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Le blog d'Yves Daoudal - Page 599

  • Saint Grégoire le Grand

    Dans le calendrier romain, depuis 1960, c’est la férie de carême qui prime. Mais dans le calendrier monastique c’est la fête de saint Grégoire le Grand. Il fut grand au carré et au cube et au-delà, car il fut un grand bénédictin, un grand pape, un grand docteur de l’Eglise, et le grand ordonnateur de la liturgie latine. Au moment de la « bataille de la messe » j’ai connu un moine qui parlait toujours de la « messe de saint Grégoire le Grand », et non de saint Pie V. Cela pour souligner que la messe traditionnelle n’est pas la messe « tridentine », mais qu’elle était déjà pour l’essentiel codifiée par saint Grégoire le Grand. De fait il aurait été bon de dire « la messe de saint Grégoire », comme les byzantins disent « la divine liturgie de saint Jean Chrysostome » (laquelle s’est fixée à peu près au même moment que se fixait la messe latine, aux XVe-XVIe siècles).

    Le bréviaire bénédictin a donc un office propre, avec une série d’antiennes et de répons, tirés de la Vie de saint Grégoire le Grand écrite par Paul Diacre (VIIIe siècle). L’un des répons, émouvant, est de saint Grégoire lui-même, regrettant le temps où il était moine.

    ℟. Ecce nunc magni maris fluctibus quatior, pastoralis curæ procellis illisus : * Et cum priorem vitam recolo, quasi post tergum reductis oculis, viso littore suspiro.
    . Immensis fluctibus turbatus feror, vix jam portum valeo videre quem reliqui. * Et cum priorem vitam recolo, quasi post tergum reductis oculis, viso littore suspiro.

    Me voici donc maintenant battu des flots de la grande mer, brisé des tempêtes de la charge pastorale. Et lorsque, au souvenir de ma vie antérieure, je jette mes regards derrière moi, à la vue du rivage qui s’éloigne, je soupire.
    Plein de trouble, je me sens emporté par des vagues immenses ; à peine aperçois-je encore le port que j’ai quitté. Et lorsque, au souvenir de ma vie antérieure, je jette mes regards derrière moi, à la vue du rivage qui s’éloigne, je soupire.

    C’est extrait du début de ses Dialogues, et Paul Diacre a également cité tout le passage au début de sa Vita. En voici la traduction par l’abbé Henry (1855) :

    Mon esprit, battu par les vagues de mes pénibles occupations, se rappelle le bonheur qu'il goûtait jadis au monastère, alors qu'il voyait à ses pieds tout ce qui passe, et qu'il planait au-dessus de ce monde éphémère. Les biens célestes étaient le seul objet de ses pensées ; dans l’élan de sa contemplation, il secouait les liens de sa mortalité et franchissait les barrières de sa prison de boue ; enfin la mort elle-même, que tous regardent comme un affreux supplice, il la chérissait comme le vestibule de la vie et la récompense de ses travaux. Mais maintenant la charge pastorale le force de subir les tracassantes affaires du siècle, et après avoir joui d'un si doux, d'un si magnifique repos, il lui faut se souiller de la poussière des choses de la terre. Une charitable condescendance l'a-t-elle obligé de se répandre au dehors, lorsqu'il veut rentrer en lui-même, incontestablement il se trouve moins d'aptitude pour ses exercices spirituels. Ainsi je pèse mes souffrances, je pèse mes pertes, et la considération des avantages dont je suis privé rend mon fardeau plus accablant encore. Les vagues de la grande mer me battent de toutes parts, et la tourmente d'une furieuse tempête brise la frêle nacelle de mon âme. Aux souvenirs de ma vie première, je soupire comme à la vue d'un tranquille rivage laissé derrière moi. Mais ce qu'il y a de plus fâcheux encore, c'est que, emporté par les vastes flots, je puis à peine, dans mon trouble, apercevoir le port que j'ai quitté.

    L’une des antiennes dit :

    Dum paginae sacrae mysteria panderet, columba nive candidior apparuit.

