Saint François Borgia : l’une des huit statues du pont Charles de Prague (sur 30) réalisées par Ferdinand Maxmilián Brokoff entre 1707 et 1714. Celle-ci est de 1710 : il avait 22 ans. (En fait il s’agit d’une copie, de 2017. L’original est désormais, comme plusieurs autres, au musée lapidaire national.)
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Saint François Borgia
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18e dimanche après la Pentecôte
Extrait du commentaire de l'évangile par saint Jean Chrysostome.
Outre la guérison du paralytique, il y a encore ici une autre preuve, par laquelle Jésus-Christ fait voir qu’il est Dieu, égal à son Père. Les Juifs disaient en eux-mêmes : il blasphème, parce qu’il n’appartient qu’à Dieu de remettre les péchés ; et lui, non-seulement remet les péchés, mais auparavant, répondant à leur pensée, quoiqu’ils ne l’eussent pas exprimée, il montre qu’il est Dieu en pénétrant le secret 1es cœurs, qui n’est connu que de Dieu seul.
Et pour montrer qu’il n’y a que Dieu qui puisse connaître le secret des cœurs, il ne faut qu’écouter ce que dit le Prophète : "Vous êtes le seul qui connaissez les cœurs." (II Par. VI,30.) Et ailleurs : "Vous êtes le Dieu qui sondez les cœurs et les reins des hommes." (Ps IX, 10.) Et Jérémie : "Le cœur de l’homme est profond et impénétrable, et qui le pourra sonder ?" (Jérém. VIII, IX.) Et ailleurs : "L’homme voit la face, mais Dieu voit le cœur." (1 Rois, XVI, 9.) Nous pouvons voir par beaucoup d’autres endroits semblables, qu’il n’y a que Dieu seul qui puisse connaître les pensées de l’homme. Jésus-Christ donc voulant montrer clairement qu’il est Dieu et égal à son Père, révèle à ses ennemis ce qu’ils pensaient en eux-mêmes, et qu’ils n’osaient publier parce qu’ils craignaient le peuple. "Jésus connaissant ce qu’ils pensaient leur dit : pourquoi donnez-vous entrée dans vos cœurs à de mauvaises pensées ? Car lequel des deux est plus aisé de dire : vos péchés vous sont remis, ou, levez-vous et marchez ?" Il laisse voir encore ici une admirable douceur : "Pourquoi, dit-il, donnez-vous entrée dans vos cœurs à de mauvaises pensées ?" Si quelqu’un pouvait avoir de l’aigreur contre Jésus-Christ, ce devait être plutôt le malade que tout autre. Il pouvait se plaindre d’avoir été trompé. Il pouvait dire : je suis venu à vous pour trouver la santé du corps, et vous me parlez de celle de l’âme. Où pourrai-je savoir que mes péchés me sont remis ? Cependant il ne dit rien de semblable. Il s’abandonne entièrement à la puissance du médecin. Il n’y a que les scribes qui par l’excès de leur malice et de leur envie, s’opposent aux grâces que Jésus-Christ fait aux autres.
Le Sauveur les reprend d’une disposition si mauvaise ; mais il le fait avec une extrême douceur. Si vous ne croyez pas, leur dit-il, que je puisse remettre les péchés, mais que j’usurpe par vanité ce qui ne m’appartient pas, regardez comme une preuve de ma divinité la connaissance que j’ai de ce qui se passe dans vos cœurs, à laquelle j’ajoute encore la guérison de ce malade. Lorsque Jésus-Christ parle au paralytique, il ne lui déclare pas ouvertement qu’il est Dieu, il ne lui dit pas : "Je vous pardonne vos péchés", mais, "vos péchés vous sont pardonnés". Mais lorsque ses ennemis le pressent, et le forcent de se déclarer, il le fait enfin, et leur dit : "Or, afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a le pouvoir sur la terre de remettre les péchés : Levez-vous, dit-il, emportez votre lit, et allez-vous-en dans votre maison. Et le paralytique se levant, s’en alla à sa maison."
On voit clairement par ces paroles que Jésus-Christ veut bien qu’on le croie égal à son Père. Car il ne dit pas que le Fils de l’homme ait besoin d’un autre, ou que Dieu lui ait donné cette puissance, mais il dit absolument : "Que le Fils de l’homme a cette puissance." Ce que je ne dis point par vanité, dit-il, mais pour vous persuader que je ne suis point un blasphémateur, lorsque je déclare que je suis égal à mon Père.
