Benoît XVI avait dit, en 2007, à propos de la canonisation de Mgr Romero :
« Mgr Romero a certainement été un grand témoin de la foi, un homme d'une grande vertu chrétienne, qui s'est engagé pour la paix et contre la dictature, et qui a été tué au cours de la célébration de la Messe. Il s'agit donc d'une mort véritablement "crédible", de témoignage de la foi. Le problème était qu'un camp politique voulait le prendre à tort comme porte-drapeau, comme figure emblématique. Comment mettre en lumière de façon juste sa figure, en la préservant de ces tentatives d'instrumentalisation ? Tel est le problème. Nous sommes en train de l'examiner et j'attends avec confiance ce que dira à cet égard la Congrégation pour les Causes des Saints. »
Cinq ans plus tard la Congrégation n’avait toujours rien dit… Mais le problème soulevé par Benoît XVI est plus que jamais d’actualité. C’est-à-dire que l’on va assister à cette instrumentalisation que redoutait le pape. Grâce au nouveau pape.
En 2007 également, le cardinal Bergoglio avait dit à un prêtre du Salvador, Mgr Jesus Delgado, que s’il était pape, la première chose qu’il ferait serait de canoniser Mgr Romero. En 2010, lors d’une autre conversation avec le même prêtre, le cardinal Bergoglio ajouta que malheureusement il ne serait jamais pape…
Mais, dans les milieux de la théologie de la libération, ce n’est pas d’abord à Mgr Romero que l’on a pensé quand le cardinal Bergoglio est devenu pape, mais à Carlos de Dios Murcia, un franciscain assassiné au début de la dictature argentine. Au point que, selon certains, Carlos Murcia serait le premier béatifié du pontificat de François. Ce qui est aller un peu vite en besogne, car le procès en béatification du P. Murcia est encore dans sa phase diocésaine. Mais il est intéressant de constater que le cardinal Begoglio signa très discrètement l’ouverture du procès diocésain en béatification du P. Murcia, pour qu’il ne soit pas bloqué par d’autres évêques argentins… Or ici il s’agit clairement d’un prêtre adepte de la théologie de la libération, comme son alter ego le Français Gabriel Longueville, assassiné en même temps que lui, et dont le procès en béatification a également été ouvert.
Un prêtre argentin, le P. Miguel La Civita, proche collaborateur de Mgr Angelelli, l’évêque des pères Murcia et Longueville, a témoigné : « Quelques jours après leur assassinat, il [Le P. Jorge Bergoglio] a pris nos séminaristes et les a cachés dans le collège des jésuites qu’il dirigeait. Ce ne sont pas des histoires que j’aurais entendues quelque part : j’ai réellement participé à ces événements en personne. Et permettez-moi de dire ceci clairement : j’étais l’archétype du prêtre tiers-mondiste, comme on les appelait alors : théologie de la libération. Le collège utilisait des retraites spirituelles pour aider les persécutés : il leur donnait un lieu pour se cacher, procurait de faux documents et aidait à fuir à l’étranger. »
Il est évident que la canonisation de Mgr Romero sera perçue et annoncée comme la canonisation de la théologie de la libération, c’est-à-dire du marxisme-léninisme à oripeaux chrétiens, et que la béatification consécutive de Murcia, si François confirme ce que fit Bergoglio, sera la consécration de cette idéologie.
C’est là qu’on va regretter Jean-Paul II…
Et surtout, là où l’affaire devient machiavélique, c’est que Jean-Paul II pourrait être canonisé en même temps… Car on a appris hier que le comité de médecins de la congrégation pour les causes des saints a déclaré inexpliquée une guérison obtenue par l’intercession de Jean-Paul II. Cette guérison devrait donc être reconnue comme miracle et permettre la canonisation…
Ainsi serait neutralisée la condamnation de la théologie de la libération voulue et réalisée conjointement par Jean-Paul II et le cardinal Ratzinger…
N.B. Il peut être intéressant de comparer le fameux dernier sermon de Mgr Romero avec les homélies du bienheureux P. Popieluszko. L’essentiel du sermon de celui-là était (explicitement) un discours de porte-parole d’Amnesty International, et le reste une insaisissable incantation au « Royaume de Dieu ». Tandis que ceux-ci étaient toujours empreints d’une authentique spiritualité. C’est que Jerzy Popieluszko était un prêtre authentique et authentique militant anticommuniste.