    Alors qu’il expliquait les mystères de la sainte Écriture, une colombe plus blanche que la neige apparut.

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    La colombe du Saint-Esprit explique l’Ecriture à Grégoire. Le diacre Pierre est prêt à écrire ce que le pape va lui dicter. Illustration du Registrum Gregorii de Trèves, recueil des lettres de saint Grégoire (fin du Xe siècle).

  • Leur PMA

    Le professeur Michael David, de la faculté de médecine de l’université d’Adelaïde (Australie), spécialisé dans la recherche sur la fertilité, a publié une étude sur 507.390 grossesses dans l’Ontorio (Canada) entre 2012 et 2015. Il en résulte que la fécondation in vitro multiplie par deux le risque de malformation cardiaque du nouveau-né, et par quatre en cas de jumeaux (ce qui est fréquent puisqu’on transfère souvent plusieurs embryons).

    Et l’on a constaté en Australie que 15 bébés sur 1000 naissent avec une malformation cardiaque congénitale.

    Précédents articles de Gènéthique sur le sujet :

    Les femmes qui font une FIV augmentent de 40 % leur risque d’avoir une complication grave à l’accouchement

    PMA: Cinq fois plus de troubles cardiaques mortels pendant la grossesse, selon une étude allemande

  • Les acharnés

    Le vétéran de la théologie de la libération Victor Codina, jésuite de 89 ans, a publié un article dans lequel il affirme qu’une note de Querida Amazonia permet l’ordination d’hommes mariés, de la même façon qu’une note d’Amoris laetitia a permis aux adultères de se remarier à l’église. Trouvaille tellement géniale que le REPAM a aussitôt repris le texte pour lui donner la plus grande diffusion.

    La note (120) dit ceci :

    Dans le Synode a germé la proposition d’élaborer un “rite amazonien”.

    Or, dit Codina, il y a déjà 23 rites dans l’Eglise, et dans nombre d’entre eux il y a des prêtres mariés. Donc le rite amazonien peut permettre l’ordination d’hommes mariés, d’autant que l’exhortation apostolique ne ferme pas la porte puisqu’elle n’en parle pas.

    Sauf que le raisonnement ne tient pas. Le vieux Codina parle des rites comme le faisaient jadis ceux qui ne voulaient pas reconnaître pleinement les Eglises orientales. Ils voulaient n’y voir que des particularités liturgiques. Le P. Codina devrait se renseigner, il apprendrait que depuis Léon XIII déjà, et surtout depuis qu’il y a un code de droit canon des Eglises orientales, Rome reconnaît explicitement l’existence d’Eglises qui ont leurs propres lois. Dont celle de permettre l’ordination d’hommes mariés. Mais il n’est aucunement question de créer une Eglise amazonienne spécifique. Le projet de « rite amazonien » est purement liturgique (si l’on peut dire…).

    En fait le vieux jésuite ne doit pas être si sûr de lui, puisque, ensuite, il évoque ce qui, réellement, ouvre la voie à l’ordination d’hommes mariés : la mention au début de Querida Amazonia que les pasteurs et les fidèles doivent s’engager à appliquer le document final du synode, lequel en appelle à un clergé marié, à des diaconesses, etc.

  • Mercredi de la deuxième semaine de carême

    ℟. Dixit Angelus ad Jacob: * Dimítte me, aurora est. Respóndit ei : Non dimíttam te, nisi benedíxeris mihi. Et benedíxit ei in eodem loco.
    ℣. Cumque surrexísset Jacob, ecce vir luctabátur cum eo usque mane: et cum vidéret quod eum superáre non posset, dixit ad eum :
    ℟. Dimítte me, aurora est. Respóndit ei : Non dimíttam te, nisi benedíxeris mihi. Et benedíxit ei in eodem loco.

    L’ange dit à Jacob : Laisse-moi, car déjà se lève l’aurore. Il lui répondit : Je ne te laisserai point si tu ne me bénis. Et il le bénit en ce même lieu.
    Lorsque Jacob se fut levé, voilà qu’un homme lutta avec lui jusqu’au matin ; or, comme cet homme vit qu’il ne pouvait le vaincre, il lui dit :
    Laisse-moi, car déjà se lève l’aurore. Il lui répondit : Je ne te laisserai pas si tu ne me bénis. Et il le bénit en ce même lieu.

