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Liturgie - Page 366

  • Saints Prime et Félicien

    Prime et Félicien étaient frères. Pendant la persécution de Dioclétien et de Maximien, ils furent accusés de professer la religion chrétienne et jetés dans les fers ; mais un Ange brisa leurs liens et les rendit à la liberté. On ne tarda pas à les amener devant le préteur, et là ils persévérèrent énergiquement dans la foi chrétienne ; alors on les sépara l’un de l’autre. La constance de Félicien fut d’abord mise à l’épreuve de diverses façons. Mais les conseillers d’impiété désespérant d’obtenir quoi que ce soit par leurs paroles, clouèrent ses pieds et ses mains à un tronc d’arbre, et le laissèrent ainsi suspendu pendant trois jours sans boire ni manger. Le lendemain, le préteur fit mander Prime et lui dit : « Vois combien ton frère est plus sage que toi : il a obéi aux empereurs, et ils l’ont comblé d’honneurs. Si tu veux l’imiter, tu partageras les mêmes faveurs et les mêmes grâces. Prime répondit : « J’ai appris par un Ange ce qu’on a fait à mon frère. Plaise à Dieu que je lui sois uni dans le martyre comme je lui suis uni par la volonté ! » A ces paroles le préteur s’emporta et, sans compter les tourments qu’il fit subir à Prime, cette fois sous les yeux de Félicien, il ordonna encore de lui verser du plomb fondu dans la bouche. Bientôt il les fit conduire tous deux à l’amphithéâtre, où deux lions furent lâchés sur eux ; mais ces animaux se couchèrent à leurs pieds et les caressèrent de la tête et de la queue. Sur plus de douze mille hommes venus à ce spectacle, cinq cents embrassèrent avec leurs familles la religion chrétienne. Le préteur troublé de ces faits, donna l’ordre de trancher la tête à Prime et à Félicien.

    (Bréviaire)

    Cela se passait à Nomentum (aujourd’hui Mantana). Au VIIe siècle la ville fut dévastée par les Lombards, et le pape Théodore décida de transférer les reliques de Prime et Félcien en l’église romaine Saint-Etienne sur le Coelius (ou Saint-Etienne-le-Rond). Au-dessus de leur tombe il fit ériger une coupole décorée de mosaïque, qui existe toujours :

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  • De la férie

    Sancti nóminis tui, Dómine, timórem páriter et amórem fac nos habére perpétuum : quia numquam tua gubernatióne destítuis, quos in soliditáte tuæ dilectiónis instítuis. Per Dóminum…

    Faites, Seigneur, que nous ayons toujours la crainte et l’amour de votre saint nom, parce que vous ne cessez jamais de diriger ceux que vous établissez dans la solidité de votre amour.

    (Collecte du deuxième dimanche après la Pentecôte)

  • Fête Dieu

    La grande solennité a lui enfin, et tout l’annonce comme le triomphe de la foi et de l’amour. Nous le disions naguère, aux jours de l’Ascension, interprétant la parole du Christ : « Il vous est expédient que je me retire. » La soustraction de la présence visible de l’Homme-Dieu aux regards des mortels devait amener en eux, par l’énergique opération de l’Esprit Saint, une plénitude de lumière et une ferveur d’amour dont le Sauveur n’avait pas été l’objet dans le cours de sa vie mortelle. Marie seule, illuminée du feu divin, avait pu accomplir envers lui, durant cette période, les devoirs que la sainte Église lui rend aujourd’hui.

    Saint Thomas, dans son hymne céleste [Adoro te], chante ainsi : « Sur la croix, la divinité seule se dérobait aux regards ; ici, c’est l’humanité elle-même qui s’est cachée. » [In cruce latebat sola Deitas, / At hic latet simul et humanitas]. Et néanmoins, en aucun jour de l’année la sainte Église n’est plus triomphante, ni plus démonstrative. Le ciel est radieux ; la terre a revêtu sa parure brillante, pour en faire hommage à celui qui dit : « Je suis la fleur des champs » et le lis des vallons. » [Cantique des cantiques, II, 1]. La sainte Église, non contente d’avoir préparé un trône sur lequel la mystérieuse Hostie recevra, durant toute une Octave, les hommages d’une cour empressée, a jugé que la pompe d’un triomphe doit précéder ces solennelles et miséricordieuses assises. Aujourd’hui, elle ne se contentera plus d’élever le Pain sacré, après la prononciation des paroles divines ; elle lui fera franchir le seuil du temple, au milieu des flots de l’encens, à travers les fleurs et la feuillée, et le peuple catholique, fléchissant les genoux, adorera de toutes parts sous la voûte du ciel son Roi et son Dieu.

