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Liturgie - Page 434

  • 13e dimanche après la Pentecôte

    Dans la prière de ce jour, nous demandons un accroissement des trois vertus théologales, foi, espérance et charité, lesquelles sont le vrai fondement de la perfection chrétienne. On les appelle théologales, parce qu’elles ont Dieu pour auteur et pour objet. La foi est la lumière intérieure qui nous montre la fin dernière surnaturelle, et qui éclaire le chemin y conduisant. L’espérance alimente dans l’âme le désir d’obtenir cette fin tandis que Dieu lui garantit son secours puissant. Quant à l’amour, il est l’impulsion irrésistible de l’âme qui court vers Dieu, anxieuse de se jeter entre ses bras pour le posséder comme son bien propre et qui ne lui manquera jamais dans l’éternité.

    Toute la perfection chrétienne repose sur ce triple fondement des vertus théologales, en sorte que les maîtres de la vie spirituelle insistent beaucoup sur les avantages qui découlent pour l’âme de l’émission répétée de ces actes de foi, d’espérance et de charité, lesquels finiront ainsi par orienter habituellement notre vie intérieure tout entière. Ici également, l’entraînement aide beaucoup, et est un puissant instrument d’héroïque perfection.

    La seconde partie de la collecte explique encore mieux le contenu de la première. Dieu promet une magnifique récompense c’est-à-dire Lui-même. Cette récompense est toutefois subordonnée à notre fidélité dans l’observation de sa loi, laquelle, dans l’état présent d’affaiblissement de notre nature corrompue, est difficile et dure. Comment surmonter l’obstacle ? D’autre part, est-il convenable pour Dieu que ses fidèles le cherchent en pleurant et à grand’peine, presque par contrainte, comme des esclaves condamnés aux travaux forcés ? Non pas. « Faites, Seigneur, — ajoute donc la collecte, — que nous aimions tout ce que vous nous commandez. » Voici l’effet de la grâce divine. Elle fortifie le cœur du fidèle et mêle tant de douceur au service du Seigneur, qu’on le sert non point comme le prisonnier qui sent l’aiguillon du geôlier l’excitant au travail, mais avec l’amour du fils à qui rien n’est plus doux que d’accomplir la volonté du Père. Quae placita sunt Ei facio semper (Jean 8, 29).

    Bienheureux cardinal Schuster

     

  • Saint Hyacinthe

    Hyacinthe, issu de la famille silésienne des Odrowaz (prononcer Odrovonj, selon la prononciation actuelle du polonais, mais le mot était retranscrit Odrowantz en allemand), était parent de l’évêque de Cracovie, qui le fit chanoine, puis l’envoya étudier à Paris et à Bologne. Puis il l’emmena, avec un autre jeune homme de la même famille, et deux autres, à Rome, où ils rencontrèrent saint Dominique. L’évêque demanda à Dominique d’envoyer des frères prêcheurs en Pologne ; celui-ci lui répondit qu’il n’en avait pas assez, mais qu’il était prêt à former des Polonais. Les quatre jeunes gens qui accompagnaient l’évêque décidèrent aussitôt de rester avec saint Dominique. Puis ils retournèrent en Pologne et fondèrent, en 1222, le couvent de Cracovie. Hyacinthe avait une vingtaine d’années. En 1225-26 il alla vers le nord, et fonda un nouveau couvent à Gdansk. Dès la Pentecôte 1228, lors du chapitre dominicain tenu à Paris sous la présidence du bienheureux Jourdain de Saxe, était établie la province dominicaine de Pologne. Hyacinthe organisa ensuite des missions à Kiev et en Prusse. Puis il resta au couvent de Cracovie, sans jamais en être le prieur, sans jamais non plus être provincial des dominicains polonais. Il mourut le jour de l’Assomption 1257.

    On lui prête un très grand nombre de miracles, dont une vingtaine de résurrections.

    Un jour qu’il était impossible de traverser la Vistule en raison des crues, il y étendit son manteau, monta dessus et donna l’ordre à ses frères de venir sur le manteau avec lui ; et ils traversèrent ainsi le fleuve.

