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Benoît XVI - Page 86

  • L’église et l’Eglise

    Extraits de l'homélie de Benoît XVI à la cathédrale Saint-Patrick de New York

    Je voudrais attirer votre attention sur quelques aspects de cette très belle structure qui peut servir il me semble, de point de départ pour une réflexion sur nos vocations particulières dans l'unité du Corps mystique.

    Le premier aspect concerne les vitraux qui inondent l'intérieur d'une lumière mystique. Vues de l'extérieur, ces fenêtres semblent sombres, lourdes et même lugubres. Mais quand on entre dans l'église, elles prennent soudain vie ; elles reflètent la lumière qui les traversent en révélant toute leur splendeur. De nombreux écrivains - ici en Amérique nous pouvons penser à Nathaniel Hawthorne - ont utilisé l'image des vitraux pour illustrer le mystère de l'Eglise elle-même. Ce n'est que de l'intérieur, à partir de l'expérience de la foi et de la vie ecclésiale, que nous voyons l'Eglise telle qu'elle est vraiment : inondée de grâc! e, resplendissante de beauté, décorée des multiples dons de l'Esprit. Ceci veut dire que nous qui vivons la vie de la grâce dans la communion de l'Eglise sommes appelés à attirer toutes les personnes à l'intérieur de ce mystère de lumière.

    Comme toutes les cathédrales gothiques, elle a une structure très complexe, dont les proportions précises et harmonieuses symbolisent l'unité de la création de Dieu. Les artistes du moyen âge représentaient souvent le Christ, la Parole créatrice de Dieu, comme un « géomètre » céleste, le compas en main, qui ordonne le cosmos avec une infinie sagesse et détermination. Une telle image ne nous fait-elle pas penser à notre besoin de voir toute chose avec les yeux de la foi, afin de pouvoir ainsi les comprendre dans leur perspective la plus vraie, da! ns l'unité du plan éternel de Dieu ? Ceci exige, nous le savons, une conversion continuelle et l'engagement à « nous renouveler par une transformation spirituelle de notre jugement » (cf. Ep 4, 23).

    L'unité d'une cathédrale gothique, nous le savons, n'est pas l'unité statique d'un temple classique, mais une unité née de la tension dynamique de forces diverses qui poussent l'architecture vers le haut, l'orientant vers le ciel. Ici aussi nous pouvons voir un symbole de l'unité de l'Eglise qui est l'unité - comme nous l'a dit saint Paul - d'un corps vivant composé de plusieurs membres divers, chacun avec son rôle et son but. Nous voyons ici également la nécessité de reconnaître et respecter les dons de chaque membre du corps comme « des manifestations de l'Esprit en vue du bien commun » (1 Co 12, 7). Dans la structure de l'Eglise voulue par Dieu il faut ce! rtes distinguer les dons hiérarchiques des dons charismatiques (cf. Lumen gentium, 4). Mais la variété même et la richesse des grâces accordées par l'Esprit nous invitent constamment à discerner comment insérer ces dons de façon juste dans le service de la mission de l'Eglise.

    Tournons donc notre regard vers le haut ! Et avec une grande humilité et confiance demandons à l'Esprit de nous donner chaque jour les moyens de grandir dans la sainteté qui fera de nous des pierres vivantes dans le temple qu'Il est précisément en train d'élever maintenant au coeur du monde. Si nous devons être de véritables forces d'unité, soyons les premiers à chercher une réconciliation intérieure à travers la pénitence ! Pardonnons les offenses subies et réprimons tout sentiment de colère et de dispute ! Soyons les premiers à faire preuve de l'humilité et de la pureté de cœur nécessaires pour s'approcher de la splendeur de la vérité de Dieu ! Dans la fidélité au dépôt de la foi confié aux apôtres (cf. 1 Tm 6, 20), soyons de joyeux témoins de la force transformatrice de l'Evangile !

