Le catéchisme de saint Pierre Canisius, qui fut très célèbre au XVIIe siècle, reste fort étonnant, non seulement par la qualité de ses définitions, mais par l'incroyable abondance, ordonnée, des « témoignages de l'Ecriture et de la Tradition » par lesquels il les appuie. On reste confondu, notamment, par la connaissance qu'il avait des pères de l'Eglise.
Voici un petit exemple :
Que renferme la quatrième demande, Donnez-nous aujourd'hui notre pain de chaque jour ?
Pauvres et mendiants à la porte de ce riche qui est Dieu, l'auteur et le principe de tout bien, nous attendons de sa bonté ce qui suffira pour le corps à nos besoins journaliers, à savoir la nourriture et le vêtement ; et de plus pour l'âme, tout ce qui pourra entretenir en nous sa vie, à savoir la parole de Dieu, qui est son aliment, spirituel, la sainte Eucharistie, cette manne céleste, enfin les divers sacrements de l'Eglise ou dons de Dieu, qui renouvellent l'homme intérieur, le fortifient et l'animent d'ardeur pour mener une vie sainte et chrétienne.
TEMOIGNAGES DE L'ECRITURE.
1. JACQUES, I, 5, 17 : " Si quelqu'un de vous manque de sagesse, qu'il la demande à Dieu, qui donne à tous libéralement sans reprocher ses dons. - Toute grâce excellente et tout don parfait vient d'en haut, et descend du Père des lumières. "
2. Psaume XXXIX, 18 : " Pour moi, je suis pauvre et dans l'indigence, le Seigneur prend soin de moi. "
3. Deutéronome, X, 18 : " Le Seigneur votre Dieu fait justice à l'orphelin et à la veuve ; il aime l'étranger, et lui donne de quoi vivre et de quoi se vêtir. "
4. Genèse, XXVIII, 20-22 : " Jacob fit un vœu en disant : Si Dieu demeure avec moi, s'il me protège dans le chemin où je marche, et me donne du pain pour me nourrir et des vêtements pour me vêtir ; - et si je retourne heureusement à la maison de mon père, le Seigneur sera mon Dieu ; - et je vous offrirai la dîme de tout ce que vous m'aurez donné. "
5. I Timothée, VI, 8 : " Ayant de quoi nous nourrir et de quoi nous vêtir, nous devons être contents. "
6. Proverbes, XXX, 8-9 : " Ne me donnez ni la pauvreté ni les richesses ; donnez-moi seulement ce qui me sera nécessaire pour vivre ; - de peur qu'étant rassasié, je ne sois tenté de vous renoncer et de dire : Qui est le Seigneur ? Ou qu'étant contraint par la pauvreté, je ne dérobe, et que je ne viole par un parjure le nom de mon Dieu. "
7. Psaume CXLIV, 15-16 : " Tous ont les yeux tournés vers vous, Seigneur, et ils attendent de vous que vous leur donniez leur nourriture au temps marqué. - Vous ouvrez votre main, et vous remplissez tous les animaux des effets de votre bonté. "
8. MATTHIEU, IV, 4 : " Il est écrit (dans le huitième chapitre du Deutéronome) : L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. "
9. AMOS, VIII, 11 : " Il viendra un temps, dit le Seigneur, et j'enverrai la faim sur la terre, non la famine du pain, ni la disette de l'eau, mais la faim de la parole du Seigneur. "
10. Ecclésiastique, XV, 3 : " Elle le nourrira du pain de vie et d'intelligence, et elle lui fera boire de l'eau de la sagesse qui donne le salut. "
11. Proverbes, IX, 8 : " Venez, mangez le pain que je vous donne, et buvez le vin que je vous ai préparé. "
12. MATTHIEU, XXVI, 26 : " Ceci est mon corps. "
13. Ibidem, VI, 11 : " Donnez-nous aujourd'hui le pain qui est au-dessus de toute substance. "
14. JEAN, VI, 52 : " Le pain que je donnerai, c'est ma chair, pour la vie du monde. "
TEMOIGNAGES DE LA TRADITION.
