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Liturgie - Page 282

  • 12e dimanche après la Pentecôte

    Deus, in adjutórium meum inténde : Dómine, ad adjuvándum me festína : confundántur et revereántur inimíci mei, qui quærunt ánimam meam.
    Avertántur retrórsum et erubéscant : qui cógitant mihi mala.

    O Dieu, venez à mon aide ; Seigneur, hâtez-vous de me secourir : que mes ennemis, ceux qui cherchent à m’ôter la vie, soient confondus et couverts de honte.
    Qu’ils soient contraints de retourner en arrière et réduits à rougir, ceux qui méditent de me faire du mal.

    L’introït de la messe de ce dimanche est composé sur le début du psaume 69. Le premier verset, « Deus in adjutorium meum intende, Domine ad adjuvandum me festina », est le début de toutes les heures du bréviaire. Cela vient des pères du désert. Cette formule, dit l’abbé Isaac dans la 10e conférence de Jean Cassien, est « un secret que les rares survivants des pères du premier âge nous ont appris », c’est le modèle de prière qu’il faut répéter et méditer sans cesse. Il poursuit :

    Ce verset, choisi dans toute l'Écriture, renferme tous les sentiments que peut concevoir la nature humaine; il convient parfaitement à tous les états et à toutes les tentations. On y trouve l'invocation de Dieu contre tous les dangers, l'humilité d'une sincère confession, la vigilance de la sollicitude et de la crainte, la considération de notre faiblesse, l'espérance d'être exaucé, la confiance en un secours présent et certain; car celui qui invoque son protecteur est toujours certain de sa présence. On y trouve l'ardeur de l'amour et de la charité, la vigilance contre les pièges qui nous environnent et contre les ennemis qui nous attaquent nuit et jour, et l'âme confesse qu'elle ne peut en triompher sans le secours de son défenseur. Ce verset, pour ceux que les démons tourmentent, est un rempart inexpugnable, une cuirasse impénétrable, un bouclier qui nous couvrira toujours lorsque la paresse, l'ennui, la tristesse, le découragement nous accablent; il nous empêche de désespérer de notre salut, en nous montrant Celui que nous invoquons présent à nos combats et entendant nos supplications.

    Voici cette supplication, qui fait monter la mélodie grégorienne jusqu’en haut de la gamme du 7e mode.

    12th Sunday after Pentecost: Introit from Corpus Christi Watershed on Vimeo.

    On trouvera ci-après la suite du texte de Cassien, qui détaille les situations où ce verset de psaume peut être utile. (Dans la traduction de « E. Cartier », 1868, qui me paraît bonne, à ceci près qu’il met curieusement au futur ce qui dans le texte est au présent).

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  • De la Sainte Vierge le samedi

    Fuit vir unus de Ramáthaim Sophim, de monte Ephraim. Potest, huius montis nómine, beatíssima semper Virgo Maria, Dei Génitrix, designari. Mons quippe fuit, quæ omnem electæ creaturæ altitúdinem, electiónis suæ dignitate, transcéndit. An non mons sublimis Maria, quæ, ut ad conceptiónem æterni Verbi pertingeret, meritórum vérticem, supra omnes Angelórum choros, usque ad sólium Deitátis eréxit? Huius enim montis præcellentíssimam dignitátem Isaías vatícinans, ait: Erit in novíssimis diébus præparátus mons domus Dómini in vértice móntium. Mons quippe in vértice móntium fuit, quia altitúdo Maríæ supra omnes Sanctos refulsit.

    « Il y eut un homme de Ramathaim Sophim, de la montagne d’Ephraïm » (I Rois 1,1). La très sainte Mère de Dieu Marie toujours vierge peut être désignée par ce nom de “montagne”. Elle fut de fait une montagne, elle qui par la dignité de son élection a transcendé toute hauteur de créature élue. N’est-elle pas, Marie, une montagne sublime, elle qui, afin qu’elle atteigne à la conception du Verbe éternel, éleva le sommet de ses mérites au-dessus des chœurs des anges, jusqu’au trône de la Divinité ? C’est de la très éminente dignité de cette montagne que prophétisa Isaïe, disant : « Il y aura dans les derniers jours une montagne préparée pour être la maison du Seigneur au sommet des montagnes. » En effet elle fut une montagne au sommet des montagnes, car la hauteur de Marie resplendit au-dessus de tous les saints.

