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Rechercher : le pape et les évangéliques

  • Le pape François et les évangéliques

    Le pasteur Juan Pablo Bongarra, président de la Société biblique argentine :

    « Chaque fois que vous parlez avec lui, la conversation se termine par une requête : Pasteur, prie pour moi. » Lors d’un grand rassemblement évangélique de prière, « il était monté sur l’estrade et avait appelé les pasteurs à prier pour lui. Il s’était agenouillé devant près de 6.000 personnes, et les pasteurs lui avaient imposé les mains et avaient prié. »

    La dernière fois que Bongarra a vu Bergoglio, c’était à Noël, quand il a invité l’archevêque à dîner pour lui demander la participation des catholiques dans les temples protestants pour la campagne « Noël c’est Jésus ».

    « Nous, les responsables évangéliques, sommes très heureux de son élection… Nous pensons qu’une nouvelle époque vient pour l’Eglise catholique, parce que notre frère veut promouvoir l’évangélisme. »

    Norberto Saracco, recteur du séminaire protestant et co-président du conseil des pasteurs de Buenos Aires :

    « Son élection a été une réponse à nos prières. Bergoglio est un homme de Dieu. Il a la passion de l’unité de l’Eglise – mais pas seulement au niveau institutionnel. Sa priorité est l’unité au niveau du peuple. »

    Luis Palau, prédicateur argentin et international :

    « Il est vraiment centré sur Jésus et l’Evangile, le pur Evangile… Avec la communauté évangélique, ce fut un grand jour quand nous avons réalisé qu’il était vraiment ouvert, qu’il avait un grand respect pour les chrétiens qui croient en la Bible, et qu’il est fondamentalement à leurs côtés. Cela demande du courage. Cela demande du respect. Cela demande de la conviction. Aussi les dirigeants de l’Eglise évangélique en Argentine l’ont en haute estime, simplement à cause de sa manière de vivre, de son respect, de sa façon de leur tendre la main et de passer du temps avec eux en privé. »

  • Le pape qui fait passer l’Eglise de la contre-réforme au « catholicisme évangélique »

    Selon George Weigel, « l’élection du pape François accomplit le tournant de l’Eglise du catholicisme de la contre-réforme (…) au catholicisme évangélique qui doit replanter l’Evangile dans ces régions du monde qui sont devenues spirituellement lasses, tout en le semant dans de nouveaux champs de mission dans le monde entier. »

    Le dernier livre de George Weigel est intitulé : Le catholicisme évangélique : la profonde réforme de l’Eglise au XXIe siècle.

    Ce livre a paru le 5 février dernier. Dès le lendemain, George Weigel soi-même en faisait la promotion sur le site First Things. Il expliquait que le « catholicisme évangélique », qui est le catholicisme « vécu dans une fidélité radicale au Christ et à l’Evangile », est le seul catholicisme possible au XXIe siècle. Le catholicisme évangélique est fondé sur cet ahurissant sophisme (qui est celui de toutes les sectes évangéliques) : ne pas chercher à avoir des connaissances sur Jésus, mais connaître Jésus en personne. (C’est ce qui explique le vide doctrinal des homélies de François : ce vide est volontaire. C'est ce qui explique aussi pourquoi il parle tant du diable : c'est un thème de prédilection des évangéliques qui le voient partout et font des "exorcismes" à tour de bras.) Le catholicisme évangélique (dont on ne voit pas ce qu’il a de catholique), c’est la « rencontre personnelle et communautaire » avec le Jésus de l’Evangile, point final.

    L’auteur de la recension de ce livre sur le National Catholic Register écrivait : « Si je pouvais entrer au conclave, j’y passerais en douce assez d’exemplaires de Catholicisme évangélique pour en mettre un sur la chaise de chaque électeur, avec l’espoir qu’ils adoptent ce chef-d’œuvre d’histoire et de pensée catholique comme un guide possible pour la mission de l’Eglise dans les siècles à venir. »

    Cet homme-là a été comblé au-delà de ses espérances, car il n’y avait pas besoin d’inonder la Chapelle Sixtine du livre de George Weigel : c’est le principal représentant du soi-disant « catholicisme évangélique » au sein de l’épiscopat mondial qui a été élu pape. Et, au lendemain de l’élection, George Weigel (qui avait longuement rencontré le cardinal Bergoglio au moment où il préparait son livre) pouvait donc écrire son article enthousiaste de la National Review : « Le premier pape américain : le tournant du catholicisme pour un avenir évangélique. »

    306_Bergoglio01.jpgOn comprend mieux désormais ce geste du cardinal Bergoglio, primat d’Argentine, agenouillé devant 6.000 personnes pour recevoir la bénédiction d’une vingtaine de pasteurs successifs. C’était le 19 juin 2006, lors de la troisième "Rencontre fraternelle de la Communion renouvelée des Evangéliques et Catholiques" (sic) au stade du Luna Park de Buenos Aires.

  • Le pape François et ses bénisseurs

    J’ai longtemps hésité à publier ces photos, parce que je les trouve très choquantes, et parce que je ne pensais vraiment pas que Jorge Mario Bergoglio devenu pape oserait refaire ce qu’il avait fait à Buenos Aires en tant qu’archevêque.

    Mais si. Il l’a refait. Se faire « bénir » par des dizaines de « pasteurs évangéliques ». Lui le vicaire du Christ. C’était le 7 mai au Vatican.

    Il y avait déjà eu ces photos choquantes du pape se faisant bénir par un retraité de l’industrie du pétrole qui se dit archevêque de Cantorbéry, mais c’était un peu atténué par le costume du personnage, et le fait que la fonction qu’il usurpe est très vénérable. Ici on voit clairement que ce sont des laïcs, et ces laïcs ne sont pas catholiques, et ils sont anticatholiques. Ils « bénissent » le pape en espérant que le pape devienne « évangélique » - ou en reconnaissant qu’il l’est déjà. Plus grave encore, il ne s'agit pas d'une simple bénédiction, mais d'une imposition des mains. Ce qui indique toujours, d'une façon ou d'une autre, la transmission du Saint-Esprit. Or on ne voit pas comment des laïcs non catholiques, tout "pasteurs pentecôtistes" qu'ils soient, pourraient transmettre le Saint-Esprit à un évêque qui a donc reçu par imposition des mains la plénitude du sacerdoce du Christ.

