L’Évangile nous offre une grande consolation. L’image est saisissante. Les Apôtres rament. avec le vent contraire et ne peuvent avancer ; pendant ce temps, le Christ prie sur la montagne ; puis il vient, à la quatrième veille de la nuit, dans la barque ; la traversée devient alors facile jusqu’à la rive du lac. C’est l’image de notre vie. Nous ramons dans la barque de notre vie avec le vent contraire et, apparemment, nous n’avançons pas. Nous nous plaignons : je ne fais pas de progrès. C’est la vérité, l’enfant de Dieu navigue toujours contre le vent. La chair, le monde, Satan unissent leurs forces contre nous. Et cependant là-haut, sur la montagne céleste, quelqu’un prie pour nous : le Christ, notre médiateur auprès du Père. Cette prière du Christ sur la montagne est aussi la prière du Christ mystique, de l’Église. Cela n’est pas encore tout ; à la quatrième veille de la nuit, le Christ vient lui-même dans la barque de notre vie ; à la messe, il est vraiment là, il vient en personne ; avec son secours, tout est facile. Avec son secours, nous accomplirons la difficile traversée du Carême et nous débarquerons heureusement sur la rive de fête de Pâques.
Liturgie - Page 299
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Samedi après les Cendres
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Vendredi après les Cendres
Dómine, non secúndum peccáta nostra, quæ fécimus nos : neque secúndum iniquitátes nostras retríbuas nobis.
℣. Dómine, ne memíneris iniquitátum nostrarum antiquarum : cito antícipent nos misericórdiæ tuæ, quia páuperes facti sumus nimis.
(Hic genuflectitur.)
℣. Adjuva nos, Deus, salutáris noster : et propter glóriam nóminis tui, Dómine, libera nos : et propítius esto peccátis nostris, propter nomen tuum.Seigneur, ne nous traitez pas selon nos péchés, et ne nous punissez pas selon nos iniquités.
Seigneur, ne vous souvenez plus de nos anciennes iniquités ; que vos miséricordes viennent en hâte au-devant de nous, car nous sommes réduits à la dernière misère.
(Ici on s’agenouille.)
Aidez-nous, ô Dieu notre Sauveur, et pour la gloire de votre nom, Seigneur, délivrez-nous et pardonnez-nous nos péchés, à cause de votre nom.L’une des particularités liturgiques du carême est ce trait qui est chanté trois fois par semaine, les lundis, mercredis et vendredis. C’est aussi la prière prescrite pour les temps de calamité. Il est composé de versets du psaume 102 et du psaume 78. Le verset du psaume a été transformé, de façon à ce que ce qui était un constat devienne une prière.
Selon le bienheureux cardinal Schuster, ce trait « semble avoir été introduit dans la liturgie par le pape Hadrien Ier, qui ordonna de le réciter à la demande de Charlemagne ».
Le voici par les moines de Solesmes sous la direction de dom Gajard, 1953.
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Jeudi après les Cendres
Le centurion s'étant donc approché du Seigneur par l'intermédiaire des anciens (selon saint Luc), saint Matthieu a pu dire pour abréger: « Un centurion s'approcha de lui. » C'est une façon de parler que tout le monde est capable d'entendre.
Il ne faut pas du reste négliger de considérer la vérité profonde que révèle dans le sens mystique le langage du saint Évangéliste et qu'expriment ces paroles d'un Psaume : « Approchez-vous de lui, et vous serez illuminés (Accedite ad eum, et illuminamini). » Aussi bien, la foi du centurion ayant été l'objet de ce magnifique éloge du Sauveur : « Je n'ai point trouvé une si grande foi dans Israël », l'Évangéliste a voulu dire qu'à raison de cette vertu qui nous approche véritablement de Jésus, le centurion s'était plutôt lui-même approché de lui que ceux qu'il avait chargés de lui présenter sa requête. Quant à saint Luc, s'il a expliqué comment tout s'est passé, c'est pour nous faire comprendre dans quel sens saint Matthieu, également infaillible, a dit que le centurion s'était approché de Jésus. C'est ainsi qu'en touchant seulement la frange du vêtement du Sauveur, l'hémorroïsse le toucha mieux que la foule dont il était pressé. De même donc qu'elle toucha d'autant plus le Seigneur qu'elle avait plus de foi en lui, ainsi le centurion s'approcha d'autant plus de Lui que sa foi fut plus vive.
Saint Augustin
• Sur le répons qui correspond à cet évangile, voir ma note de l'an dernier.
