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Liturgie - Page 101

  • Samedi Saint

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    L’icône byzantine du Christ au tombeau (celle-ci est crétoise, du XVe siècle) le représente curieusement debout dans le tombeau, mais manifestement mort (les yeux fermés), avec la Croix derrière lui.

    Cette icône est intitulée « Extrême humilité », c’est-à-dire extrême abaissement : c’est le degré le plus bas de la kénose avant la Résurrection.

    Elle est parfois appelée « Roi de gloire », car telle est l’inscription sur la Croix : ΟΒCΛΤΔΞ : abréviation de ὁ βασιλεὺς τῆς δόξης, le roi de gloire en grec.

    L’expression renvoie au psaume 23 :

    Portes, que vos princes vous lèvent ; ouvrez-vous, portes éternelles, et le Roi de gloire entrera.

    Quel est donc le Roi de gloire ? C'est le Seigneur fort et puissant, le Seigneur puissant au combat.

    Princes, levez vos portes ; ouvrez-vous, portes éternelles, et le Roi de gloire entrera.

    Quel est donc ce Roi de gloire ? C'est le Dieu des vertus, c'est lui qui est le Roi de gloire.

    Ce sera cette nuit le dialogue entre le prêtre revenant de la proclamation de la Résurrection, frappant à la porte de l’église, et des représentants des enfers à l’intérieur de l’église.

    Alors que les stigmates de la Passion sont très visibles et que le Seigneur est mort, la gloire apparaît déjà par le fond or et par l’or répandu sur le corps du Christ lui-même.

    Sur certaines icônes on voit de part et d’autre du Christ la lance et l’éponge, comme sur l’icône de la Crucifixion, sur d’autres on voit la Mère de Dieu. (Parfois avec saint Jean de l’autre côté, comme pour la Crucifixion.)

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    L’icône de l’extrême humilité a inspiré des œuvres occidentales notamment au XVe siècle, avant qu’elle ne soit plus comprise et que le Christ soit montré ressuscitant de ce même tombeau...

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    (Botticelli)

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    (Cloitre de Saint-Sernin, Toulouse)

  • Vendredi Saint

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    En haut Dieu le Père (Gospod Savaof : Seigneur Sabaoth), qui lève la main pour bénir.

    En dessous, deux anges, les mains couvertes d’un linge en signe de révérence. Entre les deux anges l’inscription Anges du Seingeur (Angeli Gospodi). Entre les anges, le Saint-Esprit sous forme de colombe. Sous les anges l’inscription « Roi de gloire » (Tsar Slavui) s’adressant au Christ.

    Puis il y a le titulus de la Croix : I Н Ц И. Théoriquement ce devrait être ИНЦИ, I.N.TS.I, qui sont les initiales de Isus Nazoryanin’ Tsar Iudeiskiy. Mais la confusion entre И et I fait que l’on voit différentes configurations.

    Dans la croix du nimbe, les lettres grecques ὁ ὢν : ho on, Celui qui est. (Caractérise des icônes du Christ.)

    Au-dessus de la barre horizontale de la croix, à gauche IC, à droite XC : Jésus-Christ, et entre les deux SN BJI : abréviation de Suin Bojiy : Fils de Dieu. A gauche le soleil (Slontse), à droite la lune (Luna). Sur les icônes peintes le soleil est sombre (éclipse de la sixième heure), la lune est rouge, selon Actes 2,20 citant Joël (Le soleil sera changé en ténèbres, et la lune en sang), et Apocalypse 6,12 (Il y eut un grand tremblement de terre, et le soleil devint noir comme un sac de crin, et la lune entière devint comme du sang.)

    Sous la barre horizontale de la Croix le tropaire : « Nous adorons ta croix, Seigneur, et nous glorifions ta sainte résurrection. »

    De chaque côté du Christ une longue ligne : à gauche la lance avec la lettre K (kopie), à droite le roseau et l’éponge, avec la lettre T (trost).

