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Liturgie - Page 307

  • Sainte Lucie

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    Dans le premier quart du VIe siècle, lorsque Théodoric, à Ravenne, sur les parois de l'église de Saint-Martin in Caelo Aureo, — actuellement Sant'Apollinare Nuovo, — associait au triomphe du Christ le cortège des martyrs et des vierges, Lucie s'élevait de la terre, ou bien descendait du ciel, pour prendre rang, entre Crispine et Cécile, dans la pompe glorieuse, sous un ruissellement d’or et de pierreries ; et d'en bas les fidèles la voyaient porter au Seigneur sa couronne votive, dans un appareil de gloire qui symbolisait pour leurs yeux terrestres la véritable beauté de la « fille du roi », la beauté dont l'Ecriture disait qu’« elle planait, somptueuse, sur la foule des croyants ».

    Avant que le VIe siècle ne touchât à son terme, le pape saint Grégoire le Grand, dans son remaniement du canon de la messe, allait la rapprocher d'eux. Le sacramentaire et l'antiphonaire de Grégoire contenaient des textes liturgiques pour la fête de sainte Lucie ; mais il ne voulut pas que le 13 décembre et la vigile du 13 fussent les seuls jours où l'Eglise la nommât à Dieu. De par la prescription de Grégoire, Agathe et Lucie, les deux vierges martyres de Syracuse, figurèrent nominalement, dans les prières du canon de la messe, après les martyres d'Afrique, avant les martyres de Rome, parmi les élues dont les pécheurs de la terre devaient aspirer à connaître un jour la « société» ; et désormais, devant toutes les hosties immolées sur tous les autels, le nom de Lucie dut être liturgiquement prononcé, dans les minutes recueillies qui succèdent à la consécration.

    Il trouva place, aussi, à côté de celui d’Agathe, dans un document d’une vénérable ancienneté : les Litanies des saints. Enfin les Litanies des agonisants, dont nous saisissons la trace dès le XIe siècle, conjurèrent et conjurent quotidiennement sainte Lucie d'assister et de protéger une à une, au moment du passage suprême, les âmes chrétiennes appelées à quitter leur enveloppe terrestre pour le décisif tête-à-tête avec Dieu. Tant au pied de l'autel que sur le lit d'agonie, les rites mêmes de l'Eglise faisaient ainsi rayonner la gloire de Lucie, pour qu'à l'ombre même de ce rayonnement se blottît tout ce qui portait le nom de chrétien, avec le même espoir, avec le même amour qu'Euskia la « bien ombragée ».

    Ce texte, de Georges Goyau, est la suite de celui que j’avais reproduit en 2013, sur la pierre tombale d’Euskia, découverte en 1894, et prouvant aux pauvres historiens rationalistes que le culte de sainte Lucie existait déjà à la fin du IVe siècle.

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  • Lundi de la troisième semaine de l’Avent

    Les antiennes de cette semaine.

    Veniet Dominus, et non tardabit, et illuminabit abscondita tenebrarum, et manifestabit se ad omnes gentes, alleluia.

    Le Seigneur viendra et il ne tardera pas, et il illuminera ce qui est caché dans les ténèbres, et il se manifestera à toutes les Nations, alléluia.

    Jerusalem, gaude gaudio magno, quia veniet tibi Salvator, alleluia.

    Jérusalem, réjouis-toi d’une grande joie, parce qu’un Sauveur viendra à toi, alléluia.

    Dabo in Sion salutem, et in Ierusalem gloriam meam, alleluia.

    J’établirai dans Sion le salut, et dans Jérusalem ma gloire, alléluia.

    Montes et omnes colles humiliabuntur: et erunt prava in directa, et aspera in vias planas: veni, Domine, et noli tardare, alleluia.

    Les montagnes et toutes les collines seront abaissées ; les chemins tortueux seront redressés, et les raboteux deviendront des voies aplanies : venez, Seigneur, et ne tardez pas, alléluia.

    Juste et pie vivamus, exspectantes beatam spem, et adventum Domini.

    Vivons justement et pieusement, attendant la bienheureuse espérance et l’avènement du Seigneur.

    Capitule des laudes au temps de l’Avent :

    Venite et ascendamus ad montem Domini et ad domum Dei Jacob, et docebit nos vias suas et ambulabimus in semitis ejus, quia de Sion exibit lex et verbum Domini de Jerusalem.

    Venez et montons à la montagne du Seigneur et à la maison du Dieu de Jacob, et il nous enseignera ses voies, et nous marcherons dans ses sentiers, parce que de Sion sortira la loi, et la parole du Seigneur, de Jérusalem.