    Les Tatars envahissant sa mission en Ukraine, il prit le ciboire pour empêcher la profanation des hosties. Alors qu’il s’enfuyait, il entendit une voix qui venait de la statue de la Sainte Vierge : « Hyacinthe, tu as pris mon fils, et moi, tu veux me laisser ? » Or cette grande statue de marbre ne pouvait pas être déplacée par un homme seul. Saint Hyacinthe la prit sans y penser, traversa le Dniepr en marchant sur les eaux, et l’emporta jusqu’à Cracovie comme si elle ne pesait rien.

    Saint Hyacinthe est le saint patron de Cracovie. En polonais, il s’appelle Jacek (prononcer Yatçèk).

  • Saint Joachim

    La richesse de Joachim consistait en troupeaux comme celle des premiers patriarches. Le pieux emploi qu’il en faisait attirait sur ses biens la bénédiction du Seigneur. Mais il était une bénédiction plus désirée, que le ciel refusait à ses supplications : Anne, son épouse, était stérile ; au milieu des filles d’Israël attendant le Messie, l’espérance de Sion semblait s’en être détournée. Au Temple, un jour que Joachim présentait des victimes, elles furent rejetées avec mépris.

    C’était une autre offrande qu’attendait de lui le Seigneur du Temple ; quand, au lieu des brebis de ses pâturages, il présentera ici la Mère de l’Agneau de Dieu, elle ne sera point repoussée !

    Mais aujourd’hui, dans sa douleur, il s’est enfui sans reparaître devant son épouse. Gagnant les montagnes où paissaient ses troupeaux, il y vivait sous la tente, jeûnant sans trêve et disant : « Je ne prendrai point de nourriture, jusqu’à ce que le Seigneur mon Dieu m’ait regardé dans sa miséricorde ; mais ma prière sera mon aliment ».

    De son côté Anne, cependant, pleurait le double deuil de son veuvage et de sa stérilité. Mais tandis qu’elle priait dans le jardin et son époux sur la montagne, leurs communes instances, présentées en même temps au Dieu souverain, étaient ensemble exaucées. L’Ange du Seigneur apparaissait à tous deux, leur donnant rendez-vous sous la porte Dorée ; et Anne bientôt pouvait dire : « Je sais maintenant que le Seigneur m’a bénie grandement. Car moi qui étais veuve, je ne le suis plus ; et moi qui étais stérile, j’ai conçu ! »

    Récit dans L’Année liturgique, d’après le protévangile de Jacques.

    Ci-dessous, fresques de Kernascleden (cliquer pour agrandir). De gauche à droite : Joachim voit ses offrandes refusées ; il est avec ses troupeaux et un ange lui apparaît (c’est presque du Gauguin) ; l’ange apparaît à Anne dans sa maison ; la rencontre de Joachim et Anne ; la présentation de Marie au Temple (puis le mariage de Marie, l’Annonciation, la Visitation…).

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  • Assomption


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    Lorsqu’ils virent la Dormition de la toute sainte et immaculée, les Anges furent émerveillés, admirant que la Vierge pût monter de la terre jusqu’aux cieux. Que tout fils de la terre exulte en esprit, tenant sa lampe allumée, que les Anges dans le ciel célèbrent avec joie la dormition de la Mère de Dieu et lui chantent : Réjouis-toi, ô bienheureuse et toujours vierge, sainte Mère de Dieu.

    (Deuxième Hirmos de la Divine Liturgie de la Dormition, par le P. Maximos Fahmé.)

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    (Icône de Domínikos Theotokópoulos, avant qu’il s’appelle El Greco, c’est-à-dire quand il était encore grec, c’est-à-dire crétois… Cette icône, qui date donc d’avant 1568, se trouve dans la cathédrale de la Dormition d’Ermoupoli, capitale de l’île de Syros et des Cyclades. On notera que Theotokópoulos veut dire « fils de la Mère de Dieu ».)

  • Vigile de l’Assomption


    podcast

    Honorons par les hymnes celle qui est plus élevée que les cieux, et plus pure que les rayons du soleil, celle qui nous sauve de la malédiction et qui est la souveraine du monde.

    Mon corps est malade ainsi que mon âme à cause de mes nombreux péchés. C’est pourquoi je me réfugie auprès de toi, ô pleine de grâce. Aide-moi, ô espoir des désespérés.

    Ô Souveraine, Mère du Sauveur, agrée les supplications de tes indignes serviteurs, en intercédant auprès de Celui qui est né de toi. Sois notre médiatrice, ô souveraine du monde.

