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Liturgie - Page 279

  • Dominator Domine

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    ℟. Dominator Domine cælorum et terræ, Creator aquarum, Rex universæ creaturæ: * Exaudi orationem servorum tuorum.
    ℣. Tu Domine, cui humilium semper et mansuetorum placuit deprecatio.
    ℟. Exaudi orationem servorum tuorum.

    Souverain Seigneur des cieux et de la terre, Créateur des eaux, Roi de toute créature, exauce la prière de tes serviteurs. Toi, Seigneur, à qui a toujours plu la supplication des humbles et des doux, exauce la prière de tes serviteurs.

    Ce répons des matines utilise des expressions des versets 17 et 16 du chapitre 9 du livre de Judith. Il est très ancien car le texte du ℟. n’est pas celui de la Vulgate : il est celui d’une vieille version latine de la Septante. En revanche le ℣. est très proche de la Vulgate (ce que l’on constate assez souvent).

    Dans tous les antiphonaires médiévaux qu’on peut consulter sur internet, la première phrase finit par « universe creature tue » : toutes tes créatures (le plus souvent avec cette orthographe médiévale qui écrit e pour ae). On voit que dans le « Bréviaire de Paris », ci-dessus, qui date du XIIIe siècle, on avait d’abord noté le répons comme nous le connaissons, puis qu’on y a ajouté ensuite « tue », en serrant autant que possible « creature tue » pour que ça ne déborde pas trop…

  • Adonai Domine

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    ℟. Adonai, Dómine, Deus magne et mirábilis, qui dedísti salútem in manu féminæ, * Exáudi preces servórum tuórum.

    ℣. Benedíctus es, Dómine, qui non derelinquis præsuméntes de te, et de sua virtúte gloriántes humilias.
    ℟. Exáudi preces servórum tuórum.

    Adonaï, Seigneur Dieu, grand et merveilleux, qui a apporté le salut par la main d’une femme, exauce les prières de tes serviteurs. Tu es béni, Seigneur, toi qui n’abandonnes pas ceux qui présument de toi, et qui humilie ceux qui se glorifient de leur puissance ; exauce les prières de tes serviteurs.

    Ce répons est le premier des matines d’hier dimanche, ce qui explique qu’il soit souvent orné d’une lettrine. L’an dernier j’avais mis l’antiphonaire des cordeliers de Fribourg. Ci-dessus c’est l’antiphonaire à l’usage de Saint-Maur des Fossés (début XIIe siècle). Premier répons du dimanche, il est donc aussi le premier des matines du lundi et du jeudi de cette semaine quand l’office est férial.

    Outre ce que je disais l’an dernier quant à la composition du texte, on peut remarquer qu’il commence par « Adonaï ». Cela ne surprend pas quiconque connaît un peu la liturgie, puisque l’une des grandes antiennes O de l’Avent commence également par Adonaï.

    Pourtant c’est l’une des deux seules fois que saint Jérôme a utilisé ce nom de Dieu dans la Vulgate. L’autre fois c’est dans le livre de l’Exode : « Le Seigneur parla à Moïse, disant : Je suis le Seigneur, qui a apparu à Abraham, Isaac et Jacob en Dieu tout-puissant : et mon nom Adonaï je ne leur ai pas indiqué. »

    Saint Jérôme laisse entendre que sous cet « Adonaï » il y a le tétragramme sacré, le nom ineffable, IHWH, que l’on prononçait précisément « Adonaï ». En fait IHWH est omniprésent dans ces versets de l’Exode, mais une fois saint Jérôme a voulu laisser le mot hébreu, quand « le Seigneur » disait son nom.

    Or dans la prière de Judith on ne voit aucune raison pour que saint Jérôme dise « Adonaï », et moins encore « Adonaï Domine », puisque « Adonaï » veut dire « Domine ».

    Ou bien saint Jérôme a voulu donner un parfum d’antiquité hébraïque à la prière de Judith, ou bien, ce qui me paraît plus probable, il y avait cette répétition bilingue dans le texte araméen qu’il a traduit et que nous n’avons plus.

  • 16e dimanche après la Pentecôte

     

    Miserére mihi, Dómine, quóniam ad te clamávi tota die : quia tu, Dómine, suávis ac mitis es, et copiósus in misericórdia ómnibus invocántibus te.
    Inclína, Dómine, aurem tuam mihi, et exáudi me : quóniam inops, et pauper sum ego.
    Glória Patri.