    Saint Grégoire le Grand, commentaire des livres des Rois, lecture des matines. (L'homme de Ramathaim Sophim est le mari d'Anne, laquelle va chanter pour la naissance miraculeuse de son enfant - Samuel - un cantique qui préfigure le Magnificat.)

  • Saint Louis

    Les trois collectes de la messe (celle de l’Eglise universelle) vues par le bienheureux cardinal Schuster :

    « Seigneur, qui avez fait passer du trône terrestre au trône céleste le bienheureux roi Louis ; par ses mérites et son intercession faites que nous aussi méritions d’avoir part à l’héritage du Christ Jésus, Roi des rois ». Aujourd’hui l’Église, dans cette première collecte, rappelle les fidèles au sens de cette dignité royale que, par notre incorporation au Christ Roi et Prêtre, nous avons obtenue dans le sacrement du Baptême. Si les chrétiens appartiennent tous à cette dynastie sacrée instituée par le Christ, — regale sacerdotium — il convient qu’ils sachent se dominer et tiennent leurs passions assujetties. On attribue à saint Colomban une belle parole qui se rapporte à cette liberté royale que doit garder intacte le chrétien. A un roi tyran, ce saint abbé dit un jour : si aufers libertatem, aufers dignitatem [si tu enlèves la liberté, tu enlèves la dignité]

    Sur les oblations. — « Comme le bienheureux confesseur Louis, ayant méprisé les délices du monde, s’efforça de plaire uniquement à Dieu ; ainsi nous vous demandons. Seigneur, que son intercession nous rende agréables à Vous ». Il n’est rien de plus vil que de transiger avec sa conscience pour ne pas déplaire aux hommes. Avec la meilleure bonne volonté, avec le tact et la prudence la plus circonspecte, il est impossible de contenter tout le monde. Saint Paul essaya de le faire, mais lui-même écrivit : Si adhuc hominibus placerem, Christi servus non essem [Si je plaisais encore aux hommes je ne serais pas le serviteur du Christ]. Le Psalmiste a un mot très fort contre ces lâches victimes du respect humain : disperdet ossa eorum qui hominibus placent, quoniam Deus sprevit eos [(Le Seigneur) a brisé les os de ceux qui cherchent à plaire aux hommes, parce que Dieu les a méprisés].

    Après la Communion. — « Seigneur, qui avez rendu illustre sur la terre, puis glorieux dans le ciel, le bienheureux confesseur Louis, établissez-le aussi défenseur de votre Église ». Le nombre est-il assez grand, de ceux qui évoquent avec passion les noms des souverains des anciennes dynasties françaises ? Et pourtant, le nom de saint Louis IX exprime encore, pour cette nation, tout un programme et un idéal de foi, de pureté, de valeur et d’honneur qui élève les lis de la vraie France catholique d’autant plus haut qu’est descendue davantage dans la fange la faction jacobine adverse, destructrice de sa propre patrie.

  • Saint Barthélémy

    On ne peut pas dire que pour la messe il y ait un « commun des apôtres », malgré ce qu’affirme le cardinal Schuster, ni que « chaque apôtre a une messe propre », comme l’affirme un de mes missels. En fait on est entre les deux. On ne peut pas parler de « commun des apôtres » au sens strict, dans la mesure où il y a plusieurs introïts, graduels, etc., des apôtres. On ne peut pas parler de messe propre au sens strict, puisque toutes les pièces d’une messe donnée se retrouvent dans une ou plusieurs autres.

    Pour la messe de saint Barthélémy, le Liber usualis renvoie à saint André pour l’introït et l’offertoire, à la fête des saints Pierre et Paul pour le graduel (mais c’est aussi celui de saint André) et donne l’alléluia (qu’on retrouvera à la fête de saint Matthieu) et la communion (qui est aussi celle de saint Matthias et de saint Jacques).

    Le texte de l’Alléluia reprend simplement le verset du Te Deum qui célèbre tous les apôtres.

    Allelúia, allelúia. Te gloriósus Apostolórum chorus laudat, Dómine. Allelúia.

    Allelúia, allelúia. Le chœur glorieux des Apôtres chante vos louanges, Seigneur. Alléluia.

    Le voici par les moines de Solesmes (direction dom Jean Claire) :

  • Saint Philippe Béniti

    Les cinq fresques sur saint Phiippe Béniti, par Andrea del Sarto, dans le « cloître des vœux » (des ex-voto) de la basilique de l’Annonciation de Florence, premier oratoire des Servites dont il fut le supérieur.

