Dans mon diocèse, comme dans les autres diocèses de « l’ouest », c’est la fête de Notre Dame de Pontmain. En 2014 j’avais signalé le lien entre Pontmain et le Japon. Depuis lors j’ai découvert le lien entre Pontmain et… le Liban.
Béchouate est un village maronite de la Békaa, dans un environnement chiite. Avec une particularité unique : la représentation de la Sainte Vierge est une statue de Notre Dame de Pontmain. Il n’y en a aucune autre au Proche Orient en dehors de Jérusalem. Personne ne sait comment elle est arrivée là. Tout au plus sait-on qu’elle est là depuis le début du XXe siècle, et qu’elle est arrivée en fait après l’incendie de l’église qui, en 1919, a détruit l’icône byzantine miraculeuse. Les habitants étaient fiers d’avoir une Notre Dame qui ne ressemblait à aucune autre, notamment à la Vierge de Lourdes qu’on voit partout, y compris à Béchouate (mais nul n’y fait attention). Jusqu’à il y a peu, ils savaient seulement que la « Vierge bleue » (al-azra al-zarqa) venait de France, sans plus.
Or, le 21 août 2004 il y eut un événement. Un Jordanien musulman et son fils visitaient l’église avec un ami maronite. Un moment l’enfant s’adresse au maronite : « Tonton François, qui est cette femme qui me sourit ? » L’ami répond que ce n’est qu’une statue de plâtre, qui ne bouge pas et ne sourit pas. L’enfant reprend : « Alors elle est animée électriquement ? » L’homme, intrigué, regarde, et voit bouger le chapelet qui a été passé autour de la croix que tient la statue. A ce moment-là, un fidèle qui se trouve là s’exclame qu’il voit les yeux de la Vierge « s’animer comme pour faire le signe de croix ». Et l’enfant s’entend dire cette prière « plus grande que lui » : « Salut à toi, Vierge Marie, Reine du monde, de la paix et de l’amour. Des vieillards, des enfants et des femmes tombent de par le monde. Instaure la paix, l’amour et la liberté sur la face de la terre, ô Reine du monde. » Peu après, une huile odorante suinte de la statue, comme de tant d’icônes en Orient. Dès le lendemain commence une longue série de miracles (répertoriés dans un cahier avec les certificats médicaux) : un enfant chiite est guéri d’une tumeur à l’oreille, un jeune maronite quitte sa chaise roulante…
Béchouate devient célèbre, et la classe politique, président en tête, voit tout de suite l’intérêt de célébrer cette Vierge catholique qui sourit à des musulmans (en fait elle était déjà connue dans la Bekaa comme « la Vierge qui fait des miracles avec les musulmans »). On élargit la route, on construit des infrastructures, des boutiques et des restaurants s’installent, et tous les idéologues du « dialogue » islamo-chrétien s’affairent… (Mais il n’y aura aucun syncrétisme. On peut même noter qu’un prêtre du sanctuaire, qui a vu l’huile suinter, est un chiite converti.)
C’était donc en août 2004. Le mois suivant, une résolution de l’ONU exigeait le départ des troupes syriennes du Liban. Comme en 1871 les troupes prussiennes avaient quitté la France après l’apparition de Pontmain.
Les habitants de Béchouate racontent un autre fait curieux. Au début de la guerre du Liban, en 1975, le village était bombardé par les Palestiniens et la milice chiite Amal. Or il n’y eut aucun blessé. Quelque temps plus tard les chrétiens firent prisonniers des chiites qui avaient participé aux bombardements, et ceux-ci leur dirent qu’ils avaient vu la Dame de Béchhouate se lever au-dessus du village et arrêter les obus de ses mains. C’est aussi ce que disaient les moines de Czestochowa quand la sainte colline fut attaquée en 1655 par les Suédois...
Autrefois sa robe était plus foncée et le crucifix était rouge, comme à Pontmain. Mais au fil des ans il a fallu refaire plusieurs fois la robe, et le crucifix a perdu sa couleur, puis il a fallu le changer et on lui a laissé sa teinte naturelle. Et pour empêcher les fidèles de continuer de dégrader la statue on l'a mise derrière une vitre...
Et bien sûr elle est partout: