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Liturgie - Page 69

  • La vigne ferme à 18h

    De même qu’ils ont supprimé les vierges folles et les vierges sages, les occupants de l’Eglise ex-latine ont supprimé les ouvriers de la 11e heure. Ainsi le païen aujourd’hui ultra-majoritaire, devant ces expressions, se disant qu’elles doivent venir du vieux fonds chrétien, donc de l’Evangile, ne les trouvera pas dans l’Evangile. C’est ainsi qu’on évangélise désormais, en trafiquant l’Evangile de façon à ce qu’on ne s’y retrouve plus.

    Car non seulement on renie des expressions de l’Evangile, mais on les remplace par des expressions qui ne correspondent pas à ce que dit le Fils de Dieu. La 11e heure, ce n’est pas 5 heures de l’après-midi. La 11e heure, au temps des vendanges, c’est plus près de 20h que de 17h. En outre c’est vraiment une idée de petit fonctionnaire ecclésiastique de croire que l’ouvrier agricole du Ier siècle terminait son travail à 18h, surtout au moment des récoltes. Et il faut ne jamais avoir été à la campagne pour croire que, aujourd’hui comme hier, les travaux agricoles s’arrêtent à l’heure de fermeture des bureaux…

    Il est vrai qu’ils ont aussi supprimé la Septuagésime, et qu’ils ont relégué l’introït à une férie de carême, parce que ses premiers mots ne correspondent pas la sensibilité délicieusement optimiste du chrétien d’aujourd’hui et sont donc désormais à demi tabous.

  • Septuagésime

    Le long et original et magnifique graduel de la Septuagésime, magistralement interprété par les moines de Solesmes en 1965 sous la direction de dom Gajard.

    Adjútor in opportunitátibus, in tribulatióne : sperent in te, qui novérunt te : quóniam non derelínquis quæréntes te, Dómine. . Quóniam non in finem oblívio erit páuperis : patiéntia páuperum non períbit in ætérnum : exsúrge, Dómine, non præváleat homo.

    Vous êtes notre secours au temps du besoin et de l’affliction. Qu’ils espèrent en vous ceux qui connaissent votre nom, car vous n’abandonnez pas ceux qui vous cherchent, Seigneur. Car le pauvre ne sera pas en oubli pour toujours ; la patience des pauvres ne périra pas à jamais. Levez-vous, Seigneur, que l’homme ne triomphe pas.

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    Commentaire de dom Ludovic Baron.

    La mélodie a bien le ton d’une parole ardente qui s’efforce de remonter des âmes déprimées. Elle affirme avec force et elle est pénétrée d’une vie intense, avec en plus l’accent direct, persuasif, enthousiaste même en un certain sens, de quelqu’un qui a passé par l’expérience à la fois de l’épreuve et de la consolation, et qui veut faire profiter ceux qui souffrent de ce qu’il a appris dans la souffrance. Cet accent est très net dès le premier mot. L’élan porte la mélodie d’un bond à la dominante et le mouvement est intense.

    Opportunitátibus et tribulatióne sont fortement soulignés, comme il convient, mais sans la moindre nuance de tristesse ; au contraire, une certaine joie les pénètre, la joie profonde qui se trouve dans toute espérance forte et qui veut se communiquer comme un secours.

    Une autre interprétation de la première phrase est possible. Parce qu’elle n’a pas de verbe, on pourrait aussi l’entendre comme s’adressant à Dieu : Tu es un Aide… Il va de soi que dans ce cas la mélodie serait une prière et devrait être chantée comme telle : une prière forte, pressante… Peut-être alors le spérent in te qui suit perdrait-il de son caractère.

    Après cette affirmation ardente, brusquement la mélodie change. Elle devient suppliante. L’Eglise se tourne vers Dieu et, dans une exclamation qui est à la fois un souhait et une prière, elle émet le vœu que ceux qui sont dans l’épreuve mettent en lui leur confiance. C’est un très beau mouvement. La double note de spérent fermement attaquée sur la dominante et un peu prolongée fait la supplication spontanée et ardente. Elle se prolonge, délicate et douce sur la tristropha, descend sur te, qu’elle enveloppe de vénération, et rebondit sur novérunt pour retrouver à nouveau le même pronom te et, à travers lui, monte vers Dieu en un nouvel accent de ferveur.