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Deux bonnes nouvelles
En Irlande, le prieuré bénédictin de Silvestream (Stamullen, à 35 km au nord de Dublin) vient d’être érigé en monastère par Mgr Michael Smith, l’évêque de Meath. Et c'est annoncé en bonne place sur le site du diocèse.
Ils sont actuellement 8 moines venus du diocèse de Tulsa, aux Etats-Unis, où ils avaient fondé en 2007 le monastère Notre-Dame du Cénacle. Ils chantent la messe et l’office traditionnels.
Une bénédiction pour un pays qui est à la fois un quasi désert monastique (depuis les persécutions anglo-protestantes) et un quasi désert de la liturgie traditionnelle.
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En Italie, la communauté bénédictine du Père Jehan de Belleville (Villatella, non loin de Vintimille), ancien moine du Barroux, va être érigée en institut diocésain le 21 mars prochain.
Cela aurait du se faire en 2015, mais l’approbation des constitutions par le Saint-Siège était arrivée le jour même où Mgr Oliveri était viré par François. Le nouvel évêque « a dû prendre du temps pour faire connaissance avec son nouveau diocèse », comme dit le P. Jeahan. Mais l’essentiel est qu’il accepte cette communauté dont il ne partage pas du tout la « sensibilité traditionnelle ».
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Mercredi des Cendres
Extrait de la dernière homélie de Benoît XVI, mercredi des Cendres 13 février 2013.
L’Église nous propose à nouveau, surtout, le rappel fort que le prophète Joël adresse au peuple d’Israël : « Parole du Seigneur : revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne les larmes et le deuil ! » (2,12). L’expression « de tout votre cœur » est soulignée. Elle signifie : du centre de nos pensées et sentiments, de la racine de nos décisions, de nos choix, de nos actions, dans un geste de liberté totale et radicale. Mais ce retour à Dieu est-il possible ? Oui, parce qu’il y a une force qui ne réside pas dans notre cœur, mais qui se dégage du cœur même de Dieu. C’est la force de sa miséricorde. Le prophète dit encore : « Revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment » (v.13). Le retour au Seigneur est possible comme « grâce », parce qu’il est œuvre de Dieu et fruit de la foi que nous mettons dans sa miséricorde. Ce retour à Dieu devient réalité concrète dans notre vie seulement lorsque la grâce du Seigneur pénètre dans l’intime et le secoue, nous donnant la force de « déchirer notre cœur ». C’est encore le prophète qui fait résonner de la part de Dieu ces paroles : « Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements » (v. 13). En effet, de nos jours aussi, beaucoup sont prêts à « déchirer leurs vêtements » devant les scandales et les injustices – naturellement commis par les autres –, mais peu semblent disponibles à agir sur leur propre « cœur », sur leur propre conscience et sur leurs intentions, laissant au Seigneur de transformer, renouveler et convertir.
Ce « revenez à moi de tout votre cœur », ensuite, est un rappel qui implique non seulement chacun mais la communauté. Toujours dans la première lecture, nous avons écouté : « Sonnez de la trompette dans Jérusalem : prescrivez un jeûne sacré, annoncez une solennité, réunissez le peuple, tenez une assemblée sainte, rassemblez les anciens, réunissez petits enfants et nourrissons ! Que le jeune époux sorte de sa maison, que la jeune mariée quitte sa chambre ! » (v. 15.16). La dimension communautaire est un élément essentiel dans la foi et dans la vie chrétienne. Le Christ est venu « afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (cf. Jn 11,52). Le « Nous » de l’Église est la communauté dans laquelle Jésus nous réunit tous ensemble (cf. Jn 12,32) : la foi est nécessairement ecclésiale. Et il est important de le rappeler et de le vivre en ce temps du Carême : que chacun soit conscient qu’il n’affronte pas seul le chemin de pénitence, mais avec beaucoup de frères et de sœurs, dans l’Église.
Le prophète, enfin, s’arrête sur la prière des prêtres, qui, les larmes aux yeux, se tournent vers Dieu en disant : « N’expose pas ceux qui t’appartiennent à l’insulte et à la moquerie des païens ! Faudra-t-il qu’on dise : “Où donc est leur Dieu ?” » (v. 17). Cette prière nous fait réfléchir sur l’importance du témoignage de foi et de vie chrétienne de chacun de nous et de nos communautés pour manifester le visage de l’Église et comment ce visage est, parfois, défiguré. Je pense en particulier aux coups portés contre l’unité de l’Église, aux divisions dans le corps ecclésial. Vivre le Carême dans une plus intense et évidente communion ecclésiale, dépassant les individualismes et les rivalités, est un signe humble et précieux pour ceux qui sont loin de la foi ou indifférents.