    Ô Mère de Dieu digne de toute louange, nous te chantons maintenant cet hymne avec joie et ardeur. C’est pourquoi, avec le Précurseur et tous les saints, ô Mère de Dieu, prie pour qu’il ait pitié de nous.

    Vous toutes les armées angéliques, et vous le Précurseur, les douze Apôtres et tous les saints, priez, avec la Mère de Dieu, pour notre salut.

    Bienheureuses les lèvres des fidèles qui vénèrent ton icône vénérable, notre guide, peinte par le tout saint apôtre Luc.

    (Ode IX, troisième partie, de la Petite Paraclisis – office du carême de la Mère de Dieu dans la liturgie byzantine ; chantée en arabe par le P. Maximos Fahmé.)

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  • Sainte Radegonde

    Voici les très belles litanies de sainte Radegonde trouvées dans le livre “La preuve historique des litanies de la grande reine de France sainte Radegonde”, 1643, avec la traduction d’époque.

    Kyrie eleison.
    Christe eleison.
    Kyrie eleison.

    Christe audi nos.
    Christe exaudi nos.

    Pater de cælis Deus, miserere nobis.
    Fili Redemptor mundi Deus, miserere nobis.
    Spiritus Sancte Deus, miserere nobis.
    Sancta Trinitas unus Deus, miserere nobis.

    Sancta Maria, ora pro nobis.
    Sancta Dei genitrix, ora pro nobis.
    Sancta Virgo virginum, ora pro nobis.

    Sancta Radegundis, ora pro nobis.
    Filia Regiæ originis, ora pro nobis.
    Filia Dei altissimi, ora pro nobis.
    Filia veræ et magnæ pænitentiæ, ora pro nobis.
    Speculum humilitatis, ora pro nobis.
    Exemplum vitæ religiosæ, ora pro nobis.
    Vinculum omnium virtutum, ora pro nobis.
    Regina corpore et animo speciosa, ora pro nobis.
    Regina regnorum contemptrix, ora pro nobis.
    Regina reginarum exemplar, ora pro nobis.
    Gemma Galliæ pretiosissima, ora pro nobis.
    Gemma diadematis Christi ornatissima, ora pro nobis.
    Crucis Christi sacratissimæ amantissima, ora pro nobis.
    Sanctorum reliquiis addictissima, ora pro nobis.
    Regularis observantiæ curiosissima, ora pro nobis.
    Pauperum alimoniæ sollicitissima, ora pro nobis.
    Compeditorum liberatrix clementissima, ora pro nobis.
    Sponsi cælestis sponsa purissima, ora pro nobis.
    A Christo Sponso sæpius visitata, ora pro nobis.
    Humilis cellulæ inquilina nobilissima, ora pro nobis.
    Pictaviensium Patrona tutissima, ora pro nobis.
    Obsessæ urbis propugnatrix potentissima, ora pro nobis.
    Divini amoris æstu plenissima, ora pro nobis.
    Miraculorum operatrix assidua, ora pro nobis.
    Dæmonum dominatrix perfectissima, ora pro nobis.
    Mortuorum suscitatrix certissima, ora pro nobis.
    Silentii custos perfectissima, ora pro nobis.
    Sacrosancti Sacramenti adoratrix assiduissima, ora pro nobis.
    Annuli abbatialis etiam post mortem servatrix tenacissima, ora pro nobis.
    In mari periclitantibus anchora fidissima, ora pro nobis.
    Lucernæ inextinguibilis præmio donata, ora pro nobis.
    Sanctarum monialium mater et radix antiquissima, ora pro nobis.
    Afflictarum animarum consolatrix piissima, ora pro nobis.
    Incorrupti corporis a pluribus sæculis privilegio decorata, ora pro nobis.
    Tumuli miraculis conspicui habitatrix sacratissima, ora pro nobis.
    Beatorum spirituum agminibus sociata, ora pro nobis.

    Ut hanc urbem Pictaviensem, et omnes in ea habitantes speciali præsidio foverer digneris, te rogamus audi nos.

    Ut nos ab omni peste et hæreticorum feritate liberare digneris, te rogamus audi nos.

    Ut in articulo mortis præsens nobis assistere digneris, te rogamus audi nos.

    Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, parce nobis Domine.
    Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, exaudi nos Domine.
    Agnus Dei, qui tollis peccata mundi, miserere nobis.

