Le saint Ordre des Frères Prêcheurs, qui présentait hier une rose vermeille à Jésus ressuscité, lui offre aujourd'hui un lis éclatant de blancheur. Catherine de Sienne succède sur le Cycle à Pierre Martyr : touchante association qui forme l'un des plus riches épisodes du Temps pascal. Notre divin Roi a droit à tous les genres de tributs, en ces derniers moments de son séjour avec nous ; et puisque la nature terrestre n'offre en cette saison que fleurs et parfums, il est juste que le monde spirituel épanouisse à la gloire de l'auteur de la grâce ses plus nobles et ses plus odorantes productions.
Qui oserait entreprendre de raconter les mérites de Catherine, d'énumérer seulement les titres de gloire dont son nom est entouré ? Entre les épouses de Jésus elle occupe un des premiers rangs. (...)
Les communications divines ont commencé pour elle dès ses premières années, et l'extase est devenue son état presque habituel. Ses yeux ont souvent vu notre divin Ressuscité qui lui prodigue les caresses et les épreuves. Les plus hauts mystères sont descendus à sa portée, et une science qui n'a rien de la terre illumine son intelligence. Cette fille sans lettres dictera des écrits sublimes, où les vues les plus profondes sur la doctrine céleste sont exposées avec une précision et une éloquence surhumaines, avec un accent qui pénètre encore les âmes aujourd'hui.
Mais le Ciel ne veut pas que tant de merveilles demeurent ensevelies dans un coin de l'Italie. Les saints sont les soutiens de l'Eglise; et si leur action est souvent mystérieuse et cachée, quelquefois aussi elle se révèle aux regards des hommes. On voit alors au grand jour les ressorts à l'aide desquels Dieu gouverne le monde. Il s'agissait, à la fin du XIV° siècle, de restituer à la ville sainte la présence du vicaire du Christ, tristement absent de son siège depuis plus de soixante ans. Une âme sainte pouvait, dans le secret de la face de Dieu, par ses mérites et ses prières, déterminer cette heureuse crise vers laquelle l'Eglise aspirait tout entière; le Seigneur voulut cette fois que tout se passât au grand jour. Au nom de Rome délaissée, au nom de son Epoux divin qui est aussi celui de l'Eglise, Catherine franchit les Alpes, et se présente au Pontife qui n'a jamais vu Rome et dont Rome ignore les traits. La Prophétesse lui intime avec respect le devoir qu'il doit remplir ; pour garantir la mission qu'elle exerce, elle lui révèle un secret dont lui seul a conscience. Grégoire XI est vaincu, et la Ville éternelle revoit enfin son pasteur et son père.
Dom Guéranger
Liturgie - Page 551
-
Sainte Catherine de Sienne
-
Saint Pierre de Vérone
Le héros que la sainte Eglise députe aujourd'hui vers Jésus ressuscité, a combattu si vaillamment que le martyre a couronné jusqu'à son nom. Le peuple chrétien l'appelle saint Pierre Martyr, en sorte que son nom et sa victoire ne se séparent jamais. Immolé par un bras hérétique, il est le noble tribut que la chrétienté du XVIe siècle offrit au Rédempteur. Jamais triomphe ne recueillit de plus solennelles acclamations. Au siècle précédent, la palme cueillie par Thomas de Cantorbérv fut saluée avec transport par les peuples qui n'aimaient rien tant alors que la liberté de l'Eglise; celle de Pierre fut l'objet d'une ovation pareille. Rien ne surpasse l'enthousiame du grand Innocent IV, dans la Bulle pour la canonisation du martyr. « La foi chrétienne appuyée sur tant de prodiges, s'écrie-t-il, brille aujourd'hui d'un éclat nouveau. Voici qu'un nouvel athlète vient par son triomphe raviver nos allégresses. Les trophées de la victoire éclatent à nos regards, le sang répandu élève sa voix, la trompette du martyre retentit, la terre arrosée d'un sang généreux fait entendre son langage, la contrée qui a produit un si noble guerrier proclame sa gloire, et jusqu'au glaive parricide qui l'a immolé acclame sa victoire. Dans sa joie, l'Eglise-mère entonne au Seigneur un cantique nouveau, et le peuple chrétien va trouver matière à des chants d'allégresse qui n'avaient pas retenti encore. Un fruit délicieux cueilli dans le jardin de la foi vient d'être placé sur la table du Roi éternel. Une grappe choisie dans la vigne de l'Eglise a rempli de son suc généreux le calice royal ; la branche dont elle a été détachée par le fer était des plus adhérentes au cep divin. L'Ordre des Prêcheurs a produit une rose vermeille dont le parfum réjouit le Roi céleste. Une pierre choisie dans l'Eglise militante, taillée et polie par l'épreuve, a mérité sa place dans l'édifice du ciel. »
(Dom Guéranger)
-
Saint Paul de la Croix
« A qui appartiennent ces campagnes ? dit-il un jour à son compagnon de route... A qui appartiennent ces campagnes? vous dis-je. Ah ! vous ne comprenez pas ?... Elles appartiennent à notre grand Dieu ! » Et, transporté d'amour, raconte son biographe, il vole en l'air jusqu'à une certaine distance.