Il veut partout convaincre les hommes de la vérité de ce qu’il leur dit, par des preuves dont ils ne puissent douter, comme lorsqu’il dit au lépreux : "Allez vous montrer aux prêtres", lorsqu’il donne en un moment une santé si parfaite à la belle-mère de saint Pierre, qu’elle le sert à table en sortant du lit; et lorsqu’il permet aux pourceaux de se précipiter dans la mer. Il prouve ici de même par la guérison du paralytique que les péchés de celui-ci lui sont véritablement remis ; et il prouve la guérison en commandant à cet homme d’emporter son lit, afin qu’on ne s’imaginât pas que ce miracle ne fût qu’une illusion.
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Sainte Brigitte
Dómine, Deus noster, qui beátæ Birgíttæ per Fílium tuum unigénitum secreta cæléstia revelásti : ipsíus pia intercessióne da nobis, fámulis tuis ; in revelatióne sempitérna glóriæ tuæ gaudére lætántes.
Seigneur notre Dieu, qui avez révélé par votre Fils unique, à la bienheureuse Brigitte, les secrets célestes, faites que, par sa pieuse intercession, nous qui sommes vos serviteurs, nous jouissions dans l’éternelle félicité de la manifestation de votre gloire.
(Les deux portraits sont suédois et du XVe siècle.)
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Notre Dame du Rosaire
Propter veritátem, et mansuetúdinem, et justítiam, et dedúcet te mirabíliter dextera tua. ℣. Audi, fília, et vide, et inclína aurem tuam : quia concupívit Rex spéciem tuam.
Pour la vérité, la douceur et la justice, et que ta droite te fasse accomplir des faits merveilleux. ℣. Ecoute, ma Fille, vois et tends l’oreille : le Roi a désiré ta beauté. (Psaume 44)
Le graduel de la messe de cette fête est repris de l’ancien formulaire de la fête de l’Assomption. Après la promulgation du dogme de l’Assomption, on a en effet fabriqué une nouvelle messe et un nouvel office en néo-latin… Notre Dame du Rosaire a donc sauvé cette pièce, qualifiée de « chef-d’œuvre de composition musicale » et de « joyau » de cette fête par dom Johner :
La beauté des vertus de Marie est décrite dans une série d'images dans l'épître. Elle est comparée à "un cèdre, un cyprès, un palmier, un rosier, un olivier, un platane". Elle ressemble à "une cannelle odorante et à un baume aromatique". Parmi ses nombreuses vertus, le Graduel attire particulièrement l'attention sur les trois suivantes : sa vérité -
elle est la réalisation de la dispensation divine de Dieu ; sa douceur - elle est la Vierge clémente, pieuse et douce ; sa justice - elle est le miroir de la justice divine. Et c'est pourquoi maintenant, avec un chœur d'anges comme escorte, elle est assumée au ciel de manière miraculeuse.Dans le verset, les anges l'interpellent : Audi, filia - "Écoute, ô fille''. Au cours de sa vie terrestre, il y eut des paroles dures et amères qui entamèrent profondément l'âme innocente de la Sainte Mère : chaque mot qui blessait son divin Fils blessait également son cœur. Nombreuses furent les images déchirantes qu'elle eut à vivre : la pauvreté abjecte de l'étable de Bethléem, son Fils mourant sur la croix et finalement mort dans ses bras. Mais le sombre hiver de cette vie est passé - et toutes les souffrances sont terminées ; un printemps perpétuel et doux est arrivé. Maintenant, elle écoute les hymnes célestes, contemple la félicité céleste, et reçoit la couronne céleste pour orner sa tête. Le roi désire vivement sa beauté. Toute la beauté et la sublimité de son âme sont maintenant exposées dans le ciel, et le Tout-Puissant a conféré à son corps l'éclat de sa propre transfiguration.
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Saint Bruno
Extraits de la notice sur le site des Chartreux.
Maître Bruno était Allemand. Il est né de parents réputés vers 1030, dans l’illustre ville de Cologne. Jeune encore, il fut nommé chanoine de l’église Saint-Cunibert. Très tôt, il vint à Reims pour étudier à sa célèbre école cathédrale, naguère illustrée par le savant Gerbert d’Aurillac (futur pape Sylvestre II). Là, il reçut une solide formation tant dans les lettres profanes que dans la littérature sacrée.