    Les blasphémateurs punis:

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    La guérison d’un lépreux:

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    La guérison d’un démoniaque:

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    La mort de saint Philippe et la résurrection d’un enfant mort (le plus éclatant des miracles qui se produisirent alors).

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    Guérison miraculeuse par les reliques de saint Philippe:

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    Sur la vie de saint Philippe Béniti, voir ici et .

    Pour moi ce jour demeure celui de la vigile de saint Barthélémy.

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  • Octave de l’Assomption

    Par un décret de la Congrégation des rites daté du 4 mai 1944, Pie XII instituait la fête du Cœur immaculée de Marie le 22 août. A savoir le jour de l’octave de la fête de l’Assomption. Comme s’il avait déjà décidé de supprimer cette octave, ce qu’il fera 11 ans plus tard.

    Retrouvons saint Bernard, dans son quatrième sermon sur l’Assomption, dont les lignes suivantes étaient la lecture du deuxième nocturne des matines (ce sont en fait des extraits, bien choisis et agencés, de la deuxième moitié du sermon).

    Rien ne me charme, mais aussi rien ne m’effraie plus, que de parler des gloires de la Vierge Marie. Si je loue sa virginité, beaucoup de vierges se présentent à mon souvenir. Si je célèbre son humilité, il s’en trouve au moins quelques-uns qui, à l’école de son Fils, sont devenus doux et humbles de cœur. Si je veux exalter sa grande miséricorde, il y a eu des hommes et aussi des femmes qui ont exercé la miséricorde. Mais il est un point où Marie n’a eu, ni devancière ni imitatrice, c’est qu’elle a tout ensemble, et les joies de la maternité et l’honneur de la virginité. C’est là le privilège de Marie, il ne sera pas donné à une autre ; il est unique et par cela même il est ineffable.

    Néanmoins, elle n’a pas que cela de particulier. A bien considérer toutes ses vertus, on trouve que celles-là même qui semblent lui être communes avec d’autres, lui sont spécialement propres. Quelle pureté, fût-ce la pureté des Anges, osera-t-on mettre en parallèle avec celle qui a rendu Marie digne de devenir le sanctuaire du Saint-Esprit, et la demeure du Fils de Dieu ? Et quelle admirable et précieuse humilité, jointe à une si grande pureté, à une parfaite innocence, à une conscience exempte de toute ombre de faute, et, pour mieux dire, à une si merveilleuse plénitude de grâce ! D’où vous vient cette humilité et cette humilité si grande, ô Vierge bienheureuse ? Elle était digne assurément des regards du Seigneur, c’est de sa beauté que le Roi a été épris, c’est son parfum très suave qui, attirant le Fils de Dieu, l’a fait sortir de l’éternel repos qu’il goûte dans le sein de son Père.

    Nous vous avons accompagnée de tous les vœux possibles, quand vous montiez vers votre Fils, et nous vous avons suivie du moins à distance, ô Vierge bénie ! Que votre bonté fasse connaître au monde la grâce que vous avez trouvée auprès de Dieu : obtenez par vos saintes prières le pardon aux coupables, la guérison aux malades, la force aux âmes faibles, la consolation aux affligés, le secours et la délivrance à ceux qui sont en péril. O Marie, reine de clémence, qu’en ce jour de solennité et d’allégresse vos humbles serviteurs qui louent et invoquent votre très doux nom soient comblés des dons de la grâce par Jésus-Christ votre Fils, notre Seigneur, qui est le Dieu souverain, béni dans tous les siècles. Amen.

    Dernier répons du deuxième nocturne (dans le bréviaire monastique, toujours) :

    ℟. Ista est speciosa inter filias Jerusalem, sicut vidistis eam plenam caritate et dilectione, * in cubilibus et in hortis aromatum. ℣. Ista est quæ ascendit de deserto, deliciis affluens. In cubilibus et in hortis aromatum. Gloria Patri. In cubilibus et in hortis aromatum.

    Elle est belle parmi toutes les filles de Jérusalem, ainsi que vous l'avez vue pleine de charité et de dilection, dans les chambres et les jardins des parfums. C’est elle qui monte du désert, pleine de délices. Dans les chambres et les jardins des parfums. Gloire au Père… Dans les chambres et les jardins des parfums.

  • Dans l’octave de l’Assomption

    Lecture des matines : début du quatrième sermon de saint Bernard sur l’Assomption.

    C'est le moment de s'adresser à toute chair quand la Mère du Verbe incarné est enlevée dans les cieux, et la mortelle humanité ne doit point cesser de faire entendre ses louanges le jour où la seule nature humaine se trouve élevée dans la Vierge au dessus des esprits immortels. Mais si la dévotion ne nous permet pas de garder le silence aujourd'hui sur elle, notre intelligence paresseuse ne peut concevoir, et notre langue inhabile ne peut exprimer rien qui soit digne d'elle. Voilà pourquoi les princes eux-mêmes de la cour céleste, à la vue d'une chose si nouvelle, s'écriaient tout pleins d'admiration : « Quelle est celle qui monte ainsi du désert, pleine de délices (Cant. 8,5) ? » C'est comme s'il disaient en termes plus clairs : « Quelle est son importance, et d'où lui vient, puisqu'elle s’élève du désert, une telle affluence de délices ? On n'en trouve pas de semblables, même parmi nous, dont le cours impétueux du fleuve réjouit la vue dans la cité de Dieu (psaume 45), et qui, sous ses yeux, buvons à longs traits, dans un torrent de délices.

    Quelle est cette femme qui vient de dessous le soleil, de là où il n'y a que labeur, douleur, affliction d’esprit (Ecclesiaste), et qui monte, comblée de délices spirituelles ? Pourquoi ne dirais-je point que ces délices, ce sont la gloire de la virginité, avec le don de la fécondité, la marque insigne de l’humilité, le doux rayon de miel de la charité, les entrailles de la miséricorde, la plénitude de 1a grâce, et le privilège d'une gloire unique ? Aussi, en s'élevant de ce désert, la Reine du monde, comme l'Église le dit dans ses chants, « est devenue belle et douce à voir dans ses délices » (antienne de l’office de la Sainte Vierge) même aux yeux des autres.

    Qu'ils cessent pourtant d'admirer les délices de ce désert, car le Seigneur a répandu sa bénédiction, et notre terre a porté son fruit (Psaume 84). Qu'ont-ils à admirer Marie quand elle s'élève du désert de cette terre comblée de délices ? Ils ont bien plus de quoi admirer dans le Christ devenu pauvre, quand il était riche de la plénitude du royaume du ciel, car il me semble bien plus étonnant de voir le fils de Dieu descendre au-dessous même des anges (psaume 8) que Marie s'élever au dessus d'eux. Son dénuement a fait notre richesse, et ses misères ont fait les délices du monde. Enfin, quand il était riche, il s'est fait pauvre pour nous, afin de nous enrichir par sa propre pauvreté (II Cor. 8,9).

    Troisième répons :

    ℟. Quæ est ista quæ procéssit sicut sol, et formósa tamquam Jerúsalem ? * Vidérunt eam fíliæ Sion, et beátam dixérunt, et regínæ laudavérunt eam. ℣. Et sicut dies verni circúmdabant eam flores rosárum et lília convállium. * Vidérunt eam fíliæ Sion, et beátam dixérunt, et regínæ laudavérunt eam. Glória Patri. * Vidérunt eam fíliæ Sion, et beátam dixérunt, et regínæ laudavérunt eam.

    Quelle est celle-ci qui s’avance comme le soleil, et belle comme Jérusalem ? (Cantique 8,5) Les filles de Sion l’ont vue et l’ont dite bienheureuse, et les reines l’ont louée. Et comme un jour de printemps, les roses l’entouraient, ainsi que les lys des vallées (Ecclésiastique 50,8). Les filles de Sion l’ont vue et l’ont dite bienheureuse, et les reines l’ont louée. Gloire au Père... Les filles de Sion l’ont vue et l’ont dite bienheureuse, et les reines l’ont louée.

  • Dimanche dans l’octave de l’Assomption

    En réalité, pour voir une mention du « dimanche dans l’octave de l’Assomption », il faut remonter non pas avant 1955 mais avant 1911. Et si le 20 août est la fête de saint Bernard, en ce dimanche on célébrait, depuis 1738, la fête de saint Joachim, fixée au dimanche dans l’octave de l’Assomption par Clément XII. Elle primait celle de saint Bernard (qui aurait primé le dimanche avant 1911 s’il n’y avait pas eu Joachim).

    Depuis la réforme de saint Pie X, on fait aujourd’hui l’office et la messe du 11e dimanche après la Pentecôte (avec mémoire de l’octave de l’Assomption jusqu’en 1955 et mémoire de saint Bernard jusqu’en 1960).

    Quoi qu’il en soit j’ai voulu garder l’octave de l’Assomption cette année sur mon blog parce que l’Assomption méritait son octave, et à cause de saint Bernard et de son sermon pour le dimanche dans l’octave de l’Assomption, jour qui est cette année celui de sa fête même si le calendrier de 1960 le passe sous silence.

    Ce sermon est parfois intitulé « Les douze prérogatives de la bienheureuse Vierge Marie », ou « Le sermon des douze étoiles ». En voici la fin.

    Quant au martyre de la Vierge qui est, comme vous vous le rappelez, la douzième étoile de sa couronne, je le trouve dans la prophétie de Siméon, et dans toute l'histoire de la passion de Notre Seigneur. En parlant de l'enfant Jésus, Siméon dit : « Cet enfant est destiné à se trouver en butte à la contradiction, » puis, s'adressant à Marie, il continue : « Et vous, votre âme sera percée d'un glaive. » On peut bien dire, en effet, qu'un glaive a percé votre âme, ô bienheureuse mère, car ce n'est qu'en passant par votre cœur qu'il pouvait pénétrer dans la chair de votre Fils. Et même quand votre Jésus, le vôtre par excellence, en même temps que le nôtre, eut rendu l'esprit, ce n'est plus son âme qu'atteignit la lance qui, n'épargnant pas même dans les bras de la mort, la victime à qui elle ne pouvait plus faire de mal, ouvrit son côté de son fer cruel, mais c'est votre âme elle-même qu’elle transperça. Car, pour lui, son âme n'était déjà plus là, mais la vôtre ne pouvait s'arracher de ces lieux. Sa douleur, comme un glaive violent, a donc transpercé votre cœur, et nous pouvons vous appeler, avec raison, plus que martyre, puisque, en vous, le sentiment de la compassion l'emporta si fort sur celui de la passion endurée par le corps.

    N'était-ce point une parole plus pénétrante qu'un glaive, qui transperça, en effet, votre âme et atteignit jusqu’à la division de l'âme et de l'esprit, que celle-ci : « Femme, voici ton fils ? » Quel échange ! Jean substitué à Jésus, le serviteur au Seigneur, le disciple au maître, le fils de Zébédée au Fils de Dieu, un pur homme au vrai Dieu ! Comment ce langage n'aurait-il pas percé, comme d'un glaive, votre âme si aimante, quand son souvenir seul déchire nos cœurs de pierre ou de fer ? Ne vous étonnez point, mes frères, que Marie soit dite martyre en son âme, il faudrait pour en être surpris que vous eussiez oublié que le plus grand crime que saint Paul ait reproché aux Gentils c'est d'avoir été sans affection. Cette absence de sentiment était loin de se trouver dans les entrailles de Marie, puisse-t-elle être aussi étrangère à ses humbles serviteurs. Mais peut-être demanderez-vous si elle ne savait pas d'avance qu'il devait mourir ? Elle n'en doutait point ; si elle espérait qu'il ressusciterait peu de temps après ? avec confiance. Et, malgré cela, elle souffrit de le voir attaché à la croix ? énormément (1). Après tout, qui êtes-vous, mon frère, et à quelle source puisez-vous votre sagesse pour vous étonner davantage de voir Marie compatir que de voir le fils de Marie pâtir ? Il aurait pu souffrir la mort du corps, et elle n'aurait pu ressentir celle du cœur ? (2) Ce fut une charité en comparaison de laquelle nul ne saurait en avoir une plus grande qui fit endurer l'une au fils ; ce fut une charité aussi à laquelle on ne saurait en comparer une autre qui fit souffrir l'autre à la mère.