« Mes frères, aimez Dieu! répète-t-il à tous ceux qu'il rencontre, aimez Dieu qui mérite tant d'être aimé ! N'entendez-vous pas les feuilles mêmes des arbres qui vous disent d'aimer Dieu ? O amour de Dieu ! ô amour de Dieu ! »
-
Saint Pierre Canisius
Le catéchisme de saint Pierre Canisius, qui fut très célèbre au XVIIe siècle, reste fort étonnant, non seulement par la qualité de ses définitions, mais par l'incroyable abondance, ordonnée, des « témoignages de l'Ecriture et de la Tradition » par lesquels il les appuie. On reste confondu, notamment, par la connaissance qu'il avait des pères de l'Eglise.
Voici un petit exemple :
-
Saint Clet
En 2007 je me demandais comment il se faisait que tant d'hommes du Cap Sizun s'appellent Clet. Après avoir donné l'explication : l'église de Cleden-Cap-Sizun est placée sous le patronage de saint Clet, j'ajoutais que cela ne faisait que déplacer la question : comment se fait-il que saint Clet, pontife inconnu, même de la plupart des catholiques, soit le saint patron de cette église ?
J'ai ensuite trouvé la réponse. En fait, elle se trouve (partiellement)... dans le nom de la paroisse : saint Clet est saint Cleden. Dans le cartulaire de l'abbaye de Landévennec, la paroisse était appelée Cletuen. Il ne s'agit donc pas du pape, mais d'un saint local, sans doute d'origine galloise car en Galles il y a un saint Clydwin. (Et en Bretagne il y a aussi Cleden-Poher.) C'est au milieu du XVIIe siècle que saint Cleden a été remplacé par le pape martyr saint Clet, sans doute par un curé ultramontain qui avait jugé bon de remplacer le saint local dont on ne savait rien par un saint pape dont on ne savait pas davantage... -
3e dimanche après Pâques
La liturgie, toujours pleine de joie pascale (« Jubilate », dit l'introït), nous oriente vers l'Ascension. « Un peu, et vous ne me verrez plus, encore un peu, et vous me reverrez », dit le Christ à ses apôtres. Certes, il leur dit cela avant la Passion, et la signification première du propos est qu'ils ne le verront plus parce qu'il sera mort et enterré (c'est pourquoi vous pleurerez et vous lamenterez), et qu'ils le reverront parce qu'il sera ressuscité (c'est pourquoi vous serez dans la joie). Mais la signification de l'Ascension est attestée par Jésus lui-même, qui ajoute : « parce que je vais au Père ».
C'est donc surtout après l'Ascension, tous les jours jusqu'à la fin du temps, que les disciples verront le Seigneur et s'en réjouiront. Ils verront le Ressuscité des yeux de la foi, c'est-à-dire le plus réellement qui soit : dans l'Eglise, dans l'Eucharistie.
-
Saint Fidèle de Sigmaringen
Il a déployé la plénitude de sa charité en soulageant et en secourant extérieurement son prochain ; ouvrant à tous les malheureux des bras paternels, il faisait vivre de véritables troupes de pauvres par les aumônes qu'il recueillait de partout. Il remédiait à l'abandon des orphelins et des veuves en leur procurant du secours auprès des puissants et des princes. Sans relâche il apportait aux prisonniers tout le réconfort, spirituel et corporel, dont il était capable; il visitait assidûment tous les malades, leur apportait de la joie et, après les avoir réconciliés avec Dieu, les fortifiait pour le dernier combat. En ce genre, il n'a jamais moissonné plus de mérites que lorsque l'armée autrichienne, cantonnée dans les Grisons, presque tout entière frappée par une épidémie, s'offrait à la maladie et à la mort comme une proie digne de pitié.
