Ecce, quam bonum et quam iucúndum, habitáre fratres in unum ! ℣. Sicut unguéntum in cápite, quod descéndit in barbam, barbam Aaron.
Qu’il est bon, qu’il est doux pour des frères de vivre unis ensemble. Comme le parfum répandu sur la tête d’Aaron, qui descendit sur sa barbe et sur son visage.
Le texte du graduel de ce dimanche reprend les deux premiers versets du bref et délicieux psaume 132, où le plus excellent parfum, celui qui était préparé pour le grand prêtre, est l’image de l’union parfaite entre frères chrétiens.
La mélodie (cliquer sur la vidéo pour la voir) est remarquable. Sur « ecce », voici !, elle attire l’attention de façon solennelle : je vais dire quelque chose d’important. Mais ce qui suit est tout simple… jusqu’à « habitare », avec un brusque saut de quinte qui la propulse à la dominante et à la tierce supérieure : attention, ce mot est important, et celui qu’il annonce va l’être encore davantage : la mélodie s’épanouit sur un magnifique « fratres », mais ce n’est pas fini, car ce qui importe est d’habiter en frères… ensemble, en une unité, en étant un, et c’est un long mélisme enveloppant qui unit les frères.
Dans le verset, la mélodie s’étend sur « unguentum », pour souligner que ce n’est pas n’importe quel parfum, mais le meilleur, le plus élaboré (ce mélisme se trouve aussi dans le graduel de la Toussaint, sur « inquirentes » : ceux qui cherchent le Seigneur), puis elle utilise une formule fréquente sur « capite » avant de monter au sommet, sur… « descendit », puis de redescendre très lentement, de façon somptueuse, comme la barbe d’Aaron, en se terminant par le même motif que le graduel de la Toussaint sur « omni bono » : ceux qui cherchent le Seigneur ne manqueront d’aucun bien. Dom Baron : « La mélodie s’élève aussi haut que peut monter la voix, se déploie large et sonore puis descend par des neumes liés et fluides symbolisant les aromates sacrés du Grand Prêtre et plus encore la grâce qui, du Christ, descend sur les membres et les fait tous un en lui. Quelle merveille que cette thésis qui, du mi supérieur glisse au la grave, dans une paix que rien ne trouble, légère sur les notes élevées ; profonde et grave sur la formule finale, comme le mystère qu’elle chante. »
La traduction de tout le psaume 132 par Lemaître de Sacy :
Ha ! que c’est une chose bonne et agréable que les frères soient unis ensemble !
C’est comme le parfum excellent qui fut répandu sur la tête d’Aaron, et qui descendit sur les deux côtés de sa barbe, et jusque sur le bord de son vêtement :
c’est comme la rosée du mont Hermon, qui descend sur la montagne de Sion.
Car c’est là que le Seigneur a ordonné que fût la bénédiction et la vie jusque dans l’éternité.