    (trad. Zenit)

  • Benoît XVI, la liberté et la vérité (suite)

    Dans l’homélie du pape, hier, au Yankee Stadium de New York

    L'unité de l'Eglise n'a pas d'autre base que le Verbe de Dieu, fait chair en Jésus Christ notre Seigneur. Tous les signes extérieurs d'identité, toutes les structures, les associations et les programmes, aussi valables et même essentiels soient-ils, n'existent, en définitive, que pour soutenir et favoriser l'unité profonde qui, dans le Christ, est le don indéfectible de Dieu à son Eglise.

    L'unité de l'Eglise est aussi « apostolique ». C'est une unité visible, fondée sur les Apôtres que le Christ a choisis pour être les témoins de sa résurrection, et elle est née de ce que les Ecritures appellent « l'obéissance de la foi » (Rm 1, 5; cf. Ac 6,7).

    « Autorité »... « obéissance ». Pour être franc, ces paroles ne sont pas faciles à prononcer aujourd'hui. De tels mots représentent une « pierre d'achoppement » pour beaucoup de contemporains, spécialement dans une société qui donne à juste titre une valeur élevée à la liberté personnelle. Cependant, dans la nuit de notre foi, en Jésus Christ, - « le chemin, la vérité et la vie » - nous voyons peu à peu la signification, la valeur, et bien sûr la beauté plénière de ces paroles. L'Evangile nous enseigne que la vraie liberté, la liberté des enfants de Dieu, ne se trouve que dans l'abandon de soi qui appartient au mystère de l'amour. Ce n'est qu'en se perdant soi-même, nous dit le Seigneur, que nous nous trouvons vraiment nous-mêmes (cf. Lc 17, 33).  La liberté véritable fleurit lorsque nous nous détournons du fardeau du péché qui embue nos perceptions et affaiblit nos résolutions, pour trouver la source de notre bonheur ultime en celui qui est l'amour infini, la liberté infinie, la vie infinie. « Dans sa volonté nous trouvons la paix ».

    La liberté réelle est alors le don gracieux de Dieu, le fruit de la conversion à sa vérité, la vérité qui nous rend libre (cf. Jn 8, 32). Et cette liberté dans la vérité apporte dans son sillage une façon nouvelle et libératrice de chercher la réalité. Lorsque nous revêtons « l'esprit du Christ » (cf. Ph 2, 5), de nouveaux horizons s'ouvrent à nous ! A la lumière de la foi, dans la communion de l'Eglise, nous trouvons aussi l'inspiration et la force de devenir dans le monde un levain de l'Evangile. Nous devenons la lumière du monde, le sel de la terre (cf. Mt 5, 13-14), auquel est confié « l'apostolat » de rendre nos vies et le monde où nous vivons, toujours plus conformes au dessein de salut de Dieu.

    (trad. Zenit)

    A la cathédrale Saint-Patrick de New York

    Faisant preuve d'une grande profondeur, saint Irénée a compris que l'exhortation de Moïse au peuple d'Israël : « Choisi la vie ! » (Dt 30, 19) était la raison la plus profonde de notre obéissance à tous les commandements de Dieu (cf. Adv. Haer. IV, 16, 2-5). Peut-être avons-nous perdu de vue le fait que dans une société dans laquelle l'Eglise semble pour beaucoup juridique et « institutionnelle », notre défi le plus urgent est de transmettre la joie qui naît de la foi et l'expérience de l'amour de Dieu.