    Bref, voici ces photos, parce qu’il faut connaître la vérité.  C’était le 7 mai au Vatican. L’entrevue était parrainée par le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. L’homme qui tient le pape dans ses bras est son fameux ami Giovanni Traettino, déjà protagoniste de la triste farce de Buenos Aires) à qui il rendit visite le 28 juillet 2014 à Caserte. Le 28 juillet, et non pas le 26 comme le prétendait Radio Vatican. La visite avait bel et bien été programmée pour le 26, mais au dernier moment quelqu’un s’était aperçu que ça ferait très mauvais effet : le 26 est la fête de sainte Anne, et sainte Anne est la patronne de Caserte. Chez les catholiques. Comme le pape est néanmoins le pape des catholiques et que son voyage avait été programmé pour le 26, il est allé à Caserte le 26… pour fêter sainte Anne... et il est retourné le 28 pour rencontrer la communauté évangélique de son ami Traettino, devant laquelle il a prononcé un discours heureusement « privé » (mais... diffusé par le Vatican) sur l’unité des « Eglises réconciliées dans la diversité »…

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  • En privé le pape est hétérodoxe, et il le fait savoir

    Nombre de propos de François sont terriblement ambigus. Leur interprétation obvie est qu’ils sont hétérodoxes, mais en les examinant on découvre généralement qu’on peut leur donner une interprétation catholique. Ce n’est pas le cas de son discours de Caserte aux fidèles de son ami pentecôtiste Traettino. A cause d’une référence à Cullman, comme l’explique Alessandro Gnocchi (traduit par Benoît et moi).

    Une fois de plus, François parle de la « diversité » et de « l’unité » dans « l’Eglise », sans préciser s’il parle de l’Eglise catholique ou d’une hypothétique Eglise qui réunisse tous les chrétiens au-delà de leurs dénominations. Mais cette fois il appuie son propos sur Oscar Cullmann :

    « L'Esprit Saint fait la diversité dans l'Église, et cette diversité est si riche, si belle; mais, plus tard, le même Esprit Saint fait l'unité. Et ainsi l'Eglise est une dans la diversité. Et pour utiliser une belle parole d'un évangélique que j'aime beaucoup: une diversité réconciliée par l'Esprit Saint. »

    L’évangélique qui a parlé de la diversité réconciliée par l’Esprit Saint, c’est Cullman. C’est lui, souligne Gnocchi, qui a imaginé en 1986, dans un ouvrage intitulé L'unité à travers la diversité, le passage « de la diversité excommuniée à la diversité réconciliée ».

    Cette fois, il est donc très clair que François expose une ecclésiologie hérétique, l’ecclésiologie « évangélique », celle d’une super-“Eglise” spirituelle englobant tous ceux qui se réclament de Jésus d’une façon ou d’une autre, et qu’en passant il blasphème le Saint-Esprit.

    Heureusement, il s’agit d’un propos privé. Puisqu’on nous a dit et répété qu’il s’agissait d’une visite privée.

    Mais ce qui est ahurissant est que ce propos ouvertement hétérodoxe (associé à une repentance surréaliste) se retrouve sur le site du Vatican, au moins en deux endroits : dans la rubrique des discours officiels du pape (tout en nous rappelant que c’est une visite privée…), et dans le Bulletin d’informations du Saint-Siège.

    Et, autre scandale, dans le Bulletin en question, donc sur le site du Saint-Siège, on trouve aussi le discours du pasteur Traettino…

  • Il faut que ce soit des “évangéliques”

    Le Conseil national des évangéliques de France (Cnef) a remis un rapport au Conseil des droits de l’homme de l’ONU sur la liberté de conscience en France.

    En 2018, ce sera le tour de la France, notamment, de faire l’objet d’un rapport du Conseil des droits de l’homme. Toute association peut lui fournir des éléments. Ce que fait donc le Cnef.

    Et il fait bien. On aurait aimé que ce fût la Conférence épiscopale. Mais nos évêques n’ont rien à redire sur la liberté de conscience en France…

    Ce sont donc ces protestants qui mettent le doigt sur les atteintes de l’Etat français aux droits de l’homme, aux droits du croyant, et ils suggèrent « 12 recommandations » dont voici les principales :

    - amender la loi Taubira pour permettre aux élus « de ne pas célébrer de mariages de couples de personnes de même sexe lorsque leurs convictions s’y opposent ».

    - ajouter une clause de conscience dans le Code de la santé publique, « notamment dans les domaines de la procréation et de la fin de vie », pour tous les personnels soignants.

    - « veiller à ce que les programmes de l’Éducation nationale […] respectent la liberté de pensée, de conscience et de religion des élèves et de leurs parents, notamment s’agissant de l’éducation à la sexualité et du fait religieux ».

    - exiger que la liberté religieuse, y compris celle de changer de religion, soit garantie pour les réfugiés et demandeurs d’asile. (Les évangéliques ont été en pointe pour dénoncer les pressions exercées sur les migrants qui veulent se convertir au christianisme – jusqu’à l’assassinant d’un Iranien à Grande-Synthe).

    - concernant le délit d’entrave numérique à l’avortement, faire en sorte « que la liberté d’expression et de communication soit garantie pour permettre la mise à disposition d’informations pluralistes sur ce sujet délicat ».

    - concernant « l’homophobie », « redéfinir plus clairement les délits d’expression afin qu’ils ne reposent pas sur une perception subjective de la supposée “victime” mais sur des faits objectifs », et « préserver le pluralisme des opinions et de leur expression publique ».

    Le Cnef déplore d’autre part que « plus aucun ministre du culte ou théologien » ne siège au sein du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) depuis l’an dernier.

    « Nous espérons un rappel à l’ordre de l’ONU envers la France, pour que la liberté de conscience, d’expression et de culte soit réellement respectée », dit Romain Choisnet, directeur de la communication du Cnef.

