Le projet de production d’un opéra pour enfants, avec l’Orchestre de chambre de Genève, a été refusé par le Département de l’instruction publique, parce que l’œuvre est « contraire au principe de neutralité religieuse ». L’article 15 de la Constitution fédérale interdit de contraindre quelqu’un à « accomplir un acte religieux », et le département précise : « d’autant plus que le très jeune âge des participants ne leur permet pas de se déterminer en matière de croyance ».
Il s’agit de L’Arche de Noé, de Benjamin Britten. Une petite merveille, basée sur un « mystère » du XVe siècle, où les enfants sont sur la scène (ils jouent les animaux de l’arche) mais aussi dans l’orchestre, car Britten avait conçu une partition où même des débutants peuvent jouer quelques notes. Et il y a une percussion aussi fournie qu’hétéroclite, avec notamment les fameuses « tasses suspendues ». C’est d’abord une œuvre pour initier les enfants à la musique classique sur un mode ludique, selon le don que Britten avait pour cela.
Certes, un texte anglais du XVe siècle sur Noé est chrétien… Mais Britten aurait été stupéfait de se voir traité de prosélyte voulant contraindre des enfants à accomplir un acte religieux... Lui qui était un « humaniste pacifiste », homosexuel de gauche, tout au plus vaguement déiste… mais ne rechignant pas à poursuivre à l’occasion la grande tradition anglaise de musique religieuse et para-liturgique.
Il y a tout de même un certain nombre de réactions indignées. Parmi lesquelles celle d’un… Vert, Jean-Michel Bugnion, député du canton de Genève, soulignant que « la culture est forcément religieuse ». Toute culture véritable, en effet.
On ne le dit pas dans les journaux, mais il est vraisemblable que cette brusque poussée de laïcisme antichrétien soit plus ou moins largement commandée par la dhimmitude qui ne cesse de progresser dans les esprits.