Je comprends ceux qui s’acharnent à vouloir à tout prix sauver le soldat François. C’est humain et c’est chrétien. Quand on est catholique, on aimerait que le pape fût pleinement catholique et se conduise en catholique.
Mais il y a des limites. Il faut arrêter de dire n’importe quoi. Et je lis vraiment n’importe quoi, chez des gens réputés sérieux, dans des publications réputées sérieuses, en ce qui concerne la « canonisation » de Jean XXIII.
Je lis que François a le droit de canoniser qui il veut quand il veut et comme il veut, donc de canoniser un bienheureux sans miracle, puisqu’il est le pape.
C’est non seulement évidemment faux, mais absurde. Le pape n’est pas un anarchiste. Il est le serviteur des serviteurs de Dieu. Il est le serviteur de l’Eglise. Il ne peut agir que dans l’obéissance aux règles de l’Eglise. Certaines de ces règles peuvent être modifiées. Il peut les modifier. Mais tant qu’il ne les a pas modifiées il doit agir en conformité avec les lois existantes. Or les règles existantes exigent un miracle pour la canonisation.
Je lis qu’il n’est pas le premier à le faire, et que, par exemple, Pie XI l’avait fait pour Albert le Grand et Pie XII pour Elisabeth de Hongrie.
C’est évidemment faux. La canonisation d’Albert le Grand et de Marguerite de Hongrie sont précisément les deux exemples de canonisation équipollente, parfaitement régulière, donnés sur le site de la conférence des évêques de France dans l’article Béatification et Canonisation.
Canonisations équipollentes, parce qu’elles sont l’authentification pontificale d’un culte déjà reconnu. Marguerite de Hongrie faisait l’objet depuis toujours d’un culte officiel en Hongrie, elle était déjà sainte Marguerite de Hongrie. Quant à Albert le Grand, c’est exactement la même configuration que pour Hildegarde. Il y avait un culte de saint Albert le Grand en Allemagne et chez les dominicains, comme il y avait un culte de sainte Hildegarde en Allemagne et chez les bénédictins. Dans l’un et l’autre cas, le pape a authentifié ce culte (et l’a donc étendu à toute l’Eglise) pour leur donner le titre de docteur de l’Eglise.
Je lis d’autre part que tous les papes depuis la fin du XIXe siècle ont canonisé des bienheureux sans qu’il y ait de nouveau miracle. Mais on se garde bien de donner un seul exemple…
Ah si. J’ai trouvé un dominicain téméraire, souvent cité, qui donne l’exemple de Jean d’Avila, béatifié par Léon XIII et canonisé par Paul VI « sans miracle ».
Manque de chance, Jean d’Avila figure en bonne place dans la liste des canonisations équipollentes dressé le 12 octobre 2013 dans l’Osservatore Romano par le cardinal Angelo Amato, qui doit être compétent en la matière puisqu’il est le préfet de la congrégation pour les causes des saints…
Naturellement, je suis tout prêt à modifier mon jugement si l’on me présente une preuve que j’ai tort. Ce billet est même un appel en ce sens.
Mais il est aussi l’expression que je ne supporte vraiment plus les mensonges d’ecclésiastiques, de prêtres de Celui qui est la Vérité, a fortiori quand c’est pour « la bonne cause ».