    Et maintenant, ô mère de miséricorde, au nom de l'affection de votre âme très pure, la lune qui se tient à vos pieds vous invoque avec les accents de la plus grande dévotion comme une médiatrice entre elle et le Soleil de justice ; que dans votre lumière elle voie sa lumière, et que, par votre intercession, elle mérite la grâce du Soleil qu'elle a véritablement aimé par dessus tout, et qu'elle a orné, en le revêtant d'une robe de gloire, et en lui mettant sur la tête une couronne de beauté. Vous êtes pleine de grâces, pleine de la rosée du ciel, appuyée sur votre bien-aimé et comblée de délices. Nourrissez aujourd'hui vos pauvres, ô vous Notre Dame; que les petits chiens eux-mêmes mangent des miettes de la table du Maître, et, de votre vase qui déborde, donnez à boire non seulement au serviteur d'Abraham, mais encore à ses chameaux, Car c'est vous qui êtes, en vérité, la fiancée choisie et préparée pour le Fils du Très-Haut, qui est Dieu et béni par dessus tout dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

    (1) Sed forte quis dicat: Nunquid non eum praescierat moriturum ?
    - Et indubitanter.
    Numquid non sperabat continuo resurrecturum ?
    - Et fidenter.
    Super haec doluit crucifixum ?
    - Et vehementer.

    (2) Ille etiam mori corpore potuit,
         ista commori corde non potuit ?

  • Dans l’octave de l’Assomption

    Lecture des matines : extraits du début et de la fin du premier sermon de saint Bernard sur l’Assomption.

    En montant aujourd'hui dans les cieux, la glorieuse Vierge a certainement porté à son comble la joie des citoyens du ciel. Car elle n'est rien moins que celle dont la voix fit tressaillir de joie, dans les entrailles d'une mère qu'elle a saluée, l'enfant qui y était encore enfermé. Si l'âme d'un enfant qui n'était pas encore né s'est fondue de bonheur à sa voix, quelle ne dut pas être l’allégresse des esprits célestes quand ils eurent le bonheur d'entendre sa voix, de contempler son visage, de jouir de sa présence bienheureuse ?

    Mais qui pourra se faire une juste idée de la gloire au sein de laquelle la reine du monde s'est avancée aujourd'hui, de l'empressement plein d'amour avec lequel toute la multitude des légions célestes s'est portée à sa rencontre ; au milieu de quels cantiques de gloire elle a été conduite à son trône, avec quel visage paisible, quel air serein, quels joyeux embrassements elle a été accueillie par son Fils, élevée par lui au-dessus de toutes les créatures avec tout l'honneur dont une telle mère est digne, et avec toute la pompe et l'éclat qui conviennent à un tel Fils ?

    Sans doute, les baisers que la Vierge mère recevait des lèvres de Jésus à la mamelle, quand elle lui souriait sur son sein virginal, étaient pleins de bonheur pour elle, mais je ne crois pas qu'ils l'aient été plus que ceux qu'elle reçoit aujourd'hui du même Jésus assis sur le trône de son Père, au moment heureux où il salue son arrivée, alors qu'elle monte elle-même à son trône de gloire, en chantant l'épithalame et en disant : « Qu'il me baise d'un baiser de sa bouche. » Qui pourra raconter la génération du Christ et l'Assomption de Marie ? Elle se trouve dans les cieux comblée d'une gloire d'autant plus singulière que, sur la terre, elle a obtenu une grâce plus insigne que toutes les autres femmes.

    • La dernière phrase est un des innombrables "isocolons" qu'affectionne saint Bernard: une phrase en deux ou trois parties (parfois davantage) de construction analogue avec des mots et des sonorités qui se répondent:

    Quantum enim gratiæ in terris adepta est præ cæteris
    tantum et in cælis obtinet gloriæ singularis

    • On peut remarquer qu’il y a trois fois le mot « aujourd’hui » dans les passages retenus par la liturgie. Dans le sermon entier, il y a sept fois le mot aujourd’hui, et ce n’est évidemment pas un hasard. Il s’agit pour saint Bernard de souligner l’actualité du mystère que l’on célèbre. La liturgie rend les mystères présents. Aujourd’hui. Il le dit sept fois parce que c’est le chiffre de la perfection, de l’achèvement. C’est pourquoi on célèbre la fête pendant sept jours, et que le huitième reprend le premier, comme le dimanche de la Résurrection est le huitième jour qui reprend le dimanche de la Création et fait entrer la création dans l’éternité. L'invitatoire des matines comporte lui aussi un "aujourd'hui", hodie, qui se dit neuf fois chaque nuit de l'octave en refrain du psaume 94. Enfin, l'antienne de Magnificat, tous les soirs, dit également "aujourd'hui" : Hódie María Virgo cælos ascéndit : gaudéte, quia cum Christo regnat in ætérnum.