1. S. JEROME, in cap. VI Matt. : " Le mot que nous avons traduit par supersubstantialem est exprimé en grec par le mot epioussion, mot que les Septante remplacent très souvent par oerioussion Nous avons cherché dans l'hébreux, et partout où se lit oerioussion dans les Septante, nous avons trouvé segulah, mot que Symmaque rend par exaireton, c'est-à-dire distingué excellent, quelquefois aussi spécial, particulier. Lors donc que nous demandons à Dieu qu'il nous donne notre pain particulier ou distingué entre les autres, nous demandons Celui-là même qui a dit, en parlant de sa propre personne : Je suis le pain vivant descendu du ciel (JEAN, VI). Nous pouvons encore entendre par ce pain suprasubstantiel (supersubstantialem) celui qui est au-dessus de toutes les substances, et qui surpasse toutes les créatures. "
2. S. CYPRIEN, Serm. de oratione dominica : " Jésus-Christ est le pain qui nous donne la vie, non pas un pain qui appartienne a tous, mais un pain qui nous est exclusivement réservé. . . Mais pourquoi lui demandons-nous que ce pain nous soit donné tous les jours ? Parce que, demeurant en Jésus-Christ, et recevant tous les jours dans l'Eucharistie l'aliment de notre salut, nous demandons de n'en être point privés en punition de quelque prévarication considérable, parce que ne point être admis à la réception du pain céleste, c'est être séparé du corps de Jésus-Christ, ainsi qu'il le déclare lui-même : " Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement ; et le pain que je donnerai pour la vie du monde, c'est ma chair. " Si le pain eucharistique, reçu avec des dispositions convenables, donne la vie éternelle, n'est-il pas à craindre qu'en renonçant à cet aliment sacré, et en nous tenant éloignes du corps du Seigneur, nous ne perdions la vie, conformément à cette menace : " Si vous ne mangez la chair du Fils de l'Homme, et si vous ne buvez son sang, vous n'aurez pas la vie en vous ? " Voilà donc le malheur que nous cherchons à prévenir ; nous conjurons Dieu de nous donner notre pain de tous les jours, c'est-à-dire Jésus-Christ, afin que, demeurant en Jésus-Christ, et vivant de sa vie, nous ne soyons jamais séparés de sa vertu sanctifiante ni de son corps. "
3. S. AMBROISE, lib. V de sacramentis, c. 4 : " Je me souviens de ce que j'ai dit en traitant des sacrements. Je vous ai dit qu'avant que les paroles de Jésus-Christ soient prononcées, ce qui est offert est du pain, mais qu'après qu'elles l'ont été, ce n'est plus du pain, mais le corps de Jésus-Christ. Pourquoi donc dans l'oraison dominicale, qui vient après, dit-on notre pain ? On dit notre pain, il est vrai, mais notre pain suprasubstantiel, epioussion. Ce n'est pas du pain comme celui qui entre dans notre corps, mais ce pain de la vie éternelle qui alimente et soutient notre âme. Voilé pourquoi il est appelé epioussios en grec. Nous, nous appelons quotidien ce pain que les grecs appellent eoioussion : advenientem. Le mot grec et le mot latin ont donc également leur à propos. Du reste, le sens du mot grec se prête à celui du latin, qui signifie quotidien ou de chaque jour. Mais si c'est notre pain quotidien, pourquoi attendre une année pour le recevoir ? "
4. S. AUGUSTIN, lib. II de serm. Domini in monte, c 7 : " Ce pain quotidien se dit ici ou de tout ce qui nous sert d'aliment pour sustenter notre vie, ou du sacrement du corps de Jésus-Christ que nous recevons tous les jours, ou de cet aliment spirituel dont nous parle Notre -Seigneur, quand il dit : Travaillez à vous procurer une nourriture qui ne soit point sujette à se corrompre (JEAN, VI, 27) ; et : Je suis le pain de vie, qui est descendu du ciel. "