    Au-dessus de la barre où reposent les pieds, les lettres NI KA (НИ КА), le mot grec νίκᾳ qui veut dire « il vainc », que l’on voit aussi sur le pain qui sera consacré dans la divine liturgie. Intéressante interprétation des vieux croyants qui voient dans ces lettres les initiales slaves de « Sauve-nous avec le sang d’Adam » (Nas Iskupi Kroviu Adamova).

    Cette barre est penchée : du côté de la main droite du Christ on monte vers le ciel, du côté de sa main gauche on descend en enfer.

    Des bâtiments y sont généralement représentés : image de Jérusalem.

    Sous les pieds du Christ, les lettre M L puis R B : Mesto Lobnoe Rai Buist : Le lieu du Crâne devint le Paradis. En dessous : le crâne d’Adam, encadré des lettres G A (Г А) : Golova Adama, le crâne d’Adam. On peut trouver aussi en dessous Г Г : G G, Gora Golgofui : la colline du Golgotha.

    En général il y a aussi des inscriptions au revers du crucifix, parfois longues.

    La croix de bronze peut être incluse dans une icône peinte, où l’on voit sainte Marie-Madeleine, la Mère de Dieu, saint Jean et « saint Longin le Centurion ». Il peut y avoir en haut, comme ici, un chérubin (rouge) et un séraphin (bleu).

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    Les personnages peuvent se trouver aussi sur une croix de bronze élargie :

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  • Jeudi Saint

    Nos autem gloriári opórtet in Cruce Dómini nostri Iesu Christi : in quo est salus, vita et resurréctio nostra : per quem salváti et liberáti sumus.
    Deus misereátur nostri, et benedícat nobis : illúminet vultum suum super nos, et misereátur nostri.

    Il faut que nous nous glorifiions dans la croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ ; en qui est notre salut, notre vie et notre résurrection, et par qui nous avons été sauvés et délivrés.
    Que Dieu ait pitié de nous et qu’il nous bénisse ; qu’il fasse luire sur nous la lumière de son visage et qu’il nous fasse miséricorde.

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    Les introïts du mardi, du mercredi et du jeudi de la Semaine Sainte parlent de la sainte croix, mais soulignent aussi la glorification du Crucifié. Avant que le Sauveur ne descende dans les profondeurs de sa Passion et de ses affronts, avant que le flot des douleurs n'éclate sur lui, il se tient devant nous dans toute sa splendeur.

    Le texte de cet introït pourrait bien inspirer un chant de triomphe et de victoire, suscitant l'enthousiasme et avançant sur un rythme vif. Mais tel n'est pas le cas. Il semble que le compositeur, avant d'écrire son chant, ait médité avec une tendre sympathie sur la Passion sacrée et qu'il se soit rendu compte que pour beaucoup tout cela serait en vain. C'est avec des larmes de compassion dans les yeux qu'il a commencé à chanter cette tendre mélodie, rendue presque triste par l'intervalle de demi-ton trois fois répété, le Nos autem.

    Un sentiment similaire s'éveille si nous répondons à la question : Qui sont donc les autres ? comme le laissent entendre les premiers mots : "Mais il nous appartient". L'Apôtre a déjà dit que la croix est une folie pour les païens et un scandale pour les Juifs, mais comment est-elle considérée à l'heure actuelle ? Les blasphèmes des modernes doivent nous remplir d'indignation et de douleur et, avec une profonde sympathie pour notre Amour blessé, nous nous efforcerons de sonder la mélodie de Nos autem. Si nous nous demandons alors quelle est notre relation avec le Crucifié, comment nous considérons en pratique la croix que Dieu nous a imposée, alors nous chanterons, non pas avec arrogance, mais humblement et modestement : Nos autem.

    La tierce majeure sur oportet n'est pas sans but. Ici, c’est comme si la sainte croix s'élevait lentement devant nous ; avec nostri, elle se dresse devant nous dans toute sa gloire ; la croix de notre Seigneur. Comme la mélodie monte progressivement, le crescendo doit aussi croître, jusqu'à atteindre sa plus grande ardeur avec nostri. Il faut veiller tout particulièrement à ce que ce do élevé ne soit pas chanté sans préparation, ni brut, ni froid, ni anguleux, comme l'étaient les poutres de la croix sur le Golgotha.

