C’est le jour de l’institution de l’eucharistie et du sacerdoce. Ce n’est pas le jour du souvenir de cette double institution. De même que l’eucharistie nous donne réellement le corps et le sang du Christ parce qu’elle EST le sacrifice de la Croix, le jeudi saint EST le jour où le Corps et le Sang nous sont donnés sous la forme qui leur est donnée en CE jour à la Cène.
C’est ce que souligne la messe, d’abord dans la prière solennelle (Hanc igitur) où le prêtre étend les mains sur les dons :
« Voici donc l’offrande que nous vous présentons, nous vos serviteurs et avec nous votre famille entière, en ce jour où Notre Seigneur Jésus-Christ a confié à ses disciples la célébration des mystères de son corps et de son sang, acceptez-la, Seigneur, avec bienveillance ; disposez dans votre paix les jours de notre vie, veuillez nous arracher à l’éternelle damnation et nous compter au nombre de vos élus. Par le Christ notre Seigneur. Ainsi soit-il. »
Et lors de la consécration elle-même :
« Celui-ci, la veille de sa Passion, c’est-à-dire aujourd’hui, prit du pain dans ses mains saintes et adorables, et les yeux levés au ciel vers vous, Dieu, son Père tout-puissant, vous rendant grâces, il bénit ce pain, le rompît et le donna à ses disciples en disant : Prenez et mangez-en tous : CECI EST MON CORPS. »
L’Eglise est également le Corps du Christ, parce que l’Eglise s’édifie par le Corps du Christ, par l’eucharistie, grâce au sacerdoce que le Christ nous donne en ce jour.
Le sacerdoce en sa plénitude est celui de l’évêque. Seul l’évêque peut édifier une Eglise diocésaine, parce qu’il est l’unique grand prêtre de ce diocèse, qu’il construit par l’eucharistie, eucharistie qui à partir de sa cathédrale se diffuse dans toutes les paroisses par ses prêtres et le peuple de Dieu en communion avec lui par l’eucharistie. La cathédrale est la mère des églises du diocèse, comme la cathédrale de l’évêque de Rome est la mère de toutes les cathédrales et églises du monde.
C’est pourquoi le Jeudi Saint est le seul jour de l’année où l’évêque ne peut pas célébrer la messe ailleurs que dans sa cathédrale. Il y a bien aussi, sans doute, le jour anniversaire de la dédicace de la cathédrale, mais là c’est plutôt une affaire de convenance, même si c’est d’impérative convenance. Alors que pour la messe de la Sainte Cène le Jeudi Saint c’est un impératif sacramentel et ecclésiologique.
Le caractère unique de cette messe est souligné par le fait qu’une seule messe est permise dans les églises, image de l’unique messe célébrée à la cathédrale.
Dom Pius Parsch commente :
« Aujourd’hui, dans toutes les églises, une seule messe est permise. Le prêtre le plus digne remplace le Christ ; les autres sont, pour ainsi dire, les Apôtres et reçoivent de ses mains la sainte Communion ; la messe est, en effet, la célébration de la Cène. Mais la messe devrait être une véritable fête de famille et de communauté. Le curé, ses auxiliaires et toute la paroisse autour de la table du Seigneur ou, pour mieux dire, le Christ avec ses disciples ! L’église de station est Saint-Jean de Latran, l’église paroissiale du père de la chrétienté. Ainsi, dans l’esprit de la liturgie, toute la famille de l’Église romaine est rassemblée pour célébrer la Cène. »
(Benoît XVI à Saint-Jean de Latran pour la messe In Cœna Domini le Jeudi Saint 2009.)