  • Dans la série « le pape aditmainapadit »

    Plutôt « adit » que « napadit », puisqu’il n’y a pas de démenti du sapeur Lombardi, François à Brian Stiller, « ambassadeur mondial de l’Alliance évangélique mondiale », qu’il a rencontré pendant trois heures :

    « Ça ne m’intéresse pas de convertir les évangéliques au catholicisme. Je veux que les gens trouvent Jésus dans leur propre communauté. Il y a tant de doctrines sur lesquelles nous ne sommes pas d’accord. Ne perdons pas notre temps avec cela. Faisons plutôt en sorte de montrer l’amour de Jésus. »

    *

    Plutôt « mainapadit », puisqu’il y a un démenti du sapeur Lombardi. Quoique plutôt « adit », vu que ce démenti est proprement grotesque : c’est la nouvelle interview de François par Scalfari dans La Repubblica :

    « Beaucoup de mes collaborateurs qui luttent avec moi me rassurent avec des données fiables qui évaluent la pédophilie dans l'Église au niveau de 2%. Cette constatation devrait me tranquilliser, mais je dois vous dire qu'elle ne me tranquillise pas du tout. Je la considère même très grave. 2% des pédophiles sont des prêtres et même des évêques et des cardinaux. »

    D’abord 2% des prêtres sont « pédophiles ». Puis 2% des « pédophiles » sont des prêtres. Les deux taux sont incompatibles, et aucun des deux ne correspond aux chiffres connus.

    - Sainteté, vous travaillez assidûment pour intégrer la catholicité avec les orthodoxes, les anglicans...

    Il m'interrompt et poursuit:

    - Avec les vaudois, que je trouve des religieux de premier ordre, avec les pentecôtistes et naturellement, avec nos frères juifs.

    - Eh bien, beaucoup de ces prêtres ou pasteurs sont régulièrement mariés. Comment va évoluer au fil du temps ce problème dans l'Eglise de Rome ?

    - Peut-être ne savez-vous pas que le célibat a été établi au Xe siècle, c'est-à-dire 900 ans après la mort de notre Seigneur. L'Eglise catholique orientale a à ce jour la faculté que ses prêtres se marient. Le problème existe certainement mais n'est pas d'une grande ampleur. Il faut du temps, mais il y a des solutions et je les trouverai.

    Bien sûr il y a le pape qui veut intégrer à la catholicité les vaudois qui sont des religieux de premier ordre, les anglicans avec leurs femmes évêques et aussi, « naturellement », nos frères juifs… Mais il y a aussi cette affirmation ahurissante que « le célibat a été établi au Xe siècle ». Et François le souligne : « Peut-être ne savez-vous pas. » Lui, il sait. Mais il faudrait qu’il nous explique. Parce que aucun historien n’avance cela. Les « historiens » anticatholiques disent que le célibat a été établi non pas au Xe mais au XIe siècle. C’est-à-dire par la réforme grégorienne, de saint Grégoire VII. Or il ne s’agissait évidemment pas d’établir le célibat, mais de réaffirmer la discipline du célibat, qui remonte aux apôtres et a été confirmée par maints conciles régionaux et d’abord par le premier concile œcuménique de Nicée.

    *

    Dans le même genre on avait déjà eu l’interview au Messagero, le 30 juin, où le pape adimainapadit (sans démenti du sapeur Lombardi) que les communistes ont volé à l’Eglise le drapeau des pauvres, et aussi :

    « La Corée représente beaucoup, elle a derrière elle une belle histoire, pendant deux siècles, elle n'avait pas de prêtres et le catholicisme s'est maintenu grâce aux laïcs. »

    Ce n’est pas la Corée, mais le Japon. Il n’y a rien de tel dans l’histoire de la Corée, même s’il y eut aussi des persécutions.

    *

    Dans l'interview à La Repubblica, François aditmainapadit aussi, parlant de Jésus (et des "pédophiles", bien sûr) :

    « Quand il utilisait le bâton, il l'empoignait pour chasser le diable qui avait pris possession de cette âme. »

    On aimerait savoir d'où lui vient cette révélation...

    *

    Pour la nouvelle interview à La Repubblica, le sapeur Lombardi a repris le démenti qu’il avait déjà fait lors de la précédente interview. Déjà, ce démenti-là ne pouvait convaincre que les plus niais des bisounours franciscolâtres. Mais cette fois il ne peut convaincre personne, puisqu’il est parfaitement clair que le pape a de nouveau invité Scalfari pour qu’il refasse ce qu’il avait déjà fait.

    Le proverbe dit : « Errare humanum est, perseverare diabolicum. » Or nous avons désormais la preuve que le premier coup n’était pas une erreur.

    Le grotesque du nouveau démenti éclate dans l’affaire des guillemets. Le sapeur Lombardi a découvert que dans l’article de La Repubblica certaines phrases attribuées au pape commencent par des guillemets, mais que ces guillemets ouverts ne sont pas fermés. Ce qui serait la preuve de propos manipulés…

    Le sapeur Lombardi serait-il un lecteur de Musset ? Ces guillemets ouverts qu’on ne ferme pas font furieusement penser à cette petite pièce de Musset où la marquise dit par trois fois :

    - Fermez donc cette porte ; il vient un vent horrible.

    - Fermez donc cette porte, vous me glacez.

    - C’est effrayant. Mais fermez donc la porte.

    En effet, il vient un vent horrible. En effet, ce qui est après les guillemets ouverts est glaçant. En effet, c'est effrayant, et il faudrait fermer cette porte de toute urgence.

  • La lettre du pape aux Irlandais

    La lettre pastorale que le pape envoie aux catholiques d'Irlande à propos des abus sexuels est poignante. Il en émane aussi toute la force de la vérité, dans tous ses aspects. C'est aussi un hymne à l'Irlande chrétienne, et à la véritable Eglise du Christ. Et une leçon d'espérance fondée sur la foi : si les remèdes prescrits sont administrés, de ce mal terrible sortira un grand bien.

    Il faut lire au moins le 4e paragraphe, sur le diagnostic, qui, comme la plus grande partie de la lettre, ne concerne pas seulement les Irlandais.

    Mais il faut lire tout le texte, que voici.