    L’antienne de Benedictus de ce jour :

    Egredietur virga de radice Jesse, et replebitur omnis terra gloria Domini: et videbit omnis caro salutare Dei.

    Il sortira un rejeton de la racine de Jessé, et toute la terre sera remplie de la gloire du Seigneur, et toute chair verra le salut de Dieu.

    Capitule des vêpres au temps de l’Avent :

    Non auferetur sceptrum de Juda et dux de femore ejus donec veniat qui mittendus est et ipse erit exspectatio gentium.

    Le sceptre ne sera pas ôté de Juda, ni le prince de sa postérité, jusqu’à ce que vienne celui qui doit être envoyé, et lui-même sera l’attente des nations.

    L’antienne de Magnificat de ce jour :

    Beatam me dicent omnes generationes quia ancillam humilem respexit Deus.

    Elles me diront bienheureuse, toutes les générations, parce que Dieu a regardé son humble servante.

  • 3e dimanche de l’Avent

    Introït

    Gaudéte in Dómino semper : íterum dico, gaudéte. Modéstia vestra nota sit ómnibus homínibus : Dóminus enim prope est. Nihil sollíciti sitis : sed in omni oratióne petitiónes vestræ innotéscant apud Deum.

    Benedixísti, Dómine, terram tuam : avertísti captivitátem Jacob.

    Commentaire de dom Ludovic Baron :

    LE TEXTE

    Réjouissez-vous dans le Seigneur toujours.
    Une fois de plus je le dis, réjouissez-vous.
    Que votre modestie (au sens de modération, de douceur) soit connue de tous les hommes.
    Le Seigneur est proche, que rien ne vous trouble ;
    Mais qu'en toute chose, par la prière,
    Vos demandes soient portées devant Dieu.

    Ps. - Tu as béni, Seigneur, la terre, tu as fait cesser la captivité de Jacob. Philip. IV, 4 - Ps. LXXXIV, 2.

    Il y a là trois conseils de Saint Paul : réjouissez-vous, soyez modestes, ne vous laissez pas dominer par les soucis ; et, au milieu, une sentence de trois mots : le Seigneur est proche. Cette sentence, la ponctuation du texte la rattache à ce qui précède : Réjouissez-vous, soyez modeste, le Seigneur est proche ; la ponctuation de la mélodie, elle, la rattache à ce qui suit : le Seigneur est proche, que rien ne vous trouble. Du point de vue de l'expression c'est la ponctuation de la mélodie qu'il faut suivre, il va de soi.

    Dans le cadre liturgique, Dominus prope est prend un sens nouveau. Par le fait qu'ils sont chantés au temps de l'Avent, ces trois mots ne se rapportent pas seulement au Seigneur, qui se tient tout proche, en nous et autour de nous et qui devrait, par sa présence, et ses relations avec nous, être la raison de notre joie, de notre douceur, de notre confiance abandonnée, mais au Seigneur qui vient, qui sera là sans tarder, dans la chair, dans la grâce ou dans la gloire. Ils deviennent ainsi l'idée centrale de tout le texte et en précisent l'interprétation. Il n'est plus une suite de conseils pour toutes circonstances mais une exhortation de l'Eglise à ses membres, les pressant de réaliser dès maintenant, la joie, la mansuétude, la confiance que la venue prochaine du Sauveur mettra dans les âmes.

    LA MÉLODIE

    Elle est une invitation à se réjouir, pénétrée elle-même de joie. Cette joie n'est pas une jubilation ; elle n'a pas d'éclat non plus. Elle est comme un courant de vie qui, discrètement, passe dans les mots et les phrases, les entraînant d'un mouvement régulier mais de plus en plus pressant jusqu'au nihil solliciti sitis du sommet où elle s'épanouit en une exhortation enthousiaste à laisser tout, pour entrer bientôt dans la jubilation de la grande allégresse qu'on dit de plus en plus proche.