Bruno devint chanoine de la cathédrale de Reims, qui se situait au premier rang parmi les Églises des Gaules. En 1056, il fut nommé recteur des études de son école, l’une des plus prestigieuses de son temps. Il y dirigea l’enseignement pendant plus de vingt ans, se faisant remarquer par sa culture, ses qualités pédagogiques et l’affection qu’il portait à ses élèves.
En 1069, un archevêque indigne qui avait acheté les consciences fut élu, Manassès de Gournay, qui se montra d’une avidité insatiable pour les biens temporels, surtout ceux sur lesquels il n’avait aucun droit. Commença alors entre quelques chanoines intègres – dont Bruno – et Manassès une longue lutte. Grégoire VII mit un point final à ce désordre en décembre 1080 et déposa l’archevêque, donnant l’ordre de le chasser et d’élire un autre à sa place.
Bruno, maître en toute honnêteté dans l’Église de Reims, était l’un des candidats les plus en vue, lui qui avait été jugé digne de souffrir la persécution pour le Nom de Jésus. Mais pour lui l’heure était venue de répondre à un plus haut appel et de quitter le monde.
Bruno abandonna alors tous ses biens, les honneurs liées à sa charge, les faux attraits et les richesses périssables de ce monde. Brûlant d’amour divin, il quitta les ombres fugitives du siècle pour se mettre en quête des biens éternels et recevoir l’habit monastique.
En juin 1084, voici qu’au jeune évêque Hugues de Grenoble se présente Maître Bruno, devenu célèbre par sa piété et sa culture, image idéale de la noblesse d’âme, du sérieux et d’une entière perfection.
Il avait comme compagnons maître Landuin, qui après lui fut prieur de Chartreuse ; les deux Étienne, celui de Bourg et celui de Die – ils avaient été chanoines de Saint-Ruf mais par désir de la vie solitaire, avec l’autorisation de leur abbé, ils avaient rejoint Bruno – ; Hugues, que l’on appelait le chapelain, parce qu’il était le seul parmi eux à exercer les fonctions sacerdotales ; et deux laïcs, que nous appelons convers, André et Guérin. Ils cherchaient un endroit propre à la vie érémitique, n’en ayant pas encore trouvé.
Ils arrivèrent mus par cet espoir et attirés par le doux parfum de la sainte existence de l’évêque. Lui les reçut avec joie et même avec respect, discuta avec eux et combla leurs vœux. Sur ses conseils, avec son aide et en sa compagnie, ils allèrent au désert de Chartreuse et y bâtirent un monastère.
Peu auparavant, Hugues avait vu en songe Dieu construire dans le désert une demeure pour sa gloire ; il avait également vu sept étoiles qui lui en montraient le chemin. Or, ils étaient sept, c’est pourquoi il embrassa volontiers leur projet.
Dans sa bonté infinie, Dieu qui jamais ne cesse de pourvoir aux besoins et aux intérêts de son Église avait donc choisi Bruno, homme d’une éminente sainteté, pour rendre à la vie contemplative l’éclat de sa pureté originelle. C’est dans ce but que celui-ci fonda et gouverna l’ermitage de Chartreuse pendant six ans, le pénétrant profondément de son esprit et donna en sa personne une règle vivante à ses fils.
Saint Pierre le Vénérable, illustre abbé de Cluny et grand ami des Chartreux, donne une description de ce genre de vie semblable à celui des Pères du Désert : « Là, ils ne cessent de s’adonner au silence, à la lecture, à l’oraison et aussi au travail manuel, surtout à la copie des livres. C’est dans leurs cellules qu’au signal donné par la cloche de l’église, ils s’acquittent d’une partie de la prière canoniale. Pour Vêpres et Matines, ils se rassemblent tous à l’église. De ce rythme de vie ils se départissent à certains jours de fête… Ils prennent alors deux repas, ils chantent à l’église toutes les Heures régulières et tous sans exception prennent leur repas au réfectoire ». (…)
Mais un événement inattendu survint : six ans après l’arrivée de Bruno en Chartreuse, en 1090, le pape Urbain II, son ancien élève, le fit appeler auprès de lui afin qu’il l’assiste de sa collaboration et de ses conseils dans la gestion des affaires ecclésiastiques. Bruno obéit, la douleur dans l’âme, quitta ses frères et se rendit à la Curie romaine.