    LETTRE  PASTORALE AUX CATHOLIQUES D'IRLANDE

    1. Chers frères et sœurs de l'Eglise en Irlande, c'est avec une profonde préoccupation que  je vous écris en tant que Pasteur de l'Eglise universelle. Comme vous, j'ai  été profondément bouleversé par les nouvelles apparues concernant l'abus d'enfants et de jeunes vulnérables par des membres de l'Eglise en Irlande, en particulier par des prêtres et des religieux. Je ne peux que partager le  désarroi et le sentiment de trahison que nombre d'entre vous ont ressenti en  prenant connaissance de ces actes scandaleux et criminels et de la façon dont les autorités de l'Eglise en Irlande les ont affrontés. Comme vous le savez, j'ai récemment invité les  évêques irlandais à une rencontre ici, à Rome, pour rendre compte de la façon  dont ils ont affronté ces questions par le passé et indiquer les mesures qu'ils ont prises pour répondre à cette grave situation. Avec certains prélats de la Curie Romaine, j'ai écouté ce qu'ils avaient à dire, tant individuellement qu'en groupe, tandis  qu'ils présentaient une analyse des erreurs commises et des leçons apprises, et une description des programmes et des protocoles aujourd'hui mis en place. Nos réflexions ont été franches et constructives. Je nourris l'espoir que, par conséquent, les évêques se trouvent à présent dans une position plus  forte pour accomplir le devoir de réparer les injustices du passé et pour  affronter les thèmes plus vastes liés à l'abus des mineurs selon des modalités conformes aux exigences de la justice et aux enseignements de l'Evangile.

    2. Pour ma part, compte tenu de la gravité de ces fautes, et de la réponse souvent inadéquate qui  leur a été réservée de la part des autorités ecclésiastiques dans votre pays, j'ai décidé d'écrire cette Lettre pastorale pour vous exprimer ma proximité et vous proposer un chemin de guérison, de renouveau et de réparation. En réalité, comme de nombreuses personnes dans votre pays l'ont observé, le problème de l'abus des mineurs n'est pas propre à l'Irlande, ni à l'Eglise. Toutefois, le devoir qui se présente désormais à vous est celui d'affronter le problème des abus qui ont lieu au sein de la communauté catholique irlandaise et de le faire avec courage et détermination. Personne ne peut imaginer que cette situation douloureuse sera résolue dans de brefs délais. Des progrès positifs ont été accomplis, mais il reste encore beaucoup à faire. La persévérance et  la prière sont nécessaires, ainsi qu'une grande confiance dans la force de guérison de la grâce de Dieu. Dans le même temps, je dois également exprimer ma conviction que, pour se reprendre de cette blessure douloureuse, l'Eglise qui est en Irlande doit en premier lieu reconnaître devant le Seigneur et devant les autres, les graves péchés commis contre des enfants sans défense. Une telle reconnaissance, accompagnée par une douleur sincère pour les préjudices  portés à ces victimes et à leurs familles, doit conduire à un effort concerté afin d'assurer la protection des enfants contre de tels crimes à l'avenir. Tandis  que vous affrontez les défis de ce moment, je vous demande de vous rappeler du rocher d'où l'on vous a taillés (Isaïe). Réfléchissez aux contributions  généreuses, souvent héroïques, offertes à l'Eglise et à l'humanité tout entière par les générations passées d'hommes et de femmes irlandais, et faites en sorte que cela constitue un élan pour un examen de conscience honnête et un programme de renouveau ecclésial et personnel convaincu. Je forme la prière que, assistée par l'intercession de ses nombreux saints et purifiée par la pénitence, l'Eglise en Irlande surmontera la crise présente et redeviendra un témoin convaincu de la vérité et de la bonté de Dieu tout-puissant, manifestées dans son Fils Jésus-Christ.

    3. Tout au long de l'histoire, les catholiques d'Irlande se sont révélés une immense force de bien tant dans  leur patrie qu'à l'étranger. Des moines celtes comme saint Colomban, diffusèrent l'Evangile en Europe occidentale en jetant les fondements de la culture monastique médiévale. Les idéaux de sainteté, de charité et de  sagesse transcendante découlant de la foi chrétienne, ont trouvé une expression dans la construction d'églises et de monastères et dans l'institution d'écoles, de bibliothèques et d'hôpitaux qui contribuèrent à renforcer l'identité spirituelle de l'Europe. Ces missionnaires irlandais ont tiré leur force et leur inspiration de la foi ferme, de la direction solide et des comportements moraux justes de l'Eglise dans leur terre natale. A partir du XVIe siècle, les catholiques d'Irlande ont subi une longue période de persécution, au cours de laquelle ils ont lutté pour maintenir vivante la flamme de la foi dans des circonstances dangereuses et difficiles. Saint Oliver Plunkett, l'archevêque martyr d'Armagh, est l'exemple le plus célèbre d'une multitude de fils et de filles courageux d'Irlande, prêts à donner leur vie pour la fidélité à l'Evangile. Après l'Emancipation catholique, l'Eglise fut libre de croître à nouveau. Des familles et d'innombrables personnes qui avaient préservé leur foi au cours de la période de l'épreuve, devinrent le moteur d'une grande renaissance du catholicisme irlandais au XIXe siècle. L'Eglise offrit l'éducation, en particulier aux pauvres, et cela devait apporter une contribution importante  à la société irlandaise. Parmi les fruits des nouvelles écoles catholiques, figura une croissance des vocations: des générations de prêtres, de religieuses et de frères missionnaires quittèrent leur patrie pour servir sur chaque continent, en particulier dans le monde anglophone. Ils furent admirables non seulement en raison de leur grand nombre, mais également en raison de la force de leur foi et de la solidité de leur engagement pastoral.  De nombreux diocèses, en particulier en Afrique, en Amérique et en Australie, ont bénéficié de la présence de clergé et de religieux irlandais qui  prêchèrent l'Evangile et fondèrent des paroisses, des écoles et des universités, des cliniques et des hôpitaux, qui servirent tant les catholiques, que la société en général, avec une attention particulière pour  les besoins des pauvres. Dans presque toutes les familles d'Irlande, il y a eu quelqu'un - un fils ou une fille, une tante ou un oncle - qui a donné sa vie à l'Eglise. Les familles irlandaises nourrissent à juste titre une grande  estime et une grande affection pour leurs proches qui ont consacré leur vie au Christ, en partageant le don de la foi avec d'autres et en mettant en pratique cette foi dans le service généreux de Dieu et du prochain.