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    Il y a très peu de représentations byzantines de la lutte entre Jacob et « l’ange ». L’une d’elles est celle de l’église de la Mère de Dieu peribleptos (admirée de tous) d’Ohrid en Macédoine (1295). Si les jambes des personnages peuvent faire penser à une lutte, ils ont plutôt l’air de s’embrasser. C’est sur quoi insisteront les miniatures médiévales.

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    Puis Rembrandt...

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    La mosaïque de Monreale (vers 1175) donnait déjà la solution : ce que montre l’iconographie, ce n’est pas d’abord la lutte, mais d’abord, puis uniquement, la bénédiction.

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    En attendant les romantiques qui vont montrer une lutte de plus en plus violente, jusqu’à un Jacob nu comme un lutteur antique. en oubliant la fin de l’histoire : le texte biblique devient un prétexte.

    Delacroix :

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    Et Maurice Denis en fera une danse (de deux personnages quasi identiques - mais c'était déjà le cas dans les miniatures, excepté les ailes):

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  • Mais il y a encore des catholiques

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    En Pologne, naturellement.

    Communiqué du bureau de presse de la conférence épiscopale :

    « Dans le cadre des recommandations de l’inspecteur sanitaire en chef selon lesquelles il ne doit pas y avoir de grands rassemblements de personnes, je demande d’augmenter – autant que possible – le nombre des messes dominicales dans les églises afin qu’un certain nombre de fidèles puisse assister à la liturgie à chaque fois, selon les directives des services de santé », écrit le président de la Conférence des évêques polonais, l’archevêque Stanisław Gądecki.

    Dans le même temps, l'archevêque Gądecki a souligné que les hôpitaux guérissent les maladies du corps et que les églises servent, entre autres, à guérir les maladies de l'esprit. « Par conséquent, il est impensable que nous ne priions pas dans nos églises » - a déclaré le président de la Conférence épiscopale polonaise.

    L'archevêque Gądecki a rappelé que les personnes âgées et les malades peuvent rester à la maison et suivre la messe du dimanche dans les médias. « Je voudrais rappeler qu'il n'est pas nécessaire d'échanger le signe de la paix en se serrant la main pendant la Sainte Messe » - écrit-il.

    L'archevêque Gądecki a demandé à prier pour ceux qui sont morts des suites du coronavirus. « Prions pour la santé des malades et pour les médecins, le personnel médical et tous les services qui œuvrent pour arrêter la propagation du virus. Prions pour la fin de l'épidémie. Conformément à la tradition de l'Église, j'encourage particulièrement à prier avec la supplication Saint Dieu, Saint Fort… » - a souligné le président de l'épiscopat polonais.

    Il y a des pays où le coronavirus est un prétexte pour interdire la communion sur la langue, en Pologne c’est seulement l’occasion de demander de ne plus pratiquer l’incongru serrage de paluches…

    Święty Boże, Święty Mocny, Święty Nieśmiertelny, zmiłuj się nad nami.
    Dieu Saint, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous.

    Et avec l'influence... corse, par le chœur Jerycho de Bartosz Izbicki, fondateur de la branche polonaise de Cantus, organiste de la basilique Saint-Jean Baptiste de Brochów (où fut baptisé Chopin) :

  • Devra-t-on se faire orthodoxe ?

    Le Saint-Synode permanent de l’Église orthodoxe de Grèce, lors de sa session du 9 mars 2020, a abordé la question du coronavirus. Rappelant les mesures prophylactiques indiquées par les autorités sanitaires, le Saint-Synode a pris les décisions suivantes concernant la vie liturgique elle-même :

    1. Intensifions tous nos prières au Vainqueur de la corruptibilité et de la mort, le Seigneur Jésus-Christ, afin qu’Il préserve Son peuple sain et sauf. Dans ce but, il est demandé à Leurs Éminences les métropolites de recommander aux recteurs des paroisses que dimanche prochain, le deuxième du Grand Carême (15 mars 2020), avant le renvoi de la sainte Liturgie, ils célèbrent une prière dans toutes les églises de Grèce, pour prévenir l’extension de la maladie.