    Dans la troisième phrase, dès le début, elle devient pénétrée de confiance ; plus que cela, de certitude. C’est d’abord une affirmation très forte : notez l’insistance de non, avec le pressus et les distrophas sans cesse ramenés à la dominante. Peu à peu, une sorte de joie paisible s’y mêle. On la perçoit déjà dans la cadence sur mi ; elle monte avec l’arsis, s’épanouit sur la distropha de te et enveloppe Dómine d’une longue vocalise toute baignée d’une tendresse intime qui supplie encore mais qui contemple surtout.

    Le Verset. – L’Eglise s’adresse-t-elle à Dieu, à elle-même ou aux déprimés ? Il est difficile de le préciser ; sans doute aux trois à la fois. Elle crie sa confiance à Dieu pour se rassurer elle-même et réconforter les malheureux qui l’entendent. C’est la même affirmation que dans le quóniam non de la première partie. L’intonation est identique mais le développement qui suit revêt ici une ardeur persuasive plus accentuée encore : le salicus, les petits motifs revenant sans cesse à la dominante si, le grand élan qui monte au fa avec sa note de joie, l’insistance à nouveau sur la tonique… Quelle admirable certitude ! Fínem est mis en relief par une sorte de rejet qui lui donne une force considérable. Un accent de supplication sur la cadence de páuperis, et l’ardeur de la foi confiante reprend plus vive dans la montée de patiéntia. Elle s’épanouit à nouveau dans la joie du bonheur futur sur páuperum et y demeure fixée jusqu’à la fin de la phrase. Elle s’achève sur ætérnum en une très belle cadence du VIIIe mode, ferme, paisible, heureuse.

    Pour finir, un appel direct à Dieu : « Lève-toi, Seigneur ; que la nature effrayée, ne l’emporte pas sur la confiance en ta bonté ». Il n’est pas angoissé, il jaillit d’une telle confiance ! Mais, les intervalles de quarte, trois fois répétés, et les trois doubles notes sur lesquelles s’appuie le mouvement lui donnent quelque chose de très fort. Il se fait insistant sur non prævaléat et plus encore sur hómo qui se revêt à la fin d’un admirable accent de prière confiante, aimante, intime ; comme l’était le Dómine de la première partie.

    *

    Dans l'Eglise orthodoxe russe c'est aujourd'hui la commémoration de tous les martyrs russes du XXe siècle.

  • Sainte Jeanne de France

    Aujourd’hui c’est la fête de saint André Corsini, évêque de Fiesole au XIVe siècle. En certains endroits on peut fêter sainte Jeanne de Valois, ou sainte Jeanne de France, fille de roi (Louis XI), femme de roi (Louis XII), sœur de roi (Charles VIII), ce qui ne lui porta ni chance ni bonheur (elle était laide, on l’appelait Jeanne la boiteuse ou Jeanne l’estropiée et son mari ne voulait pas la voir). J’ai déjà évoqué cette figure en 2020. Voici l’homélie de Pie XII lors de sa canonisation, le 28 mai 1950, jour de la Pentecôte.

    « Devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur et vous trouverez du soulagement pour vos âmes ». Cette parole du Divin Rédempteur monte à Notre esprit lorsque Nous méditons sur la vie de sainte Jeanne, Reine de France, à qui Nous avons décidé de rendre les plus hauts honneurs dus à la sainteté. Elle fut, en effet, très douce et très humble, et brilla par cette soumission chrétienne de l'âme qui n'est pas abdication de l'esprit ni faiblesse de la volonté, mais à proprement parler une vertu. Une vertu, disons-Nous, qui sous les injures, même les plus cruelles, est capable de contenir, de tempérer et de diriger les agitations du cœur ; une vertu qui apporte aux mortels la maîtrise d'eux-mêmes ; qui donne la tranquillité, la sérénité et la paix ; une vertu qui, dans la joie ou dans la tristesse, fait lever les yeux vers le ciel où chacun, après cet exil de la terre, pourra obtenir une récompense si haute que toutes les grandeurs et dignités humaines paraîtront caduques, vaines et inutiles.

