Coup de théâtre à l’italienne… Alors qu’il avait rejeté le gouvernement proposé par la Ligue et le M5S, puis nommé un ancien directeur du FMI comme Premier ministre, le président italien a accepté hier soir un nouveau gouvernement présenté par le Premier ministre qu’il avait destitué… et accepté la démission du Premier ministre qui n’avait pas encore constitué son gouvernement… Et, alors qu’on se demandait si les nouvelles élections allaient avoir lieu avant ou après l’été, voilà que le gouvernement vient de prêter serment…
La différence entre les deux propositions de Giuseppe Conte, c’est-à-dire des partis qui ont remporté les élections, est que le très eurosceptique Paolo Savona, qui était la pierre d’achoppement, n’est plus ministre des Finances mais ministre… des Affaires européennes, coiffé par un ancien eurocrate, Enzo Moavero Milanesi, comme ministre des Affaires étrangères, le portefeuille des Finances revenant à un proche de la Ligue. Matteo Salvini et Luigi Di Maio, chefs de la Ligue et du M5S, sont tous deux vices-Premiers ministres, le premier étant ministre de l’Intérieur, le second ministre du Travail, du Développement économique et des Politiques sociales.
Enzo Moavero Milanesi a été brièvement ministre des Affaires européennes, et surtout il a été le bras droit de Mario Monti quand celui-ci était commissaire européen (1995-2000), puis vice-secrétaire général de la Commission européenne (2002-2005)…
On imagine assez mal la cohabitation avec l’équipe de Matteo Salvini, du moins si Moavero Milanesi est toujours aussi européiste… et si ce gouvernement applique la politique économique et sociale promise…
D’un côté le président Mattarella et, ou, ses supérieurs bruxellois, ont fini par comprendre que le déni de démocratie était un peu trop voyant et violent (et ont vu aussi les sondages qui montraient une nouvelle forte progression de la Ligue en cas de nouvelles élections...) ; d’autre part Mattarella et, ou, ses supérieurs bruxellois, ont imposé que soit rétrogradé Savona et qu’il y ait une figure connue comme européiste, un homme lige de Bruxelles, à un poste important.
La question est de savoir si Enzo Moavero Milanesi est un gage, un alibi, ou un otage…
Je note que mes deux sites de propagande européiste préférés ne titrent pas sur une victoire de Bruxelles qui aurait fait reculer les populistes, mais : « Les eurosceptiques s’installent au pouvoir en Italie » (Euractiv) et : « L’Italie a un nouveau gouvernement avec un ministre de l’Europe eurosceptique » (EUobserver).