    2. [Rappel des mesures préconisées par le gouvernement.]

    3. Pour les membres de l’Église, la participation à la divine Eucharistie et à la communion, au Calice commun de la Vie, ne peut assurément devenir la cause de la transmission de la maladie, car les fidèles de tous les temps savent que la participation à la divine Communion, même lors de pandémies, constitue d’une part une affirmation effective de l’abandon de soi au Dieu vivant, et d’autre part une manifestation claire de l’amour qui vainc toute crainte humaine pouvant être justifiée : « La crainte n’est pas dans l’amour, mais l’amour parfait bannit la crainte » (I Jn IV, 18). Les membres de l'Église savent que la communion, c'est-à-dire la relation, est un fruit de l'amour et un exercice de liberté, précisément parce qu'elle ignore les soupçons, les réserves et les peurs.

    Les discussions et opinions entendues ces derniers jours au sujet de toute cette question, voire même sur l’interdiction éventuelle de la sainte Eucharistie, partent d’un point de départ différent et ont une approche différente. Tous ceux qui s’approchent du sacrement « avec crainte de Dieu, foi et amour » et ce tout à fait librement, sans aucune contrainte, communient au Corps et au Sang du Christ, qui devient un « remède d’immortalité », « pour la rémission des péchés et la vie éternelle »

    Tous ces fidèles, le cher et pieux peuple orthodoxe, et le bon et saint clergé qui, par le biais de la divine communion, expriment leur amour et leur soif de vie et de relation, le moins qu'ils méritent du débat public est le respect de leur foi et de leur choix, d'aimer sans crainte ni angoisse. Sans condamner qui que ce soit en raison de la crainte et de l’inquiétude, nous confessons que tous les fidèles, accomplissant le devoir de l’amour dans la liberté, continueront à fréquenter nos églises et à communier, ayant la certitude qu’ils communient dans la Vie et l’immortalité.

    *

    Et aussi:

    "Des patrouilles de civils se sont constituées en Thrace pour aider l’armée et la police à verrouiller la frontière greco-turque. Le chef de l’Eglise orthodoxe grecque, l’archevêque Iéronimos, est venu leur rendre visite pour les bénir."

  • Mardi de la deuxième semaine de carême

    En ces jours-là, la parole du Seigneur fut adressée à Élie, lui disant : Lève-toi et va à Sarepta de Sidon, et demeures-y ; car j’ai commandé à une femme veuve de te nourrir. Il se leva et s’en alla à Sarepta. Lorsqu’il fut venu à la porte de la ville, il aperçut une femme veuve qui ramassait du bois ; il l’appela et lui dit : Donne-moi un peu d’eau dans un vase afin que je boive. Tandis qu’elle allait lui en chercher, il cria derrière son dos : Apporte-moi aussi, je te prie, une bouchée de pain dans ta main. Elle lui répondit : Vive le Seigneur ton Dieu, je n’ai pas de pain ; j’ai seulement une poignée de farine dans une hydrie, et un peu d’huile dans un lécythe. Eh bien, je ramasse deux bouts de bois pour entrer et l’apprêter pour moi et à mon fils, afin que nous mangions et mourions. Elie lui dit : Ne crains pas, mais va et fais comme tu as dit ; cependant fais d’abord pour moi, de ce reste de farine, un petit pain cuit sous la cendre, et apporte-le-moi, et tu en feras après cela pour toi et pour ton fils. Car voici ce que dit le Seigneur, Dieu d’Israël : L’hydrie de farine ne fera pas défaut, et le lécythe d’huile ne diminuera pas, jusqu’au jour où le Seigneur doit donner la pluie sur la terre. Elle s’en alla et fit selon la parole d’Elie. Et il mangea, lui, et elle, et sa maison ; et depuis ce jour l’hydrie de farine ne fit pas défaut, et le lécythe d’huile ne diminua pas, selon la parole du Seigneur qui avait été dite par la main d’Elie.