    Deuxième répons :

    ℟. Beáta es, Virgo María, Dei Génitrix, quæ credidísti Dómino : perfécta sunt in te quæ dicta sunt tibi : ecce exaltáta es super choros Angelórum : * Intercéde pro nobis ad Dóminum Deum nostrum. ℣. Ave María, grátia plena ; Dóminus tecum. * Intercéde pro nobis ad Dóminum Deum nostrum.

    Vous êtes bienheureuse, Vierge Marie, Mère de Dieu, vous qui avez cru au Seigneur ; car ce qui vous a été dit, s’accomplira en vous : voici que vous êtes exaltée au-dessus des chœurs des Anges : * Intercédez pour nous auprès du Seigneur notre Dieu. Je vous salue, Marie, pleine de grâce, le Seigneur est avec vous. Intercédez pour nous auprès du Seigneur notre Dieu.

  • Dans l’octave de l’Assomption

    Suite du sermon de saint Jean Damascène (propos de Juvénal, archevêque de Jérusalem, selon l’Histoire euthymiaque III, 40) :

    Nous tenons d'une tradition ancienne et très véridique qu'au moment de sa glorieuse dormition, tous les saints Apôtres, qui parcouraient la terre pour le salut des nations, furent assemblés en un instant par la voie des airs à Jérusalem. Quand ils furent près d'elle, des anges leur apparurent dans une vision, et un divin concert des puissances supérieures se fit entendre. Et ainsi, dans une gloire divine et céleste, la Vierge remit aux mains de Dieu sa sainte âme d'une manière ineffable. Quant à son corps, réceptacle de la divinité, il fut transporté et enseveli, au milieu des chants des anges et des Apôtres, et déposé dans un cercueil à Gethsémani, où pendant trois jours persévéra sans relâche le chant des chœurs angéliques. Après le troisième jour, ces chants ayant cessé, les Apôtres présents ouvrirent le cercueil à la demande de Thomas qui seul avait été loin d'eux, et qui, venu le troisième jour, voulut vénérer le corps qui avait porté Dieu. Mais son corps digne de toute louange, ils ne purent aucunement le trouver; ils ne trouvèrent que ses vêtements funèbres déposés là, d'où s'échappait un parfum ineffable qui les pénétrait, et ils refermèrent le cercueil. Saisis d'étonnement devant le prodige mystérieux, voici seulement ce qu'ils pouvaient conclure : celui qui dans sa propre personne daigna s'incarner d'elle et se faire homme, Dieu le Verbe, le Seigneur de gloire, et qui garda intacte la virginité de sa Mère après son enfantement, celui-là avait voulu encore, après son départ d'ici-bas, honorer son corps virginal et immaculé du privilège de l'incorruptibilité, et d'une translation avant la résurrection commune et universelle.

    Etaient présents alors avec les Apôtres, le saint apôtre Timothée, premier évêque d'Ephèse, et Denys l'Aréopagite, comme lui-même, le grand Denys, dans ses discours adressés au susdit apôtre Timothée, au sujet du bienheureux Hiérothée, lui-même alors présent, en témoigne en ces termes:

    « Même auprès de nos pontifes inspirés, en effet, lorsque nous-mêmes, comme tu le sais, et lui et beaucoup de nos saints frères, nous nous réunîmes pour contempler le corps qui fut principe de vie, en présence aussi de Jacques, frère du Seigneur, et de Pierre, la plus haute et la plus ancienne autorité des théologiens, et lorsqu'on décida, après cette contemplation, que chacun de tous les pontifes célébrerait selon son pouvoir la bonté infinie de la puissance divine. »

    Premier répons :

    ℟. Ornátam monílibus filiam Jerúsalem Dóminus concupivit : * Et vidéntes eam fíliæ Sion, beatíssimam prædicavérunt, dicéntes : Unguéntum effúsum nomen tuum. ℣. Astitit regína a dextris tuis in vestítu deauráto, circúmdata varietáte. * Et vidéntes eam fíliæ Sion, beatíssimam prædicavérunt, dicéntes : Unguéntum effúsum nomen tuum.

    Le Seigneur a aimé la fille de Jérusalem, parée de colliers : Et les filles de Sion, la voyant, l’ont proclamée la plus heureuse, disant : C’est un parfum répandu que votre nom. La reine s’est tenue debout à votre droite, dans un vêtement d’or, couverte d’ornements variés. Et les filles de Sion, la voyant, l’ont proclamée la plus heureuse, disant : C’est un parfum répandu que votre nom.

    (Cantique des cantiques et psaume 44)