L’ambassadeur de France à Budapest (photo du 14 juillet 2016) a envoyé le 18 juin dernier une note diplomatique au ministère des affaires étrangères et à la présidence de la République, où il fait l’éloge du gouvernement Orbán et fustige les médias français et anglo-saxons qui font de la désinformation sur ce pays.
La Hongrie est « un peu le Real Madrid du monde politique moderne », dit Eric Fournier, en référence au club de foot triple champion de la Ligue des champions. Halte à la « magyarophobie » de la presse ! La Hongrie est « un modèle ayant su anticiper les problèmes posés par les mouvements migratoires illégaux ».
Il dénonce « l'habitude intellectuelle » qu'ont « les médias anglo-saxons et français à qualifier de populiste tout régime élu démocratiquement mais ne correspondant pas à leur vision du monde ». Or « aucun autre gouvernement européen ne peut se prévaloir d'une triple victoire électorale consécutive avec deux tiers des suffrages ».
En agitant la menace de la procédure de l’article 7, la Commission européenne « cherche à faire payer à la Hongrie son discours critique », et aussi les récents amendements constitutionnels, dont celui qui stipule que toutes les institutions du pays doivent défendre la culture chrétienne : « Quoi de plus normal, a priori, de la part d’une nation qui continue depuis 1.018 ans de faire de saint Etienne l’un de ses pères fondateurs ? »
Quant aux accusations d’antisémitisme (par la campagne anti-Soros), c’est un « fantasme » de journalistes étrangers, et aussi un moyen de faire diversion quant au « véritable antisémitisme moderne » qui est « le fait des musulmans de France et d’Allemagne ».
La note, évidemment confidentielle, a été révélée hier par Mediapart. Le Quai d’Orsay en a confirmé l’existence, soulignant que ces propos « ne reflètent nullement la position des autorités françaises », mais relèvent au contraire d’« un commentaire non sollicité et malvenu de son auteur, auquel il a été fermement rappelé la nécessité d’une expression précise et mesurée, dans le strict champ de ses compétences ».
Emmanuel Macron a été interrogé à ce sujet lors de sa conférence de presse à l’issue du sommet européen. Il a répondu lui aussi que la note ne correspondait « en rien à la position officielle française », ce qu’on avait remarqué. Il a ajouté : « Si une preuve m’était apportée que de tels propos aient été tenus publiquement, alors cet ambassadeur serait révoqué. » Mais, soulignant qu’il s’agissait d’une note confidentielle exprimant une opinion personnelle, il a conclu : « Est-ce qu'il appartient à l'autorité de révoquer un ambassadeur parce qu'il dit ce qu'il pense ? Je ne le crois pas, ou alors nous créerions un délit d'opinion dans la fonction publique. »
Addendum
Macron vient de le virer, par un décret daté du 28 juin (la veille de sa réponse aux journalistes). Macron est donc un fieffé menteur. Ou plutôt : il a donc créé un délit d'opinion dans la fonction publique.
On voit aussi que Edwy Plenel poursuit avec constance son travail de corbeau, qu'il commença il y a 36 ans au Monde quand ce "journaliste d'investigation" était informé directement par le ministère de l'Intérieur.