    4. Au cours des dernières décennies, toutefois, l'Eglise dans votre pays a dû affronter de nouveaux et graves défis à la foi, découlant de la transformation et de la sécularisation  rapides de la société irlandaise. Un changement social très rapide a eu lieu, qui a souvent eu des effets contraires à l'adhésion traditionnelle des  personnes à l'égard de l'enseignement et des valeurs catholiques. Très souvent, les pratiques sacramentelles et de dévotion qui soutiennent la foi et lui permettent de croître, comme par exemple la confession fréquente, la  prière quotidienne et les retraites annuelles, ont été négligées. Au cours de cette période, apparut également la tendance déterminante, également de la part de prêtres et de religieux, d'adopter des façons de penser et de considérer les réalités séculières sans référence suffisante à l'Evangile. Le programme de renouveau proposé par le Concile Vatican II fut parfois mal  interprété et en vérité, à la lumière des profonds changements sociaux qui avaient lieu, il était très difficile de comprendre comment les appliquer de la meilleure façon possible. En particulier, il y eut une tendance, dictée par de justes intentions, mais erronée, visant à éviter les approches pénales à l'égard de situations canoniques irrégulières. C'est dans ce contexte général que nous devons chercher à comprendre le problème déconcertant de l'abus sexuel des enfants, qui a contribué de façon très importante à l'affaiblissement  de la foi et à la perte de respect pour l'Eglise et pour ses enseignements. Ce  n'est qu'en examinant avec attention les nombreux éléments qui ont donné naissance à la crise actuelle qu'il est possible d'entreprendre un diagnostic clair de ses causes et de trouver des remèdes efficaces. Il est certain que parmi les facteurs qui y ont contribué, nous pouvons citer: des procédures inadéquates pour déterminer l'aptitude des candidats au sacerdoce et à la vie religieuse; une formation humaine, morale, intellectuelle et spirituelle insuffisante dans les séminaires et les noviciats; une tendance dans la société à favoriser le clergé et d'autres figures d'autorité, ainsi qu'une préoccupation déplacée pour la réputation de l'Eglise et pour éviter les scandales, qui a eu pour résultat de ne pas appliquer les peines canoniques en vigueur et de ne pas protéger la dignité de chaque personne. Il faut agir avec urgence pour affronter ces facteurs, qui ont eu des conséquences si  tragiques pour les vies des victimes et de leurs familles et qui ont assombri la lumière de l'Evangile à un degré tel que pas même des siècles de persécution ne sont parvenus à atteindre.

    5. En plusieurs occasions  depuis mon élection au Siège de Pierre, j'ai rencontré des victimes d'abus sexuels, de même que je suis disposé à le faire à l'avenir. Je me suis arrêté  pour parler avec eux, j'ai écouté leurs récits, j'ai pris acte de leur  souffrance, j'ai prié avec eux et pour eux. Auparavant, au cours de mon pontificat, soucieux d'affronter ce thème, j'avais demandé aux évêques d'Irlande, à l'occasion de leur visite Ad Limina de 2006, d'établir la vérité sur ce qui est arrivé par le passé, de prendre  toutes les mesures nécessaires pour éviter que cela ne se reproduise à l'avenir, d'assurer que les principes de justice soient pleinement respectés et, surtout, de soutenir les victimes et tous ceux qui sont victimes de ces crimes monstrueux (28 octobre 2006). Avec cette Lettre, mon intention est de  vous exhorter tous, en tant que  peuple de Dieu qui est en Irlande, à réfléchir sur les blessures infligées au Corps du Christ, sur les remèdes, parfois douloureux, nécessaires pour les panser et les guérir, et sur le besoin d'unité, de charité et d'aide réciproque dans le long processus de reprise et de renouveau ecclésial. Je m'adresse à présent à vous avec des paroles qui me viennent du cœur, et je désire  parler à chacun de vous individuellement et à vous tous en tant que frères et sœurs dans le Seigneur.

    6. Aux victimes d'abus et à leurs familles: Vous avez terriblement souffert et j'en suis vraiment désolé. Je sais que rien ne peut effacer le mal que vous avez supporté. Votre confiance a été trahie, et votre dignité a été violée. Beaucoup d'entre vous, alors que vous étiez suffisamment courageux pour parler de ce qui vous était arrivé, ont fait l'expérience que personne ne vous écoutait. Ceux d'entre vous qui ont subi des abus dans les collèges doivent avoir ressenti qu'il n'y avait pas moyen d'échapper à leur souffrance. Il est compréhensible que vous trouviez difficile de pardonner ou de vous réconcilier avec l'Eglise. En son nom, je vous exprime ouvertement la honte et le remords que nous  éprouvons tous. Dans le même temps, je vous demande de ne pas perdre l'espérance. C'est dans la communion de l'Eglise que nous rencontrons la personne de Jésus-Christ, lui-même victime de l'injustice et du péché. Comme vous, il porte encore les blessures de sa souffrance injuste. Il comprend la profondeur de votre peine et la persistance de son effet dans vos vies et dans vos relations avec les autres, y compris vos relations avec l'Eglise. Je sais que  certains d'entre vous trouvent également difficile d'entrer dans une église après ce qui s'est passé. Toutefois, les blessures mêmes du Christ, transformées par ses souffrances rédemptrices, sont les instruments grâce auxquels le pouvoir du mal s'est brisé et nous renaissons à la vie et à l'espérance. Je crois fermement dans le pouvoir de guérison de son amour sacrificiel - également dans les situations les plus sombres et sans espérance - qui  apporte la libération et la promesse d'un nouveau début. En m'adressant à  vous comme pasteur, préoccupé par le bien de tous les fils de Dieu, je vous demande avec humilité de réfléchir sur ce que je vous ai dit. Je prie afin que, en vous approchant du Christ et en participant à la vie de son Eglise - une Eglise purifiée par la pénitence et renouvelée dans la charité  pastorale - vous puissiez parvenir à redécouvrir l'amour infini du Christ pour chacun de vous. Je suis confiant dans le fait que, de cette manière, vous serez capables de trouver la réconciliation, une guérison intérieure profonde et la paix.