    Elles ne sont donc pas épuisées ces joies que chaque solennité de l’Année liturgique était venue successivement nous apporter. Elles revivent toutes dans celle d’aujourd’hui. Le roi-prophète l’avait prédit : « Le Seigneur a créé un mémorial de toutes ses merveilles : c’est l’aliment qu’il a préparé à ceux qui l’honorent » [psaume 90]. La sainte Église tressaille d’enthousiasme, tenant entre ses mains l’Époux divin qui a dit : « Voici que je demeure avec vous jusqu’à la consommation du monde. » La promesse était formelle, et elle s’est accomplie. Nous le vîmes s’élever, il est vrai, de la cime du mont des Oliviers et aller s’asseoir à la droite du Père. Mais depuis le jour sacré de la Pentecôte où l’Esprit divin a pris possession de la sainte Église, le mystère auguste de la Cène sacrée s’est accompli, en vertu des paroles souveraines : « Faites ceci en mémoire de moi » ; et dès lors la race humaine n’a plus été veuve de son Chef et de son Sauveur.

    Quoi d’étonnant alors que l’Église, en possession du Verbe de Dieu devenu ainsi sa chose, ait avancé tout à coup dans l’intelligence ? Les espèces sacramentelles qui protègent le mystère sont là, mais elles ne restent que pour introduire dans l’invisible…

    Dom Guéranger

    Ce sont là les dernières lignes écrites par dom Guéranger avant sa mort. Le premier jet de ce qu’il prévoyait d’écrire sur la fête de ce jour dans son Année liturgique, suivi de références à saint Augustin qui devaient nourrir le développement. C’est en soi émouvant, et plus encore quand on voit que ses derniers mots furent : « introduire dans l’invisible… ».

  • Sainte Clotilde

    Clovis eut de la reine Clotilde un premier fils. La reine, voulant qu’il reçût le baptême, adressait sans cesse de pieux conseils au roi, disant : Les dieux que vous adorez ne sont rien, puisqu’ils ne peuvent se secourir eux-mêmes ni secourir les autres ; car ils sont de pierre, de bois ou de quelque métal. Les noms que vous leur avez donnés sont des noms d’hommes et non de dieux, comme Saturne qui, dit-on, pour ne pas être chassé du trône par son fils, s’échappa par la fuite ; comme Jupiter lui-même, honteusement souillé de tous les vices, qui a déshonoré tant de maris, outragé les femmes de sa propre famille, et qui n’a pu s’abstenir de concubinage avec sa propre sœur, puisqu’elle disait : Je suis la sœur et la femme de Jupiter. Qu’ont jamais pu Mars et Mercure ? Ils possèdent plutôt la science de la magie qu’une puissance divine. Le Dieu qu’on doit adorer est celui qui, par sa parole, a tiré du néant le ciel et la terre, la mer et toutes les choses qui y sont contenues ; qui a fait briller le soleil, et a orné le ciel d’étoiles ; qui a rempli les eaux de poissons, la terre d’animaux, et les airs d’oiseaux ; à l’ordre duquel la terre se couvre de plantes, les arbres de fruits et les vignes de raisins ; dont la main a produit le genre humain ; qui a donné enfin à l’homme son ouvrage avec toutes les créatures pour lui obéir et le servir. Ces paroles de la reine ne portaient nullement l’esprit du roi à la foi sainte, mais il disait : C’est par l’ordre de nos dieux que toutes choses sont créées et produites ; il est clair que votre Dieu, ne peut rien ; bien plus, il est prouvé qu’il n’est pas de la race des dieux. » Cependant la reine fidèle présenta son fils au baptême : elle fit décorer l’église de voiles et de tapisseries, pour que cette pompe attirât vers la foi catholique le roi que ses discours n’avaient pu toucher. L’enfant ayant été baptisé et appelé Ingomer, mourut dans la semaine même de son baptême. Le roi, aigri de cette perte, faisait à la reine de vifs reproches, lui disant : Si l’enfant avait été consacré au nom de mes dieux, il vivrait encore ; mais, comme il a été baptisé au nom de votre Dieu, il n’a pu vivre. La reine lui répondit : Je rends grâces au puissant Créateur de toutes choses, qui ne m’a pas jugée indigne de voir associé à son royaume l’enfant né de mon sein. Cette perte n’a pas affecté mon âme de douleur, parce que je sais que les enfants que Dieu retire du monde, quand ils sont encore dans les aubes, sont nourris de sa vue. Elle engendra ensuite un second fils, qui reçut au baptême le nom de Chlodomir. Cet enfant étant tombé malade, le roi disait : Il ne peut lui arriver autre chose que ce qui est arrivé à son frère, c’est-à-dire qu’il meure aussitôt après avoir été baptisé au nom de votre Christ. Mais le Seigneur accorda la santé de l’enfant aux prières de sa mère.