    ℣. Ora pro nobis sancta Radegundis.
    ℟. Ut digni efficiamur promissionibus Christi.

    Oremus. Concede nos famulos tuos, quæsumus, ignoscentior Domine, beatæ Radegundis Reginæ incomparabilis momentoso patrocinio indesinenter sublevari, ut inexhaustæ commiserationis expeditius pollentiam pernoscamus. Amen.

     

    Seigneur, ayez pitié de nous.
    Jésus-Christ, ayez pitié de nous.
    Seigneur, ayez pitié de nous.

    Jésus-Christ, oyez-nous.
    Jésus-Christ, exaucez-nous.

    Dieu le Père du Ciel, ayez pitié de nous.
    Dieu le Fils Rédempteur du monde, ayez pitié de nous.
    Dieu Saint-Esprit, ayez pitié de nous.
    Sainte Trinité un seul Dieu, ayez pitié de nous.

    Sainte Marie, priez pour nous.
    Sainte Mère de Dieu, priez pour nous.
    Sainte Vierge des vierges, priez pour nous.

    Sainte Radegonde, priez pour nous.
    Fille de naissance royale, priez pour nous.
    Fille du Dieu très-haut, priez pour nous.
    Fille d’une vraie et grande pénitence, priez pour nous.
    Miroir d’humilité, priez pour nous.
    Exemplaire de la vie religieuse, priez pour nous.
    Le lien de toutes les vertus, priez pour nous.
    Reine belle de corps et d’âme, priez pour nous.
    Reine qui avez méprisé les royaumes, priez pour nous.
    Reine l’exemplaire de toutes les reines, priez pour nous.
    Pierre précieuse de la France, priez pour nous.
    Pierre précieuse du diadème de Jésus-Christ, priez pour nous.
    Amoureuse de la Croix sacrée de Jésus-Christ, priez pour nous.
    Vénératrice des reliques des saints, priez pour nous.
    Très exacte observatrice de la régularité, priez pour nous.
    Très soigneuse de la nourriture des pauvres, priez pour nous.
    Libératrice très pitoyable des prisonniers, priez pour nous.
    Epouse très pure du céleste Epoux, priez pour nous.
    Honorée des visites de Jésus-Christ son Epoux, priez pour nous.
    Très noble habitatrice d’une petite cellule, priez pour nous.
    Patronne très assurée des Poitevins, priez pour nous.
    La défense de notre ville assiégée, priez pour nous.
    Embrasée du feu de l’amour divin, priez pour nous.
    Opératrice de fréquents miracles, priez pour nous.
    Très absolue dominatrice des démons, priez pour nous.
    Ressuscitatrice des morts priez pour nous.
    Exacte observatrice du silence, priez pour nous.
    Très assidue adoratrice du très Saint Sacrement, priez pour nous.
    Gardienne de l’anneau abbatial, même après la mort, priez pour nous.
    L’ancre de ceux qui sont en danger sur la mer, priez pour nous.
    Favorisée d’avoir une lampe qui ne s’éteignait jamais, priez pour nous.
    Mère et très ancienne tige des saintes religieuses, priez pour nous.
    Charitable consolatrice des affligés, priez pour nous.
    Douée du privilège d’un corps incorruptible, priez pour nous.
    Habitatrice d’un tombeau renommé par les miracles, priez pour nous.
    Associée à la troupe des bienheureux esprits, priez pour nous.

    Nous vous prions très humblement, entendez nos prières, s’il vous plaît, protégez d’un secours spécial cette ville de Poitiers et tous ses habitants.

    Nous vous prions, entendez nos prières, qu’il vous plaise de nous délivrer de toute peste et cruauté des hérétiques.

    Nous vous prions, entendez nos prières, qu’il vous plaise être présente et nous assister en l’article de la mort.

    Agneau de Dieu qui ôtez les péchés du monde, pardonnez-nous, Seigneur.
    Agneau de Dieu qui ôtez les péchés du monde, exaucez-nous, Seigneur.
    Agneau de Dieu qui ôtez les péchés du monde, ayez pitié de nous.

    ℣. Priez pour nous, sainte Radegonde.
    ℟. Afin que nous soyons faits dignes des promesses de Jésus-Christ.

