Une conférence islamique s’est tenue à Grozny, en Tchétchénie, du 25 au 27 août, sous l’égide conjointe, manifestement, même si ce n’est pas dit, de Vladimir Poutine et du président-maréchal Sissi. Le lieu, comme la présence du Grand Imam d’al-Azhar, et du grand mufti d’Egypte, et du conseiller de la présidence égyptienne et représentant de la commission des affaires religieuses au Parlement égyptien, comme le but de la conférence, ne laissent aucun doute. Car il s’agissait de réunir le plus grand nombre possible de responsables musulmans pour condamner le wahhabisme comme conduisant au terrorisme. Et parmi les quelque 200 participants venus d’un peu partout il y avait aussi, comme par hasard, le grand mufti de Damas.
Le but de la conférence était de définir « la véritable identité du peuple sunnite et de la communauté sunnite ». Une liste des mouvements authentiquement sunnites a été dressée, de laquelle est exclu le wahhabisme d’Arabie saoudite. Exclusion due à la nécessité pour l’idéologie officielle d’Arabie saoudite « d’un changement radical de façon à rétablir la vraie signification du sunnisme, sachant que ce concept a subi une déformation dangereuse à la suite des efforts des extrémistes de le vider de son sens afin de le reprendre et le réduire à la perception qu’ils en ont ».
Pour lutter contre l’islamisme, la conférence a proposé la création – en Russie – d’une chaîne de télévision qui pourrait concurrencer al-Jazira et « transmettre le vrai message de l’islam et combattre l’extrémisme et le terrorisme ». Et aussi d’un « centre scientifique en Tchétchénie pour surveiller et étudier les groupes contemporains (...) et réfuter et critiquer scientifiquement la pensée extrémiste ». Le nom du centre serait Tabsir (clairvoyance). Et encore de bourses pour étudiants de la charia afin de contrecarrer l’action de l’Arabie saoudite…
Cette conférence n’a eu aucun retentissement médiatique. A vrai dire elle n’a guère d’intérêt, sauf d’avoir eu lieu, et de montrer que le maréchal Sissi poursuit son objectif, avec Poutine. Evidemment tout reste à faire, et il ne semble pas que la conférence ait simplement suggéré à demi-mot qu’il faudrait réinterpréter le Coran (en commençant par renverser les versets abrogés et abrogeants)…
Il y a eu toutefois une réaction, extrêmement vive : celle de l’Arabie saoudite. Une campagne des médias du royaume visant à défendre « notre nation » contre ceux qui l’attaquent, notamment le Grand Imam d’al-Azhar qui a « longtemps été alcoolique » et qui maintenant « s’allie avec Poutine pour exclure l’Arabie saoudite du monde musulman »… On souligne que cette conférence « affligeante» a eu pour hôte le président tchétchène Ramzan Kadyrov qui est un « soufi délirant ». Le prédicateur de la mosquée Roi-Khaled de Riyad a déclaré : « La conférence tchétchène doit nous servir de réveil : le monde se prépare à nous brûler sur le bûcher »…