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Angelus Domini vocavit Abraham
Titien, 1542-44
℟. Angelus Domini vocavit Abraham, dicens:
* Ne extendas manum tuam super puerum, eo quod timeas Dominum.
℣. Cumque extendisset manum ut immolaret filium, ecce Angelus Domini de caelo clamavit, dicens.
℟. Ne extendas manum tuam super puerum, eo quod timeas Dominum.L’ange du Seigneur appela Abraham et lui dit : Ne porte pas la main sur l’enfant, parce que tu crains Dieu. Comme il étendait la main pour immoler son fils, voici que l’Ange du Seigneur cria du ciel, disant : Ne porte pas la main sur l’enfant, parce que tu crains Dieu.
Le texte de ce répons ne correspond exactement ni à la Vulgate ni aux textes plus anciens que nous connaissons. Il semble qu’il s’agisse d’une version proprement liturgique.
Salzinnes, 1554-55
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Saint Gabriel de la Vierge des douleurs
Deus, qui beátum Gabriélem dulcíssimæ Matris tuæ dolóres assídue recólere docuísti, ac per illam sanctitátis et miraculórum glória sublimásti : da nobis, eius intercessióne et exémplo ; ita Genetrícis tuæ consociári flétibus, ut matérna eiúsdem protectióne salvémur : Qui vivis et regnas…
Dieu, qui avez appris au bienheureux Gabriel à méditer sans cesse les douleurs de votre très douce Mère et qui l’avez élevé par elle à la gloire des miracles et de la sainteté : accordez-nous, par son intercession ; de nous associer comme lui aux larmes de votre Mère, afin d’être sauvés nous aussi par sa maternelle protection.
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Quinquagésime
Introit
Esto mihi in Deum protectórem, et in locum refúgii, ut salvum me fácias : quóniam firmaméntum meum et refúgium meum es tu : et propter nomen tuum dux mihi eris, et enútries me.
In te, Dómine, sperávi, non confúndar in ætérnum : in iustítia tua líbera me et éripe me.
Gloria Patri…Sois pour moi un Dieu protecteur et un lieu de refuge afin que tu me sauves.
Car tu es mon firmament et mon refuge.
Et à cause de ton nom tu seras mon guide et tu me nourriras.Ps. - En toi, Seigneur, j'ai espéré, que je ne sois pas confondu.
Dans ta justice, délivre-moi. Ps. XXX, 3-4, 1.Ecrit par David au cours de ses persécutions, le Psaume XXXe est devenu le Psaume de l'abandon absolu dans la paix, depuis que Notre Seigneur s'est servi du verset 6e pour exprimer au Père, au moment où il allait mourir, la remise de son âme pacifiée : In mánus túas comméndo Spíritum méum...Entre tes mains je remets mon esprit.
C'est dans ce sens qu'il faut entendre les trois versets qui forment l'Introït. Ils sont la voix d'Abraham, du Christ, de tous ceux de leur race, de tous les membres de l'Eglise, demandant à Dieu de les recevoir, de les prendre en lui, de les couvrir de sa protection comme nous couvre le firmament ; de les nourrir, en leur donnant sans cesse le Pain de vie qui est son Verbe : Parole divine et Eucharistie. Tout cela, en attendant que, la mort nous ayant permis de mettre en acte toute notre puissance de vie, nous jouissions à jamais de la vision des Trois établis en paix dans la Terre promise et nourris éternellement, dans cette vision même, du pain des anges qui fait la béatitude.
LA MÉLODIE
Elle se déroule dans une atmosphère de douceur, de tendresse joyeuse, de paix abandonnée. Il n'y a pas d'angoisse, pas de supplication ardente ; on sent que l'âme est sûre d'être exaucée ; mieux encore, qu'elle l'est déjà. Elle a ce qu'elle demande : Dieu. Elle ne le cherche pas ; elle le possède, elle se repose en lui, réfugiée, à l'abri, couverte de sa tendresse dont elle expérimente la protection, forte comme un rocher à l'entrée d'une grotte, douce, lumineuse, immense et profonde comme le firmament. C'est moins une prière proprement dite qu'une sorte de parole d'amour, dans laquelle l'âme demande, uniquement pour recevoir une réponse où sera toute la tendresse de l'aimé. D'où le caractère d'intimité heureuse qui est partout.
Dom Ludovic Baron
Par les moines de Ligugé, 1959 :
Voir aussi:
Les trois axes de la liturgie de ce jour.