    Prions. Seigneur très enclin à pardonner, octroyez-nous, s’il vous plaît, d’être continuellement soulagés par les prières et mérites de sainte Radegonde, reine incomparable, à ce que plus facilement nous expérimentions les effets de votre amour et miséricorde infinie d’une inépuisable commisération. Ainsi soit-il.

  • Sainte Claire

    En ce temps-là, la sainte Eglise était secouée par les guerres du schismatique empereur Frédéric et le val de Spolète but le calice amer de sa fureur plus souvent que les autres pays. Le dit monarque avait envoyé dans cette vallée plusieurs escadrons et compagnies de gens armés, parmi lesquels se trouvaient beaucoup de Sarrazins et de nombreux archers; ils fourmillaient comme un essaim d'abeilles et couvraient toute la terre. Ils brûlaient et démolissaient villes, forteresses et châteaux, coupaient les arbres, rasaient les vignes et les jardins, prenaient hommes, femmes et enfants pour les tuer ou les jeter en prison. Les habitants d'Assise, épouvantés, s'étaient enfuis à leur approche, à l'exception d'un très petit nombre. Bientôt, en effet, la rage des ennemis se tourna vers la cité qui était spécialement chère au Seigneur. Les Sarrazins, gens pleins de malice et de cruauté, toujours prêts à répandre le sang chrétien, coururent d'abord au monastère des Pauvres Dames. Avec une frénétique et bestiale audace, ils entrèrent dans le cloître en escaladant les murs. Les pauvres Sœurs eurent tant d'effroi que leurs cœurs tremblaient dans leurs corps. Tout en larmes, elles se pressèrent au chevet de leur bonne Mère, qui était alors couchée et gravement malade, et lui dirent la raison de leur épouvante. Sans aucune crainte, la douce vierge Claire réconforta ses filles en disant :

    « — Mes Sœurs et filles, ne craignez rien, si Dieu est avec nous, que pourront nous faire ses ennemis ? Confiez-vous en Notre Seigneur Jésus-Christ, car il vous délivrera. »

    Elle se fit alors conduire jusqu'à la porte et mettre devant les barbares. Puis elle ordonna d'apporter le corps de Notre Seigneur, lequel était précieusement enfermé dans une petite cassette d'argent, recouverte d'une autre en ivoire. La séraphique Claire recommanda à la Fleur de la virginité, Notre Seigneur Jésus-Christ, celle de ses filles, et, se prosternant à terre, le pria avec beaucoup de larmes, disant :

    « — Te plaira-t-il, mon doux Jésus, que tes servantes sans défense, que j'ai toujours nourries du lait savoureux de ton très doux amour, tombent maintenant aux mains de ces païens ? O mon Seigneur Jésus ! qu'il te plaise de garder tes pauvres servantes, car je ne les puis sauver maintenant ! »

    Lorsqu'elle eut dit ces paroles, Madame Sainte Claire et les deux Sœurs qui la soutenaient, sœur Françoise de Colle di Mezzo et sœur Illuminata, de Pise, ouïrent une voix d'enfant qui répondit avec une infinie douceur.

    « — Je vous garderai toujours. »

    Claire répliqua :

    « — Je te prie, mon Seigneur, s'il te plaît, de garder aussi cette ville, car pour ton amour elle nous donne de quoi vivre. »

    Et Notre-Seigneur répondit encore :

    « — La ville n'aura aucun mal par ma grâce, et pour ton amour, je la délivrerai. »

    A cette voix merveilleuse, le visage de la sainte fut irradié de lumière, de sorte que les Sœurs étaient en grande admiration ; la séraphique vierge, levant vers le ciel ses yeux pleins de larmes, commença à réconforter ses filles, leur disant :

    « — Je vous commande, mes belles filles, de vous consoler et de n'avoir aucune peur, ayez confiance et espérance en Dieu, car les Sarrazins ne vous feront pas de mal. »

    Chose admirable, soudain tous ces méchants chiens qui étaient entrés avec tant de férocité dans le cloître furent saisis d'un si grand effroi que, remontant par-dessus les murs, ils s'enfuirent en hâte. Et c'est ainsi qu'ils furent chassés par la vertu de l'oraison de Madame Sainte Claire. Ni les Sœurs, ni le moutier, ni le jardin ne subirent aucun dommage, et peu après les Sarrazins partirent sans troubler la cité d'Assise.