    Ayez pitié de moi, Seigneur, parce que j’ai crié vers vous durant tout le jour, et parce vous, Seigneur, vous êtes bienveillant et doux, et répandez vos miséricordes avec abondance sur tous ceux qui vous invoquent.
    Inclinez votre oreille vers moi, Seigneur, et exaucez-moi car je suis faible et pauvre.

    L’introït de ce dimanche est un chef-d’œuvre d’expression. Le texte est un peu comme un De Profundis, c’est un appel à la miséricorde divine, une supplication, de la part de quelqu’un qui crie vers Dieu tout le jour… A priori ce n’est pas gai. Pourtant il commence comme un autre introït dont le texte est : Laetabitur justus… Que le juste se réjouisse. Et de fait le chant n’a rien de triste. Il a quelque chose de décidé, c’est le chant de quelqu’un qui est sûr de lui, c’est-à-dire sûr de la miséricorde de Dieu qui donne la joie. La mélodie qui semblait vouloir s’achever sur « clamavi » s’élève brusquement sur « tota die » : c’est tout le jour que je crie, et c’est cette prière incessante qui ouvre le cœur de Dieu dans les cieux.

    La deuxième phrase chante avec tendresse combien doux et suave est le Seigneur, puis s’exalte sur la surabondance de sa miséricorde en faisant planer la mélodie tout en haut de la gamme, avant de se détendre peu à peu, lentement et doucement, dans la paix acquise.

    L’Alléluia.

    L’offertoire.

    Sur l’évangile de ce dimanche. Et saint Bède et saint Basile.

  • Samedi des quatre temps

    Dans son Evangile, le Seigneur, notre Rédempteur, s’adresse à nous quelquefois par des paroles, et quelquefois par des actions; et c’est tantôt des choses différentes qu’il nous dit par ses paroles et par ses actions, tantôt la même chose. Vous avez, mes frères, entendu rapporter deux faits dans cet évangile : le figuier stérile et la femme courbée. Or ces deux faits mettaient en jeu la bonté miséricordieuse [de Dieu]. Le premier l’exprimait par une comparaison, le second la rendait sensible par une action. Mais le figuier stérile signifie la même chose que la femme courbée, le figuier épargné la même chose que la femme redressée. [Le maître de la vigne vint trois fois voir le figuier et n’y trouva aucun fruit; la femme redressée, elle, était courbée depuis dix-huit ans. Ces dix-huit ans représentent la même chose que les trois fois où l’on nous dit que le maître de la vigne est venu voir le figuier stérile.

    Après avoir ainsi donné rapidement l’idée générale de ce texte, expliquons-en maintenant chaque point dans l’ordre de la lecture.

    «Un homme avait un figuier planté dans sa vigne; il vint en chercher les fruits, et n’en trouva pas.»] Que signifie le figuier, sinon la nature humaine? Et que symbolise la femme courbée, sinon cette même nature? Celle-ci fut bien plantée comme le figuier, bien créée comme la femme, mais tombée dans le péché par sa propre volonté, elle n’a su conserver ni le fruit du travail [de son Maître], ni l’état de rectitude [de sa nature], puisqu’en se jetant de son propre mouvement dans le péché, elle a perdu l’état de rectitude, pour n’avoir pas voulu porter le fruit de l’obéissance. Créée à la ressemblance de Dieu, mais ne persistant pas dans sa dignité, elle n’a rien fait pour se conserver telle qu’elle avait été plantée ou créée.

    C’est trois fois que le maître de la vigne vint au figuier, car il a sollicité le genre humain avant la Loi, sous la Loi et sous la grâce : en l’attendant, en l’avertissant et en le visitant.

    [«Il dit alors à celui qui cultivait sa vigne : Voilà trois ans que je viens chercher les fruits de ce figuier, et je n’en trouve pas. »] Dieu est venu avant la Loi, parce qu’il a fait savoir à chacun, par la lumière de sa raison naturelle, qu’il doit traiter autrui comme un autre soi-même. Il est venu sous la Loi, du fait qu’il nous a enseignés par ses commandements. Il est venu après la Loi par sa grâce, puisqu’il nous a montré sa bonté en se rendant lui-même présent. Cependant, il se plaint de n’avoir pas trouvé de fruits en ces trois années, car il y a des hommes dépravés dont l’âme ne peut être corrigée par la loi insufflée en notre nature, ni instruite par les commandements, ni convertie par les miracles de son Incarnation.

