« J’ai envie que nous allions à l’étranger parler droits de l’homme avec les Russes, avec les Chinois, sans avoir honte de nous-mêmes. Nous ne sommes pas la Chine , nous ne sommes pas la Russie. Notre pays n’est pas une dictature. Nous ne sommes pas une nation qui passe son temps à violer les droits de l’homme. »
Ce propos est de Rama Yade, secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères et aux Droits de l’homme. Elle était interrogée sur sa visite aux squatteurs d’Aubervilliers et sur la situation des clandestins en France, notamment après la mort d’une Chinoise tombée d’un immeuble en voulant échapper à la police qui ne la recherchait pas, et après la mort d’un jeune Russe dans des conditions similaires.
Le contexte explique donc que Rama Yade évoque la Chine et la Russie. Mais cela ne justifie en rien ce propos, qui serait déjà hallucinant dans la bouche de quelque responsable politique que ce soit, et qui est proprement insupportable dans la bouche de quelqu’un qui est en charge de la diplomatie française. Rama Yade a « gagné haut la main la palme de l’impudence diplomatique », constate Jean-Marie Le Pen dans un communiqué.
Il y a ici deux énormités.
La première est de traiter la Russie de « dictature ». Et, plus fort encore, de « nation qui passe son temps à violer les droits de l’homme ». Certes, Nicolas Sarkozy, devant la conférence des ambassadeurs, avait dénoncé la « brutalité » de la Russie (dans le domaine de l’énergie), ce qui avait suscité une réponse ironique de Moscou. Mais ni lui ni aucune personnalité gouvernementale du monde civilisé n’avait encore traité la Russie de « dictature » et de « nation qui passe son temps à violer les droits de l’homme ». Personne ne s’était encore permis une telle attaque, aussi stupide et insensée qu’injuste, d’un pays ami.
La seconde énormité est le fait de mettre la Russie et la Chine sur le même plan en matière de « dictature ». Comme s’il y avait un rapport entre la très réelle dictature du parti communiste chinois, qui interdit toute démocratie et toute liberté d’expression, et la Russie de Poutine, où les partis politiques sont libres, et où il faut être vraiment sourd pour ne pas entendre l’opposition.
En bref, la Russie de Poutine est le pays qui honore Soljenitsyne, et la Chine , qui réussit le tour de force d’ajouter à l’esclavagisme communiste l’esclavagisme du pire capitalisme libéral, est le pays où les esprits libres sont en camp de concentration.
L’interprétation la plus bienveillante est que Rama Yade ne sait pas de quoi elle parle. C’est ce que suggère Jean-Marie Le Pen dans son communiqué, ajoutant que « ce n’est pas une excuse, surtout quand on est ministre ». La conclusion va de soi : « Pour l’honneur de la France, Rama Yade doit démissionner. »