    Cette invasion de Saint-Damien eut lieu au mois de septembre, un vendredi, à trois heures environ, et la très douce vierge Claire, ce soir-là, dans sa profonde humilité, appela les deux Sœurs qui seules avaient ouï la voix et leur commanda de n'en parler à personne tant qu'elle vivrait.

    Vie de sainte Claire par Thomas de Celano, traduction Madeleine Havard de la Montagne

  • 12e dimanche après la Pentecôte

    Les Pères interprètent la parabole du bon Samaritain à l'échelle de l'histoire universelle. Cet homme qu'on a dépouillé et qui gît à moitié mort au bord du chemin, n'est-il pas une image d'« Adam », de l'homme par excellence, qui en vérité « est tombé sur des bandits ». N'est-il pas vrai que l'homme, cette créature appelée homme, tout au long de son histoire, est aliéné, brutalisé, exploité ? L'humanité dans sa grande masse a presque toujours vécu sous l'oppression. Et inversement, les oppresseurs sont-ils la vraie image de l'homme, ou n'en donnent-ils pas plutôt une image dénaturée, avilissante ? Karl Marx a décrit de façon drastique « l'aliénation » de l'homme. Même s'il n'a pas réussi à atteindre la profondeur réelle de l'aliénation du fait que sa pensée était strictement matérialiste, il a livré une image très concrète de l'homme qui tombe aux mains de bandits.

    Au Moyen Âge, les théologiens ont compris les deux indications que donne la parabole sur l'état de l'homme brutalisé comme l'expression d'une dimension anthropologique fondamentale. Il est dit de la victime de l'attaque qu'elle a été d'une part dépouillée, spoliée (spoliatus), d'autre part rouée de coups et laissée à moitié morte (vulneratus). Les scolastiques rapportaient cela à la double dimension de l'aliénation de l'homme. Il est spoliatus supernaturalibus et vulneratus in naturalibus, disaient-ils, c'est-à-dire spolié de la splendeur de la grâce surnaturelle qu'il avait reçue en don, et blessé dans sa nature. C'est bien une allégorie, et elle dépasse, c'est certain, le sens littéral des mots. Mais il s'agit tout de même d'une tentative pour préciser la nature de la double blessure qui pèse sur l'histoire de l'humanité.

    La route de Jérusalem à Jéricho apparaît alors comme une image de l'histoire universelle, l'homme qui gît à moitié mort sur le bord comme une image de l'humanité. Le prêtre et le lévite passent leur chemin : l'histoire en elle-même, avec ses cultures et ses religions, ne constitue pas à elle seule la source du salut. Et si l'homme qui a été attaqué est par antonomase l'image de l'humanité, le Samaritain ne peut être que l'image de Jésus Christ. Dieu lui-même, qui est pour nous l'étranger lointain, s'est mis en route pour prendre soin de sa créature blessée. Dieu, si loin de nous, s'est fait notre prochain en Jésus Christ. Il verse de l'huile et du vin sur nos blessures, une image dans laquelle on a vu le don salvifique des sacrements, et il nous conduit jusqu'à l'auberge, c'est-à-dire l'Église, où il nous fait soigner en avançant même l'argent pour le coût des soins.

    Dans le détail, les différents éléments de l'allégorie varient selon les Pères de l'Église, et nous pouvons sans crainte les laisser de côté. Mais la grande vision de l'homme aliéné et sans défense qui gît au bord de la route de l'histoire, et de Dieu lui-même qui, en Jésus Christ, est devenu son prochain, nous pouvons sans crainte la conserver, car c'est une dimension qui va au fond des choses et qui nous concerne tous. Le puissant impératif que recèle la parabole ne s'en trouve nullement affaibli, bien au contraire, c'est là qu'il prend sa dimension pleine et entière. Et c'est ce qui donne enfin toute sa portée au grand thème de l'amour, qui est le véritable point marquant du texte. Car nous nous apercevons à présent que nous sommes tous « aliénés », que nous avons tous besoin de la rédemption. Nous nous apercevons que nous avons tous besoin de l'amour salvifique dont Dieu nous fait don, afin d'être nous aussi capable d'aimer, et que nous avons besoin de Dieu, qui se fait notre prochain, pour parvenir à être le prochain de tous les autres.

