L’éditeur et libraire américain Angelus Press a envoyé aux évêques de la Fraternité sacerdotale saint Pie X des questions, à l’occasion du 20e anniversaire des sacres, et publie dans le numéro de juillet de son magazine les réponses de deux d’entre eux, Mgr Fellay et Mgr Tissier de Mallerais.
Du premier, voici sa réponse à la question : Que diriez-vous à ceux qui, en 1988, prédisaient que la Fraternité allait créer une Eglise parallèle ? L’histoire n’a-t-elle pas prouvé qu’ils avaient tort ?
— Aux prêcheurs et prophètes de 1988, nous demanderions seulement de regarder la réalité, la réalité du non-schisme de la Fraternité Saint Pie X, une réalité qui est reconnue par Rome quoi qu’il en soit de ce qu’ils peuvent dire de contraire, ou des menaces qu’ils peuvent brandir.
Et à la question : quelle évaluation, pensez-vous, ferait Mgr Lefebvre de la crise telle qu'elle est en 2008?
— Il dirait exactement ce qu’il disait en 1988. Rien n’a changé.
Voici quelques réponses de Mgr Tissier de Mallerais (dans la traduction de Luc Perrin sur Le Forum Catholique) :
Quel est votre sentiment sur l'état de l'Eglise, après 20 ans d'épiscopat ?
— Jean-Paul II n'a rien fait pour reconstruire la Foi. La grande apostasie s'est amplifiée ; la jeunesse est presque entièrement perdue en impureté et dans les drogues. Le règne social du Christ est complètement détruit par la liberté religieuse et les droits de l'homme. Nous vivons la grande apostasie dont parle St. Paul dans l'épître aux Thessaloniciens: “venerit dicessio primum” (II Thess. 2:3).
Quelle évaluation, pensez-vous, ferait Mgr Lefebvre de la crise telle qu'elle est en 2008?
— Il ne dénoncerait pas seulement le libéralisme — c'était le cas avec Paul VI — mais le modernisme, ce qui est le cas de Benoît XVI: un véritable moderniste avec toute la théorie du modernisme mise à jour ! C'est tellement grave que je ne peux pas même exprimer mon horreur. Je garde le silence (sic). Mais Mgr Lefebvre hurlerait: “Hérétiques, vous pervertissez la Foi!”
Je traduis d’autres réponses qui me paraissent « intéressantes » :
Que diriez-vous à ceux qui, en 1988, prédisaient que la Fraternité allait créer une Eglise parallèle ? L’histoire n’a-t-elle pas prouvé qu’ils avaient tort ?
— Je réponds : où est l’Eglise, mes amis ? Reconnaissez l’arbre à ses fruits. Où sont les fruits, là est l’Eglise. Je ne veux pas dire que l’Eglise se réduise à la Fraternité, mais que son cœur est dans la Fraternité. La vraie Foi, le véritable enseignement, les sacrements non abâtardis : tout cela est dans la Fraternité. Partout ailleurs, il y a un mélange plein de compromis à cause du libéralisme et de la faiblesse d’esprit. L’Eglise parallèle est la nouvelle Eglise de Vatican II : son esprit, sa nouvelle religion ou non-religion.
Beaucoup de catholiques qui avaient commencé à combattre auprès de Mgr Lefebvre se sentent maintenant enclins à unir leurs forces à une Rome apparemment plus conservatrice en ralliant des organisations qui ont un statut plus « régulier » à l’intérieur de l’Eglise.
— Oui, il y a beaucoup de pertes. A cause d’un manque de principes, d’un manque de confiance dans le combat de la Fraternité, cherchant des compromis, voulant la paix, désirant la victoire avant le temps prévu par Dieu. Ces pauvres gens (prêtres, religieux, laïcs) sont libéraux et pragmatiques. Séduits par les sourires des gens au Vatican, je veux dire les prélats de la Curie romaine. Des gens qui sont fatigués du long, très long combat pour la Foi : « 40 ans, c’est assez ! » Mais ce combat-là durera encore 30 ans. Alors ne le cessez pas, ne cherchez pas une « réconciliation », continuez à vous battre !
Que considérez-vous comme les plus grands défis auxquels devront faire face la Fraternité et les fidèles dans les prochaines années ?
— Avant tout, notre persévérance à refuser les erreurs du Second Concile du Vatican. Deuxièmement, notre solidité dans le refus de toute « réconciliation » avec la Rome occupée. (…)
Enfin, pour terminer sur une note plus drôle (bien que l’humour de Mgr soit hélas involontaire) :
Quels livres sont essentiels pour la foi de nos jours ?
— Pour tous, un missel et leur catéchisme. Pour les jeunes gens, des livres sur le règne social de N.S.J.C. Pour les jeunes femmes, des livres de cuisine, de couture et sur l'art de meubler une maison.
(Il n’est toutefois pas vraiment amusant qu’un évêque, après ses propos incessants sur le combat (fight), sans jamais la moindre allusion à l’amour, donne comme « livres essentiels pour la foi » des jeunes femmes des livres de cuisine et de couture… Les talibans ne sont pas loin…)