    (trad. Zenit)

    Dans son discours aux jeunes, au séminaire Saint-Joseph de New York

    Après avoir souligné que les jeunes américains étaient éduqués "au sens de la générosité, du service et de la droiture", le Saint-Père a signalé que ses propres années de jeunesse "ont été détruites par un funeste régime qui pensait avoir toutes les réponses et dont l'influence a grandi, s'infiltrant dans les écoles et les organismes civils, ainsi que dans la politique et même dans la religion, avant que l'on puisse s'apercevoir clairement qu'il était monstrueux. Dieu y avait été proscrit". Il a invité les jeunes à rendre grâce à Dieu parce que malgré tout, "aujourd'hui une grande partie de leur génération peut jouir des libertés qui ont surgies grâce à l'expansion de la démocratie et du respect des droits de l'homme. Cependant -a-t-il poursuivi- , le pouvoir destructif demeure. Dire le contraire serait se mentir à soi- même. Mais celui-ci ne triomphera jamais; il a été battu". Dans la liturgie de la Vigile pascale, "nous appelons Dieu pour le monde. Il dissipe les ténèbres du cœur. Il dissipe les ténèbres de l'esprit. Que peuvent-être ces ténèbres ? Que se passe-t-il quand les personnes, surtout les plus vulnérables, trouvent le poing fermé de la répression ou de la manipulation au lieu de la main tendue de l'espérance?". Benoît XVI a ensuite mentionné "les personnes touchées par l'abus de drogue et de stupéfiants, faute de toit ou en raison de la pauvreté, celles touchées par le racisme, la violence ou l'humiliation, en particulier les jeunes filles et les femmes".

    Le Saint-Père a ensuite dit qu'un "deuxième type de ténèbres, celles qui touchent à l'esprit, n'est pas souvent perçu, et est donc particulièrement nocif. La manipulation de la vérité dénature notre perception de la réalité et trouble notre imagination et nos aspirations". Pour cela, "il faut sauvegarder à tout prix l'importance fondamentale de la liberté" qui "peut être mal comprise et mal employée, de sorte qu'elle ne conduit pas au bonheur que nous espérons tous, mais à un obscur scénario de manipulation, dans lequel la compréhension que nous avons de nous-mêmes et du monde devient confuse ou dénaturée par ceux qui cachent leurs intentions. Souvent, -a encore observé le Saint-Père - la liberté est revendiquée sans qu'il ne soit jamais fait référence à la vérité de la personne humaine" et "au lieu de la vérité, ou mieux de son absence, l'idée selon laquelle en donnant une valeur indistincte à tout, on assure la liberté et la libération de la conscience, s'est répandue. Cela s'appelle le relativisme".

    "La vérité ne s'impose pas. Elle n'est pas non plus un simple ensemble de règles. Elle est la découverte de Quelqu'un qui ne nous trahit jamais, de Quelqu'un en qui nous pouvons toujours avoir confiance. En fait, la vérité est une personne: Jésus-Christ. C'est la raison pour laquelle la vraie liberté n'est pas de choisir "de se désintéresser de". Elle est de décider "de se compromettre avec". Benoît XVI a donc invité les jeunes à se demander comment aider les autres "à marcher sur le chemin de la liberté qui amène à la pleine satisfaction et au bonheur durable. La lumière du Christ vous invite à être des étoiles-guides pour les autres, en marchant sur le chemin du Christ, qui est le chemin du pardon, de la réconciliation, de l'humilité, de la joie et de la paix".

    (synthèse d’ Eucharistie miséricordieuse)

  • Benoît XVI : l’espérance passe par la pénitence

    L’agence Zenit publie une traduction de l’homélie de Benoît XVI lors de la messe au National's Stadium de Washington. En voici deux extraits, qui sont bien dans la ligne de Spe Salvi. Merci au pape de rappeler la nécessité et la grandeur du sacrement de pénitence. (Notons qu’il dit bien pénitence, et non « réconciliation ». Car il n’y a pas de réconciliation sans pénitence.)