    Le caractère progressif de cette pression joyeuse est très marqué dans la première phrase. Bien posée par la clivis épisématique et le quilisma, avec je ne sais quoi de ferme déjà dans ce départ recueilli, elle monte vers le sommet, entraînée par le salicus, les trois rythmes ternaires qui se suivent et l'accent tonique de semper, et, jusqu'en la thésis, garde cette force de volonté qui veut s'imposer : iterum dico. Même joie persuasive et même progression dans la seconde phrase. Le mouvement par une arsis forte et bien marquée - notez le salicus et le quilisma - va vers hominibus, sortant cette fois la mélodie de l'ambiance du ré pour l'établir en fa. C'est de là qu'elle repart pour l'enthousiaste montée de prope est et l'accent de nihil, admirable d'ardeur communicative. La détente se fait tout au long de la thésis qui vient rimer avec celle de la phrase précédente et ramène, pour la fin, la discrétion du début. C'est encore la période d'attente, et la joie, si elle doit dominer un instant les soucis, ne les enlève pas. Il faut les porter, sans la perdre ; d'où le conseil de la prière. Il est donné sur un ton qui ne manque pas de chaleur, avec le pressus de omni, le beau motif ascendant de oratione, la distropha de innotéscant ; mais qui revêt aussi la modération passible d'un avis pratique.

    Le Psaume, qui est comme la réponse du peuple à l'invitation qui lui est adressée, et bien servi par la formule toute joyeuse du 1er mode.

    Par le chœur grégorien portugais Solemnis :
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  • Samedi de la deuxième semaine de l’Avent

    C’est donc le dernier jour pour les antiennes de la deuxième semaine de l’Avent, inspirées d’Isaïe, Habacuc (la troisième) et de saint Luc (la première, qui renvoie aussi à Daniel).

    Ecce in núbibus cæli Dóminus véniet cum potestáte magna, allelúia.

    Voici que dans les nuées du ciel le Seigneur viendra avec une grande puissance, alléluia.

    Urbs fortitúdinis nostræ Sion, Salvátor ponetur in ea murus et antemurale: aperíte portas, quia nobíscum Deus, allelúia.

    Notre ville forte est Sion ; le Sauveur y sera mis comme mur et avant-mur. Ouvrez les portes, parce que Dieu est avec nous, alléluia.

    Ecce, apparebit Dóminus, et non mentiétur: si moram fécerit, exspécta eum, quia véniet, et non tardabit, allelúia.

    Voici que paraîtra le Seigneur et il ne trompera pas ; s’il met un délai, attends le, car il viendra et il ne tardera pas, alléluia. 

    Ecce, Dóminus noster cum virtúte véniet, et illuminabit óculos servórum suórum, allelúia.

    Voici que notre Seigneur viendra avec puissance et illuminera les yeux de ses serviteurs, alléluia.

  • Verbum supernum prodiens

    Verbum supérnum pródiens
    A Patre olim éxiens,
    Qui natus orbi súbvenis
    Cursu declívi témporis,

    Verbe du Tout-Puissant né dans le sein du Père,
    Éternel et Dieu comme lui,
    Qui, pour tirer enfin l'homme de sa misère
    Viens naître homme aujourd'hui,

    Illúmina nunc péctora
    Tuóque amóre cóncrema;
    Audíto ut praecónio
    Sint pulsa tandem lúbrica.

    Fais que ta vérité dans nos armes rayonne,
    Et que ton feu brûlant nos cœurs,
    La voix de ton héraut qui dans les déserts tonne
    Guérisse nos langueurs.

    Judéxque cum post áderis
    Rimári facta péctoris,
    Reddens vicem pro ábditis
    Justísque regnum pro bonis.

    Et, lorsque découvrant les vertus ou le vice
    Jusqu'au fond du cœur des humains,
    Tu rendras en vrai juge aux méchants le supplice
    Et la couronne aux saints.

    Non demum arctémur malis
    pro qualitáte críminis,
    sed cum béatis cómpotes
    simus perénnes cǽlites.

    Ne lance pas sur nous l'effroyable anathème,
    Mais joins-nous à lui par ta bonté
    À ceux dont l'œil doit voir de ton palais suprême
    L'immortelle beauté.

    Laus, honor, virtus, gloria,
    Deo Patri et Fílio
    Sancto simul Paráclito,
    In sæculórum sǽcula. Amen.

    Gloire au Père éternel, au Fils, notre espérance,
    À l'Esprit, notre heureuse paix.
    Qu'ils règnent en ce jour qui jamais ne commence
    Et ne finit jamais.

    Hymne des matines au temps de l'Avent, traduction de Louis-Isaac Lemaistre de Sacy (Heures de Port-Royal).

    A défaut de chant, voici des cloches :
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    Et la harpe celtique de Kim Robertson :
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    Bréviaire de Paris, XIIIe siècle

  • Immaculée Conception

    Gaudens gaudébo in Dómino, et exsultábit ánima mea in Deo meo : quia índuit me vestiméntis salútis : et induménto justítiæ circúmdedit me, quasi sponsam ornátam monílibus suis.
    Exaltábo te, Dómine, quóniam suscepísti me : nec delectásti inimícos meos super me.