    Grégoire de Tours, Histoire des Francs, livre II. C’est aussitôt après cet épisode que Grégoire raconte la conversion et le baptême de Clovis.

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    Le chef de sainte Clotilde porté en procession, lors du pèlerinage de 2007 avec l’abbé Pierre Lourdelet.

    Le 68e pèlerinage national de sainte Clotilde à Vivières aura lieu le dimanche 21 juin. Tous renseignements sur le site de la Confrérie Sainte Clotilde. (La messe est dans la « forme extraordinaire », comme elle l’a toujours été.)

  • Saints Pierre et Marcellin

    L’exorciste Pierre, mis en prison, sous l’empereur Dioclétien, par le juge Sérénus, pour avoir confessé la foi chrétienne, délivra du démon qui l’agitait, Pauline, fille d’Artémius, directeur de la prison. Frappés de ce prodige, le père et la mère de la jeune fille, toute sa famille et les voisins qui étaient accourus, embrassèrent la religion de Jésus-Christ. Pierre les amena au Prêtre Marcellin qui les baptisa tous. A cette nouvelle, Sérénus fit comparaître devant lui Pierre et Marcellin, les reprit durement, et joignit les menaces et l’intimidation à la sévérité de ses reproches pour les amener à renoncer au Christ. Marcellin lui ayant répondu avec une assurance toute chrétienne, le juge ordonna de le frapper à coups de poing, de le séparer de Pierre, de l’enfermer nu, sans nourriture et sans lumière, dans un cachot jonché de fragments de verre. Par son ordre aussi, Pierre fut à son tour étroitement enchaîné. Mais ces tourments ne faisant qu’accroître en tous deux la foi et le courage, ils persévérèrent dans leur confession ; et condamnés à avoir la tête tranchée, ils rendirent ainsi à Jésus-Christ un témoignage éclatant.

    (Bréviaire)

    C’est l’une des plus émouvantes épitaphes composées par saint Damase que celle de Pierre et Marcellin, au cimetière inter duas lauros, puisqu’elle fait état d’un témoignage personnel :

    MARCELLINE • TVOS • PARITER • PETRE • NOSSE • TRIVMPHOS
    PERCVSSOR • RETVLIT • DAMASO • MIHI • CVM • PVER • ESSEM
    HÆC • SIBI • CARNIFICEM • RABIDVM • MANDATA • DEDISSE
    SENTIBVS • IN • MEDIIS • VESTRA • VT • TVNC • COLLA • SECARET
    NE • TVMVLVM • VESTRVM • QVISQVAM • COGNOSCERE • POSSET
    VOS • ALACRES • VESTRIS • MANIBVS • MVNDASSE • SEPVLCRA
    CANDIDVLO • OCCVLTE • POSTQVAM • IACVISSE • SVB • ANTRO
    POSTEA • COMMONITAM • VESTRA • PIETATE • LVCILLAM
    HIC • PLACVISSE • MAGIS • SANCTISSIMA • CONDERE • MEMBRA

    O Marcellin, et vous aussi, ô Pierre, contemplez vos triomphes.
    Le bourreau rapporta à moi Damase quand j’étais encore enfant,
    qu’il avait reçu l’ordre du cruel tyran
    de vous couper la tête au milieu d’une forêt,
    afin que personne ne pût connaître votre tombe.
    Vous, alors, de vos mains, purifiâtes votre sépulcre avec diligence.
    Cependant, après avoir reposé quelque temps ignorés dans la grotte blanche,
    vous daignâtes en avertir Lucilla,
    qui préféra déposer ici votre dépouille sacrée.