    7. Aux prêtres et aux religieux qui ont abusé des enfants: Vous avez trahi la confiance placée en vous par de jeunes innocents et par leurs parents. Vous devez répondre de cela devant Dieu tout-puissant, ainsi que devant les tribunaux constitués à cet effet. Vous avez perdu l'estime des personnes en Irlande et jeté la honte et le déshonneur sur vos confrères. Ceux d'entre vous qui sont prêtres ont violé la sainteté du sacrement de l'Ordre sacré, dans lequel le Christ se rend  présent en nous et dans nos actions. En même temps que le dommage immense causé aux victimes, un grand dommage a été perpétré contre l'Eglise et la perception publique du sacerdoce et de la vie religieuse. Je vous exhorte à examiner votre conscience, à assumer la responsabilité des péchés que vous avez commis et à exprimer avec humilité votre regret. Le repentir sincère ouvre la porte  au pardon de Dieu et à la grâce du véritable rachat. En offrant des prières et des pénitences pour ceux que vous avez offensés, vous devez chercher à  faire personnellement amende pour vos actions. Le sacrifice rédempteur du Christ a le pouvoir de pardonner même le plus grave des péchés et de tirer le bien également du plus terrible des maux. Dans le même temps, la justice de Dieu exige que nous rendions compte de nos actions sans rien cacher. Reconnaissez ouvertement vos fautes, soumettez-vous aux exigences de la justice, mais ne  désespérez pas de la miséricorde de Dieu.

    8. Aux parents: Vous avez été profondément bouleversés en apprenant les choses terribles qui eurent  lieu dans ce qui aurait dû être le milieu le plus sûr de tous. Dans le monde d'aujourd'hui, il n'est pas facile de construire un foyer domestique et d'éduquer les enfants. Ils méritent de grandir dans un milieu protégé, aimés et  désirés, avec un profond sens de leur identité et de leur valeur. Ils ont le droit d'être éduqués aux valeurs morales authentiques, enracinés dans la  dignité de la personne humaine, à être inspirés par la vérité de notre foi catholique et à apprendre des manières de se comporter et d'agir qui les conduisent à une saine estime de soi et au bonheur durable. C'est à vous, leurs parents, qu'est confié en premier lieu ce devoir noble et exigeant. Je  vous exhorte à accomplir votre part pour assurer le meilleur soin possible des enfants, que ce soit à la maison ou dans la société en général, alors que l'Eglise, pour sa part, continue à mettre en œuvre les mesures adoptées ces dernières années pour protéger les jeunes dans les milieux paroissiaux et éducatifs. Alors que vous exercez vos importantes responsabilités, soyez certains que je suis proche de vous et que je vous assure du soutien de ma  prière.

    9. Aux enfants et aux jeunes d'Irlande: Je désire vous offrir une parole particulière d'encouragement. Votre expérience d'Eglise est très différente de celle de vos parents et de vos grands-parents. Le monde a beaucoup changé depuis qu'ils avaient votre  âge. Malgré cela, tous, à chaque génération, sont appelés à parcourir le même  chemin de vie; quelles que puissent être les circonstances. Nous sommes tous scandalisés par les péchés et les échecs de certains membres de l'Eglise, en  particulier de ceux qui furent choisis de manière particulière pour guider et servir les jeunes. Mais c'est dans l'Eglise que vous trouverez Jésus-Christ qui est le même hier, aujourd'hui et à jamais. Il vous aime et c'est pour cela qu'il s'est offert lui-même sur la Croix. Recherchez une relation personnelle avec lui dans la communion de son Eglise, car il ne trahira jamais votre confiance! Lui seul peut satisfaire vos attentes les plus profondes et donner à vos vies leur signification la plus pleine, en les orientant au service des autres. Gardez les yeux fixés sur Jésus et sur sa  bonté et protégez dans votre cœur la flamme de la foi. Avec vos frères  catholiques en Irlande, je me tourne vers vous pour que vous soyez de fidèles disciples de notre Dieu et que vous contribuiez, avec votre enthousiasme et  votre idéalisme si nécessaires, à la reconstruction et au renouveau de notre Eglise bien-aimée.

    10. Aux prêtres et aux  religieux d'Irlande: Nous souffrons tous à la suite des péchés de nos confrères qui ont trahi une consigne sacrée ou qui n'ont pas affronté de la manière juste et responsable les accusations d'abus. Face à l'outrage et à l'indignation que cela a provoqué, non seulement parmi les laïcs mais également parmi vous et vos communautés religieuses, un grand nombre d'entre vous se sentent personnellement découragés et même abandonnés. En outre, je suis conscient qu'aux yeux de certains vous apparaissez coupables par association, et que vous êtes vus comme si vous étiez en quelque sorte responsables des méfaits d'autres personnes. En ce temps de souffrance, je veux rendre acte du dévouement de votre vie de prêtres et de religieux et de vos apostolats, et je vous invite à réaffirmer votre foi en Christ, votre amour envers son Eglise et votre confiance dans la promesse de rédemption, de pardon et de renouveau intérieur de l'Evangile. De cette manière, vous démontrerez à tous que, là où le péché  abonde, la grâce surabonde. Je sais qu'un grand nombre d'entre vous sont déçus, déconcertés et fâchés pour la manière dont ces questions ont été affrontées par certains de vos supérieurs. Malgré cela, il est essentiel que vous collaboriez de près avec ceux qui représentent l'autorité et que vous vous prodiguiez pour faire en sorte que les mesures adoptées pour répondre à la crise soient vraiment évangéliques, justes et efficaces. Je vous exhorte en particulier à devenir de manière toujours plus claire des hommes et des femmes de prière, en suivant avec courage la voie de la conversion, de la purification et de la réconciliation. De cette manière, l'Eglise en Irlande tirera une nouvelle vie et vitalité de votre témoignage au pouvoir rédempteur  du Seigneur rendu visible dans votre vie.

