Pour la première fois, dans un sondage BVA pour Les Echos et France Info, une majorité de sondés (52%) considère que « le Front national devrait être à présent considéré comme un parti comme les autres ».
C’est parce qu’il devient en effet un parti comme les autres. Le Front national de Jean-Marie Le Pen avait un comportement parfaitement et impeccablement « démocratique » et « républicain », mais il n’était pas « comme les autres », parce que pour être vraiment « républicain » au sens de la république laïque UMPS (maçonnique) il faut professer le « Non à une loi morale qui primerait la loi civile », comme l’avait fait Jacques Chirac en rejetant l’encyclique Evangelium vitae de Jean-Paul II. Jean-Marie Le Pen a toujours souligné qu’il y a des valeurs morales (résumées dans le Décalogue) qui s’imposent à la loi civile*. Pour le nouveau Front national de Marine Le Pen, la valeur suprême est l’Etat national. Si le FN professe que dans l’action politique il n’y a rien au-dessus de l’Etat, alors il est reconnu comme « républicain » au très particulier sens français du terme.
J’ai suivi de très près (j’étais sur place) la fabrication de l’image médiatique “Marine Le Pen” par les journalistes de gauche. Je me suis alors complètement trompé. J’étais persuadé qu’ils fabriquaient artificiellement une bulle pour avoir le plaisir de la crever lorsqu’ils le décideraient (inutile de faire des recherches, je ne l’ai écrit nulle part). En fait ils avaient compris qu’ils tenaient en Marine Le Pen une figure politico-médiatique susceptible de faire le poids face aux autres figures politico-médiatiques, sur le même plan qu’elles, ce qui impliquait que lorsqu’elle prendrait les rênes du FN elle deviendrait un réel danger pour l’UMP. C’est pourquoi les médias ont mené une intense campagne pour l’élection de Marine Le Pen à la tête du FN. Le résultat des cantonales est conforme aux espérances : l’UMP dégringole, le FN monte. Et comme nous avons la droite la plus bête du monde, une fois de plus l’UMP a tout fait pour aggraver sa défaite, en faisant passer de 10 à 12,5% des inscrits le seuil permettant à un candidat de se maintenir au second tour. C’était pour empêcher les désastreuses triangulaires avec un candidat FN ; de fait il n’y a pas eu de triangulaires : en de nombreux endroits c’est le candidat UMP qui a été éliminé par la règle qui devait éliminer le FN.
La machine médiatique est donc bien en place pour qu’aux prochaines élections la gauche s’installe confortablement au « pouvoir », avec une UMP historiquement affaiblie, puisque c’était depuis le début le but de la manœuvre. Mais il n’est pas garanti que l’effet Marine Le Pen s’arrête là, comme la forte poussée des cantonales semble le laisser entendre. Le problème sera alors de diaboliser un FN dont on a fait un « parti comme les autres ».
* Sur ces sujets, voir ma conférence donnée à l’université d’été du FN en 2002. (Inutile de souligner qu’elle paraît aujourd’hui complètement “décalée”…)