    Fille de roi, dès les premières années de son enfance, elle ne goûta ni les fastes de la cour ni les pompes du siècle, ni les joies et les amusements habituels à son âge ; mais elle mena une vie retirée, développa sa piété envers Dieu et la Vierge Marie, et chaque fois qu'elle le pouvait, elle distribuait avec une grande douceur des largesses aux pauvres.

    Encore enfant, elle fut mariée contre son gré par ses parents, et durant les vingt-deux ans de son mariage, elle ne connut ni ce charme paisible, ni ces joies de la maternité dont en général on peut jouir sur cette terre, mais des peines très aiguës, et pour finir, l'abandon de son époux et la frustration de sa très haute dignité.

    Jeanne, dans ces terribles épreuves et adversités, apparut admirablement douée d'une force supérieure, unie à une grande humilité et à tous les autres ornements de l'esprit ; elle conserva un front serein, et se présenta aux hommes avec cette noblesse éminente que la vertu chrétienne augmente et qu'embellit tant à l'intérieur qu'au dehors, l'éclat de la grâce divine. C'est pourquoi, voyant le royaume terrestre échapper de ses mains, elle lui dit calmement et volontiers adieu pour pouvoir plus facilement et plus intensément s'adonner à la recherche et au développement du Royaume de Dieu. Elle se donna tout entière aux œuvres de religion et de charité, entraînée surtout par les conseils et l'exemple de saint François de Paule, et ainsi il arriva que ne pouvant plus marcher à la tête de son peuple bien-aimé avec la dignité de reine, elle le dominait encore et l'illuminait par l'éclat de sa très haute vertu.

    Et comme elle approchait déjà de la fin de son exil sur la terre, elle put réaliser, avec une très suave satisfaction pour son âme, le dessein qu'elle formait depuis longtemps, de fonder un Ordre de Vierges. Celles-ci, loin du tumulte du monde, mèneraient dans les cloîtres une vie sereine, elles s'adonneraient à la prière et à la contemplation des réalités célestes, et librement et spontanément, expieraient leurs fautes et celles de leur prochain par des pénitences et des mortifications corporelles. Elle voulut que cet Ordre fondé par elle soit dédié à la Sainte Vierge, Mère de Dieu, que depuis son plus jeune âge elle aimait tant et vénérait.

    Et de plus, pour faire participer tous les autres à l'intime sérénité dont son âme jouissait grâce à Dieu, elle fonda une association d'hommes et de femmes. Elle voulut que cet Institut soit « l'Ordre de la Paix », pour que tous ceux qui y entreraient tendent vers elle de toutes leurs forces, et pour que cette paix, qui vient du ciel, la vraie paix, fleurisse réellement et efficacement dans les âmes des hommes, dans leurs paroles et même dans l'agitation de la vie, pour la plus grande utilité de tous et de chacun. Qui ne verrait combien cet institut était opportun, en des temps où trop souvent des haines tenaces bouleversaient les peuples, déchiraient les familles en factions et menaçaient même de submerger les fondements de la société humaine par des discordes, des rivalités et bien des fois même par des conflits armés.

    Et si cela était très opportun à cette époque, ce ne l'est certes pas moins de nos jours, où, comme tous peuvent le constater, des crises non moins graves se lèvent, des dissensions et des rivalités divisent les esprits et troublent souvent la vie laborieuse des citoyens, pour le plus grand dommage du bien commun.

    C'est donc cela que cette Sainte nous conseille par ses exemples et ses enseignements ; c'est cela qu'elle demande à Dieu pour nous du trône céleste où elle jouit des joies éternelles : que tous, ayant apaisé leur haine, s'aiment entre eux ; que tous les peuples, ayant mis fin à leurs divergences pénibles par la justice et la charité, soient enfin unis, dans une active et fraternelle coopération ; que les Nations enfin, surmontant les discordes nuisibles et funestes, et conciliant les intérêts de chacun, forment comme une grande famille qui, par l'union de son courage et de ses forces, progresse dans la recherche de la prospérité et de la paix pour tous.