    Je me réjouirai avec effusion dans le Seigneur, et mon âme sera ravie d’allégresse en mon Dieu : car il m’a revêtu des vêtements du salut : et il m’a entouré des ornements de la justice, comme une épouse parée de ses bijoux. (Isaïe 61,10)
    Je vous exalterai, Seigneur, parce que vous m’avez relevé, et que vous n’avez pas réjoui mes ennemis à mon sujet. (Psaume 29)

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    Solesmes, 1958

    L’introït est tiré d’Isaïe, lequel, au nom d’Israël, se réjouit dans le Seigneur parce qu’il l’a recouvert d’un manteau de salut et de sainteté, comme une épouse parée de ses bijoux. Ce cantique triomphal ne résonne mieux dans aucune bouche mortelle que sur les lèvres immaculées de Marie, qui, pas un seul instant de sa vie, ne fut privée de ce splendide vêtement de salut dont parle ici le Prophète. Bienheureux cardinal Schuster

    Introït : c’est comme un chant de triomphe, après la défaite que le péché a infligée à l’humanité ; c’est comme un rayon de soleil, au sein des ténèbres, quand nous entendons l’Épouse immaculée de Dieu entonner ce chant de joie. Il faut entendre et chanter cette mélodie enthousiaste, pour en saisir tout le bonheur et toute la joie. Pour les prêtres, elle a encore une signification particulière. De ce manteau intérieur de la grâce, les vêtements sacrés, qu’ils portent tous les jours, sont un vivant symbole. Ainsi pourrait chanter le baptisé, ainsi pourrait chanter tout enfant de Dieu, quand il pense au vêtement de la grâce sanctifiante, à l’armure de grâce qu’il a reçue au Baptême, dans la Confirmation et dans l’Eucharistie. Dom Pius Parsch

    Cet introït traduit la joie intérieure de la Vierge Marie, cette vibration de joie qui traversa son âme en ce premier instant de sa vie, quand par l'indicible beauté de Dieu qui se dévoilait, elle se donna à lui de tout l'élan de son cœur ; joie qu'elle extériorisera plus tard, en chantant le Magnificat... Et exsultavit Spiritus meus. La plénitude de grâce l'environne comme d'un manteau : vestimentum salutis, vêtement de salut dont elle couvrira tous ceux qui accepteront de venir s'y mettre à l'abri. La mélodie est calquée sur l'introït Vocem jucunditatis du Ve dimanche après Pâques, selon un schéma classique du mode 3, commençant sur la tonique mi pour se développer dans les hauteurs autour du si-do. C'est sur la seconde phrase que la mélodie trouve son apogée, vestimentum salutis, après un balancement traduisant la joie, elle se fait souple et ample pour s'épanouir sur le torculus du sommet, avant d'achever sur la cadence classique du 8e mode. Dom Ludovic Baron

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  • Saint Ambroise

    Les sacrements de l'Église sont à la fois plus anciens que ceux de la Synagogue et supérieurs à la manne.

    Qu'ils soient plus anciens, la lecture de la Genèse qu'on vient de faire nous l'apprend. La Synagogue, en effet, a pris naissance à la Loi de Moïse. Or Abraham est bien antérieur. Il avait vaincu ses ennemis et retrouvé son neveu et il jouissait de sa victoire. Alors Melchisédech vint au-devant de lui et offrit ce qu'Abraham reçut avec respect. Ce n'est pas Abraham qui offrit, mais Melchisédech, qui est présenté sans père ni mère, sans avoir de commencement ni de fin à ses jours, mais semblable au Fils de Dieu, dont Paul dit aux Hébreux qu'il demeure prêtre à jamais. Il est appelé roi de justice, roi de paix.

    Ne reconnais-tu pas qui il est ? Un homme peut-il être roi de justice, alors qu'il est à peine juste ? Peut-il être roi de paix, quand il peut à peine être pacifique ? Il est sans mère selon sa divinité, parce qu'il a été engendré par Dieu le Père, d'une même substance avec le Père. Sans père selon son incarnation, parce qu'il est né d'une vierge. Il n'a ni commencement ni fin, parce qu'il est lui-même le commencement et la fin de tout, le premier et le dernier. Le sacrement que tu as reçu n'est donc pas don d'un homme, mais de Dieu, apporté par celui qui a béni Abraham, le père de la foi, celui dont tu admires la grâce et les actes.

