Dieu lui-même, qui avait ordonné dans la loi qu’on lui offrît les prémices, s’étant fait homme, demanda aussi les prémices des peuples. Les bergers furent les prémices des Juifs ; les Mages devinrent les prémices des Gentils. Ceux-là sont attirés de près, ceux-ci amenés de loin. « Où est, disent-ils, celui qui est né Roi des Juifs ? » Hérode, roi des Juifs, avait déjà des fils. Archélaos était né dans un palais ; le Christ, dans un logis qui ne lui appartenait pas. Archélaos, à sa naissance, fut couché dans un lit d’argent ; mais le Christ nouveau-né est déposé dans une crèche étroite : et cependant on néglige celui qui est né dans un palais, et l’on recherche celui qui est né sous un abri emprunté. Les Mages ne nomment même pas le premier ; mais, ayant trouvé le second, ils se prosternent et l’adorent.
Quel est donc ce Roi des Juifs ? Il est pauvre et riche, humble et grand. Quel est donc, ce Roi des Juifs que l’on porte comme un enfant, et que l’on adore comme un Dieu (portatur ut parvulus, adoratur ut Deus) ? Il est petit dans la crèche, immense dans le Ciel (parvus in praesepio, immensus in coelo) : vil dans les langes, et glorieusement manifesté dans le firmament (vilis in pannis, pretiosus in stellis).
O Hérode, pourquoi te troubler ainsi ? Ce roi qui est né, ne vient pas pour vaincre les rois en leur faisant la guerre ; mais il va les subjuguer d’une manière merveilleuse, en mourant. II n’est pas né pour te succéder ; mais pour que le monde croie fidèlement en lui. Il vient, non pour combattre durant sa vie ; mais pour triompher par sa mort.
Cet enfant que les Mages appellent en ce moment le Roi des Juifs, est aussi le Créateur et le Seigneur des Anges. Si tu crains l’enfance muette de ce nouveau-né, tu dois redouter bien davantage sa toute-puissance pour le jour où il sera ton Juge. Ne le crains pas comme un successeur à ton trône, mais redoute en lui le juste Juge qui condamnera ton infidélité. « Allez, leur dit-il, et puis venez me rapporter ce que vous aurez trouvé, afin que moi aussi, j’aille l’adorer. » O ruse artificieuse ! ô incrédulité impie ! ô perversité hypocrite ! Le sang des Innocents que tu as si cruellement répandu, atteste ce que tu voulais faire de cet enfant.
Saint Fulgence, lecture des matines avant la suppression de l’octave de l’Epiphanie.