    Mais que sainte Jeanne nous obtienne surtout, nous l'en prions, ce sans quoi tout le reste ne peut rien, ne vaut rien : que l'amour divin réchauffe les âmes des mortels, que la charité chrétienne envers tous les entraîne, que les préceptes évangéliques les règlent, les gouvernent et les dirigent.

    Que tous saisissent dans la vie de Jeanne et qu'ils apprennent d'elle que ni les grandeurs humaines, ni les richesses, ni les voluptés du siècle ne peuvent communiquer le bonheur aux hommes, mais seulement la vertu, par laquelle « rien n'est plus beau, rien n'est plus noble, rien n'est plus aimable ».

    Soutenus par la grâce divine, efforçons-nous donc de l'acquérir, et ainsi nous pourrons un jour atteindre cette béatitude éternelle qui ne connaît pas de fin. Amen.

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    Cette « vraye effigie » correspond en effet, au contraire des – jolis - portraits de fantaisie, au masque mortuaire.

  • Saint Blaise

    Martyrologe :

    A Sébaste, en Arménie, la passion de saint Blaise, évêque et martyr. Ce grand thaumaturge subit, sous le préfet Agricolaüs, une longue flagellation ; attaché à un poteau où on lui déchira le corps avec des peignes de fer, il fut ensuite enfermé dans un horrible cachot, puis on le jeta dans un lac d'où il sortit sain et sauf; enfin, sur l'ordre du même juge, il eut la tête tranchée, et avec lui deux enfants subirent le même sort. Auparavant, sept femmes qui avaient recueilli les gouttes de sang qui coulaient de son corps furent à ce signe reconnues comme chrétiennes et, après avoir enduré de cruels tourments, furent elles-mêmes mises à mort par le glaive.

    En Occident, saint Blaise est souvent représenté avec deux cierges croisés guérissant un enfant en train de s’étouffer. En certains endroits on bénit les « pains de saint Blaise ». Puisqu’on lui avait « déchiré le corps avec des peignes de fer » et que les représentations de son martyre montraient cet épisode, il fut aussi le saint patron des cardeurs de laine…

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  • La Purification de la Sainte Vierge

    Parmi les éléments de renouveau de l’art sacré en Russie, il y a le retour en force du vieux chant traditionnel Znamenny, adaptation slavonne du chant byzantin grec, dont le porte-flambeau est le monastère de Valaam, et il y a même un ensemble qui a importé de l’Athos le chant byzantin authentique mais en slavon. C’est le « Chœur byzantin Axion Estin » (premiers mots grecs de l’hymne à la Mère de Dieu après la consécration) du monastère Nikolo-Maletski (Saint-Nicolas sur la rivière Malitsa) près de Tver.

    Voici les stichères et les apostiches des petites vêpres, ainsi que le superbe doxastikon des laudes (à 2’27”), illustrés par de belles icônes. Le texte slavon se trouve sous la vidéo sur YouTube.

    Stichères

    L'Etre suprême, le Verbe incirconscrit, qui repose avec gloire sur les trônes des cieux, Siméon le reçoit dans ses bras, s'écriant : Laisse-moi m'en aller selon ta parole maintenant, salut et repos des fidèles, Sauveur.

    L'admirable Siméon, te voyant comme un enfant nouveau-né, toi le Verbe d'avant les siècles que le Père engendra, s'écria : Ô Maître, je tremble et je crains de te porter dans mes bras, mais dans ta miséricorde, je t'en prie, laisse aller en paix ton serviteur à présent.

    Que s'ouvre désormais la porte du ciel, car le Verbe Dieu né du Père éternellement est enfanté par la Vierge, prenant la chair des mortels, dans son désir de rappeler la nature humaine et de l'asseoir à la droite du Père, en sa bonté.

     

    Apostiches

    En ce jour le Sauveur est présenté comme un enfant dans le temple du Seigneur et dans ses mains de vieillard Siméon le reçoit.