    Dans l'exercice de mon ministère de successeur de Pierre, je suis venu en Amérique pour vous confirmer, chers frères et sœurs, dans la foi des apôtres (cf. Lc 22, 32). Je suis venu pour proclamer à nouveau, comme saint Pierre le proclama le jour de la Pentecôte, que Jésus Christ est le Seigneur et le Messie, ressuscité de la mort, assis à la droite du Père dans la gloire et constitué juge des vivants et des morts (Ac 2, 14sq). Je suis venu pour répéter l'exhortation urgente des apôtres à la conversion pour le pardon des péchés et pour implorer du Seigneur une nouvelle effusion de l'Esprit Saint sur l'Eglise dans ce pays. Comme nous l'avons entendu en ce temps pascal, l'Eglise est née à travers les dons du repentir et de la foi dans le Seigneur ressuscité, donnés par l'Esprit. A chaque époque, celle-ci est poussée par ce même Esprit à porter aux hommes et aux femmes de chaque race, langue et peuple (cf. Ap 5, 9) la bonne nouvelle de notre réconciliation avec Dieu dans le Christ. (...)

    Dans le passage de l'Evangile d'aujourd'hui, le Seigneur ressuscité fait don de l'Esprit Saint aux apôtres et leur concède l'autorité de pardonner les péchés. Par le pouvoir invincible de la grâce du Christ, confié à de fragiles ministres humains, l'Eglise renaît continuellement et l'espérance d'un nouveau départ est donnée à chacun d'entre nous. Nous sommes confiants dans le pouvoir de l'Esprit d'inspirer des conversions, de soigner toutes les blessures, de dépasser toutes les divisions et de susciter une vie et une liberté nouvelles ! Combien avons-nous besoin de tels dons ! Et ils sont tellement à portée de main, notamment dans le sacrement de la pénitence ! La force libératrice de ce sacrement, dans lequel notre confession sincère du péché rencontre la parole miséricordieuse de pardon!  et de paix de la part de Dieu, a besoin d'être redécouverte et faite sienne par tous les catholiques. Le renouveau de l'Eglise en Amérique dépend en grande partie de la pratique de la pénitence et de la croissance de la sainteté : toutes deux sont inspirées et réalisées par ce sacrement.

  • Le pape à l’ONU

    Quelques extraits importants du discours de Benoît XVI à l’ONU. Le texte intégral en français ici. (Sur le site du Vatican, pour l’heure, il est à moitié en français et à moitié en anglais, car il semble que le pape ait en effet prononcé la première moitié de son discours en fançais. Ce qui n'est pas anodin.)

    La liberté et le bien commun

    Dans le contexte des relations internationales, il faut reconnaître le rôle primordial des règles et des structures qui, par nature, sont ordonnées à la promotion du bien commun et donc à la sauvegarde de la liberté humaine. Ces régulations ne limitent pas la liberté. Au contraire, elles la promeuvent quand elles interdisent des comportements et des actions qui vont à l’encontre du bien commun, qui entravent son exercice effectif et qui compromettent donc la dignité de toute personne humaine. Au nom de la liberté, il doit y avoir une corrélation entre droits et devoirs, en fonction desquels toute personne est appelée à prendre ses responsabilités dans les choix qu’elle opère, en tenant compte des relations tissées avec les autres. Nous pensons ici à la manière dont les résultats de la recherche scientifique et des avancées technologiques ont parfois été utilisés. Tout en reconnaissant les immenses bénéfices que l’humanité peut en tirer, certaines de leurs applications représentent une violation évidente de l’ordre de la création, au point non seulement d’être en contradiction avec le caractère sacré de la vie, mais d’arriver à priver la personne humaine et la famille de leur identité naturelle. De la même manière, l’action internationale visant à préserver l’environnement et à protéger les différentes formes de vie sur la terre doit non seulement garantir un usage rationnel de la technologie et de la science, mais doit aussi redécouvrir l’authentique image de la création. Il ne s’agira jamais de devoir choisir entre science et éthique, mais bien plutôt d’adopter une méthode scientifique qui soit véritablement respectueuse des impératifs éthiques.