    Que figure le vigneron, sinon l’ordre des prélats, qui sont préposés à la conduite de l’Eglise pour prendre soin de cette vigne du Seigneur,

    Ce qui précède, tiré de l’homélie de saint Grégoire le Grand, est la lecture des matines de ce jour, excepté ce qui est entre crochets. Et voici la suite du sermon.

    Lire la suite

  • Vendredi des quatre temps

    Quǽsumus, omnípotens Deus : ut, de percéptis munéribus grátias exhibéntes, benefícia potióra sumámus. Per Dóminum.

    Nous vous en supplions, Dieu tout-puissant, faites que, vous rendant grâces des dons que nous avons reçus, nous recevions des bienfaits encore plus grands.

    La collecte eucharistique de ce jour est commune à beaucoup d’autres fêtes de saints. Nous y rendons grâces à Dieu pour les dons déjà reçus, mais nous le supplions en même temps de nous en accorder de plus grands encore. Ces derniers mots : beneficia potiora semblent quelque peu obscurs, en raison de leur concision même. Quels sont donc ces dons encore plus grands que la divine Eucharistie, et que nous implorons aujourd’hui ? La réponse n’est pas difficile. La possession de Jésus dans la gloire est certainement une plus grande grâce que la sainte Communion, parce qu’ici-bas l’union avec Jésus est illuminée seulement par la foi, tandis qu’au ciel resplendit sur elle la lumière incréée et divine elle-même. Il faut ajouter que, sur la terre, l’union sacramentelle du communiant avec Jésus-Eucharistie est imparfaite parce qu’elle dépend en grande partie des dispositions de celui qui communie, tandis qu’au ciel l’union est parfaite, puisque Dieu lui-même, par les splendeurs de sa gloire, pénètre complètement l’intelligence des bienheureux, comblant tout leur désir. Il y a plus ; en cette vie, la grâce de la Communion eucharistique peut être perdue par un seul péché mortel, tandis qu’au ciel l’union béatifique exclut la possibilité de toute perte ou d’un simple relâchement de cette union du Créateur avec sa créature. En somme la sainte Eucharistie est un don immense, mais elle est en même temps le gage et comme l’anticipation d’une autre faveur plus précieuse encore, à laquelle nous devons aspirer continuellement, surtout quand nous recevons la sainte Communion. Disons-la avec les mots du Docteur Angélique :

    Jesu, quem velatum nunc adspicio,
    Oro, fiat illud quod tam sitio.
    Ut Te revelata cernens facie,
    Visu sim beatus tuae gloriae.

    O Jésus, que je contemple à travers un voile, je vous prie, réalisez le désir ardent de mon âme; faites qu'un jour, vous voyant sans voile, face à face, je sois bienheureux à la vue de votre gloire. (Dernière strophe de l’Adoro Te).

    Bienheureux cardinal Schuster

  • Saint Matthieu

    Le graduel Beatus vir (qu’on trouve aussi aujourd’hui au commun des martyrs non pontifes) n’était sans doute pas attribué à saint Matthieu à l’origine, car dans les anciens manuscrits on le trouve pour la fête de saint Valentin (avec l’introït et le trait qui seront celui du commun des martyrs non pontifes, mais on le trouve pour la fête de saint Jean l’évangéliste dans le codex Bodmer74)…

    Je n’en trouve pas d’interprétation qui corresponde à la partition. Voici toutefois ce graduel, dans une version fort différente mais qui dérive manifestement du chant d’origine (simplifié, un peu comme sur les livres de lutrin du XIXe siècle), dans la messe de saint Henri d’Uppsala, patron de la Finlande, par la Schola Sancti Henrici :

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  • Mercredi des quatre temps

    L’évangile de ce jour, qui raconte comment Jésus guérit un garçon terriblement tourmenté par un « esprit sourd et muet », a été choisi en raison de sa dernière phrase : « Cette sorte de démon ne peut se chasser que par la prière et par le jeune. » Qui a été reprise comme antienne du Benedictus aux laudes.