    Maintenant, ô Maître, laisse ton serviteur s'en aller en paix selon ta parole.

    L'ardente braise que le prophète Isaïe avait d'avance contemplée, le Christ, à présent, par cette pince que forment les bras de la Mère de Dieu, est remise au vieillard Siméon.

    Lumière qui dissipera les ténèbres des nations  et gloire de ton peuple Israël.

    Avec crainte et avec joie tenant le Maître dans ses bras, Siméon demandait de pouvoir quitter cette vie et chantait la Mère de Dieu.

    Gloire au Père... Maintenant...

    Reçois, Siméon, s'écria la Tout-immaculée, dans tes bras comme enfant le Seigneur de gloire, le Christ, dont le monde attend le salut.

     

    Doxastikon des laudes

    Toi qui en ce jour as daigné reposer sur les bras du Vieillard comme sur le char des Chérubins, Christ notre Dieu, accorde-nous, à nous les chantres de ton nom, d'être délivrés de la tyrannie des passions ; rappelle-nous vers toi et sauve nos âmes.

  • Saint Ignace

    Apolytikion de la fête du "saint hiéromartyr Ignace le Théophore" (20 décembre), par le "Chœur angélique" de Simonopetra, Athos.

    Καὶ τρόπων μέτοχος, καὶ θρόνων διάδοχος, τῶν Ἀποστόλων γενόμενος, τὴν πρᾶξιν εὗρες Θεόπνευστε, εἰς θεωρίας ἐπίβασιν· διὰ τοῦτο τὸν λόγον τῆς ἀληθείας ὀρθοτομῶν, καὶ τῇ πίστει ἐνήθλησας μέχρις αἵματος, Ἱερομάρτυς Ἰγνάτιε, πρέσβευε Χριστῷ τῷ Θεῷ, σωθῆναι τὰς ψυχὰς ἡμῶν.

    Emule des Apôtres dans leur vie et sur leurs trônes devenu leur successeur, tu as trouvé dans la pratique des vertus, ô inspiré de Dieu, la voie qui mène à la contemplation; c'est pourquoi, dispensant fidèlement la parole de vérité, tu luttas jusqu'au sang pour la foi; ô pontife-martyr Ignace, intercède auprès du Christ notre Dieu pour qu'il sauve nos âmes.

  • Saint Jean Bosco

    Le 19 avril (1883), il arrive à Paris et va loger au couvent des Dames du Sacré-Cœur, à quelques pas de la Madeleine. Mais même dans l'immense capitale il ne reste pas longtemps ignoré. Paris s'émeut : un saint est de passage, un homme dont on raconte des merveilles, un prêtre qui lit dans les âmes et prédit l'avenir !
    En quelque grande église qu'il célèbre la messe, les malheureux et les désemparés savent toujours le joindre.
    Le 3 mai, fête de l'Ascension, il est à Sainte-Clotilde. Personne ne l'a annoncé ; l'église est quand même archicomble. À la fin de sa messe, un torrent humain s'engouffre derrière lui dans la sacristie. Il faut barrer le chœur de peur qu'on ne l'étouffe.
    Une heure passe ; la foule ne diminue pas. Le défilé continue.
    Au bout de deux heures, don Bosco demande au comte de Franqueville qui l'accompagne :
    — Mon cher comte, y a-t-il encore beaucoup de monde dans l'église ?
    — Environ cinq cents personnes.
    — Je suis absolument épuisé, mort de fatigue. Peut-être pourrais-je prendre une tasse de café ?
    — Certainement, mon père !
    À peine l'abbé s'est-il un peu restauré que le flot de misère l'envahit de nouveau. Pour chacun, il a un bon mot, un conseil, une consolation.
    Passe encore une heure.
    — Où en est-on, cher ami ?
    Le comte entrebâille la porte de la sacristie :
    — Ils sont bien mille maintenant.
    — Pour l'amour de Dieu, continuons !