    Le droit international est lié à la reconnaissance de la personne comme image du Créateur

    Le principe de la « responsabilité de protéger » était considéré par l’antique ius gentium comme le fondement de toute action entreprise par l’autorité envers ceux qui sont gouvernés par elle : à l’époque où le concept d’État national souverain commençait à se développer, le religieux dominicain Francisco De Vitoria, considéré à juste titre comme un précurseur de l’idée des Nations unies, décrivait cette responsabilité comme un aspect de la raison naturelle partagé par toutes les nations, et le fruit d’un droit international dont la tâche était de réguler les relations entre les peuples. Aujourd’hui comme alors, un tel principe doit faire apparaître l’idée de personne comme image du Créateur, ainsi que le désir d’absolu et l’essence de la liberté. Le fondement des Nations unies, nous le savons bien, a coïncidé avec les profonds bouleversements dont a souffert l’humanité lorsque la référence au sens de la transcendance et à la raison naturelle a été abandonnée et que par conséquent la liberté et la dignité humaine furent massivement violées. Dans de telles circonstances, cela menace les fondements objectifs des valeurs qui inspirent et régulent l’ordre international et cela mine les principes intangibles et coercitifs formulés et consolidés par les Nations unies. Face à des défis nouveaux répétés, c’est une erreur de se retrancher derrière une approche pragmatique, limitée à mettre en place des « bases communes », dont le contenu est minimal et dont l’efficacité est faible.

    Ce que veut dire « universel »

    Les droits reconnus et exposés dans la Déclaration s’appliquent à tout homme, cela en vertu de l’origine commune des personnes, qui demeure le point central du dessein créateur de Dieu pour le monde et pour l’histoire. Ces droits trouvent leur fondement dans la loi naturelle inscrite au cœur de l’homme et présente dans les diverses cultures et civilisations. Détacher les droits humains de ce contexte signifierait restreindre leur portée et céder à une conception relativiste, pour laquelle le sens et l’interprétation des droits pourraient varier et leur universalité pourrait être niée au nom des différentes conceptions culturelles, politiques, sociales et même religieuses. La grande variété des points de vue ne peut pas être un motif pour oublier que ce ne sont pas les droits seulement qui sont universels, mais également la personne humaine, sujet de ces droits.

    La liberté religieuse

    Il n’est pas imaginable que des croyants doivent se priver d’une partie d’eux-mêmes – de leur foi – afin d’être des citoyens actifs. Il ne devrait jamais être nécessaire de nier Dieu pour jouir de ses droits. Il est d’autant plus nécessaire de protéger les droits liés à la religion s’ils sont considérés comme opposés à une idéologie séculière dominante ou à des positions religieuses majoritaires, de nature exclusive. La pleine garantie de la liberté religieuse ne peut pas être limitée au libre exercice du culte, mais doit prendre en considération la dimension publique de la religion et donc la possibilité pour les croyants de participer à la construction de l’ordre social.

    Le fondement transcendant des droits de la personne humaine

    Ces droits trouvent leur fondement et leur forme dans la nature transcendante de la personne, qui permet aux hommes et aux femmes d’avancer sur le chemin de la foi et de la recherche de Dieu dans ce monde. Il faut renforcer la reconnaissance de cette dimension si nous voulons soutenir l’espérance de l’humanité en un monde meilleur et si nous voulons créer les conditions pour la paix, le développement, la coopération et la garantie des droits pour les générations à venir. Dans ma récente encyclique Spe salvi, je rappelais que « la recherche pénible et toujours nouvelle d’ordonnancements droits pour les choses humaines est le devoir de chaque génération » (n. 25). Pour les chrétiens, cette tâche trouve sa justification dans l’espérance qui jaillit de l’œuvre salvifique de Jésus Christ.

  • La vérité

    Pour suivre le voyage du pape aux Etats-Unis avant d’avoir les textes de ses discours, on se reportera, comme hier, à e-deo.

    Ce qui me frappe est son insistance sur la vérité, et sa façon d’amener son auditoire à prendre au sérieux le fait que la vérité est le Christ.