    11. A mes frères évêques: On ne peut pas nier que certains d'entre vous et de vos prédécesseurs ont  manqué, parfois gravement, dans l'application des normes du droit canonique codifiées depuis longtemps en ce qui concerne les crimes d'abus sur les enfants. De graves erreurs furent commises en traitant les accusations. Je comprends combien il était difficile de saisir l'étendue et la complexité du  problème, d'obtenir des informations fiables et de prendre des décisions  justes à la lumière de conseils divergents d'experts. Malgré cela, il faut admettre que de graves erreurs de jugement furent commises et que des manquements dans le gouvernement ont eu lieu. Tout cela a sérieusement miné votre crédibilité et efficacité. J'apprécie les efforts que vous avez accomplis pour porter remède aux erreurs du passé et pour assurer qu'elles ne se répètent pas. Outre à mettre pleinement en œuvre les normes du droit canonique en affrontant les cas d'abus sur les enfants, continuez à coopérer avec les autorités civiles dans le domaine de leur compétence. Les supérieurs religieux doivent clairement en faire tout autant. Ils ont, eux aussi, participé aux rencontres récentes, ici à Rome, pour établir une approche claire et cohérente de ces questions. Il est nécessaire que les normes de l'Eglise  en Irlande pour la protection des enfants soient constamment revues et mises à jour et qu'elles soient appliquées de manière totale et impartiale, conformément au droit canonique. Seule une action ferme menée de l'avant de  manière pleinement honnête et transparente pourra rétablir le respect et l'affection  des Irlandais envers l'Eglise, à laquelle nous avons consacré notre vie. Cela  doit naître, avant tout, de l'examen de vos propres personnes, de la  purification intérieure et du renouveau spirituel. La population irlandaise attend à juste titre que vous soyez des hommes de Dieu, que vous soyez saints, que vous viviez avec simplicité, que vous recherchiez chaque jour la  conversion personnelle. Pour elle, selon l'expression de saint Augustin, vous êtes des évêques, et pourtant avec eux vous êtes appelés à être des disciples du Christ. Je vous exhorte donc à renouveler votre sens des responsabilités devant Dieu, à croître dans la solidarité avec votre peuple et à approfondir votre sollicitude pastorale pour tous les membres de votre troupeau. Soyez en particulier sensibles à la vie spirituelle et morale de chacun de vos prêtres. Soyez un exemple à travers vos vies elles-mêmes, soyez proches d'eux, écoutez leurs préoccupations, offrez-leur votre encouragement en ce moment de difficulté et nourrissez la flamme de leur amour pour le Christ et leur  engagement dans le service à leurs frères et sœurs. Les laïcs doivent eux aussi être encouragés à jouer leur rôle dans la vie de l'Eglise. Faites en sorte qu'ils soient formés de telle manière qu'ils puissent rendre raison, de manière articulée et convaincante, de l'Evangile dans la société moderne, et qu'ils coopèrent plus pleinement à la vie et à la mission de l'Eglise. Cela  vous aidera également à recommencer à être des guides et des témoins crédibles de la vérité rédemptrice du Christ.

    12. A tous les fidèles d'Irlande: L'expérience qu'un jeune fait de l'Eglise devrait toujours porter du fruit dans une rencontre personnelle et vivifiante avec Jésus-Christ dans une communauté qui aime et qui offre une nourriture. Dans ce domaine, les jeunes doivent être encouragés à croître jusqu'à leur pleine stature humaine et spirituelle, à aspirer aux idéaux élevés de sainteté, de charité et de vérité et à tirer inspiration des richesses d'une grande tradition religieuse et culturelle. Dans notre société toujours plus sécularisée, dans laquelle nous aussi chrétiens nous trouvons difficile de parler de la dimension transcendante de notre existence, nous avons besoin de trouver de nouveaux chemins pour transmettre aux jeunes la beauté et la richesse de l'amitié avec  Jésus-Christ dans la communion de son Eglise. En affrontant la crise  présente, les mesures pour faire face de manière juste aux crimes individuels sont essentielles, toutefois elles ne sont pas suffisantes à elles seules: il y a besoin d'une nouvelle vision pour inspirer la génération présente et les générations futures à tirer profit du don de notre foi commune. En marchant  sur la voie indiquée par l'Evangile, en observant les commandements et en  conformant votre vie de manière toujours plus proche à la personne de  Jésus-Christ, vous ferez l'expérience du renouveau profond dont il y a  aujourd'hui un besoin si urgent. Je vous invite tous à persévérer le long de ce chemin.

    13. Chers frères et sœurs dans le Christ, c'est avec une profonde préoccupation envers vous tous en ce temps de douleur, dans lequel la fragilité de la condition humaine  a été aussi clairement révélée, que j'ai souhaité vous offrir ces paroles d'encouragement et de soutien. J'espère que vous les accueillerez comme un signe de ma  proximité spirituelle et de ma confiance dans votre capacité à répondre aux défis du temps présent en tirant une inspiration renouvelée et une force des nobles traditions de l'Irlande de fidélité à l'Evangile, de persévérance dans la foi et de fermeté dans la recherche de la sainteté. Avec vous tous, je prie avec insistance qu'avec la grâce de Dieu, les blessures  qui ont frappé un grand nombre de personnes et de familles puissent être  guéries et que l'Eglise qui est en Irlande puisse faire l'expérience d'une saison de renaissance et de renouveau spirituel.

