L’évangile est celui de la guérison du paralytique, où Jésus affirme qu’il a le pouvoir de remettre les péchés. L’Eglise a choisi le texte de saint Matthieu, dépouillé de la plus grande partie du pittoresque de saint Marc (qui bien évidemment n’est pas seulement pittoresque). Est-ce pour permettre au prédicateur de raconter toute l’histoire et de la mettre en scène ?
Ou peut-être est-ce plutôt pour que l’attention se porte sur l’essentiel. L’essentiel que seul Matthieu dit explicitement et de façon exhaustive alors qu’il est si elliptique dans sa narration.
L’essentiel, c’est que Jésus est Dieu et qu’il s’est incarné pour donner aux hommes le pouvoir divin de remettre les péchés.
L’incarnation est soulignée dans le premier verset : « Et, étant monté dans une barque, il traversa et alla dans sa ville. » Pourquoi mentionner un fait aussi inintéressant, alors que l’on va omettre tout le début de l’histoire de la guérison du paralytique ? C’est pour montrer que Jésus est bien un homme comme les autres, au point même que comme les autres il est l’habitant d’une ville déterminée : il va dans « sa » ville, il est un citoyen de Capharnaüm.
Mais cet homme a le pouvoir de remettre les péchés. Il dit bien qu’il a le pouvoir de remettre les péchés, et non de simplement « pardonner ». Il est significatif que toutes les traductions protestantes (et la soi-disant Bible de la liturgie catholique, bien sûr !) traduisent de façon fautive par « pardonner ». Mais remettre les péchés, c’est autre chose que pardonner. L’homme peut pardonner à son frère. Seul Dieu peut remettre, comme on remet une dette : elle n’existe plus, le chirographe est déchiré et détruit. Quand Dieu remet le péché c’est comme si le péché n’avait pas existé. Or il a existé. La remise des péchés est une re-création, dont seul Dieu est capable.
Donc Jésus est Dieu. (Ou c’est un blasphémateur qui mérite la mort, et qui sera mis à mort pour cela même.)
Et là vient la finale originale de saint Matthieu : les foules « glorifièrent Dieu qui a donné un tel pouvoir aux hommes ». En effet, Dieu, par Jésus-Christ, a donné aux hommes ce pouvoir divin de remettre les péchés, par le sacrement de pénitence. Ce que les protestants refusent de comprendre, alors que c’est en toutes lettres dans l’Evangile…
Illustration d’un lectionnaire syriaque de Mossoul – N’oublions pas les chrétiens de Mossoul qui ont tous dû fuir "leur ville" pour la première fois de l’histoire. Le paralytique guéri est assez marrant. Il n’en revient pas de ce qui lui arrive, mais il n’a pas l’air vraiment rassuré. Il a l’air d’avoir peur de recevoir sur la tête le personnage qui paraît tomber du toit… Je ne sais pas qui il est ni ce qu’il fait avec son espèce de baguette très fine. Ni d’ailleurs ce que représente l’espèce de tapis (?) aux arabesques…
Addendum
Excellente et très convaincante remarque de Gottschütz dans les commentaires: il ne s'agit pas du paralytique de ce dimanche mais de celui de la piscine probatique : ce n'est pas un tapis mais la piscine, et l'ange qui remue l'eau (sous les arcades du portique). C'est réconfortant d'avoir des lecteurs intelligents...