    Les quatre temps de septembre furent en effet désignés comme « le jeûne du septième mois », et il nous reste neuf sermons de saint Léon le Grand pour ce temps. Dont celui dont on lisait un passage au deuxième nocturne des matines du dimanche précédent, avant le raccourcissent drastique de ces matines (mais il se trouve toujours dans le bréviaire monastique).

    Le commentaire de l’évangile dans le bréviaire est celui de saint Bède. Il commente ainsi la dernière phrase :

    Il leur dit : « Ce genre [de démons] ne peut se chasser que par la prière et le jeûne. » En instruisant les Apôtres sur la manière dont le démon le plus méchant doit être chassé, Jésus-Christ nous donne à tous une règle de vie, afin que nous sachions que les tentations les plus fortes, provenant soit des esprits immondes, soit des hommes, doivent être vaincues par les jeûnes et les prières, et que la colère du Seigneur aussi, lorsqu’elle s’est allumée pour venger nos crimes, peut être apaisée par ce remède spécial. Or, le jeûne, en un sens général, consiste à s’abstenir non seulement des aliments, mais de tous les plaisirs charnels ; bien plus, à se défendre de toute affection au mal. Pareillement, la prière, en un sens général, ne s’entend pas seulement des paroles par lesquelles nous invoquons la clémence divine, mais aussi de tous les actes que nous accomplissons avec la dévotion de la foi pour servir notre Créateur.

    Dans la Catena Aurea, saint Thomas d’Aquin cite ce commentaire, et il ajoute un commentaire « de saint Jérôme » qui est en fait tiré d’un commentaire de saint Marc qui fut publié sous le nom de saint Jérôme mais n’est pas de lui :

    La folie, qui a pour objet les jouissances de la chair, est guérie par le jeûne; de même aussi la paresse est chassée par la prière. A chaque plaie il faut appliquer le remède convenable: ce n'est point par un remède appliqué sur le pied que l'on guérit l'œil malade. Ainsi donc, employez le jeûne contre les passions du corps, et la prière contre les maladies de l'âme.

    Le paradoxe est que l’origine lointaine de ce « jeûne du septième mois » est, comme le rappelle la deuxième lecture de la messe, le jour (le premier du septième mois) où Esdras lit devant le peuple le Livre de la Loi qui vient d’être retrouvé. « Et il leur dit : Allez, mangez des viandes grasses et buvez de douces liqueurs, et faites-en part à ceux qui n’ont rien préparé, car ce jour est consacré au Seigneur ; et ne vous attristez point, car la joie du Seigneur est notre force. » Et c’est le chant de communion.

    D’où le chant d'action de grâce triomphale de l’introït, où « le Psalmiste invite Israël à faire résonner le tambourin, à faire vibrer la harpe et la douce cithare, à sonner du cor, à l’occasion de la septième nouvelle lune (celle qui, autrefois, commençait l’année juive), parce que c’est là une tradition sainte en Israël et une loi du Dieu de Jacob »…

  • Saint Janvier

    Vers trois heures et demie, les murmures augmentèrent d'une façon effrayante : cela commençait par une espèce de plainte, et cela montait jusqu'aux rugissements. Les “parentes” de saint Janvier jetèrent quelques injures au saint qui se faisait ainsi prier.

    A quatre heures, il y avait presque émeute : on trépignait, on vociférait, on montrait des poings ; le chanoine de garde - on avait renouvelé les chanoines d'heure en heure - s'approcha de la balustrade et dit :

    - Il y a sans doute des hérétiques dans l'assemblée. Que les hérétiques sortent, ou le miracle ne se fera pas.

    A ces mots, une clameur épouvantable s'éleva de toutes les parties de la cathédrale, hurlant :

    - Dehors les hérétiques ! à bas les hérétiques ! à mort les hérétiques !

    Une douzaine d'Anglais, qui étaient aux tribunes, descendirent alors de leur échafaudage, au milieu des cris, des huées et des vociférations de la foule ; une escouade de fantassins, conduite par un officier, l'épée nue à la main, les enveloppa, afin qu'ils ne fussent pas mis en pièces par le peuple, et les accompagna hors de l'église, où je ne sais pas ce qu'ils devinrent.

    Leur expulsion amena un moment de silence, pendant lequel la foule, émue et soulagée, reprit le mouvement qui la reportait vers l'autel pour baiser la fiole, et l'éloignait de l'autel quand la fiole était baisée.