    Un après-midi, don Bosco, regagnant son domicile rue de la Ville-l'Évêque, trouve la maison cernée par la foule.
    — Laissez-moi passer, s'il vous plaît.
    — Tout doux, monsieur le curé. Nous voulons tous voir don Bosco. Chacun à son tour. On nous a distribué des numéros ; quel est le vôtre ?
    — Je n'en ai malheureusement pas.
    — Alors, attendez qu'on vous en donne un. Mettez-vous derrière.
    — Mais si vous ne me laissez pas passer, vous ne verrez jamais don Bosco.
    — Pourquoi pas ?
    — Parce que c'est moi, don Bosco.
    — Farceur ! Attendez votre tour !
    — Très bien, je m'en vais ! soupire don Bosco, et il se rend près d'un malade qui réclame sa visite.
    Une autre fois, il lui faut une demi-heure pour entrer dans l'église de la Madeleine où il doit prêcher.
    À Saint-Sulpice, les suisses doivent lui frayer son chemin vers la sacristie. Où qu'il aille, les rues sont engorgées. On s'écrase autour de lui. « Ayez pitié de moi !... Sauvez mon enfant !... Rendez la paix à mon foyer !...»
    Au monastère des Bénédictines, une multitude de gens l'attendent, des malades sur des civières, des paralytiques en voiturettes, des désespérés, des boiteux, des béquillards, des mères avec leurs enfants sous les bras.
    Non que don Bosco guérisse tout le monde. C'est la foi qui manque, ou bien le thaumaturge estime, en tel cas, la maladie préférable à la santé. « Dieu t'aime, dit-il à une jeune fille assise sur son fauteuil roulant. Porte ta croix pour son amour ! »
    « Je sais ce que tu penses, mon bon Michel, explique-t-il à don Rua. Tu te demandes pourquoi cette jeune fille n'a pas été guérie. Elle est trop belle. En retrouvant la santé, elle perdrait son âme. »
    Chez les Lazaristes on lui présente le père Dutilleux, qui est mourant.
    — Pourquoi voudriez-vous guérir ? demande don Bosco.
    — Je désirerais tant travailler encore quelques années au service de ma congrégation !
    — Oh ! vous le ferez mieux du haut du ciel.
    Le lendemain matin, le père Dutilleux expire en paix.

    (Don Bosco, l'Apôtre des Jeunes, G. Hünermann)

  • Leur religion

    Múnera tua nos, Deus, a delectatiónibus terrenis expédiant : et cæléstibus semper instáurent aliméntis. Per Dóminum…

    O Dieu, que vos dons nous détachent des jouissances terrestres et que votre grâce nous fortifie toujours au moyen de cet aliment tout céleste.

    En voyant la postcommunion de la messe d’hier, je me disais que selon les principes des fabricants de la néo-liturgie elle avait dû être supprimée, parce qu’elle ne correspond manifestement pas à la sensibilité de l’homme d’aujourd’hui (ce qui est un critère décisif). J’en ai la confirmation grâce au blog New Liturgical Movement. Cette oraison, qui a toujours fait partie de la liturgie latine, a bel et bien été supprimée : on ne la trouve nulle part dans le nouveau missel.

    Le chrétien d’aujourd’hui n’a pas à se détacher des jouissances terrestres. C’est un exemple parmi des dizaines d’autres que la néo-liturgie est la liturgie d’une Eglise qui n’est plus l’Eglise catholique, puisqu’elle supprime systématiquement ce qui constitue une part essentielle de l’ascèse chrétienne telle qu’elle a toujours été vécue et enseignée.

    Lorsque François proclame que les nouveaux livres sont « l'unique expression de la lex orandi du rite romain », il souligne que ce qu’il appelle le rite romain n’est plus le rite de l’Eglise catholique latine.

    Et New Liturgical Movement me fait découvrir que la collecte elle-même ne se trouve plus nulle part dans le néo-missel. Parce que l’homme moderne ne supporte même pas qu’il puisse avoir besoin de Dieu pour remédier à ses fragilités et qu’il puisse souffrir quoi que ce soit à cause de ses péchés…

    Deus, qui nos, in tantis perículis constitútos, pro humána scis fragilitáte non posse subsístere : da nobis salútem mentis et córporis ; ut ea, quæ pro peccátis nostris pátimur, te adiuvánte vincámus. Per Dóminum..

