J’ai évoqué le 1er octobre la communauté œcuménique suédoise de Berget, à Rättvik. Voici des précisions d’un ami prêtre, le P. Philippe Perruchot, qui connaît bien cette communauté. Et il m’envoie la dernière lettre circulaire de la dominicaine de la communauté (qui relate précisément le parcours de la communauté vers l'unité catholique).
Il n’est pas exact d’écrire que « la journée commence par la « messe » luthérienne ». La journée commence par une heure d’adoration du Saint-Sacrement (!) - à laquelle se joignent plusieurs des membres luthériens de la communauté. Cette heure d’adoration est suivie par les laudes : faisons remarquer à ce sujet que le bréviaire de Berget (prononcer Beryette, en mettant l’accent sur Ber, « et » est l’article - le suédois est une langue germanique douce et mélodieuse) a été refondu il y a quelques années pour devenir assez semblable à l’office romain.
D’autre part, la communauté n’a pas à « devenir une sorte de sas vers l’Église catholique », c’est ce qu’elle est depuis sa fondation ! Ce sont des centaines de luthériens qui, grâce à cette communauté, ont pu découvrir le catholicisme, voire, pour plusieurs d’entre eux, se convertir et même embrasser la vie religieuse (il y a maintenant en Suède quelques communautés religieuses bien vivantes). On peut ainsi citer, par exemple, deux des enfants de Peder Bergqvist, le « prêtre » luthérien, qui, depuis longtemps déjà, sont catholiques…
Que la messe luthérienne continue d’être célébrée à Berget n’a donc rien d’étonnant : c’est au contraire indispensable pour que Berget puisse continuer sa mission de témoignage auprès des luthériens. C’est même d’autant plus nécessaire que, en quelques décennies, le caractère « suédois » des églises catholiques en Suède est devenu très ténu : les fidèles sont en grande majorité d’origine immigrée (Polonais, Africains, Sri Lankais, Philippins…), et le clergé est souvent lui aussi d’origine étrangère. Pas facile pour un Suédois « de souche » de se sentir à l’aise dans une église catholique ! (On pense à la difficulté qui était celle des Anglais attirés par le catholicisme au XIXe siècle, lorsqu’en Angleterre on ne rencontrait dans les églises catholiques - fidèles et clergé - que des immigrés irlandais…)
Enfin - chose difficilement concevable pour nous, catholiques -, l’existence même d’un « centre de retraites » a quelque chose d’extrêmement provoquant dans le monde luthérien : pour un luthérien, faire une « retraite », n’est-ce pas contester ce qui doit être au centre de sa foi, à savoir la gratuité totale du salut ? Comment peut-on prétendre influer sur ce salut par quelque œuvre que ce soit, fût-ce la plus pieuse des retraites ? Voilà pourquoi il faut que Berget reste Berget, et ne devienne pas une paroisse ou quoi que ce soit d’autre…