    Une heure à peu près s'écoula dans l'attente, et sans que le miracle se fit. Pendant cette heure, la foule fut assez tranquille ; mais c'était le calme qui précède l'orage. Bientôt les rumeurs recommencèrent, les grondements se firent entendre de nouveau, quelques clameurs sauvages et isolées éclatèrent. Enfin, cris tumultueux, vociférations, grondements, rumeurs, se fondirent dans un rugissement universel dont rien ne peut donner une idée.

    Le chanoine demanda une seconde fois s'il y avait des hérétiques dans l'assemblée ; mais cette fois personne ne répondit. Si quelque malheureux Anglais, Russe ou Grec, se fût dénoncé en répondant, à cet appel, il eût été certainement mis en morceaux, sans qu'aucune force militaire, sans qu'aucune protection humaine eût pu le sauver.

    Alors les “parents” de saint Janvier se mêlèrent à la partie : c'était quelque chose de hideux que ces vingt ou trente mégères arrachant leur bonnet de rage, menaçant saint Janvier du poing, invectivant leur parent de toute la force de leurs poumons, hurlant les injures les plus grossières, vociférant les menaces les plus terribles, insultant le saint sur son autel, comme une populace ivre eût pu faire d'un parricide sur un échafaud.

    Au milieu de ce sabbat infernal, tout à coup le prêtre éleva la fiole en l'air, criant :

    - Gloire à saint Janvier, le miracle est fait !

    Aussitôt tout changea.

    Chacun se jeta la face contre terre. Aux injures, aux vociférations, aux cris, aux clameurs, aux rugissements, succédèrent les gémissements, les plaintes, les pleurs, les sanglots. Toute cette populace, folle de joie, se roulait, se relevait, s'embrassait, criant :

    – Miracle ! miracle ! et demandait pardon à saint Janvier, en agitant ses mouchoirs trempés de larmes, des excès auxquels elle venait de se porter à son endroit.

    Au même instant, les musiciens commencèrent à jouer et les chantres à chanter le Te Deum, tandis qu'un coup de canon tiré au fort Saint-Elme, et dont le bruit vint retentir jusque dans l'église, annonçait à la ville et au monde, urbi et orbi, que le miracle était fait.

    En effet, la foule se précipita vers l'autel, nous comme les autres. Ainsi que la première fois, on nous donna la fiole à baiser ; mais, de parfaitement coagulé qu'il était d'abord, le sang était devenu parfaitement liquide.

    C'est, comme nous l'avons dit, dans cette liquéfaction que consiste le miracle.

    Et il y avait bien véritablement miracle, car c'était toujours la même fiole ; le prêtre ne l'avait touchée que pour la prendre sur l'autel et la faire baiser aux assistants, et ceux qui venaient de la baiser ne l'avaient pas un instant perdue de vue.

    La liquéfaction s'était faite au moment où la fiole était posée sur l'autel, et où le prêtre, à dix pas de la fiole à peu près, apostrophait les parentes de saint Janvier.

    Maintenant, que le doute dresse sa tête pour nier, que la science élève sa voix pour contredire ; voilà ce qui est, voilà ce qui se fait, ce qui se fait sans mystère, sans supercherie, sans substitution, ce qui se fait à la vue de tous. La philosophie du dix huitième siècle et la chimie moderne y ont perdu leur latin : Voltaire et Lavoisier ont voulu mordre à cette fiole, et, comme le serpent de la fable, ils y ont usé leurs dents.

    Maintenant, est-ce un secret gardé par les chanoines du Trésor et conservé de génération en génération depuis le quatrième siècle jusqu'à nous ?

    Cela est possible ; mais alors cette fidélité, on en conviendra, est plus miraculeuse encore que le miracle.

    J'aime donc mieux croire tout bonnement au miracle ; et, pour ma part, je déclare que j'y crois.

    Le soir, toute la ville était illuminée et l'on dansait dans les rues.

    Fin du chapitre 21 de “Le Corricolo” d’Alexandre Dumas.

  • Saint Joseph de Cupertino

    Saint Joseph de Cupertino continue de resplendir de nos jours comme un phare qui illumine le chemin quotidien de ceux qui ont recours à son intercession céleste. Sa renommée s'est popularisée sous le nom du "Saint des lévitations" en raison de ses fréquentes extases et de ses extraordinaires expériences mystiques; il invite les fidèles à répondre aux attentes les plus intimes du cœur ; il les encourage à rechercher le sens profond de l'existence et, en dernière analyse, il les pousse à rencontrer personnellement Dieu, en s'abandonnant pleinement à sa volonté.