    O Dieu, qui savez qu’en raison de la fragilité humaine, nous ne pourrions subsister au milieu de tant de périls, donnez-nous la santé de l’âme et du corps, afin que grâce à votre secours, nous puissions surmonter ce que nous souffrons pour nos péchés.

    La "liturgie rénovée" est véritablement la liturgie d’une autre religion.

    Corrigendum. En fait la collecte se trouve dans une sorte de réserve où personne n'ira la chercher, comme nombre d'oraisons qu'on ne veut plus voir mais qu'on met dans un placard juste pour pouvoir dire que ce n'est pas vrai qu'elle a été supprimée... Voir le commentaire d'Alexandre.

  • Sainte Martine

    Le martyrologe dit, en ce jour qui est le « 3 des calendes de février » :

    Sainte Martine, vierge et martyre, dont l'anniversaire est mentionné aux calendes de janvier.

    Les calendes de janvier, c’est le 1er janvier, et le martyrologe dit, juste après l’annonce de l’octave de la Nativité et de la fête de la Circoncision :

    A Rome, la passion de sainte Martine, vierge et martyre. Sous l'empereur Alexandre, elle endura divers genres de tourments, et, finalement frappée par le glaive, elle obtint la palme du martyre. Sa fête se célèbre le 3 des calendes de février.

    Le culte de sainte Martine ayant été introduit par le pape Donus entre 676 et 678, certains formulaires liturgiques romains eurent ensuite une messe de sainte Martine. L’un d’eux disait par erreur « sainte Marie ». Alors il y eut ensuite quelques antiphonaires romano-francs (on en a trois) qui donnèrent une fête de « sainte Marie » le 1er janvier. Cela ne dura pas au-delà du IXe siècle (en dehors des sublimes antiennes mariales de l'office qui sont restées), mais au XXe on en prit prétexte pour instituer une « solennité de Marie Mère de Dieu » au 1er janvier en prétendant que c’était une ancienne tradition…

  • 4e dimanche après l’Epiphanie

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    Gravure des Evangelicae Historiae Imagines, recueil de 153 gravures, livre demandé par saint Ignace de Loyola et publié en 1593. (On peut le voir intégralement ici.)

    « Lui cependant dormait. Ses disciples s’approchèrent de lui, l’éveillèrent disant : Seigneur, sauve-nous. » Nous trouvons la préfiguration de ce miracle dans Jonas. Les autres sont épouvantés, il dort tranquillement, on l’éveille et, par le pouvoir et le mystère de sa passion, il délivre ceux qui l’éveillent.

    Ainsi parle saint Jérôme dans son Commentaire de saint Matthieu. Il dicte rapidement, et de façon très elliptique pour qui n’a pas immédiatement à la mémoire ses écrits précédents.

    Jonas, « par son naufrage, préfigure la passion du Seigneur », avait dit saint Jérôme à saint Paulin de Nole (lettre 53,8). C’est le « signe de Jonas », dont parle Jésus, mais saint Jérôme souligne qu’il ne s’agit pas seulement des trois jours et trois nuits passés dans le poisson. La tempête en fait partie intégrante. Deux ans avant, saint Jérôme a écrit un livre entier sur la prophétie de Jonas. Il fait dire au prophète qui dormait tranquillement et qu’on est allé réveiller : « C’est contre moi que tonne la tempête, elle me cherche, elle vous menace de naufrage pour me saisir. Elle me saisira, pour que ma mort vous fasse vivre. » Quelques lignes plus loin il commente : « Nous n’ignorons pas que les vents déchaînés auxquels le Seigneur dans l’Evangile commanda de s’apaiser, que le navire en péril dans lequel dormait Jonas, que la mer soulevée qui est réprimandée : “Silence, calme-toi !”, se rapportent au Seigneur Sauveur et à l’Eglise en péril, ou bien au Christ éveillant les apôtres, et ceux-ci, en l’abandonnant dans sa passion, le précipitaient en quelque sorte dans les flots. »