Ne croyant pas être capables de continuer sans lui, ses frères se dispersèrent mais Bruno les encouragea et réussit à les faire revenir. Cependant Bruno ne put supporter l’agitation et les mœurs de la Curie.
Avide de retrouver la solitude et la tranquillité perdues, il quitta la cour pontificale. Ayant refusé l’archevêché de Reggio pour lequel il avait été désigné sur le désir du pape, il se retira dans un désert de Calabre dénommé La Tour.
Grâce à l’appui généreux du Comte Roger, prince normand de Calabre et de Sicile, Bruno mit à exécution son projet de vie solitaire, passant le reste de sa vie entouré d’un grand nombre de laïcs et de clercs. (…)
En Calabre, Bruno s’appliqua, tant qu’il vécut, à la vocation de la vie solitaire. C’est là qu’il mourut, onze ans environ après son départ de Chartreuse, entouré de l’amour et de la vénération de ses frères. (…)
La statue de saint Bruno sur la colonnade du Bernin (l'une des 140). On lit sur le site italien Cartusialover (sic): "Le Saint Bruno représenté sur la colonnade a été sculpté entre août 1670 et mars 1673 par le sculpteur romain Francesco Antonio Fontana. Il a créé une figure en travertin du saint natif de Cologne, haute de trois mètres et le visage tourné doucement vers une grande croix qu'il soutient lui-même de sa main droite. La main gauche est posée sur le cœur, indiquant la vie consacrée à la recherche de Dieu dans le silence et la solitude. Des traits gracieux du visage, de la robe et des mains, qui donnent à cette sculpture une douce autorité, comme dans le caractère du saint."
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Sainte Galle
Le martyrologe de ce jour commence par la mention des moines saint Placide et ses compagnons, martyrs en Sicile. Ce Placide a longtemps été confondu avec le disciple de saint Benoît, mais le martyr est plus tardif.
Il se termine par la mention de sainte Galle :
A Rome, sainte Galle veuve, fille du consul Symmaque. Après la mort de son mari, elle se retira près de la basilique Saint-Pierre, y passa de nombreuses années dans l'exercice continuel de la prière, de l'aumône, du jeûne et des autres œuvres saintes. Le pape saint Grégoire a décrit son très heureux trépas.
Saint Grégoire commence par dire que Galle, devenue veuve après un an de mariage, ne voulut pas se remarier comme on l’en pressait : « Elle choisit plutôt de s’unir à Dieu dans des noces spirituelles, qui commencent dans le deuil mais atteignent les joies éternelles, que se soumettre à des noces charnelles, qui commencent toujours par la joie et se terminent par le deuil. »
Saint Grégoire expose en effet qu’alors qu’elle était très malade elle vit saint Pierre devant son lit. Elle lui dit : « Qu’est-ce, mon Seigneur, est-ce que mes péchés sont pardonnés ? » Saint Pierre lui répondit : « Ils sont pardonnés, viens ! » (Dimissa, veni.) Elle raconta sa vision à la Mère de la congrégation, et elle mourut le troisième jour.
Il y a dans l’église romaine Santa Maria in Campitelli, ou Santa Maria in Portico, une petite icône de la Mère de Dieu placée dans la gloire au-dessus de l’autel. Cette icône a donné le nom de « in portico » à l’église parce qu’elle vient d’une église qui n’existe plus, qui était près du Portique d’Octavien, édifiée sur la maison de sainte Galle. Et cette icône est selon la tradition le reflet de l’apparition de Notre Dame à sainte Galle. Bien qu’une inscription l’atteste, elle est évidemment postérieure. Mais il est possible que l’image centrale de l’hodigitria soit une copie de l’icône originelle.
Hic est illa piae Genitricis Imago Mariae quae discubenti Gallae patuit metuenti.
Ceci est l’Image de Marie Mère de Dieu qui s’est manifestée à Galle qui se couchait en ayant la crainte de Dieu.