    Son discours aux représentants des autres religions était remarquable de ce point de vue. Benoît XVI commence par se féliciter de la tradition américaine d’entente et de liberté entre les fidèles des diverses religions, ainsi que des programmes de dialogue interreligieux et interculturel, puis il lâche que « le but plus large du dialogue est de découvrir la vérité » sur l’origine et la fin de l’humanité, le bien et le mal. Puis il dit que sur ce « forum du dialogue interreligieux » le christianisme apporte Jésus, « le Logos éternel qui est devenu chair pour réconcilier l’homme avec Dieu et révéler la raison profonde de toutes choses ». Et il ajoute que si nous voulons la paix, « nous devons aussi écouter attentivement la voix de la vérité ». « Notre dialogue ne doit pas s’arrêter à l’identification d’un ensemble commun de valeurs, mais doit continuer jusqu’à trouver leur fondement ultime. Nous n’avons pas de raison d’avoir peur, car la vérité dévoile pour nous la relation essentielle entre le monde et Dieu. Nous sommes capables de percevoir que la paix est un “don céleste“ qui nous presse à conformer l’histoire humaine à l’ordre divin. C’est-là que réside la “vérité de la paix“. »

    Dans son discours aux éducateurs catholiques, il proclame d’emblée que « d’abord et avant tout une institution éducative catholique est un lieu où rencontrer le Dieu vivant qui révèle en Jésus-Christ son amour et sa vérité transformante ».

    Cette « dynamique entre rencontre personnelle, savoir et témoignage chrétien fait partie de la diaconie de la vérité que l’Église exerce au sein de l’humanité ». « La révélation de Dieu offre à toute génération l’occasion de découvrir la vérité définitive sur sa propre vie et le but de l’histoire. » Et la vérité doit « imprégner chaque dimension de ces institutions », pour que l’Évangile guide l’étudiant comme l’enseignant « vers la vérité objective qui, en transcendant le particulier et le subjectif, pointe vers l’universel et l’absolu qui nous permet de proclamer avec confiance l’espérance qui ne déçoit pas ».

    Et bien entendu le pape revient ensuite sur l’articulation entre liberté et vérité :

    « La liberté n’est pas un désengagement [opting out]. C’est un engagement choisi [opting in] - une participation à l’Être lui-même. Ainsi la liberté authentique ne peut jamais être atteinte en se détournant de Dieu. Un tel choix manquerait finalement la vérité même dont nous avons besoin pour nous comprendre nous-mêmes. »

    Ce qui débouche sur la symphonie foi et raison, vérité et liberté :

    « C’est seulement dans la foi que la vérité devient incarnée et que la raison devient vraiment humaine, capable de diriger la volonté suivant la voie de la liberté. »

    « La vérité signifie plus que la connaissance : connaître la vérité nous mène à découvrir le bien. La vérité parle à l’individu dans son entièreté, l’invitant à répondre avec son être total. Cette vision optimiste se trouve dans notre foi chrétienne parce que cette foi s’est vue accordée la vision du Logos, la raison créatrice de Dieu, qui en l’Incarnation s’est révélée comme la Bonté elle-même. »

    Admirable.

    NB. Je vois que tous les textes des discours prononcés jusqu'à maintenant sont aujourd'hui sur le site du Vatican, en anglais, italien et espagnol. Espérons qu'ils soient aussi traduits en français, même si nous ne le méritons pas...

