Quasiment tous les jours une prestigieuse institution musicale russe met en ligne sur YouTube un concert. Cela permet de constater que la plupart des grands interprètes russes sont en Russie et non en exil, voire même sont revenus en Russie. Un cas spectaculaire est la soprano Aïda Garifullina, qui après avoir remporté le premier prix Placido Domingo a fait partie de la troupe de l’opéra de Vienne avant de chanter dans le monde entier. Acceptant même d’être la vedette people du 14 juillet 2018 sur le Champ de Mars puis le lendemain pour la coupe du monde de foot… Eh bien j’ai trouvé samedi un concert de Aïda Garifullina à Kaliningrad, cet été, avec l’Orchestre symphonique d’Etat de Russie sous la direction de son chef Valéri Polianski.
Ces concerts donnent lieu à des détails pittoresques. Il y a toujours des spectateurs qui viennent apporter des fleurs au soliste et au chef, tant parfois qu’ils ne savent plus quoi en faire. La plupart du temps quelqu’un prend la parole pour présenter les œuvres au programme, et les musiciens. Et les noms peuvent être très longs, parce que souvent on donne tous les titres. Ainsi à Kaliningrad c’était « l’artiste émérite du Tatarstan artiste émérite de la Fédération de Russie Aïda Emilevna Garifullina ».
Ces concerts permettent aussi d’intéressantes découvertes. Ainsi lors d’un autre concert à Kaliningrad, où il y avait une création impressionnante de Mikhaïl Arkadiev. (Cet Arkadiev d’autre part joue divinement Bach au piano.) J’ai découvert à cette occasion qu’il avait fait scandale en 2011 en publiant une lettre ouverte contre l’intégration d’office de tous les membres de l’Union des compositeurs au « Front populaire panrusse » qui réunit toutes les organisations favorables à Vladimir Poutine. La presse du régime dénonçait cet acte antipatriotique etc. Mais Poutine prit la parole pour défendre Arkadiev, disant qu’il était opposé à l’adhésion au Front populaire par nomination, et d’ajouter qu’il n’appréciait pas que les chiffres du Front soient « artificiellement gonflés » parce que « cela ne peut que discréditer l’idée elle-même ». Telle est l’horrible dictature poutinienne.