    14. Je souhaite vous  proposer des initiatives concrètes pour affronter la situation. Au  terme de ma rencontre avec les évêques d'Irlande, j'ai demandé que le carême  de cette année soit considéré comme un temps de prière pour une effusion de la miséricorde de Dieu et des dons de sainteté et de force de l'Esprit Saint sur l'Eglise dans votre pays. Je vous invite tous à présent à consacrer vos  pénitences du vendredi, pour une année entière, d'aujourd'hui jusqu'à la Pâque 2011, à cette fin. Je vous demande d'offrir votre jeûne, votre prière, votre lecture de la Sainte Ecriture et vos œuvres de miséricorde pour obtenir la grâce de la guérison et du renouveau pour l'Eglise qui est en Irlande. Je vous encourage à redécouvrir le sacrement de la Réconciliation et à recourir plus fréquemment à la force transformatrice de sa grâce. Une attention particulière devra aussi être réservée à l'adoration eucharistique, et dans chaque diocèse, il devra y avoir des églises ou des chapelles  spécifiquement réservées à cette fin. Je demande que les paroisses, les séminaires, les maisons religieuses et les monastères organisent des temps d'adoration eucharistique, de manière à ce que tous aient la possibilité d'y prendre part. A travers la prière fervente face à la présence réelle du Seigneur, vous pouvez accomplir la réparation pour les péchés d'abus qui ont fait tant de mal, et dans le même temps implorer la grâce d'une force renouvelée et d'un sens plus profond de la mission de la part de tous les évêques, les prêtres, les religieux et les fidèles. Je suis confiant dans le fait que ce programme conduira à une renaissance de l'Eglise en Irlande, dans la plénitude de la  vérité même de Dieu, car c'est la vérité qui nous rend libres. En outre, après avoir pris conseil et avoir prié sur la question, j'ai l'intention d'effectuer une Visite apostolique dans plusieurs diocèses d'Irlande, ainsi que dans des séminaires et des congrégations religieuses. La Visite se propose d'aider l'Eglise locale dans son chemin de renouveau et sera établie en coopération avec les bureaux compétents de la Curie romaine et la conférence épiscopale irlandaise. Les détails seront communiqué en temps utile. Je propose en outre que soit organisée une Mission au niveau national pour tous les évêques, les  prêtres et les religieux. Je nourris l'espérance que, en puisant à la compétence d'experts prédicateurs et organisateurs de retraites, venus d'Irlande ou d'ailleurs, et en réexaminant les documents conciliaires, les rites liturgiques de l'ordination et de la profession et les récents enseignements  pontificaux, vous parveniez à une analyse plus profonde de vos vocations respectives, de manière à redécouvrir les racines de votre foi en  Jésus-Christ et à boire abondamment aux sources de l'eau vive qu'il vous offre à travers son Eglise. En cette Année consacrée aux prêtres, je vous confie de manière toute particulière la figure de saint Jean-Marie Vianney,  qui eut une compréhension si riche du mystère du sacerdoce. Le prêtre, écrivit-il, a la clé des trésors du ciel: c'est lui qui ouvre la porte, c'est lui le dispensateur du bon Dieu, l'administrateur de ses biens. Le Curé d'Ars  comprit parfaitement combien est grandement bénie une communauté lorsqu'elle est servie par un prêtre bon et saint: Un bon pasteur, un pasteur selon le cœur de Dieu, est le trésor le plus grand que le bon Dieu peut donner à  une paroisse et l'un des dons les plus précieux de la divine miséricorde. Par l'intercession de saint Jean-Marie Vianney, puisse le sacerdoce en Irlande reprendre vie et puisse toute l'Eglise en Irlande croître dans l'estime du grand don du ministère sacerdotal. Je saisis cette opportunité pour remercier dès à présent tous ceux qui seront impliqués dans l'organisation de la Visite  apostolique et la Mission, ainsi que les nombreux hommes et femmes qui, dans  toute l'Irlande, œuvrent déjà pour la protection des enfants dans les milieux ecclésiaux. Dès le moment où la gravité et l'extension du problème des abus sexuels contre les enfants dans des institutions catholiques commença à être pleinement compris, l'Eglise a accompli un énorme travail dans de nombreuses régions du monde, afin de l'affronter et d'y trouver remède. Tandis qu'il ne faut épargner aucun effort pour améliorer et mettre à jour les procédures déjà existantes, je suis encouragé par le fait que les pratiques de protection en vigueur, adoptées par les Eglises locales, sont considérées, dans certaines parties du monde, comme un modèle à suivre pour les autres institutions. Je souhaite conclure cette Lettre avec une Prière pour l'Eglise en Irlande, que je vous envoie avec l'attention qu'un père a pour ses enfants et avec l'affection d'un chrétien comme vous, scandalisé et blessé par ce qui est arrivé dans notre bien-aimée Eglise. Lorsque vous aurez recours à cette prière dans vos  familles, vos paroisses et vos communautés, puisse la bienheureuse Vierge Marie vous protéger et vous guider sur le chemin qui conduit à une union plus étroite avec son Fils, crucifié et ressuscité. Avec une grande affection et une ferme confiance dans les promesses de Dieu, je vous donne à tous de tout cœur ma bénédiction apostolique en gage de force et de paix dans le Seigneur.

  • Les deux papes

    Une nouvelle réflexion fort intéressante d’Antonio Socci sur "les deux papes" (alors qu'il ne peut y en avoir qu'un): chez Benoît et moi.

    Il rappelle que Benoît XVI a décidé de continuer à s’appeler Benoît XVI, Sa Sainteté Benoît XVI, avec ses armoiries qui ont les clefs de saint Pierre (tandis que celles de François n’ont pas le pallium…), qu’il a choisi le titre de « pape émérite », ce qui est une nouveauté absolue (y compris pour les canonistes qui en perdent leur latin), et il souligne un propos dont on n’avait pas (non plus) remarqué la portée dans le discours du 27 février 2013. Benoît XVI revenait sur le moment où il avait accepté d’être pape : « La gravité de la décision a été vraiment aussi dans le fait qu’à partir de ce moment, j’étais engagé sans cesse et pour toujours envers le Seigneur. Toujours – celui qui assume le ministère pétrinien n’a plus aucune vie privée. Il appartient toujours et totalement à tous, à toute l’Église. (...) Le "toujours" est aussi un "pour toujours"- il n’y a plus de retour dans le privé. Ma décision de renoncer à l’exercice actif du ministère ne supprime pas cela. »

    Et il laissait entendre ensuite qu’il y avait bien un exercice passif du ministère pétrinien

    Le plus stupéfiant, si l’on y réfléchit bien, étant peut-être le tweet de François, le 11 février : « Aujourd'hui, je vous invite à prier pour Sa Sainteté le Pape Benoît XVI, un homme de grand courage et humilité. »

  • On a deux papes !

    Ce matin, François a fait un éloge appuyé des familles nombreuses :

    « C’est une consolation et une espérance que de voir tant de familles nombreuses accueillir les enfants comme un vrai don de Dieu. » (Voir éventuellement la suite ici.)

    Mais ce n’est pas du tout contradictoire avec la sortie sur les lapins, affirme à CBS Mgr Anthony Figueiredo, directeur du collège pontifical nord-américain de Rome :

    « Quand le pape parle dans l’avion, il parle comme pasteur aux gens ordinaires. Quand il revient, il veut parler en tant que pape. »

    Donc le pasteur dit au vulgum pecus que les catholiques ne doivent pas se reproduire comme des lapins, et le pape dit que les familles nombreuses sont une bénédiction. On met le tout dans un chapeau, et il en ressort la doctrine à François.

    Enfin, non, ce n’est pas exactement cela. Mgr Figueiredo explique que si certains papes ont mis la doctrine d’abord, François met la personne d’abord.

    On connaît la chanson : ce qui compte c’est la personne, la pastorale, la miséricorde, etc., et ceux qui veulent mettre la doctrine en avant sont des rigides, des sans cœur, des pharisiens, etc.

    Mgr Figueiredo ajoute toutefois : « C’est risqué, sans aucun doute, parce que, si vous commencez par la personne, chacun a sa façon de le comprendre. »

    En fait il n’y a pas deux papes, mais une multitude.

  • Et le pape...

    Remarquable commentaire de l'interview de François dans la Repubblica, par Paolo Gulisano, traduit chez Benoît et moi.