    Patron  des  étudiants, saint Joseph de Cupertino encourage le monde de la culture, en particulier de l'école, à fonder son savoir humain sur la sagesse de Dieu. Et c'est précisément grâce à sa docilité intérieure aux suggestions de la sagesse divine que ce saint particulier peut se présenter comme un guide spirituel pour toutes les catégories de fidèles. Aux prêtres et aux personnes consacrées, aux jeunes et aux adultes, aux enfants et aux personnes âgées, à quiconque désire devenir disciple du Christ, il continue d'indiquer les priorités que ce choix radical comporte. La reconnaissance du primat de Dieu dans notre existence, la valeur de la prière et de la contemplation, l'adhésion passionnée à l'Evangile "sine glossa", sans compromis: telles sont certaines des conditions indispensables pour être des témoins crédibles de Jésus, recherchant avec amour son saint Visage. C'est ce que fit ce mystique extraordinaire, disciple exemplaire du "Poverello" d'Assise. Il brûla d'un tendre amour pour le Seigneur et vécut au service de son Royaume. A présent, du ciel, il ne cesse de protéger et de soutenir ceux qui, suivant ses pas, entendent se convertir à Dieu et se mettre en route de façon décidée sur la voie de la sainteté.

    Dans la spiritualité qui le distingue, ressortent les traits typiques de l'authentique tradition franciscaine. Epris du mystère de l'Incarnation, Joseph de Cupertino contemplait extasié le Fils de Dieu né à Bethléem, en l'appelant affectueusement et secrètement le "Bambinello" (petit enfant). Il exprimait presque extérieurement la douceur de ce mystère en embrassant une image de l'Enfant Jésus en cire, en chantant et en dansant du fait de la tendresse divine répandue abondamment sur l'humanité dans la grotte de Noël.

    Sa participation au mystère de la Passion du Christ était émouvante. Le Crucifix était toujours présent dans son esprit et dans son cœur, parmi les souffrances d'une vie incomprise et souvent pavée d'obstacles. Il versait de chaudes larmes en pensant à la mort de Jésus sur la Croix, en particulier car, comme il aimait le répéter, ce sont les péchés qui ont transpercé le corps immaculé du Rédempteur sous le marteau de l'ingratitude, de l'égoïsme et de l'indifférence.

    Un autre aspect important de sa spiritualité fut l'amour de l'Eucharistie. La célébration de la Messe, ainsi que les longues heures passées en adoration devant le tabernacle, constituaient le coeur de sa vie de prière et de contemplation. Il considérait le sacrement de l'Autel comme une "nourriture des anges", un mystère de la foi laissé par Jésus à son Eglise, un Sacrement où le Fils de Dieu fait homme n'apparaît pas aux fidèles face à face, mais cœur à cœur. Avec ce suprême mystère, affirmait-il, Dieu nous a donné tous les trésors de la toute-puissance divine et nous a révélé l'abondance de sa miséricorde divine. Du contact quotidien avec Jésus Eucharistie, il tirait sérénité et paix, qu'il transmettait ensuite à ceux qu'il rencontrait, rappelant qu'en ce monde, nous sommes tous pèlerins et étrangers en chemin vers l'éternité.

    Saint Jean-Paul II, extrait de son Message au ministre général de l’ordre franciscain des frères mineurs conventuels pour le 400e anniversaire de la naissance de saint Joseph de Cupertino.

  • 15e dimanche après la Pentecôte

    Panis, quem ego dédero, caro mea est pro sǽculi vita.

    Le pain que je donnerai, c’est ma chair, pour la vie du monde.

    L’antienne de communion de ce dimanche est la plus en situation qui se puisse trouver, puisqu’elle évoque ce qui vient précisément de se passer, et c’est Jésus lui-même qui souligne que ce pain est sa chair.

    On remarque aussi les neumes magnifiques sur vita, avec une joyeuse élévation quatre fois jusqu’au do à partir de la dominante : cette vie, c’est celle que Jésus dans l’évangile a redonnée au fils de la veuve de Naïm : Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi. Et c’est ce qu’il dit à tous les communiants.