    Dans cet émouvant épisode, Elie est le prophète de la miséricorde divine, de la multiplication des pains et donc de l’eucharistie, et de la plénitude de la vie éternelle.

    Les traductions françaises ne respectent pas les particularités du texte. Saint Jérôme a traduit le mot hébreu kad par hydria. La Septante l’a également traduit par hydria. Pourtant le vase à anses et à col qui porte ce nom est, comme ce nom l’indique, davantage destiné à contenir de l’eau, et en tout cas un liquide, que de la farine. L’autre récipient est, dans le texte hébreu que nous avons, tsappakhath, un mot rarissime qu’on ne retrouve qu’en I Samuel 26. Saint Jérôme l’a aussi traduit par un mot grec, lecythus, vase a priori destiné à contenir de l’huile parfumée pour le corps. La Septante l’a traduit par kapsakis, un mot rarissime qu’on ne retrouve que dans le livre de Judith (pour un vase d’huile également, que saint Jérôme appelle simplement vas).

    A la fin du texte, on remarque « par la main d’Elie ». La Septante a aussi « par la main d’Elie ». Le texte hébreu ici a été manifestement modifié : « la parole du Seigneur qu’il avait dite par Elie ». Mais l’hébraïsme « par la main de » est une expression biblique importante, que l’on trouve quand il s’agit de Moïse, des commandements et préceptes que Dieu fait passer à son peuple « par la main de Moïse » (par l’entremise du médiateur). Là le texte hébreu dit bien « par la main » (be-yad). Il faut garder l’expression pour Elie : elle souligne qu’il est l’intermédiaire de Dieu, comme Moïse. Ce sont les deux personnages de la Transfiguration. Est-ce pour éviter ce rapprochement que l’expression a été supprimée du texte hébreu ?

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    Superbe tableau d’Abraham Van Dijck, où chaque personnage a la juste expression, mais le feu aussi, et le récipient de farine et la jarre d’huile. Le voir en grand ici.

  • En Inde

    La scène se passe à l’hôpital Sanjo de Mandya, un hôpital de 100 lits créé et géré par les Sœurs de saint Joseph, congrégation de l’Eglise syro-malabar. Le 1er mars, un patient hindou âgé est admis pour soigner une pression artérielle excessive. Le lendemain il demande ce qu’est cette Bible dans sa chambre. Le responsable des relations publiques, Simon George, lui dit que c’est le livre sacré des chrétiens et qu’il peut le lire si cela l’intéresse. Aussitôt l’homme téléphone à son fils, qui est un militant du groupe paramilitaire hindou Rashtriya Swayamsevak Sangh. Une vingtaine de personnes manifestent bientôt devant l’hôpital, qu’ils accusent de « conversions forcées » et de dénigrement des dieux hindous. Très vite ils sont 70, ils font irruption dans le bureau du responsable des relations publiques et le tabassent. Ils s’en prennent aussi à l’administratrice de l’hôpital, sœur Nirmal José. La police arrive… et embarque Simon George, qui est aussitôt incarcéré. Le lendemain, le P. Josekutty Kalayil, responsable des affaires juridiques de l’hôpital, tente en vain de faire libérer Simon George sous caution…

    (Le Karnataka est aujourd’hui dirigé par le BJP, le parti nationaliste hindou du Premier ministre Narendra Modi, dont dépend le Rashtriya Swayamsevak Sangh. Il ne faut pas confondre le Karnataka avec l’Etat voisin du Kerala. Au Karnataka il y a moins de 2% de chrétiens, et si Mandya est le siège d’une éparchie syro-malabar, on n’y compte que 9.000 chrétiens sur… 1,8 million d’habitants, hindous à 95%.)

  • Audi, benigne Conditor

    L’hymne des vêpres du carême, par les moines de l’abbaye de Silos, vers 1956-1959 - les deux premières strophes et la doxologie (On notera que la collection s’intitule « Discothèque catholique populaire »…).


    podcast

    Audi, benígne Cónditor,
    Nostras preces cum flétibus,
    In hoc sacro jejúnio
    Fusas quadragenário.