    La forêt s’appelait silva nigra, la forêt noire. A cause de l’antro candidulo (la grotte « blanche ») dont parle saint Damase, la forêt fut appelée « silva candida », la forêt blanche, éclatante, radieuse. Et elle devint un siège épiscopal.

    Et les noms de Pierre et Marcellin furent très rapidement inscrits au canon de la messe, où ils figurent toujours.

  • Sainte Angèle Merici

    Comme je l’avais souligné en 2013, sainte Angèle Merici, qu’on connaît comme fondatrice des ursulines, fut en fait pendant l’essentiel de sa vie une tertiaire franciscaine.

    Elle n’a écrit (ou plutôt dicté) que trois textes, peu avant sa mort, la Règle, des Avis, et un Testament, trois textes sans autre prétention que de viser à assurer la bonne marche des couvents d’ursulines. Or, à la lecture de ces textes, qui datent de 1540, on ne peut que regretter qu’elle n’ait pas écrit davantage. Car cette lumineuse simplicité, cette douce charité qui coule de source, nous parlent aujourd’hui bien plus que tant d’écrits tarabiscotés de tant de mystiques, ou de sévères sentences de rigoureux doctrinaires.

    Dans les deux extraits du Testament que je reproduis ci-dessous, on verra aussi comment cette fille de paysans, qui n’est jamais allée à l’école, cite l’Ecriture Sainte. Au moment où, de l’autre côté de la Méditerranée, une certaine Thérèse, fille du chevalier Alonso Sánchez de Cepeda, va entreprendre la réforme du Carmel et ne se posera même pas la question de l’apprentissage du latin pour comprendre l’office divin ou la Bible.

    Premièrement donc, mes très affectionnées mères et sœurs en Jésus-Christ : efforcez-vous, avec l’aide de Dieu, d’acquérir et de conserver en vous de telles convictions et de si bons sentiments, que vous soyez portées à cette sollicitude et à ce gouvernement seulement par le seul amour de Dieu et le seul zèle pour le salut des âmes.

    Car, toutes vos œuvres et tous les actes de votre gouvernement étant ainsi enracinés dans cette double charité, ne pourront produire que des fruits bons et salutaires.

    En effet, comme le dit notre Sauveur, “Bona arbor non potest malos fructus facere”. L’arbre bon, dit-il, c’est-à-dire le cœur et l’esprit imprégnés de charité, ne peuvent produire que des œuvres bonnes et saintes.

    C’est pourquoi saint Augustin disait aussi : “ama et fac quod vis” ; c’est-à-dire : aie l’amour et la charité, et ensuite fais ce qui te plaît ; comme s’il nous disait ouvertement : la charité ne peut pécher.

    (…)

    Troisièmement : je vous en prie, de grâce, veuillez vous efforcer de mener vos filles avec amour et d’une main suave et douce, et non impérieusement ni avec âpreté ; mais en toute chose, veuillez être affables. Prêtez attention à Jésus, Christ qui dit : “Discite a me quia mitis sum et humilis corde” ; apprenez de moi, dit-il, que je suis affable et doux de cœur. Et de Dieu on lit : “disponit omnia suaviter” ; c’est-à-dire : il dispose et gouverne toutes choses suavement. Et Jésus-Christ dit encore : “Jugum meum suave, et onus meum leve” ; mon joug et ma servitude sont légers et suaves.

    Vous devez donc vous efforcer de faire de même vous aussi, et d’user de toute l’affabilité possible.

    Et par-dessus tout, gardez-vous de vouloir faire faire par force, car Dieu a donné à chacun le libre arbitre, et Il ne veut forcer personne, mais seulement il propose, invite et conseille, comme il le fait aussi par la bouche de saint Jean en disant : “Suadeo tibi emere coronam immarcescibilem” ; c’est-à-dire : je te conseille d’acheter la couronne qui ne se fane pas. Je te conseille, dit-il, et non pas : je te force.

