Je signale à tous ceux qui s’intéressent au processus de ratification (aujourd’hui juridiquement nul) de l’ex-traité de Lisbonne, qu’on trouvera sur Bruges-Europe un remarquable point, précis et détaillé, sur la situation tchèque (même si je ne suis pas aussi pessimiste que l’ami Védas).
Juste une précision : les députés tchèques n’ont pas voté la loi de ratification du traité en début d’année. Témoin ce que disait le 3 juin dernier au Sénat français Ludìk Sefzig, de la commission des affaires européennes du Sénat de la République tchèque : « Le débat de ratification a été interrompu à la chambre basse dans l'attente de la décision de la Cour constitutionnelle et du Sénat. La décision de la Cour est attendue pour la fin de la présente année. »
Les propos de Ludìk Sefzig sont du reste fort intéressants. L’homme, membre de l’ODS, se déclare pro-européen convaincu, ce qui ne l’empêche pas de dire :
Le traité de Lisbonne modifie sensiblement les décisions dans les matières du troisième pilier Justice et affaires intérieures. C'est la raison pour laquelle le Sénat tchèque cherche à disposer de contrôles efficaces sur ces questions très sensibles pour nos concitoyens et pour assurer le respect de notre Constitution nationale. D'autant que nous estimons que le Parlement européen n'est pas en mesure de tenir compte des sentiments des citoyens européens. De ce fait, le déficit démocratique risque de s'aggraver en Europe. (…)
La Cour a été saisie de six questions portant sur trois domaines : la Charte des droits fondamentaux, les questions de justice et affaires intérieures, les transferts de compétence par l'application de la règle de la majorité qualifiée en application des « clauses passerelles ». Dans ces matières, à partir de 2014, un État membre pourra en effet se voir imposer des mesures contre sa volonté. La République tchèque pourrait devoir modifier sa Constitution, préalablement à la ratification du traité de Lisbonne, pour tenir compte de cette nouvelle procédure. En revanche, dans les matières économiques du premier pilier, notre pays n'a pas de difficultés particulières puisque le peuple s'est déjà prononcé, par référendum, au moment de l'adhésion de la République tchèque à l'Union européenne. (…)
Nous attendons ainsi une issue positive au débat de ratification. Mais nous craignons surtout le fait que des décisions extérieures puissent s'imposer à un État membre contre la volonté de ses citoyens, ce qui pourrait ultérieurement conduire à des réactions populistes, voire même à une désintégration de l'espace économique européen. Instruits par notre expérience historique, nous sommes en faveur d'une évolution prudente. (…)
Je suis membre du parti le plus important, qui est de centre droit et pro-européen. Mais mon parti a, lui aussi, émis des critiques sur le contenu du projet de traité, notamment du fait de l'accélération trop importante, à nos yeux, du transfert de certaines compétences à l'Union. Cela comporte le risque d'une remise en cause du projet européen lui-même. Nous critiquons l'approche fédéraliste, car les différences sont trop marquées entre les différents États membres pour que l'on puisse aller dans cette voie. Nous pensons aussi que l'Europe n'a pas assez de moyens pour faire face à l'ampleur des subventions que requerraient des politiques fédéralistes. Les citoyens risqueraient alors d'être déçus. C'est d'ailleurs notre pays qui a demandé, et obtenu, que les transferts de compétences puissent se faire dans les deux sens, vers le national, comme vers le communautaire. La situation est ainsi difficilement prévisible. Mais la décision politique portera essentiellement sur le contrôle du système de décision dans le cadre du nouveau traité.