L’office anti-fraude de l’Union européenne, Olaf, est fortement soupçonné d’avoir utilisé un faux témoignage comme unique élément à charge contre le commissaire européen John Dalli, contraint à la démission en octobre dernier.
Cet élément était une rencontre, en février 2012, entre une lobbyiste, Gayle Kimberley, travaillant pour le compte d’un marchand de tabac suédois, Swedish Match, et un homme d’affaires maltais, Silvio Zammit ; celui-ci aurait promis de faire pression sur le commissaire européen pour que la directive en cours d’élaboration permette la commercialisation dans l’UE du « snus » suédois, pour la modique somme de 60 millions d’euros. Comme Zammit est un associé de Dalli, Olaf a conclu que Dalli était forcément au courant de la transaction et a demandé à la Commission de virer Dalli. Ce qui fut fait aussitôt, tellement on était content de fusiller un affreux catholique de droite.
Or on sait maintenant que la rencontre de février 2012 n’a jamais eu lieu. Elle avait été inventée par Gayle Kimberley, qui a fini par avouer son mensonge aux dirigeants de Swedish Match. Ceux-ci ont alors alerté Olaf, mais Olaf a demandé aux dirigeants de Swedish Match et à Gayle Kimberley de maintenir leur version, « pour le bien de l’enquête ».
L’affaire a été dévoilée lors d’une audition de la commission de contrôle budgétaire du Parlement européen, hier, par… José Bové. Le député Vert a mené son enquête personnelle, et a enregistré les déclarations des dirigeants de Swedish Match. « Cela montre un dysfonctionnement majeur des institutions européennes », dit-il. En effet.
Au cours d’une autre audition, un autre député européen de gauche, l’Autrichien Herbert Bosch, a affirmé quant à lui que les enquêteurs d’Olaf avaient procédé à des écoutes téléphoniques illégales dans le cadre de cette affaire.
Naturellement, Olaf nie tout en bloc.
D’autre part, le groupe des Verts a demandé que le Parlement européen lance sa propre enquête sur le limogeage de John Dalli et sur le rôle des lobbies du tabac sur les prises de décision de l’UE, au motif que les parties du rapport d’Olaf déclassifiées mercredi sont incroyablement lacunaires…
Le médiateur européen a lui-même lancé une enquête, sur demande du Corporate Europe Observatory qui soulignait le manque de transparence, et les dissimulations, de la Commission européenne dans cette affaire.
(EUobserver, EuropeanVoice)