  • La religion n’est pas seulement une affaire privée

    En attendant la publication du texte de l’allocution de Benoît XVI aux évêques américains, on pourra se reporter à e-deo qui en donne des extraits. Le pape a ensuite répondu à trois questions. Voici un extrait d’une des réponses, en rapport direct avec le passage de son allocution contre la tendance à « traiter la religion comme une affaire privée », car « c’est seulement lorsque la foi imprègne chaque aspect de leur vie que les chrétiens deviennent vraiment ouverts à la puissance transformante de l’Evangile » :

    « Nous devons reconnaître avec inquiétude l’éclipse presque totale de sens eschatologique dans beaucoup de nos sociétés traditionnellement chrétiennes. Comme vous le savez, j’ai attiré l’attention sur ce problème dans l’encyclique Spe Salvi. Il suffit de dire que la foi et l’espérance ne se limitent pas à ce monde : comme vertus théologales, elles nous unissent au Seigneur et nous attirent vers l’accomplissement, non seulement de notre destinée personnelle, mais aussi de toute la Création. La foi et l’espérance son l’inspiration et la base de nos efforts pour nous préparer à la venue du Royaume de Dieu. Dans le christianisme, il ne peut pas y avoir de place pour une religion purement privée : le Christ est le Sauveur du monde, et, en tant que membres de son Corps, partageant ses munera prophétique, sacerdotal et royal, nous ne pouvons pas séparer notre amour pour lui de notre obligation à bâtir son Eglise et étendre son Royaume. Dans la mesure où la religion devient une affaire purement privée, elle perd véritablement son âme. »

  • La liberté

    Extrait du discours de Benoît XVI à la Maison Blanche

    La liberté n’est pas seulement un don, mais aussi un appel à la responsabilité personnelle. Les Américains le savent par expérience – presque chaque ville de ce pays possède ses monuments qui rendent hommage à ceux qui ont sacrifié leur vie pour la défense de la liberté, soit sur leur propre terre, soit à l’étranger. La défense de la liberté appelle à cultiver la vertu, l’autodiscipline, le sacrifice pour le bien commun et un sens de la responsabilité envers les plus démunis. Elle exige en outre le courage de s’engager dans la vie civile et de porter ses croyances religieuses et ses valeurs les plus profondes dans le débat public raisonnable. En un mot, la liberté est toujours neuve. Il s’agit d’un défi lancé à chaque génération, et il doit être constamment relevé en vue du bien (cf. Spe Salvi, 24). Peu ont compris cela avec autant de lucidité que le vénéré pape Jean-Paul II. En réfléchissant à la victoire spirituelle de la liberté sur le totalitarisme dans sa Pologne natale et en Europe orientale, il nous a rappelé combien l’histoire met en évidence, en de nombreuses occasions, que « dans un monde sans vérité, la liberté perd son propre fondement » et qu’une démocratie sans valeurs peut perdre son âme (cf. Centesimus annus, 46). Ces paroles prophétiques font écho, d’une certaine manière, à la conviction du président Washington, exprimée dans son discours d’adieu, selon laquelle la religion et la moralité constituent « les soutiens indispensables » à la prospérité politique.

    (traduction de La Croix)

  • L’Evangile de la miséricorde

    L’agence Zenit publie une traduction du discours que le pape Benoît XVI a adressé samedi 5 avril aux participants au congrès organisé par l'Institut Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille. Extrait.

    Oui, l'Evangile de l'amour et de la vie est toujours également l'Evangile de la Miséricorde, qui s'adresse à l'homme concret et pécheur que nous sommes, pour le relever après toutes ses chutes, pour le guérir de toutes ses plaies. Mon bien-aimé prédécesseur, le serviteur de Dieu Jean-PauI Il, dont nous venons de célébrer le troisième anniversaire de la mort, dit à l'occasion de l'inauguration du nouveau sanctuaire de la divine miséricorde à Cracovie : «Il n'existe pas pour l'homme d'autre source d'espérance en dehors de la miséricorde de Dieu » (17 août 2002). A partir de cette miséricorde l'Eglise nourrit une confiance énorme dans l'homme et dans sa capacité à se relever. Elle sait que, avec l'aide de la grâce, la liberté humaine est capable du don de soi définitif et fidèle, qui rend possible le mariage d'un homme et d'une femme comme pacte indissoluble, que la liberté humaine, même dans les circonstances les plus difficiles, est capable de gestes extraordinaires de sacrifice et de solidarité pour accueillir la vie d'un nouvel être humain. On peut ainsi voir que les « non » que l'Eglise prononce dans ses indications morales et sur lesquels l'attention de l'opinion publique s'arrête de façon unilatérale, sont en réalité des grands « oui » à la dignité de la personne humaine, à sa vie et à sa capacité d'aimer. Ils sont l'expression de la confiance constante que, malgré leur faiblesse, les êtres humains sont en mesure de répondre à la vocation la plus haute pour laquelle ils ont été créés : celle d'aimer.