    La deuxième phrase développe et confirme le thème annoncé dans la première phrase. Le sang humain qui rougit le tronc de la croix est devenu pour beaucoup le breuvage du « salut », apportant une vie nouvelle et le courage et la force de vaincre la tristesse, le malheur et la mort. De lui émane la vie éternelle, bénie et glorifiée. Dans la mélodie, la seconde moitié de la première phrase est répétée.

    Textuellement, la phrase finale forme un parallèle avec la deuxième phrase. Ici, comme auparavant sur autem et souvent dans le plain-chant, la tristropha sert à mettre en relief le mot suivant : salvati - « nous sommes sauvés ». Liberati répète le motif de resurrectio, auquel (glo)-riari et autem sont également liés. Avec un amour évident, le compositeur s'attarde sur sumus, tout comme il a donné à nostri et nostra une prééminence mélodique.

    Le verset du psaume, avec son si un peu dur après l'usage exclusif du si bémol dans l'antienne, est un cri de miséricorde, d'illumination et de bénédiction, afin que les mystères de la croix, ses souffrances et son amour nous soient révélés.

    À la fin des temps, la croix apparaîtra dans les nuages du ciel. Pour ceux qui ont courageusement pris leur croix et suivi le Crucifié, pour ceux qui, en sacrifiant tout, ont servi les intérêts du Crucifié, cette croix sera un bienfait. Alors, en effet, la croix et le Crucifié, dans le sens le plus complet, seront leur salut, leur vie, leur résurrection ; alors, la demande du verset du psaume deviendra un chant d'action de grâce jubilatoire. Tu as eu pitié de nous. Maintenant, ton visage glorieux brille sur nous et, submergés par la joie, nous contemplons les profondeurs de ton amour rédempteur.

    Dom Dominic Johner

  • Mercredi Saint

    Préface du missel ambrosien, citée et traduite par dom Guéranger :

    Dignum et justum est, æquum et salutare, nos tibi semper hic et ubique gratias agere, Domine sancte, Pater omnipotens, æterne Deus, per Christum Dominum nostrum, qui innocens pro impiis voluit pati, et pro sceleratis indebite condemnari. Cujus mors delicta nostra detersit, et resurrectio Paradisi fores nobis reseravit. Per quem tuam pietatem suppliciter exoramus : ut nos hodie a peccatis emacules ; cras vero venerabilis Cœnæ dapibus saties ; hodie acceptes nostrorum confessionem delictorum : cras vero tribuas spiritualium incrementa donorum ; hodie jejuniorum nostrorum vota suscipias : cras vero nos ad sanctissimæ Cœnæ convivium introducas. Per eumdem Christum Dominum nostrum. Amen.

    Il est digne et juste, équitable et salutaire, que nous vous rendions grâces, sans cesse, ici et en tout lieu, Seigneur saint, Père tout-puissant, Dieu éternel, par Jésus-Christ notre Seigneur qui a daigné souffrir, quoique innocent, pour les impies, et être injustement condamné pour les coupables. C’est sa mort qui a effacé nos péchés, et sa résurrection qui nous a ouvert les portes du Paradis. C’est en son nom que nous supplions votre miséricorde de nous purifier aujourd’hui de la tache de nos péchés, et demain de nous rassasier du mets sacré de l’auguste Cène. Acceptez aujourd’hui la confession de nos fautes : demain accordez-nous l’accroissement des dons spirituels. Aujourd’hui vous recevez le sacrifice de nos jeûnes : demain introduisez-nous dans la salle du divin festin. Par le même Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.

  • Mardi Saint

    ℟. Contumélias et terróres passus sum ab eis, qui erant pacífici mei, et custodiéntes latus meum, dicéntes : Decipiámus eum, et prævaleámus illi : sed tu, Dómine, mecum es tamquam bellátor fortis. * Cadant in oppróbrium sempitérnum, ut vídeam vindíctam in eis, quia tibi revelávi causam meam.