    Chaque homme est individuellement concerné par les deux personnages de la parabole. Car chacun de nous est « aliéné », aliéné aussi de l'amour (qui est l'essence de la « splendeur surnaturelle » dont nous avons été spoliés), chacun de nous doit nécessairement d'abord être guéri et recevoir l'offrande du don. Mais chacun d'entre nous devrait aussi se faire samaritain, suivre le Christ et devenir semblable à lui. Alors nous vivrons de manière juste. Nous aimerons comme il faut si nous devenons semblables à lui, qui nous a tous aimés le premier (cf. 1 Jn 4, 19).

    Joseph Ratzinger, Jésus de Nazareth

  • Saint Laurent

    Qu’est-ce que le Sauveur dit par ces paroles : « Celui qui demeure en moi, je demeure moi-même en lui ? » Que dit-il, sinon ce qu’entendaient les martyrs : « Celui qui persévérera jusqu’à la fin, sera sauvé ? » Comment est resté en lui saint Laurent, dont nous célébrons aujourd’hui la fête ? Il y est resté jusqu’au moment de l’épreuve, de l’interrogatoire du tyran, des menaces les plus effrayantes, jusqu’à la mort. Que dis-je ? Jusqu’au plus douloureux martyre. Car on ne l’a pas fait mourir tout de suite : on lui a fait subir le supplice du feu, on l’a laissé vivre longtemps ; ou plutôt, on ne l’a pas laissé vivre longtemps, mais on l’a forcé à mourir lentement.

    Dans cette longue agonie, au milieu de ces tourments, il ne ressentit point la douleur, parce qu’ayant mangé le corps et bu le sang du Christ avec des dispositions parfaites, il était comme engraissé de cet aliment et enivré de ce breuvage ; car en lui se trouvait celui qui a dit : « C’est l’esprit qui vivifie ». Son corps subissait les ardeurs du feu, mais l’esprit soutenait son âme : il ne défaillit point, aussi entra-t-il dans le royaume éternel.

    Le saint martyr Sixte, dont nous avons solennisé la mémoire il y a cinq jours, lui avait dit : « Mon fils, ne t’attriste pas ». (Sixte était l’évêque [de Rome : Sixte II], et Laurent son diacre.) « Mon fils, ne t’attriste pas : tu me suivras après un triduum ». Il donnait le nom de triduum à l’intervalle qui devait se trouver entre son martyre et celui de saint Laurent, que nous célébrons aujourd’hui. Trois jours, voilà l’intervalle. O consolation ! Il ne dit pas : Ne t’attriste pas, mon fils ; la persécution aura un terme, et tu seras en sécurité ; mais : Ne t’attriste pas : où je vais le premier, tu me suivras : ton voyage n’est pas, à vrai dire, retardé ; car dans l’intervalle de trois jours tu seras avec moi. Saint Laurent reçut cette promesse prophétique, remporta la victoire sur le démon et parvint au triomphe.

    Saint Augustin, traité 27 sur saint Jean

  • Vigile de saint Laurent

    La messe est très ancienne et semble bien mettre en valeur ce qui nous impressionne le plus dans la vie de saint Laurent :
     a) la distribution des biens de l’Église aux pauvres (Intr. et Grad.) ;
     b) l’invitation à suivre l’exemple du Sauveur (Év. et Com.) ;
     c) l’ardeur dans la prière (Ép. et Off.).

    L’Offertoire traduit les dispositions du saint au moment où il comparaît devant le souverain juge : « Ma prière est pure ; c’est pourquoi je demande que ma voix soit entendue dans le ciel ; que ma supplication s’élève vers Dieu ». La lente mélodie, avec les notes profondes du début est vraiment grave et implorante. Nous sommes aujourd’hui les « pauvres » auxquels le Seigneur distribue les trésors spirituels de l’Église par la main de saint Laurent ; c’est à nous aussi que s’adresse l’appel du Sauveur à le suivre en portant notre croix ; nous supplions Dieu de nous donner la force d’accomplir ce sacrifice où il sera notre témoin et notre aide, et déjà nous l’en remercions en nous appropriant les paroles de l’Épître : « Vous m’avez délivré de la flamme qui me pressait et m’entourait, et, au milieu du feu, je n’ai pas été brûlé ». Ce texte s’applique exactement à saint Laurent, mais à nous également dans chacune de nos épreuves. Ayons en profonde vénération ces antiques formulaires de messes dont la richesse a été l’aliment spirituel de tant de grandes âmes avant nous.

    Dom Pius Parsch