    Je ne dis pas cependant qu’on ne doive parfois user de reproches et de sévérité, en lieux et temps voulus, selon l’importance, la situation et le besoin des personnes ; mais nous devons agir poussées seulement par la charité et le seul zèle des âmes.

  • Fête de la Très Sainte Trinité

    Dom Guéranger reproduit dans son Année liturgique, en ce jour, la traduction d’une hymne syriaque qui lui a été donnée « par une main fraternelle », et dont l’auteur est saint Syméon, évêque de Séleucie et Ctésiphon, martyr en 341, victime d’une terrible persécution menée par le roi des Perses. C’est un « vénérable écho de la foi des martyrs, le plus ancien monument de l’hymnographie orthodoxe en ces contrées où fut le berceau du monde », écrit avec émotion dom Guéranger.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez créés dans votre liberté au commencement.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez appelés votre ressemblante et vivante image.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez ennoblis par le don de la liberté et de la raison.

    Louange à vous, Père plein de justice, qui avez voulu nous posséder dans votre amour.

    Louange à vous, Fils très saint, qui avez pris notre corps pour nous sauver.

    Louange à vous, Esprit de vie, qui nous avez enrichis de vos dons.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez rassemblés et ramenés des erreurs de l’idolâtrie.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez conduits à la science de votre Divinité.

    Louange à vous, Seigneur, qui avez fait de nous des instruments raisonnables pour votre service.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez conviés à la splendide demeure du ciel.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez instruits des célestes hiérarchies.

    Louange à vous, Seigneur, qui nous avez jugés dignes de vous louer avec les Anges.

    Que toute bouche vous célèbre, Père, Fils, et Saint-Esprit.

    Que des hauteurs et des bas lieux louange soit à la Trinité.

    Que dans le siècle présent et futur soit à vous la louange et des esprits et des créatures revêtues d’un corps :

    Du temps jusqu’à l’éternité, dans les siècles des siècles. Amen.

     *

    En Perse, l’an 341, la passion de saint Siméon bar Sabas, évêque de Séleucie et Ctésiphon. Par ordre du roi des Perses Sapor II, il fut arrêté, chargé de fers et, comme il refusait d’adorer le soleil et qu’il rendait témoignage au Seigneur Jésus Christ d’une voix libre et assurée, il fut d’abord enfermé dans une prison pour esclaves avec une troupe de plus de cent compagnons, parmi lesquels des évêques, des prêtres et des clercs de divers ordres. Ils y furent détenus longtemps, puis, le vendredi de la Passion du Seigneur, tous les compagnons de Siméon furent égorgés sous ses yeux, pendant qu’il exhortait vivement chacun d’eux. Il fut enfin lui-même décapité, le dernier de tous. Avec lui souffrirent encore Abdécalas et Ananie, ses prêtres, personnages très distingués.
    On commémore également un grand nombre de martyrs, qui, après la mort de saint Siméon, furent frappés par l’épée à travers toute la Perse, pour le nom du Christ, sous le même roi Sapor, de 341 à 345.

    Martyrologe romain, au 17 avril

    (Le patriarche assyrien porte toujours le titre de métropolite de Séleucie-Ctésiphon.)

  • Samedi des quatre temps de Pentecôte

    Cáritas Dei diffúsa est in córdibus nostris, allelúia : per inhabitántem Spíritum ejus in nobis, allelúia, allelúia.

    « L’amour de Dieu a été versé dans nos cœurs, Alléluia, par le Saint-Esprit qui demeure en nous, Alléluia, Alléluia. »

    Cette belle parole de saint Paul est, pour ainsi dire, l’ite missa est de l’octave de la Pentecôte (Introït, Épître, Antienne du Benedictus). La liturgie résume ainsi tout ce qu’elle a à dire sur le Saint-Esprit. L’amour de Dieu est la filiation divine, la grâce sanctifiante, la gloire ; c’est la participation à la vie glorifiée du Christ. C’est l’essence de notre religion. Croître de plus en plus dans cet « amour de Dieu » est la tâche de notre vie, et le but de la sainte liturgie est de produire cet accroissement. « Répandu » est un mot de prédilection de la liturgie quand elle parle du Saint-Esprit (dans notre messe : diffusa, infunde, effundam). C’est donc le Saint-Esprit qui nous confère la grâce de la filiation divine ; mais, en même temps que la grâce, il vient lui-même et demeure en nous ; Et c’est aussi, pour le temps qui vient, notre grande consolation et notre force : nous sommes les temples de l’Esprit du Christ. Ce sera la tâche et ce sera notre tâche, pendant le temps qui suit la Pentecôte, de parer ce temple.