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Saint François
(Giotto)
Le serviteur de Dieu, voyant donc ses enfants se multiplier peu à peu, écrivit pour eux et pour lui, dans un langage simple, une règle de conduite. Il en établit pour base indissoluble l'observance du saint Evangile, et se contenta d'y ajouter un petit nombre de points qui lui semblaient nécessaires pour former un genre uniforme de vie. Ensuite, désireux d'obtenir du souverain Pontife l'approbation de cette règle, il résolut d'aller se présenter à lui avec les hommes pleins de simplicité qu'il s'était associés, se confiant pour une semblable démarche uniquement en l'assistance du Ciel. Dieu regarda son désir et il fortifia par la vision suivante, dont il favorisa son serviteur, le cœur de ses compagnons, que la considération de leur simplicité jetait dans la crainte. Il semblait à François qu'il s'avançait par un chemin au bord duquel était un arbre d'une élévation prodigieuse. Lorsqu'il s'en fut approché et qu'assis dessous il en admirait la hauteur, la puissance divine l'éleva lui-même au-dessus de la terre de telle sorte qu'il atteignait le faîte de cet arbre et en inclinait sans difficulté les branches les plus hautes vers celles qui étaient le plus rapprochées de la terre.
Cet homme plein de l'esprit de Dieu comprit donc que cette vision lui présageait un bon succès auprès du siège apostolique ; et tressaillant de joie en son âme, après avoir ranimé le courage de ses frères dans le Seigneur, il se mit en route avec eux. Arrivé à Rome, il fut introduit en présence du Souverain Pontife. Le vicaire de Jésus-Christ, qui habitait alors le palais de Latran, et se promenait en ce moment dans une salle appelée la salle des Sentinelles, livré tout entier à de profondes méditations, le repoussa avec mépris comme un inconnu. François sortit humblement et sans murmurer ; mais la nuit suivante Dieu envoya aussi au Pontife une vision. Il lui semblait voir un palmier croître peu à peu à ses pieds, s'élever ensuite et devenir un arbre admirable. Etonné et se demandant ce que signifiait une pareille vision, la céleste lumière lui fit comprendre que ce palmier désignait le pauvre rejeté par lui la veille. Le jour venu, il envoya par la ville ses serviteurs chercher ce pauvre. Ils le trouvèrent à l'hôpital de Saint-Antoine, proche de Latran, et le pape commanda qu'on le fît venir sans délai. Introduit pour la seconde fois devant le Souverain Pontife, François lui exposa son projet et le supplia avec instance et humilité de vouloir bien approuver sa règle. Le vicaire de Jésus-Christ, qui était Innocent III, homme illustre par sa sagesse, voyant dans le serviteur de Dieu la pureté admirable d'une âme droite, une constance inébranlable et la ferveur d'une volonté toute sainte, fut épris d'amour pour lui et se sentit porté à répondre à ses désirs. Cependant il différa pour le moment, car plusieurs cardinaux jugeaient ce genre de vie nouveau et au-dessus des forces humaines. Mais il y avait dans le Sacré-Collège un homme vénérable, Jean de Saint-Paul, évêque de Sabine. Il aimait avec ardeur la sainteté sous quelque forme qu'elle se montrât, et il était le protecteur des pauvres de Jésus-Christ. Enflammé par l'Esprit-Saint, il dit au Souverain-Pontife et à ses frères : « Ce pauvre nous demande d'approuver un genre de vie conforme aux conseils évangéliques. Si nous rejetons ses projets comme trop difficiles et comme une nouveauté, nous nous exposons à agir contre l'Evangile du Seigneur. Car soutenir que l'observance des conseils et le vœu qu'on en fait sont quelque chose de nouveau ou de contraire à la raison, c'est blasphémer ouvertement contre Jésus-Christ, auteur de l'Evangile. » Alors le successeur de saint Pierre se tournant vers le pauvre du Seigneur : « O mon fils, lui dit-il, priez Jésus-Christ de nous manifester sa volonté par vous-même, afin que, l'ayant connue d'une manière plus certaine, nous puissions plus sûrement répondre à vos pieux désirs. » Le serviteur du Dieu tout-puissant se mit donc à prier avec ardeur, et sa ferveur lui obtint une réponse qu'il put produire extérieurement et dont le pape sentit intérieurement la vertu. Il leur dit en parabole qu'un roi riche avait choisi pour épouse une femme d'une rare beauté, mais pauvre, et que, heureux de trouver dans les enfants issus de cette union son image royale, il avait ordonné de les nourrir des mets de sa table, selon l'ordre qu'il en avait reçu de Dieu. Il expliqua sa parabole et ajouta : « On ne doit pas craindre de voir mourir de faim les enfants et les héritiers du Roi éternel, qui, comme Jésus-Christ, ont pris naissance d'une pauvre mère par la vertu de l'Esprit-Saint. On ne doit pas craindre de les voir former par l'esprit de pauvreté un ordre dénué de tout. Si le Roi des cieux a promis son royaume éternel à ses imitateurs, combien plus leur donnera-t-il les choses qu'il accorde indifféremment aux bons et aux méchants ! »
