Dixième et dernier chapitre des Gloires de Marie, de saint Alphonse-Marie de Liguori.
L'auguste nom de la Mère de Dieu, le nom de Marie, n'est pas d'origine terrestre ; il ne fut pas, comme les autres noms, inventé par l'esprit des hommes ; il ne lui fut pas donné par leur libre choix : descendu du ciel, il lui fut imposé par un décret divin ; ainsi l'attestent saint Jérôme, saint Épiphane, saint Antonin, et d'autres auteurs.
" Le nom de Marie, dit saint Pierre Damien, fut tiré du trésor de la Divinité ". Oui, ô Marie, ajoute Richard de Saint-Laurent, votre nom sublime et admirable est sorti du trésor de la Divinité ; les trois personnes de la Trinité sainte vous l'ont donné d'un commun accord, ce nom qui éclipse tous les noms après celui de votre Fils ; elles l'ont rempli de tant de majesté et de puissance que, quand il est prononcé, il faut que tout se prosterne pour le vénérer, au ciel, sur la terre et dans les enfers. Mais, sans parler des autres prérogatives que le Seigneur a voulu attacher au nom de Marie, considérons ici combien il l'a rendu doux aux serviteurs de cette céleste Reine, soit pendant la vie, soit à l'heure de la mort.
Premièrement, le nom de Marie est doux à ses serviteurs pendant leur vie. Le saint anachorète Honorius le trouvait plein de tout ce qu'il y a de douceur et de suavité en Dieu ; et, pour le glorieux saint Antoine de Padoue, ce nom avait les mêmes charmes que saint Bernard trouvait dans celui de Jésus. " Le nom de Jésus, avait dit Bernard, le nom de Marie, reprenait Antoine, est une joie au cœur de ses pieux serviteurs, un miel sur leurs lèvres, une mélodie pour leurs oreilles ". Le vénérable Juvénal Ancina, évéque de Saluces, goûtait, en prononçant le nom de Marie, une douceur sensible telle, dit son historien, qu'il s'en léchait les lèvres. On lit la même chose d'une femme de Cologne : " Je ne prononce jamais le nom de Marie, assurait-elle à l'évêque Massilius, sans que mon palais soit flatté d'une saveur supérieure à celle du miel ". Massilius adopta sa pratique et expérimenta la même douceur.
Lors de l'Assomption de la Vierge, les anges demandèrent à trois reprises quel était son nom ; on peut le conclure de ces trois passages des Cantiques : " Quelle est celle-ci qui monte du désert comme un nuage d'encens ? - Quelle est celle-ci qui s'avance comme une aurore naissante ? - Quelle est celle-ci qui s'élève du désert, nageant dans les délices " ? Pourquoi, se demande Richard, pourquoi les anges répètent-ils tant de fois leur question : Quelle est celle-ci ?... C'est sans doute, répond-il, afin d'entendre répéter le nom de Marie, tant ce nom résonne délicieusement à l'oreille des anges eux-mêmes.
Mais ce n'est pas de cette douceur sensible que j'entends parler ici : il n'est pas donné à tous de la sentir ; je veux parler d'une douceur spirituelle, d'un sentiment salutaire de consolation, d'amour, de joie, de confiance et de force, que le nom de Marie inspire communément à ceux qui le prononcent avec dévotion.
L'Abbé Francon dit à ce sujet : " Après le saint nom de Jésus, le nom de Marie est si fécond en biens de tout genre, que, ni sur la terre ni dans le ciel, on n'entend prononcer aucun nom qui remplisse les âmes dévotes d'autant de grâces, de consolation et d'espérance. En effet, continue le même auteur, le nom de Marie renferme je ne sais quoi d'admirable, de doux et de divin, qui fait qu'il ne peut retentir dans un cœur aimant sans l'embaumer d'une odeur de sainte suavité. Et voici, dit-il en finissant, la merveille de cet auguste nom : mille fois répété, il paraît toujours nouveau à ceux qui aiment Marie, aussi bien que le plaisir avec lequel ils l'entendent ".
Le bienheureux Henri Suso avait bien fait, lui aussi, l'expérience de cette douceur du nom de Marie. En le prononçant, il se sentait, disait-il lui-même, tout pénétré de confiance et enflammé d'amour ; aussi, versant des larmes de joie et transporté hors de lui-même, il eut voulu que le cœur lui bondît de la poitrine jusque sur les lèvres ; car, assurait-il, ce nom si doux, si cher, se liquéfiait au fond de son âme comme un rayon de miel. Après quoi, il s'écriait : " O nom plein de suavité ! O Marie ! que devez-vous donc être vous-même, si votre nom seul est déjà si aimable et si gracieux " ?
De son côté, saint Bernard, s'adressant à sa bonne Mère, lui disait, en ces termes pleins de tendresse, la flamme dont il brûlait pour elle : " O grande, ô clémente, ô admirable Marie ! ô Vierge très sainte et digne de tout louange, combien doux et aimable est votre nom ! On ne peut le prononcer sans se sentir embrasé d'amour et pour vous et pour Dieu ; il suffit même que ce nom se présente à la pensée de ceux qui vous aiment, pour accroître beaucoup leur amour et les consoler ". - Ah ! si les richesses consolent les pauvres, en les tirant de leur misère, ajoute Richard de Saint-Laurent, combien plus, ô Marie, votre nom nous console dans nos peines, car, bien mieux que les richesses de la terre, il adoucit les angoisses de la vie présente !
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