    C’est avec reconnaissance que nous prenons congé du temps pascal, pendant lequel nous avons reçu tant de grâces. Ce n’est pas sans mélancolie, cependant, que nous retournons aux difficultés de la vie quotidienne, aux rudes combats de l’existence.

    Dom Pius Parsch

  • Vendredi des quatre temps de Pentecôte

    L’évangile est celui du paralytique qu’on descend par le toit devant Jésus. Jésus lui dit : tes péchés te sont remis. Ce qui provoque la bronca, pour le moment intérieure, des pharisiens et des docteurs de la loi. Car Dieu seul peut remettre les péchés. Or Jésus leur dit : « Qu’est-ce qui est plus facile, de dire “tes péchés te sont remis”, ou “lève-toi et marche” ? » Et le paralytique est instantanément guéri. Ce qui veut dire que Jésus lui a réellement pardonné ses péchés, ce qui veut dire que Jésus est réellement Dieu.

    C’est pourquoi « la stupeur les saisit tous », et remplis de crainte religieuse, de la crainte qu’on éprouve devant la manifestation de la majesté divine, ils disaient : « Vidimus mirabilia hodie. »

    La traduction va de soi : « Nous avons vu des merveilles aujourd’hui. » Le mot “merveille” (attesté dès le XIe siècle) vient en droite ligne  de “mirabilia”, et l’on n’est guère étonné de trouver ce mot, puisque ces mirabilia, ces choses étonnantes et qui nous ravissent, ces miraculeuses merveilles de Dieu se trouvent un peu partout dans la Bible, près de 40 fois dans les psaumes, quand ce n’est pas Dieu lui-même qui est qualifié de “mirabilis”.

    Et pourtant, en dehors de Crampon, aucune traduction ne dit « merveilles ». La grande majorité dit « choses étranges », et d’autres « prodigieuses ».

    Ce qui montre en passant que Fillion, ou Glaire, contrairement à ce qu’ils disent, ne traduisent pas la Vulgate. Ou plus exactement s’en écartent dès que la Vulgate s’écarte des textes « originaux ».

    Il se trouve en effet que le “mirabilia” de la Vulgate ne traduit pas, apparemment, le mot grec qui désigne habituellement les merveilles de Dieu. Le grec ici dit παράδοξα, paradoxa : littéralement des choses contraires à l’opinion commune, contraires à ce que l’on attend, d’où extraordinaires ou étranges. Du mot grec vient le français paradoxe, paradoxal. Et le grec a aussi ce sens, d’abord pour désigner les paradoxes stoïciens.

    On voit que le mot a tous ces sens-là dans l’évangile : les gens viennent de voir quelque chose d’étrange, d’extraordinaire, vraiment contraire à l’opinion commune. Et de paradoxal, aussi, puisque Jésus montre qu’il guérit l’âme en guérissant le corps, qu'il est Dieu alors qu'il est un homme.

    Mais finalement paradoxa, au nominatif masculin paradoxos, a fini par vouloir dire “merveilleux”, dans une circonstance précise : c’est le titre donné à un athlète qui  remporté une victoire particulièrement éclatante, ou à un artiste qui a produit une œuvre extraordinaire.

    Or dans la double guérison du paralytique, Jésus vient de se montrer le Paradoxos, le Merveilleux. Et c’est sans doute pourquoi παράδοξα a été traduit (dans tous les manuscrits) par “mirabilia”, et que saint Jérôme, en révisant les textes, a laissé cette traduction. Comme Dieu dans les psaumes est Mirabilis.

    Peut-être Olivier Messiaen pensait-il à cela, lui qui ne se rassasiait pas de louer les merveilles de Dieu (c’est même son insistance qui m’a fait comprendre de quoi il s’agissait), lorsque dans son opéra Saint François d’Assise Frère Bernard demande à l’ange quel est son nom et que celui-ci répond : « Ne me demande pas mon nom, ne me demande pas mon nom : il est Merveilleux » (citation en fait de Juges 13,18). La musique alors montre que c’est vraiment son nom.