    Écoutez, Créateur bienveillant, nos prières accompagnées de larmes, répandues au milieu des jeûnes de cette sainte Quarantaine.

    Scrutátor alme córdium,
    Infírma tu scis vírium :
    Ad te revérsis éxhibe
    Remissiónis grátiam.

    Vous qui scrutez le fond des cœurs, vous connaissez notre faiblesse : nous revenons à vous ; donnez-nous la grâce du pardon.

    Multum quidem peccávimus,
    Sed parce confiténtibus :
    Ad laudem tui nóminis
    Confer medélam lánguidis.

    Nous avons beaucoup péché ; pardonnez-nous à cause de notre aveu : pour la gloire de votre Nom, apportez le remède à nos langueurs.

    Sic corpus extra cónteri
    Dona per abstinéntiam ;
    Jejúnet ut mens sóbria
    A labe prorsus
    críminum.

    Faites que la résistance de notre corps soit abattue par l’abstinence, et que notre esprit sobre jeûne de la souillure des péchés.

    Præsta, beáta Trínitas,
    Concéde, simplex Unitas ;
    Ut fructuósa sint tuis
    Jejuniórum múnera.
    Amen.

    Exaucez-nous, Trinité bienheureuse, accordez-nous, Unité simple, que soit profitables à vos fidèles les bienfaits du jeûne. Amen.

  • Deuxième dimanche de carême

    Confitémini Dómino, quóniam bonus : quóniam in sǽculum misericórdia ejus.

    Confessez le Seigneur, parce qu’il est bon, parce que sa miséricorde est éternelle.

    Quis loquétur poténtias Dómini : audítas fáciet omnes laudes ejus ?

    Qui racontera les puissances du Seigneur ? Qui fera entendre toutes ses louanges ?

    Beáti, qui custódiunt judícium et fáciunt justítiam in omni témpore.

    Heureux ceux qui gardent l’équité et qui pratiquent la justice en tout temps.

    Meménto nostri, Dómine, in beneplácito pópuli tui : vísita nos in salutári tuo.

    Souvenez-vous de nous, Seigneur, dans votre bienveillance pour votre peuple ; visitez-nous par votre salut.

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    Le trait de ce dimanche a les formules caractéristiques de ce genre de pièce, mais il a aussi une particularité remarquable, fort bien analysée par dom Baron :

    De la première à la dernière note il y a, par delà les fluctuations des incises, des phrases et des versets, une montée ininterrompue qui fait de tout le Trait une louange de plus en plus ample, de plus en plus éclatante, jusqu’à ce qu’elle s’achève, transformée en ardente supplication, dans les régions extrêmes du mode.

    Le premier verset débute en ré, et ne dépasse le fa que par quelques broderies.

    Le second part du ré mais s’établit sur le fa et le mouvement s’anime, avec le texte d’ailleurs. Notez le très beau motif de quis loquetur si bien adapté au mot, à l’idée et à l’interrogation.

    Le troisième s’établit dès le début sur fa et, en trois notes, il est sur le la ; mouvement rapide qui rend parfaitement le sentiment spontané d’admiration et de désir de Beati, lequel se développe très heureusement sur les formules de custodiunt judicium.

    Le quatrième est, dans toute sa première partie, nettement basé sur le la. Il se développe sur memento en une supplication qui, dans les régions élevées, prend une valeur peu commune. L’ardeur ne s’en manifeste pas par des élans impétueux mais par la redite paisible des mêmes motifs sur les mêmes notes. Il en résulte une insistance très poussée et, en même temps, très délicate et très intime. Une gracieuse ondulation sur nostri amène le mot Domine enveloppé de tendresse. Tui est bien à sa place, très en relief à la fin de la phrase ; et l’incise finale porte jusqu’au si bémol qui est le sommet de la mélodie, le mot visita nos qui est aussi le mot de la miséricorde et le sommet de la prière.

    Lent - Second Sunday: Tract from Corpus Christi Watershed on Vimeo.