    . Júdica, Dómine, causam ánimæ meæ, defénsor vitæ meæ.

    ℟. Cadant in oppróbrium sempitérnum, ut vídeam vindíctam in eis, quia tibi revelavi causam meam

    J’ai subi outrages et terreurs de la part de ceux qui étaient mes gens de paix, et qui gardaient mon côté, en disant : Trompons-le, et prenons sur lui le dessus ; mais vous, Seigneur, vous êtes avec moi comme un vaillant guerrier. Qu’ils tombent en éternel opprobre, et que je voie sur eux la sanction, car c’est à vous que j’ai révélé ma cause.

    Jugez, Seigneur, la cause de mon âme, défenseur de ma vie.

    Qu’ils tombent en éternel opprobre, et que je voie sur eux la vengeance, car c’est à vous que j’ai révélé ma cause.

    Tel est le premier répons des matines de ce jour. Il est pris de Jérémie 20, 10-12. En réalité il est formé de mots et d’expressions repris de ce texte, que voici avec en gras ce qui se trouve dans le répons, ou a été adapté.

    Audivi enim contumelias multorum, et terrorem in circuitu : Persequimini, et persequamur eum, ab omnibus viris qui erant pacifici mei, et custodientes latus meum : si quomodo decipiatur, et prævaleamus adversus eum, et consequamur ultionem ex eo.

    Dominus autem mecum est, quasi bellator fortis : idcirco qui persequuntur me cadent, et infirmi erunt : confundentur vehementer, quia non intellexerunt opprobrium sempiternum, quod numquam delebitur.

    Et tu, Domine exercituum, probator justi, qui vides renes et cor, videam, quæso, ultionem tuam ex eis : tibi enim revelavi causam meam.

    Car j’ai entendu les outrages d’un grand nombre, et la terreur de toutes parts : Poursuivez-le, et nous le poursuivrons. Tous les hommes qui étaient en paix avec moi, et qui étaient sans cesse à mes côtés, s’entredisent : Si on peut le tromper de quelque manière, ayons l’avantage sur lui, et tirons vengeance de lui.

    Mais le Seigneur est avec moi comme un guerrier puissant ; c’est pourquoi ceux qui me persécutent tomberont et seront sans force ; ils seront couverts de confusion, parce qu’ils n’ont pas compris l’opprobre éternel qui ne s’effacera jamais.

    Et vous, Seigneur des armées, qui éprouvez le juste, qui voyez les reins et les cœurs, faites-moi voir, je vous prie, votre vengeance sur eux ; car c’est à vous que j’ai révélé ma cause.

    Le verset est pris quant à lui des Lamentations de Jérémie, 3,58, avec une modification du temps du verbe, et avec defensor au lieu de redemptor. (Substitution a priori curieuse, car on aurait plutôt vu l'inverse: la liturgie donnant le sens chrétien du texte prophétique. Mais il faut se souvenir que c'est le Christ qui parle dans sa Passion. Il s'adresse au Père qui est son défenseur et non son rédempteur.)

    Judicasti, Domine, causam animæ meæ,redemptor vitæ meæ.

    Vous avez jugé, Seigneur, la cause de mon âme, rédempteur de ma vie.

    (Le sens de judicare est ici comme souvent dans les psaumes « rendre justice à ».)

  • La dictature Bergoglio

    Communiqué de Paix liturgique :

    Nous avons noté que, malgré les rumeurs qui l’annonçaient, le mois de mars a passé sans qu’aucun document ne soit publié par les Congrégations romaines concernant la messe traditionnelle. Mais nous avons eu confirmation par le nonce apostolique lui-même, que ce qui était recherché par Rome était de conduire les fidèles encore attachés à la messe traditionnelle à rejoindre la « communion », c’est-à-dire la pratique de la réforme. Nous avons eu par ailleurs l’information que tous les jeunes prêtres diocésains, dont les évêques transmettaient à la Congrégation pour le Culte divin une demande d’autorisation de célébrer la messe traditionnelle se voyaient opposer un refus sur ordre formel du pape.