La progression de la septuagésime à la quinquagésime comme préparation au carême.
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De la Sainte Vierge le samedi
Lecture des matines :
Christus virgo, mater virginis nostri virgo perpetua, mater et virgo. Jesus enim clausis ingressus est ostiis: et in sepulchro ejus, quod novum et in petra durissima fuerat excisum, nec antea quis, nec postea positus est. Hortus conclusus, fons signatus: de quo fonte ille fluvius manat, juxta Joel, qui irrigat torrentem vel funium, vel spinarum: funium, peccatorum, quibus ante alligabamur: spinarum, quae sufficiant sementem patrisfamilias. Haec est porta Orientalis, ut ait Ezechiel, semper clausa et lucida, operiens in se, vel ex se proferens Sancta sanctorum: per quam sol justitiae, et Pontifex noster secundum ordinem Melchisedech ingreditur, et egreditur.
Saint Jérôme, lettre au sénateur Pammaque (l’une des deux lettres qui constituent l’Apologeticum ad Pammachium, faisant référence au traité contre Jovinien).
Le Christ est vierge, la mère de notre vierge est vierge perpétuelle (1), mère et vierge. Jésus en effet est entré, les portes étant closes (2) ; et dans son sépulcre, qui était neuf et creusé dans une roche très dure, personne ne fut déposé, ni avant, ni après lui (3). Jardin clos, source scellée (4) ; de cette source émane un fleuve, selon Joël, qui arrose le torrent des liens, ou des épines (5) : les liens des péchés par lesquels nous étions liés auparavant, les épines, qui étouffent la semence du père de famille (6). Elle est la porte orientale dont parle Ezéchiel (7), qui est toujours fermée et lumineuse, qui cache en elle-même ou qui fait voir par elle-même le Saint des saints ; par laquelle entre et sort le Soleil de justice (8) et notre Pontife selon l’ordre de Melchisédech (9).
(1) Cf. « Ille virgo de virgine, de incorrupta incorruptus » (Il est vierge d'une vierge, incorrompu de l'incorrompue - saint Jérôme, Contre Jovinien).
(2) Jean 20, 19.
(3) Luc 23, 53.
(4) Cantique des cantiques 4, 12.
(5) Joël 3, 18 dans la Vulgate, 4, 18 dans la Septante. Comme à son habitude quand il commente le texte sacré, saint Jérôme donne les deux traductions, de la Septante et la sienne, qui sera la Vulgate. Celle-ci, c’est le « torrent des épines ». Le mot hébreu que saint Jérôme avait était différent de celui qu’avaient les Septante, qu’ils ont traduit par σχοίνων : un mot qui veut dire « de joncs », ou tout ce qui est fait, tressé, avec des joncs. On remarque que pour saint Jérôme le mot paraît avoir perdu son sens de jonc pour désigner un « lien », une corde (tressée). Dans son commentaire du livre de Joël d’après les Septante, il traduit par le diminutif « funiculorum » : des cordelettes. Le mot qui figure dans le texte massorétique, Chittim, a été gardé tel quel, comme un nom propre, dans la Bible du rabbinat et quelques autres traductions. Chittim, ou Sittim, comme le lieu où les Israéliens couchèrent avec les femmes de Moab, et le dernier campement avant l’entrée dans la terre promise. Mais Joël ne peut pas parler ici de ce lieu, puisque précisément il ne faisait pas partie a priori de la terre promise dont parle ce verset. La majorité des traductions récentes donnent « la vallée » (ou « le ravin »)… « des acacias », parce que MM. Brown, Driver et Briggs en ont décidé ainsi…
(6) Mat. 13, 7 ; Marc, 4, 7 ; Luc 8, 7.
(7) Ezéchiel 44, 1.
(8) Malachie 4, 2.
(9) Psaume 109, 4 ; Hébreux 5, 1-9. -
Saint Matthias
Dans certains anciens sacramentaires, et par suite dans un certain nombre d’anciens missels, on trouvait à la place de la secrète actuelle celle-ci :
Deus, qui proditoris apostatae ruinam, ne Apostolorum tuorum numerus sacratus perfectione careret, beati Matthiae electione supplesti ; praesentia munera sanctifica, et per ea nos gratiae tuae virtute confirma.
Dieu, qui par l’élection du bienheureux Matthias as suppléé la ruine du traître apostat, afin que le nombre sacré de tes apôtres ne soit pas privé de sa perfection, sanctifie les dons présents, et par eux affermis-nous par la puissance de ta grâce.