Tu penses que tu dis mieux parce que tu répètes : Mais c'était un esprit; il se montrait esprit, on le voyait comme tel, c'est l'esprit qui faisait tout en lui sous une apparence humaine. C'est là ta pensée; je le dis de nouveau : c'était aussi la pensée de ses disciples. Eh bien ! si tu ne parles point mal, si ton opinion est vraie, celle des disciples l'était aussi; et si le Seigneur les y a laissés, nous devons t'y laisser aussi , puisque la tienne ne diffère pas de la leur, et que si tu as raison, ils avaient raison comme toi. Mais non, ils n'avaient pas raison.
« Pourquoi vous troublez-vous ? » leur dit le Seigneur. Ainsi ta manière de voir leur fut inspirée par le trouble. Que s'imaginaient-ils donc? Voir un esprit; c'est alors que le Seigneur leur dit : « Pourquoi vous troublez-vous, et pourquoi ces pensées montent-elles dans votre cœur ? » C'étaient donc des pensées terrestres; si elles fussent venues du ciel, elles seraient descendues dans le cœur, elles n'y seraient pas montées. Pourquoi nous dit-on Elevez votre cœur, sinon afin que ce cœur, placé en haut par nous, ne se heurte point contre les pensées terrestres qu'il rencontrerait ? « Pourquoi êtes-vous troublés et pourquoi ces pensées montent-elles dans votre cœur ? Voyez mes mains et mes pieds; touchez et voyez ». S'il ne vous suffit pas de regarder, mettez la main. Si ce n'est même par assez de mettre la main après avoir regardé, touchez. Le texte ne signifie même pas simplement : Touchez, mais : Palpez, serrez; que vos mains servent à constater si vos yeux vous trompent : Palpez et voyez ; mettez vos yeux dans vos mains. Palpez, et reconnaissez, quoi? « Qu'un esprit n'a ni chair ni os, comme vous m'en voyez ».
Avec les disciples tu étais dans l'erreur, reviens avec eux à la vérité. L'erreur est une faiblesse humaine, je l'accorde : vous croyiez que le Christ n'est qu'esprit; Pierre se l'imagina aussi, avec les autres Apôtres, quand ils pensèrent voir en lui une espèce de fantôme; mais ils ne persévérèrent point dans cette opinion erronée. Le Médecin ne les a pas laissés dans cet état. Il s’est approché d'eux, il leur a appliqué le remède. Il voyait les blessures dans leur cœur, mais pour guérir les blessures de leur cœur, il portait en son corps les cicatrices.
Saint Augustin, sermon 237