     

  • Lundi saint

    Erubéscant et revereántur simul, qui gratulántur malis meis : induántur pudóre et reveréntia, qui malígna loquúntur advérsus me.

    Qu’ils rougissent et soient confondus ceux qui se réjouissent de mes maux ; qu’ils soient couverts de honte et de confusion ceux qui m’accablent d’injures.

    Ainsi chante l’antienne de communion de la messe de ce jour. A priori on ne voit pas le rapport entre ce verset du psaume 34 et la communion qu’on vient de faire. C’est que nous sommes dans le temps de la Passion, et que ce temps est tout entier centré sur les souffrances du Christ. En ce temps, notre communion au corps du Christ est donc communion aux souffrances du Christ. Aucune autre intention ne doit la parasiter.

    C’était déjà le cas la semaine dernière, de façon très nette samedi :

    Ne tradíderis me, Dómine, in ánimas persequéntium me : quóniam insurrexérunt in me testes iníqui, et mentíta est iníquitas sibi.

    Ne me livrez pas ; Seigneur, à la merci de ceux qui me persécutent : des témoins iniques se sont élevés contre moi et l’iniquité a menti contre elle-même.

    Et de façon encore plus claire hier, où le calice eucharistique était le calice de la Passion :

    Pater, si non potest hic calix transíre, nisi bibam illum : fiat volúntas tua.

    Père, si ce calice ne peut passer sans que je le boive, que votre volonté soit faite.

  • Dimanche des Rameaux

    La messe romaine de ce jour est a priori en deux parties opposées. La première est une fête où l’on acclame le Seigneur qui entre à Jérusalem sous les vivats. La seconde est une poignante liturgie de déréliction. Il y a pourtant une profonde unité, et la première partie, qui est centrée sur le roi qui prend possession de sa capitale, informe la seconde : c’est la même personne qui va subir la Passion et être crucifiée. Il s’agit toujours du Roi. Et Jésus le dira lui-même à Pilate : il est le roi des juifs. Le trône de ce roi, ce sera la Croix. C’est en étant élevé sur la Croix que le Christ est glorifié. C’est sur la Croix qu’il est le Roi de gloire, alors qu’en apparence il est une loque humaine à l’agonie.

    Il y a dans la première partie de la messe de ce dimanche une très grande insistance sur la royauté du Christ. Dès les premiers mots : « Hosanna au fils de David ! Béni celui qui vient au nom du Seigneur. O Roi d’Israël ! Hosanna au plus haut des cieux. »

    Puis on chante le psaume 23 : « Elevez vos portes, princes, et vous, élevez-vous, portes éternelles : et le Roi de gloire entrera. Qui est ce roi de gloire ? … »

    Puis le psaume 46 : « Le Seigneur est élevé et terrible : c’est un grand Roi sur toute la terre. »

    L'évangile rappelle ce que disaient les prophètes: « Voici que ton roi vient à toi... »

    La quatrième antienne cite les acclamations selon saint Luc : « Béni soit le Roi qui vient au nom du Seigneur ! Paix sur terre et gloire au plus haut des cieux ! »

    Puis vient l’hymne… au Christ Roi : « Glória, laus et honor tibi sit, Rex Christe, Redémptor… »

    La 7e antienne chante : « Salut, notre Roi, Fils de David, Rédempteur du monde ! »

    Et la prière finale commence ainsi : « Seigneur Jésus-Christ, notre Roi et notre Rédempteur… »

    Ce n’est pas sans faire penser à l’Epiphanie, qui est la grande fête du Christ Roi. Or que se passe-t-il à l’Epiphanie ? Des mages viennent adorer Jésus et lui donner des présents : l’or, l’encens et la myrrhe. L’or parce qu’il est roi, la myrrhe parce qu’il va mourir : telle est la messe des Rameaux.

    Les mages offrent ces présents à un enfant. Un enfant que l’icône byzantine représente comme un mort enveloppé de bandelettes couché dans un cercueil.