Le vicaire du Sauveur avait écouté avec l'attention la plus vive la parabole et son explication. Il fut transporté d'admiration et ne douta plus que le Seigneur lui-même n'eût parlé par la bouche de François. Il jugea aussi, par l'inspiration divine, qu'une autre vision dont il avait été favorisé trouverait son accomplissement en cet homme. Il voyait en songe, comme il le rapporta lui-même, l'église de Latran près de tomber en ruines, quand un homme pauvre, sans apparence et méprisable, la soutenant de son dos, l'empêchait de s'écrouler. « Ce pauvre, dit-il, est vraiment celui qui soutiendra l'Eglise de Jésus-Christ par ses œuvres et sa doctrine. » Alors plein d'une sainte ferveur, le pape accorda au serviteur de Dieu toute sa demande, et il eut toujours pour lui dans la suite une tendresse spéciale. Non seulement il satisfit à ses désirs, mais il lui promit de faire encore plus pour lui dans la suite. Il approuva sa règle, lui donna le commandement de prêcher la pénitence, et voulut que ses compagnons portassent de petites couronnes, afin de pouvoir répandre en toute liberté la divine parole.
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Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus
Extrait de la lettre à sœur Marie du Sacré-Cœur (qui est aussi sa sœur biologique et sa marraine), accompagnant l’exposé de sa « petite doctrine » (connu aujourd’hui comme le manuscrit B).
Ne croyez pas que je nage dans les consolations, oh non ! ma consolation c'est de n'en pas avoir sur la terre. Sans se montrer, sans faire entendre sa voix, Jésus m'instruit dans le secret, ce n'est pas par le moyen des livres, car je ne comprends pas ce que je lis, mais parfois une parole comme celle-ci que j'ai tiré à la fin de l'oraison (après être restée dans le silence et la sécheresse) vient me consoler : «Voici le Maître que je te donne, il t'apprendra tout ce que tu dois faire. Je veux te faire lire dans le livre de vie, où est contenue la science d'Amour.» La science d'Amour, oh oui ! cette parole résonne doucement à l'oreille de mon âme, je ne désire que cette science-là, pour elle, ayant donné toutes mes richesses, j'estime comme l'épouse des sacrés cantiques n'avoir rien donné... Je comprends si bien qu'il n'y a que l'amour qui puisse nous rendre agréables au Bon Dieu que cet amour est le seul bien que j'ambitionne. Jésus se plaît à me montrer l'unique chemin qui conduit à cette fournaise Divine, ce chemin c'est l'abandon du petit enfant qui s'endort sans crainte dans les bras de son Père... «Si quelqu'un est tout petit, qu'il vienne à moi» a dit l'Esprit Saint par la bouche de Salomon, et ce même Esprit d'Amour a dit encore que «La miséricorde est accordée aux petits». En son nom le prophète Isaïe nous révèle qu'au dernier jour «le Seigneur conduira son troupeau dans les pâturages, qu'il rassemblera les petits agneaux et les pressera sur son sein», et comme si toutes ces promesses ne suffisaient pas, le même prophète dont le regard inspiré plongeait déjà dans les profondeurs éternelles s'écrie au nom du Seigneur : «Comme une mère caresse son enfant, ainsi je vous consolerai, je vous porterai sur mon sein et je vous caresserai sur mes genoux.» O Marraine chérie ! après un pareil langage, il n'y a plus qu'à se taire, à pleurer de reconnaissance et d'amour... Ah ! si toutes les âmes faibles et imparfaites sentaient ce que sent la plus petite de toutes les âmes, l'âme de votre petite Thérèse, pas une seule ne désespérerait d'arriver au sommet de la montagne de l'amour, puisque Jésus ne demande pas de grandes actions, mais seulement l'abandon et la reconnaissance, puisqu'il a dit dans le Ps. XLIX : «Je n'ai nul besoin des boucs de vos troupeaux, parce que toutes les bêtes des forêts m'appartiennent et les milliers d'animaux qui paissent sur les collines, je connais tous les oiseaux des montagnes... Si j'avais faim, ce n'est pas à vous que je le dirais : car la terre et tout ce qu'elle contient est à moi. Est-ce que je dois manger la chair des taureaux et boire le sang des boucs ?...