  • Le pape évoque une victime du satanisme

    L’agence Zenit souligne que le pape, à la fin de son audience de mercredi, saluant en italien les Filles de la Croix et les laïcs vivant de la même spiritualité, a évoqué le martyre de la religieuse Maria Laura Mianetti qui, « fidèle au don total d'elle-même, a sacrifié sa vie en priant pour qui la frappait ».

    La religieuse avait été victime, à Chiavenna, d'un guet-apens tendu par trois adolescentes qui avaient soi-disant besoin d'aide, au soir du 6 juin 2000. Les jeunes filles ont avoué avoir frappé la religieuse à l'arme blanche dans le cadre d'un rite satanique. Dans son agonie, la religieuse a prié pour ces trois jeunes et leur a dit qu'elle leur pardonnait. La congrégation romaine pour les Causes des saints a reconnu cette mort violente comme un « martyre », ce qui ouvre la voie à la béatification de la religieuse.

    Information à l’intention du directeur de la sécurité publique de Charente-Maritime, pour qui le satanisme n’a pas de rapport avec la religion.

  • Europe : l’avertissement du pape

    Voici la fin de l’allocution de Benoît XVI, lors de l’audience d’hier, consacrée à saint Benoît.

    Benoît qualifie la Règle de « Règle minimale tracée uniquement pour le début » (73, 8) ; en réalité, celle-ci offre cependant des indications utiles non seulement aux moines, mais également à tous ceux qui cherchent un guide sur leur chemin vers Dieu. En raison de sa mesure, de son humanité et de son sobre discernement entre ce qui est essentiel et secondaire dans la vie spirituelle, elle a pu conserver sa force illuminatrice jusqu'à aujourd'hui. Paul VI, en proclamant saint Benoît Patron de l'Europe le 24 octobre 1964, voulut reconnaître l'œuvre merveilleuse accomplie par le saint à travers la Règle pour la formation de la civilisation et de la culture européenne. Aujourd'hui, l'Europe - à peine sortie d'un siècle profondément blessé par deux guerres mondiales et après l'effondrement des grandes idéologies qui se sont révélées de tragiques utopies - est à la recherche de sa propre identité. Pour créer une unité nouvelle et durable, les instruments politiques, économiques et juridiques sont assurément importants, mais il faut également susciter un renouveau éthique et spirituel qui puise aux racines chrétiennes du continent, autrement on ne peut pas reconstruire l'Europe. Sans cette sève vitale, l'homme reste exposé au danger de succomber à l'antique tentation de vouloir se racheter tout seul - une utopie qui, de différentes manières, a causé dans l'Europe du XXe siècle, comme l'a remarqué le Pape Jean-Paul II, « un recul sans précédent dans l'histoire tourmentée de l'humanité » (Insegnamenti, XIII/1, 1990, p. 58). En recherchant le vrai progrès, nous écoutons encore aujourd'hui la Règle de saint Benoît comme une lumière pour notre chemin. Le grand moine demeure un véritable maître à l'école de qui nous pouvons apprendre l'art de vivre l'humanisme véritable.

    Sans un renouveau qui puise aux racines chrétiennes, « on ne peut pas reconstruire l'Europe ». On ne peut pas, affirme le pape. Parce qu’alors l’Europe reste soumise au danger de retomber dans l’utopie qui a conduit aux tragédies du XXe siècle. L’avertissement est aussi clair que le constat.