    L’enfant est très présent aux Rameaux. En Orient c’est la fête des enfants, et la liturgie latine répète un grand nombre de fois l’antienne « Pueri Hebareorum » pendant la distribution des rameaux : « Les enfants des Hébreux, portant des branches d’olivier, allèrent au-devant du Seigneur ; ils criaient et disaient : Hosanna au plus haut des cieux. »

    En réalité aucun évangile ne le dit ainsi. Les évangiles parlent des disciples et de la foule. Et l’évangile de la procession des Rameaux s’arrête là. Mais si l’on continue à lire saint Matthieu on voit peu après les prêtres indignés d’entendre « des enfants criant dans le temple et disant Hosanna au Fils de David », et demandant à Jésus de les faire taire. Et Jésus répond : N’avez-vous jamais lu : De la bouche des enfants et des nourrissons tu as parfait la louange ? » C’est dans le psaume 8.

    Car « si vous ne devenez pas comme les petits enfants vous n’enterez pas dans le Royaume ».

    C’est sur la Croix que la louange sera parfaite, et que l’Enfant de la crèche, allant jusqu’au bout de la kénose, entrera en possession de son Royaume, le royaume éternel où il fera entrer ses frères devenus enfants des Hébreux.

    *

    Pueri Hebraeorum et psaume 23, par les moines de Silos :


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    Le texte est ici (« La distribution des rameaux »).

  • Samedi de la Passion

    Les ennemis du Sauveur sont arrivés à ce degré de fureur qui fait perdre le sens. Lazare ressuscité est devant leurs yeux ; et au lieu de reconnaître en lui la preuve incontestable de la mission divine de Jésus, et de se rendre enfin à l’évidence, ils songent à faire périr ce témoin irrécusable, comme si Jésus, qui l’a ressuscité une fois, ne pouvait pas de nouveau lui rendre la vie. La réception triomphale que le peuple fait au Sauveur dans Jérusalem, et dont la commémoration fera l’objet de la solennité de demain, vient encore accroître leur dépit et leur haine. « Nous n’y gagnons rien, disent-ils ; tout le monde va après lui. » Hélas ! Cette ovation d’un moment sera promptement suivie d’un de ces retours auxquels le peuple n’est que trop sujet. En attendant, voici jusqu’à des Gentils qui se présentent pour voir Jésus. C’est l’annonce du prochain accomplissement de la prophétie du Sauveur : « Le royaume des cieux vous sera enlevé, pour être donné à un peuple qui en produira les fruits ». C’est alors que « le Fils de l’homme sera glorifié », que toutes les nations protesteront par leur humble hommage au Crucifié, contre l’affreux aveuglement des Juifs. Mais auparavant il faut que le divin « Froment soit jeté en terre, qu’il y meure » ; puis viendra le temps de la récolte, et l’humble grain rendra cent pour un.

    Jésus cependant éprouve dans son humanité un moment de trouble à la pensée de cette mort. Ce n’est pas encore l’agonie du jardin ; mais un frisson l’a saisi. Écoutons ce cri : « Père ! sauvez-moi de cette heure. » Chrétiens, c’est notre Dieu qui s’émeut de crainte, en prévoyant ce qu’il aura bientôt à souffrir pour nous. Il demande d’échapper à cette destinée qu’il a prévue, qu’il a voulue. « Mais, ajoute-t-il, c’est pour cela que je suis venu ; ô Père, glorifiez votre nom. » Son cœur est calme maintenant ; il accepte de nouveau les dures conditions de notre salut. Entendez aussi cette parole de triomphe. Par la vertu du sacrifice qui va s’offrir, Satan sera détrôné ; « ce prince du monde va être jeté dehors. » Mais la défaite de Satan n’est pas l’unique fruit de l’immolation de notre Sauveur ; l’homme, cet être terrestre et dépravé, va quitter la terre et s’élever jusqu’au ciel. Le Fils de Dieu, comme un aimant céleste, l’attirera désormais à soi. « Quand je serai élevé de terre, dit-il, quand je serai attaché à ma croix, j’attirerai tout à moi. » Il ne pense plus à ses souffrances, à cette mort terrible qui tout à l’heure l’effrayait ; il ne voit plus que la ruine de notre implacable ennemi, que notre salut et notre glorification par sa croix. Nous avons dans ces paroles le cœur tout entier de notre Rédempteur ; si nous les méditons, elles suffisent à elles seules pour disposer nos âmes à goûter les mystères ineffables dont est remplie la grande Semaine qui s’ouvre demain.