«Immolez à Dieu des sacrifices de louanges et d'actions de grâces.» Voilà donc tout ce que Jésus réclame de nous, il n'a point besoin de nos œuvres, mais seulement de notre amour, car ce même Dieu qui déclare n'avoir point besoin de nous dire s'il a faim, n'a pas craint de mendier un peu d'eau à la Samaritaine. Il avait soif... Mais en disant : «Donne-moi à boire», c'était l'amour de sa pauvre créature que le Créateur de l'univers réclamait. Il avait soif d'amour... Ah ! je le sens plus que jamais Jésus est altéré, il ne rencontre que des ingrats et des indifférents parmi les disciples du monde, et parmi ses disciples à lui, il trouve, hélas ! peu de cœurs qui se livrent à lui sans réserve, qui comprennent toute la tendresse de son Amour infini.
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17e dimanche après la Pentecôte
Vovéte et réddite Dómino, Deo vestro, omnes, qui in circúitu eius affértis múnera : terríbili, et ei qui aufert spíritum príncipum : terríbili apud omnes reges terræ.
Exprimez tous vos vœux au Seigneur votre Dieu et rendez-lui hommage, vous tous qui apportez vos dons dans l’enceinte de son temple ; au terrible, qui est Celui qui écrase l’orgueil des princes, au terrible parmi les rois de la terre.
Peu de communions ont un texte aussi grave que celui-ci. En général, on y prononce des paroles de consolation et de la bonté de Dieu, ou on y présente nos pétitions humbles mais confiantes. Ici, cependant, Dieu est appelé deux fois "le Terrible", devant lequel tous les rois de la terre tremblent. Il apparaît ici, comme dans l'Introït, comme le juge de la terre (auquel l'Évangile d'aujourd'hui fait également référence) lorsque le Seigneur dit à son Seigneur - le Père à son Fils - qu'il soumettra tous ses ennemis et en fera son marchepied. Il écrasera toute l'obstination des potentats terrestres, leur enlèvera leur courage - ou, comme d'autres le traduisent, les privera de leur souffle - et leur orgueil et leur amour-propre ne seront rien face à sa gloire et à sa majesté.
Le premier terribili se place sur la dominante, et avec sa tierce majeure, il est le mot le plus significatif de toute la mélodie, tout comme la phrase qu'il ouvre surpasse les deux autres. Dans la première phrase, l'augmentation de la mélodie sur les trois premiers mots semble correspondre à la pensée : il ne faut pas seulement faire des vœux : il faut les tenir et les accomplir. Sur Dómino, la syllabe accentuée n'a qu'une seule note, tandis que la syllabe suivante, non accentuée, soutient un tristropha, ce qui est fréquent. Sur in circúitu ejus, la mélodie décrit un demi-cercle, comme si elle imitait le sens des mots. Le deuxième terribili commence lui aussi sur la dominante, puis s'incline avec révérence devant la majesté de Dieu.
La crainte du Seigneur, de Celui qui jugera un jour le monde entier, doit également sous-tendre notre activité dans la musique d'église. Dans notre culte, nous ne pourrons jamais être trop respectueux. Car, de notre vivant, nous pouvons recevoir dans notre cœur le Christ, notre Sauveur, notre Rédempteur et notre Consolateur, dont nous adorons la grandeur et dont nous attendons l'arrivée pour le jugement.
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De la Sainte Vierge le samedi
Voici l’hymne à la Mère de Dieu chantée après la consécration dans la Divine Liturgie de saint Jean Chrysostome, en slavon Dostoïno iest (en grec Axion estin), magnifiquement chantée par le patriarche Néophyte de Bulgarie.
Il est digne en vérité de te proclamer bienheureuse, Toi qui enfantas Dieu, toujours bienheureuse et Tout-Immaculée et Mère de notre Dieu. Toi plus vénérable que les chérubins et incomparablement plus glorieuse que les séraphins, toi qui sans corruption enfantas Dieu le Verbe, toi véritablement Mère de Dieu nous te magnifions.