    Il est donc prouvé que les sacrements de l'Église sont plus anciens. Apprends maintenant qu'ils sont supérieurs. En vérité il est admirable que Dieu ait fait pleuvoir la manne pour nos pères et qu'ils aient été rassasiés chaque jour du pain du ciel. C'est pourquoi il est dit : « L'homme a mangé le pain des anges. » Pourtant ceux qui ont mangé ce pain au désert sont tous morts. Cette nourriture, au contraire, que tu reçois, ce pain vivant qui est descendu du ciel, fournit le soutien de la vie éternelle, et quiconque le mange ne mourra jamais. C'est le corps du Christ.

    Examine maintenant ce qui est supérieur, le pain des anges ou la chair du Christ, qui est certes le corps qui donne la vie. Cette manne-là était du ciel, celle-ci au-dessus du ciel ; celle-là appartenait au ciel, celle-ci au maître du ciel ; celle-là était sujette à la corruption si on la gardait jusqu'au lendemain, celle-ci est étrangère à toute corruption : quiconque en goûte avec respect ne peut éprouver la corruption. Pour ceux-là l'eau coula du rocher, pour toi le sang coule du Christ. L'eau les désaltéra pour un moment, toi le sang te lave à jamais. Le Juif boit et a soif. Toi, une fois que tu auras bu, tu ne pourras plus avoir soif. Cela se passait en figure, ceci en vérité.

    Si ce que tu admires n'est que l'ombre, combien grand est ce dont tu admires l'ombre même. Ecoute, c'est l'ombre qui s'est manifestée aux pères : « Ils buvaient, dit-on, du rocher qui suivait ; or le rocher c'était le Christ. Mais en un bon nombre d'entre eux Dieu ne s'est pas complu, car ils furent anéantis au désert. Or cela s'est fait en figure à notre intention. » Tu as compris ce qui vaut mieux, car la lumière est préférable aux ténèbres, la vérité à la figure, le corps du créateur à la manne du ciel.

    De mysteriis

  • Saint Nicolas

    Pange, lingua, Nicolai
    Praesulis praeconium.
    Ut nos summus Adonai
    Rex et Pater omnium,
    Ad salutis portum trahi
    Faciat per Filium.

    Chante, ô ma langue, les louanges du pontife Nicolas : afin que le suprême Adonaï, Roi et Père de tous les êtres, nous fasse aborder par l’entremise de son divin Fils au port du salut.

    Dum penderet ad mamillam
    Matris, ab infantia,
    Quarta semel bibit illam,
    Atque sexta feria ;
    Ne per lactis puer stillam,
    Solveret jejunia.

    A l’âge où Nicolas pendait encore aux mamelles de sa mère, jamais on ne le vit plus d’une fois le jour s’y désaltérer, à la quatrième et sixième férie de la semaine : il craignait, le pieux enfant, de rompre son jeûne par une goutte de lait.

    Sublimatus ad honorem
    Nicolaus Praesulis,
    Pietatis ita rorem
    Cunctis pluit populis;
    Ut vix parem aut majorem
    Habeat in saeculis.

    Élevé à l’honneur de Prélat, Nicolas fit pleuvoir si abondamment la rosée de la piété sur tous les peuples, qu’à peine a-t-il son pareil dans toute la série des siècles.

    Auro dato, violari
    Virgines prohibuit ;
    Far in fame, vas in mari,
    Servat et distribuit ;
    Qui timebant naufragari
    Nautis opem tribuit.

    Par l’usage qu’il fait de son or, il sauve trois vierges de la prostitution; dans la famine il multiplie le blé et le distribue au peuple ; il retire un vase tombé dans la mer, et porte secours aux nautoniers qui craignaient le naufrage.

    A defunctis suscitatur
    Furtum qui commiserat;
    Et Judaeus baptizatur,
    Furtumque recuperat.
    Illi vita restauratur,
    Hic ad fidem properat.

    Du milieu des morts est par lui ressuscité un homme qui avait commis un vol : par lui un Juif est baptisé et recouvre le bien qu’on lui avait dérobé ; l’un est rendu à la vie, l’autre s’élance dans la voie de la foi.

    Nicolae, sacerdotum
    Decus, honor, gloria,
    Plebem omnem, clerum totum,
    Mentes, manus, labia,
    Ad reddendum Deo votum,
    Tua juvet gratia.