  • Jeudi de Pentecôte

    Séquence de sainte Hildegarde pour la Pentecôte, par l'ensemble Sequentia

    O ignis Spiritus Paracliti,
    vita vitae omnis creaturae,
    sanctus es vivificando formas.

    O feu de l’Esprit Paraclet, vie de la vie de toute créature, saint es-tu de donner forme à la vie.

    Sanctus es ungendo
    periculose fractos,
    sanctus es tergendo
    fetida vulnera.

    Saint es-tu de répandre ton baume sur les brisés de la vie en danger. Saint es-tu d’essuyer les blessures répugnantes.

    O spiraculum sanctitatis,
    o ignis caritatis,
    o dulcis gustus
    in pectoribus
    et infusio cordium
    in bono odore virtutum.

    O haleine de sainteté, o feu de l’amour, o goût suave dans nos entrailles, o bon parfum des vertus infusé dans les cœurs.

    O fons purissimus,
    in quo consideratur
    quod Deus alienos
    colligit
    et perditos requirit.

    O fontaine très pure où voir tout à la fois Dieu qui rassemble les étrangers et va chercher ceux qui sont perdus.

    O lorica vitae
    et spes compaginis
    membrorum omnium.
    O cingulum honestatis,
    salva beatos.

    O cuirasse de la vie et espérance, lien d’assemblage de tous les membres ; o ceinture de la vertu, sauve les bienheureux !

    Custodi eos
    qui carcerati sunt
    ab inimico,
    et solve ligatos,
    quos divina vis
    salvare vult.

    Veille sur ceux qui ont été emprisonnés par l’ennemi et brise leurs chaînes : eux que la puissance divine veut sauver.

    O iter fortissimum,
    quod penetravit omnia
    in altissimis
    et in terrenis
    et in omnibus abyssis,
    tu omnes componis
    et colligis.

    O chemin de bravoure qui a tout pénétré, dans les cieux, sur terre et dans les abîmes, tu rassembles et unis tous les êtres.

    De te nubes fluunt,
    aether volat,
    lapides humorem habent,
    aquae rivulos educunt
    et terra viriditatem sudat.

    Par ton génie, les nuages filent, l’air se meut impalpable, les pierres suintent ; les eaux surgissent en ruisselets et la terre épanche sa viridité.

    Tu etiam semper
    educis doctos,
    per inspirationem sapientiae
    laetificos.

    Toi encore tu fais toujours surgir des sages, porteurs de la joie que leur inspire la sagesse.

    Unde laus tibi sit,
    qui es sonus laudis
    et gaudium vitae,
    spes et honor fortissimus,
    dans praemia lucis.

    Pour tout cela, louange à toi, qui fais retentir la louange, à toi joie de vivre, espérance, honneur et puissance, qui donnes la récompense de la lumière.

    Traduction de Philippe Lecoq, qui me paraît bonne (et plus près du texte que celle de dom Guéranger qui donne cette séquence en ce jour), et qui a raison de seulement transcrire le mot « viriditas », qui est le mot fétiche de sainte Hildegarde. J’ai trouvé aussi une traduction, mais seulement partielle, de Remy de Gourmont :

    O Feu de l'Esprit consolateur, vie de la vie de toute créature, tu es saint parce que tu vivifies les formes, — tu es saint parce que tu daignes oindre les membres périlleusement brisés, tu es saint parce que tu panses les plus fétides plaies, — ô soupirail de sainteté !... — ô forteresse de vie, ô espoir de la solidarité humaine, ô refuge de la beauté, sauve les bénis ! — Garde ceux qui sont prisonniers de l'ennemi, déchaîne ceux qui sont enchaînés, sauve ceux que veut sauver la Force divine !... — Par toi les nuages vont, l'éther plane, les pierres transpirent, les eaux se font ruisseaux, la terre exhale de verdoyantes suers (sic). — Et c'est toi aussi qui guides les doctes létifiés par l'inspiration de ta Sagesse. — Donc, louange à toi, toi le vocable de louanges, toi, la joie de la vie, l'espérance, la force et l'honneur, toi le dispensateur de la lumière !