Ainsi sont démasqués tous ceux qui introduisent des doctrines impies sur Celui qui nous a faits et modelés, qui a créé ce monde et au-dessus duquel il n'est point d'autre Dieu; ainsi sont également réfutés, par des preuves en due forme, ceux qui enseignent des faussetés au sujet de l'être de notre Seigneur et au sujet de l'"économie" qu'il a accomplie à cause de l'homme, sa créature. A l'inverse, la prédication de l'Église présente à tous égards une inébranlable solidité, demeure identique à elle-même et bénéficie, ainsi que nous l'avons montré, du témoignage des prophètes, des apôtres et de tous leurs disciples, témoignage qui englobe "le commencement, le milieu et la fin", bref la totalité de l'"économie" de Dieu et de son opération infailliblement ordonnée au salut de l'homme et fondant notre foi. Dès lors, cette foi, que nous avons reçue de l'Église, nous la gardons avec soin, car sans cesse, sous l'action de l'Esprit de Dieu, telle un dépôt de grand prix renfermé dans un vase excellent, elle rajeunit et fait rajeunir le vase même qui la contient.
C'est à l'Eglise elle-même, en effet, qu'a été confié le "Don de Dieu (Jn 4,10)", comme l'avait été le souffle à l'ouvrage modelé (Gn 2,7), afin que tous les membres puissent y avoir part et être par là vivifiés; c'est en elle qu'a été déposée la communion avec le Christ, c'est-à-dire l'Esprit Saint, arrhes de l'incorruptibilité (Ep 1,14 2Co 1,22), confirmation de notre foi (Col 2,7) et échelle de notre ascension vers Dieu (Gn 28,12): car "dans l'Église, est-il dit, Dieu a placé des apôtres, des prophètes, des docteurs (1Co 12,28)" et tout le reste de l'opération de l'Esprit (1Co 12,11). De cet Esprit s'excluent donc tous ceux qui, refusant d'accourir à l'Eglise, se privent eux-mêmes de la vie par leurs doctrines fausses et leurs actions dépravées. Car là où est l'Église, là est aussi l'Esprit de Dieu; et là où est l'Esprit de Dieu, là est l'Église et toute grâce. Et l'Esprit est Vérité (1Jn 5,6). C'est pourquoi ceux qui s'excluent de lui ne se nourrissent pas non plus aux mamelles de leur Mère en vue de la vie et n'ont point part à la source limpide qui coule du corps du Christ (Ap 22,1 Jn 7,37-38), mais "ils se creusent des citernes crevassées (Jr 2,13)" faites de trous de terre et boivent l'eau fétide d'un bourbier: ils fuient la foi de l'Eglise de crainte d'être démasqués, et ils rejettent l'Esprit pour n'être pas instruits. Devenus étrangers à la vérité, il est fatal qu'ils roulent dans toute erreur et soient ballottés par elle, qu'ils pensent diversement sur les mêmes sujets suivant les moments et n'aient jamais de doctrine fermement établie, puisqu'ils veulent être sophistes de mots plutôt que disciples de la vérité.
(Adversus Haereses, livre III, 24)