    Dom Guéranger

  • Vendredi de la Passion

    Les Pontifes et les Pharisiens délibéraient entre eux, mais ils ne disaient pas : Croyons en lui ; ces hommes pervers étaient bien plus préoccupés de la pensée de nuire à Jésus pour le perdre que des moyens d’éviter leur propre perte, et cependant ils craignaient et se consultaient. « Ils disaient : Que faisons-nous, car cet homme opère beaucoup de miracles ? Si nous le laissons ainsi, tous croiront en lui, et les Romains viendront et ruineront notre pays et notre nation. » Ils craignirent de perdre les biens temporels, et ils ne songèrent pas aux biens de la vie éternelle : c’est ainsi qu’ils perdirent les uns et les autres. (Temporália pérdere timuérunt, et vitam ætérnam non cogitavérunt, ac sic utrumque amisérunt.) En effet, après la passion et la glorification du Seigneur, les Romains leur enlevèrent leur ville qu’ils prirent d’assaut, et ruinèrent leur nation qu’ils emmenèrent en captivité. Ainsi se vérifia en eux cette prédiction : « Les enfants de ce royaume iront dans les ténèbres extérieures. » (…)

    « Mais l’un d’eux, nommé Caïphe, qui était le Pontife de cette année-là, leur dit : Vous n’y entendez rien, et vous ne pensez pas qu’il vous est avantageux qu’un seul homme meure pour le peuple, et non pas que toute la nation périsse. Or, il ne dit pas cela de lui-même ; mais étant le Pontife de cette année-là, il prophétisa. » Nous apprenons ici que même les hommes méchants peuvent, par l’esprit de prophétie, annoncer les choses à venir. Cependant l’Évangéliste attribue ce dernier fait à un mystère tout divin ; car, dit-il, « il était Pontife », c’est-à-dire grand prêtre. (…)

    Que prophétisa donc Caïphe ? « Que Jésus devait mourir pour la nation ; et non seulement pour la nation, mais aussi pour rassembler les enfants de Dieu qui étaient dispersés ». Ces derniers mots ont été ajoutés par l’évangéliste ; car Caïphe, dans sa prophétie, n’a parlé que de la nation juive, où se trouvaient ces brebis dont le Seigneur dit lui-même : « Je n’ai été envoyé que vers les brebis perdues de la maison d’Israël. » Mais l’évangéliste savait qu’il y avait d’autres brebis qui n’étaient pas de ce bercail, et qu’il fallait réunir, afin qu’il n’y eût qu’un seul bercail et un seul pasteur. Mais tout cela doit s’entendre par rapport à la prédestination ; car ceux qui n’avaient pas encore cru n’étaient encore ni les brebis ni les enfants de Dieu.

    « A partir de ce jour, ils pensèrent donc à le mettre à mort. C’est pourquoi. Jésus n’allait plus en public parmi les Juifs ; mais il s’en alla dans le pays qui est près du désert, en une ville appelée Ephrem, et là il demeurait avec ses disciples. » Le motif de sa conduite n’était point la disparition de sa puissance. Certes, s’il l’eût voulu, il aurait vécu publiquement au milieu des Juifs, et ils ne lui auraient fait aucun mal ; mais, dans cette faiblesse apparente de son humanité, il montrait à ses disciples l’exemple qu’ils devaient suivre : il leur prouvait que, pour les fidèles qui sont ses membres, il n’y aurait point de péché à se dérober aux yeux de leurs persécuteurs, et à éviter leur fureur criminelle, en se cachant, plutôt qu’à l’allumer davantage, en se présentant devant eux.

    Saint Augustin, fin du traité 49 sur saint Jean. Les deux premiers paragraphes sont la lecture des matines.