    Des Pontifes l’ornement, l’honneur et la gloire, Nicolas, que la grâce dont vous êtes enrichi vienne en aide au peuple et au clergé; qu’elle assiste nos âmes, nos mains et nos lèvres, et nous fasse rendre à Dieu nos vœux.

    Sit laus summae Trinitati,
    Virtus et Victoria,
    Quae det nobis ut beati
    Nicolai gaudia
    Assequamur laureati,
    Post vitam in patria. Amen.

    Louange à la souveraine Trinité : à elle puissance et victoire ; qu’elle daigne nous accorder d’entrer après la vie, chargés de palmes , dans la patrie des cieux, en part des joies éternelles de Nicolas. Amen.

    Hymne (d’une bien jolie simplicité pour les apprentis latinistes) qui se trouvait dans les bréviaires français entre le XIVe et le XVIe siècle, traduction dom Guéranger. les deux premiers mots montrent sur quel air elle se chante…

  • Una Voce

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    Dans le numéro 309 d’Una Voce qui vient de paraître, j’ai commis deux articles : un sur « Noël en Pologne » (qui a bénéficié des judicieux conseils du lecteur qui nous parle de l’Avent), un autre sur « Dum medium silentium ». Ainsi que deux recensions, sur « Voix de louange » de Marguerite Harl (les cantiques de l’Alexandrinus), et « Le traducteur de Bethléem » (saint Jérôme) de Christophe Rico.

  • L’Avent en Pologne

    Un de mes lecteurs me raconte l’Avent en Pologne. Je vous en fais profiter.

    La messe Rorate

    Tous les jours (sauf le dimanche), dans ma paroisse d’un quartier récent de Varsovie, pendant le temps de l’Avent, nous nous réunissons à l’église à 6h10 pour chanter  « le petit Office de l’Immaculée Conception ». A 6h30, nous assistons à la messe “Rorate". C’est un temps merveilleux de l’année liturgique.

    Chacun (ou presque) se rend à la Messe une lanterne à la main .On voit ainsi dans les rues des ombres éclairées du halo tremblotant d’une bougie converger vers l’église en rappelant aux automobilistes pressés, aux joggers, aux travailleurs matinaux qui attendant leur bus que le Christ va venir et qu’il est temps de se préparer à sa venue. Quand il fait froid et que la ville est recouverte de neige, c’est magique.

    Quand on entre dans l'église, elle est plongée dans le noir. Les fidèles qui n'ont pas apporté de lanterne peuvent emprunter un lampion sur une table au fond de l'église. Après le petit office de l'Immaculée Conception, la messe commence. L'église est toujours plongée dans le noir. Chez nous, il y a environ 200 personnes à la messe de 6h30.

    Au début du Gloria le prêtre et les fidèles lèvent leurs lanternes et les projecteurs de l'église s'allument.

    A la fin du Gloria, tout le monde éteint sa bougie. On la rallumera a la fin de la Messe pour rapporter la « lumière du Christ » à la maison. Chez nous on allume les bougies de la couronne de l'Avent avec cette lumière rapportée de l'église. Je dis « lumière du Christ » et tout le monde répond « Nous rendons grâce à Dieu ».

    Quand on sort de l'église, on voit le jour poindre. On rentre à la maison avec la lanterne allumée...

    La retraite spirituelle

    Dans chaque paroisse, il est de coutume pendant l'Avent comme pendant le carême de participer à une « retraite paroissiale ». Cette année ce sera du dimanche 18 décembre au mercredi 21 décembre inclus. Soit 4 messes pendant lesquelles un « prêtre recollectioniste » comme on dit en polonais, est invité par la paroisse à prêcher. En général, le prêtre qui prêche la retraite développe un thème en 4 parties... Il faut venir vraiment très à l'avance si vous ne voulez pas rester debout. Les retraites ça peut faire mal aux jambes et au dos.

    La visite pastorale

    Chaque année les prêtres de la paroisse rendent visite aux fidèles à leur domicile. On appelle couramment cette visite « koleda » (d'après la tradition de chanter de maison en maison des chants de Noël et de jouer des saynètes religieuses). Le nom officiel c'est « wizyta duszpasterska ».

    C'est l'occasion de discuter. De prier ensemble. De bénir la maison. C'est l'occasion de faire un grand ménage. Il faut mettre sur la table ; une bible, une bouteille d'eau bénite, un crucifix et un goupillon (on peut acheter un « service spécial koleda » dans les magasins d'article religieux). Il est bien vu de donner une enveloppe au prêtre pour les besoins de la paroisse.