Les quatre temps de l’Avent n’avaient encore aucun rapport avec l’Avent au temps de saint Léon le Grand (Ve siècle). Le « jeûne du dixième mois » (mercredi, vendredi et vigile du dimanche) n’était pas lié au cycle de Noël, comme en témoignent les (cinq) sermons de ce pape prononcés le dimanche précédent. Il s’agissait du jeûne qui marquait l’hiver comme les autres « quatre temps » marquaient les autres saisons. Et c’était l’occasion de rendre grâces pour les récoltes de l’année. Loin donc d’annoncer Noël, le « jeûne du dixième mois » était une célébration de la fin de l’année agricole, et non du début de l’année liturgique.
Mais peu à peu il servit de préparation pénitentielle à Noël, et il s’étendit, de façons diverses selon les Eglises, aux autres semaines de décembre, et de novembre, et à tous les jours de ces semaines, pour former finalement le « carême de la Saint-Martin », 40 jours entre la fête de saint Martin et Noël.
Curieusement, il n’y avait pas encore de liturgie spécifique de l’Avent. Cette liturgie somptueuse, d’une extraordinaire richesse, d’une lumineuse profondeur spirituelle, n’est venue que plus tard, sans qu’on sache quand. Sans doute une fois que le « carême de la Saint-Martin » fût partout réduit aux quatre semaines avant Noël. C’est ainsi que l’on constate qu’il n’y a aucun sermon des pères de l’Eglise sur l’Avent. Ceux de saint Léon sur le jeûne du dixième mois ne font aucune allusion à ce temps liturgique. Les premiers sacramentaires n’en font pas mention. Seul le sacramentaire dit grégorien en parle, mais malgré son nom il est plus tardif. Le premier grand auteur à prononcer des sermons de l’Avent est saint Bernard.
C’est l’occasion de souligner que la liturgie de l’Avent est une spécialité latine. L’année liturgique byzantine commence avec la Nativité de Marie, qui est en effet l’aurore du salut. A l’approche de Noël il y a ici et là quelques allusions à la fête qui vient, mais rien d’organisé, à part la liturgie des deux dimanches qui la précèdent : le dimanche « des ancêtres du Seigneur » (selon la chair) et le « dimanche des Pères » ou « de la généalogie » (où l’on fait mémoire de tous les saints de l’Ancien Testament, d’Abraham à saint Joseph). La liturgie syro-maronite a quant à elle une préparation sur six dimanches : Annonce de la naissance de Jean le Précurseur (ou Annonce à Zacharie), Annonciation de la Mère de Dieu, Visitation, Présentation de Marie au Temple, Révélation à Joseph, dimanche de la généalogie du Sauveur. Cette période est appelée Soubara ou Souboro, c’est-à-dire « Annonciation ». La célébration de l’Annonciation comme fête préparatoire à Noël existait aussi dans de nombreuses Eglises occidentales avant qu’on la fixe à sa date historique le 25 mars. Mais c'est elle aussi que l'on célèbre en ce mercredi des quatre temps.
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