La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel rendu le 21 mars 2006 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, qui déclarait illégale la longue grève dans la Régie des transports de Marseille à l’automne 2005. En bref, la Cour de cassation justifie la grève politique, contrairement aux règles du droit du travail et à sa propre jurisprudence.
La Cour de cassation juge que « la défense du mode d’exploitation du réseau des transports urbains constituait, pour les employés de la RTM , une revendication d’ordre professionnel et que les capacités de l’employeur à satisfaire les revendications des salariés est sans incidence sur la légitimité de la grève ».
En première instance, puis en appel, la justice avait constaté que le motif de la grève ne pouvait pas être résolu par la direction de l’entreprise puisqu’elle avait pour origine une décision de la communauté urbaine de Marseille, et que par conséquent cette grève était politique, donc illégale. (Il s’agissait d’une délégation de service octroyée à un opérateur privé pour ouvrir l’exploitation du futur tramway.)
Ceci est le droit français. C’est dans le Code du travail. Une grève est illégale quand elle répond à une décision politique, simplement parce que l’employeur n’a pas prise sur une décision politique et se trouve donc dans l’impossibilité de satisfaire la revendication.
C’est clair, c’est simple à comprendre, et c’est le bon sens. Il est à noter que les syndicats, qui connaissent bien le droit de grève, avaient parfaitement intégré cette question dans leurs préavis. Ils avaient indiqué quatre motifs de grève, dont trois étaient professionnels. Mais il était évident que ces motifs avaient été ajoutés « artificiellement », comme l’avaient constaté le tribunal, puis la cour d’appel.
La Cour de cassation ne revient d’ailleurs pas sur ce point. Elle se focalise précisément sur la question de la grève politique : elle décide que le fait que la direction ait ou non la capacité de satisfaire les grévistes n’a pas d’incidence sur la légalité de la grève.
En réalité, la Cour de cassation s’aligne sur la pratique actuelle des gouvernements. On constate que les pouvoirs publics ne dénoncent jamais plus les grèves illégales. Donc c’est que les grèves illégales sont légales. Et désormais, avec le sceau de la Cour de cassation.
Désormais, les syndicats n’auront plus besoin de se cacher derrière des revendications professionnelles artificielles. Ils pourront déclencher impunément des grèves ouvertement politiques. Des grèves légales contre un employeur qui n’a d’autre choix que d’appliquer la loi. Ce n’est plus l’état de droit, c’est Ubu.