Cette famille persane (le père, ma mère et leurs deux fils) martyrisée à Rome sous Claude a une messe propre, qui n’est plus guère célébrée puisque leur fête n’est plus qu’une mémoire. Or voici des extraits de ce qu’en dit le bienheureux cardinal Schuster :
La messe a une saveur d’antiquité et révèle une période d’excellent goût liturgique.
L’antienne d’introït est tirée du psaume 67 et annonce le refrigerium ou banquet céleste que Dieu prépare à ses martyrs, c’est-à-dire à ceux qui, pour son amour, ont supporté en ce monde la faim et la soif de justice, et ont été opprimés en haine du nom du Christ : « Les justes s’assoient au banquet et jubilent en présence de Dieu, et gaiement ils se réjouiront. » PS. 67 : « Que Dieu se lève, et que soient dispersés ses ennemis ; et que fuient devant lui ceux qui le haïssent, y. Gloire, etc. »
Dans les collectes suivantes, comme en beaucoup d’autres antiques oraisons, à la différence du goût plus moderne qui préfère résumer en quelques mots, dans la collecte, toute la biographie d’un saint, les martyrs de ce jour ne sont pas même nommés ; la raison en est que les anciens, sans s’arrêter par trop aux détails, aimaient les grandes synthèses théologiques, ne séparant jamais l’individu de la société entière des saints et de Jésus-Christ, source première et centre de toute sainteté. Prière. « Écoutez, Seigneur, les prières de votre peuple, qui y ajoute le patronage de vos saints, afin que vous nous accordiez de goûter la paix de la vie présente et d’obtenir aussi la grâce de la vie éternelle. Par notre Seigneur, etc. »
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L’offertoire suivant, tiré du psaume 123, est, avec sa mélodie grégorienne, l’un des chefs-d’œuvre les plus inspirés de l’antiphonaire de saint Grégoire. Dans l’usage de l’Église, il convient particulièrement aux Martyrs qui versèrent leur sang dans la fleur de la jeunesse, comme c’est le cas pour Audifax et Abachum. [C’est aussi celui de la fête des saints Innocents.]
Offertoire : « Notre âme est comme un passereau échappé au filet du chasseur. Le filet s’est brisé et nous nous sommes trouvés libres. »
Le piège qui nous est tendu par le diable se cache, comme dans l’herbe fleurie, au milieu des joies de la vie et dans les aises des biens de ce monde. La vanité revêt la gamme multicolore de la réalité et nous trompe. Dieu toutefois tranche ce piège pour ses martyrs, et le petit oiseau s’envole, libre, vers le ciel.
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Après la communion, on récite cette belle prière : « Apaisé par l’intercession de vos saints, accordez-nous, Seigneur, que ce que maintenant, à l’ombre du mystère, nous célébrons dans le temps, nous puissions l’obtenir pleinement dans l’éternité bienheureuse. »
Le vœu exprimé aujourd’hui dans la prière après la communion est vraiment sublime. Que signifie en effet l’Eucharistie célébrée sous les voiles du sacrement, avec les azymes de la fuite, au milieu des douleurs et des luttes de la vie présente, sinon notre participation au Sacrifice et à la Passion de Jésus ? Mais la grâce du sacrement scelle notre intime union avec le Rédempteur ; aussi ce même Esprit qui aujourd’hui nous consacre victimes avec Jésus ranimera un jour par sa vie divine nos membres mortifiés et leur donnera part à la gloire de la résurrection.