Cet homme de foi, Fidèle par son nom et par sa vie, se distingua, en même temps que par sa charité, par son ardeur pour défendre la foi. Il la prêcha inlassablement, et peu de jours avant de la confirmer par son sang, dans son dernier sermon, il laissa comme son testament en prononçant ces paroles :« O foi catholique, comme tu es ferme, comme tu es inébranlable, bien enracinée, bien fondée sur la pierre solide ! Le ciel et la terre disparaîtront, mais tu ne pourras jamais dîsparaître. Dès le commencement, le monde entier t'a contredite, mais tu as triomphé de tous par ta grande puissance. La victoire a vaincu le monde, c'est notre foi. Elle a fait plier des rois très puissants sous le joug du Christ, elle a conduit les peuples à obéir au Christ. Qu'est-ce qui a fait que les saints apôtres et martyrs ont subi de durs combats et de cruels supplices, sinon la foi, principalement la foi en la résurrection ? Qu'est-ce qui a conduit les anciens moines à dédaigner les plaisirs, à mépriser les honneurs, à piétiner les richesses pour mener au désert une vie céleste, sinon la foi vive ? De nos jours, qu'est-ce qui entraîne les Chrétiens à rejeter la facilité, à renoncer au confort, à supporter les épreuves, à souffrir une vie pénible ? C'est la foi vive qui agit par la charité. C'est elle qui fait abandonner les biens présents par l'espérance des biens futurs et, en échange des biens présents, recevoir les biens du monde à venir »
(Benoît XIV, lors de sa canonisation, le 29 juin 1746)
-
Saint Georges
L'Eglise Romaine n'a pas de Légende sur saint Georges dans son Office; on lit en place un passage de saint Cyprien sur les combats des Martyrs. La raison de cette dérogation à l'usage ordinaire est fondée sur une particularité qui remonte jusqu'au V° siècle. En 496, dans un célèbre concile tenu à Rome, le pape saint Gélase donnant le catalogue des livres que les fidèles pouvaient lire sans danger et avec profit, et de ceux qu'ils devaient éviter, signale parmi ces derniers certains Actes de saint Georges, comme rédigés par un écrivain hérétique et inepte, et défend d'en faire usage. Il existait cependant d'autres Actes du saint Martyr en Orient, totalement différents de ceux qui avaient eu cours à Rome, mais on ne les connaissait pas dans cette ville. Le culte de saint Georges ne souffrit en rien dans la ville sainte de ce manque d'une Légende véridique. Une Eglise stationnale, Titre cardinalice, s'y éleva dès les premiers siècles, et subsiste encore sous le vocable de Saint-Georges-au-Voile-d'or; mais la Liturgie a continué de porter la trace de la sainte sévérité du canon de Gélase, par l'omission du récit de la vie du Martyr dans son Office.
Les Bollandistes ont eu entre les mains plusieurs copies des Actes proscrits, qu'ils ont trouvés en effet remplis de détails absurdes ; mais ils se sont gardés de les reproduire. Le P. Papebrock a donné en place les véritables Actes, écrits en grec, cités par saint André de Crète, et dans lesquels se développe l'admirable caractère de saint Georges, qui exerça un haut emploi militaire dans les armées romaines, sous l'empire de Dioclétien. Il fut une des premières victimes de la grande persécution, et souffrit à Nicomédie. Son courage fit une telle impression sur Alexandra, femme de Dioclétien, que cette princesse se déclara chrétienne, et mérita de partager la couronne du saint guerrier.
Dom Guéranger
-
Saint Soter et saint Caius
La liturgie rassemble ce jour deux papes martyrs : saint Soter, successeur de saint Anicet au IIe siècle, et saint Caius, mort le siècle suivant pendant la persécution de Dioclétien.
Du premier, on ne sait que ceci :
« Eusèbe nous a conservé un fragment d'une lettre de saint Denys, évêque de Corinthe, dans laquelle il remercie notre saint pontife des largesses qu'il a envoyées aux fidèles de cette Eglise qui souffraient d'une famine. Une lettre apostolique accompagnait ces aumônes, et saint Denys atteste qu'on la lisait dans l'assemblée des fidèles, avec celle que saint Clément avait adressée à la même Eglise au siècle précédent. » (Dom Guéranger)
Du second, le martyrologe nous dit que c'est lui qui « ordonna que dans l'Eglise, avant de monter à l'épiscopat, on passerait par les degrés des ordres et rangs de portier, de lecteur, d'exorciste, d'acolythe, de sous-diacre, de diacre et de prêtre ».
-
Saint Anselme
Voici les derniers mots de la catéchèse de Benoît XVI sur saint Anselme, le 23 septembre 2009. Ils ont été traduits par Zenit, mais ne figurent pas dans le texte publié sur le site du Saint-Siège.
Chers frères et sœurs, que l'amour pour la vérité et la soif constante de Dieu, qui ont marqué l'existence entière de saint Anselme, soient un encouragement pour chaque chrétien à rechercher sans jamais se lasser une union toujours plus intime avec le Christ, Chemin, Vérité et Vie. En outre, que le zèle plein de courage qui a caractérisé son action pastorale, et qui a parfois suscité en lui des incompréhensions, de l'amertume et même l'exil, soit un encouragement pour les pasteurs, pour les personnes consacrées et pour tous les fidèles à aimer l'Eglise du Christ, à prier, à travailler et à souffrir pour elle, sans jamais l'abandonner ou la trahir. Que la Vierge Mère de Dieu, envers laquelle saint Anselme nourrissait une dévotion tendre et filiale, obtienne cela pour nous. «Marie, c'est toi que mon cœur veut aimer - écrit saint Anselme -, c'est toi que ma langue désire ardemment louer».