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Liturgie - Page 583

  • Venite

    Venite, et revertamur ad Dominum, quia ipse cepit, et sanabit nos ; percutiet, et curabit nos. Vivificabit nos post duos dies ; in die tertia suscitabit nos, et vivemus in conspectu ejus. Sciemus, sequemurque, ut cognoscamus Dominum.

    Venez, et retournons au Seigneur, car Il nous a fait captifs, et il nous délivrera ; il nous a blessés, et il nous guérira. Il nous rendra la vie après deux jours ; le troisième jour il nous ressuscitera, et nous vivrons en sa présence. Nous saurons, et nous suivrons le Seigneur, afin de Le connaître.

    (Osée, 6, lectio brevis des matines du temps de Pâques)

  • Saint Pie V

    Tandis que les armées françaises ravagent la Lombardie, les protestants de Suisse, disciples de Calvin, en profitent pour introduire en fraude de mauvais livres, ce qui constitue un réel danger pour le peuple, curieux de ces écrits qui ont l'attrait de la nouveauté et de la contestation.

    Cette grave affaire préoccupe beaucoup le pape. Après en avoir mûrement délibéré, le Saint-Office romain décide de nommer le père Michel Alexandrin Inquisiteur, car sa rigueur théologique lui permettra facilement de démontrer la fausseté des livres hérétiques [Michel Alexandrin est le nom de religion d'Antoine Ghislieri, futur Pie V]. Le voici donc envoyé à Côme dans le nord de l'Italie. A peine nommé en 1545, il part visiter le territoire qu'on lui a désigné. Là, au lieu de rechercher ses aises, comme le voudrait sa nouvelle et importante fonction, il va à pied, préférant l'inconfort d'une mauvaise paillasse à un bon lit et s'imposant de mortifiantes privations. En chemin, il égrène son rosaire ou récite à haute voix des prières. Autant de manières de sanctifier sa mission et de montrer l'exemple.

    Or il advient qu'à Côme, un marchand a convenu avec les Protestants genevois de l'envoi d'un grand nombre de livres de propagande calviniste qu'il pourra vendre à bon prix en faisant de gros bénéfices. Le bonhomme trouve moyen de corrompre tous chanoines du Chapitre pour qu'ils ferment les yeux sur son trafic. Lorsque le Père inquisiteur apprend l'affaire, il décide d'excommunier tous les responsables de ce mauvais commerce, à commencer par tous les chanoines. Mais ces derniers ne se démontent pas. Ils font courir dans la ville toutes sortes de bruits pour monter le peuple contre l'inquisiteur. Le chanoine le plus compromis a même l'audace de porter plainte auprès du gouverneur de Milan, en lui présentant les choses à sa manière, c'est à dire en cachant le trafic de livres et en imputant toute la responsabilité des troubles à l'intransigeance du père Michel Alexandrin. Le mauvais prêtre est beau parleur et le gouverneur se laisse convaincre. Il convoque l'inquisiteur pour le remettre à sa place de manière outrageante.

    Devant cette infamie, il en va de l'honneur de l'Eglise. Ghislieri part sur le champ à Rome pour retracer ce qui s'est passé. Il arrive le 24 décembre 1550. Lorsqu'il frappe à la porte du couvent de son ordre, le prieur le prend pour un de ces ambitieux venu mendier des faveurs à la cour du pape : « Que venez vous chercher ici, mon père ? Venez vous voir si le collège des cardinaux est disposé à vous faire pape ? » dit-il, railleur, et bien loin d'imaginer que ce celui dont il se moquait monterait bientôt sur le trône de saint Pierre ! Qu'importe, l'inquisiteur peut s'expliquer auprès de la Curie qui approuve entièrement sa conduite. Les réclamations injustes des chanoines de Côme sont rejetées, pour leur plus grande confusion.

    (Extrait d'un article de Catherine Bousquet, dans la revue Transmettre.)

  • Sainte Monique

    Un jour dans sa maladie, elle perdit connaissance et fut un moment enlevée à tout ce qui l'entourait. Nous accourûmes ; elle reprit bientôt ses sens, et nous regardant mon frère et moi, debout auprès d'elle ; elle nous dit comme nous interrogeant : « Où étais-je ? » Et à l'aspect de notre douleur muette : « Vous laisserez ici votre mère ! » Je gardais le silence et je retenais mes pleurs. Mon frère dit quelques mots exprimant le vœu qu'elle achevât sa vie dans sa patrie plutôt que sur une terre étrangère. Elle l'entendit, et, le visage ému, le réprimant des yeux pour de telles pensées, puis me regardant : « Vois comme il parle, » me dit-elle ; et s'adressant à tous deux : « Laissez ce corps partout ; et que tel souci ne vous trouble pas. Ce que je vous demande seulement, c'est de vous souvenir de moi à l'autel du Seigneur, partout où vous serez. » Nous ayant témoigné sa censée comme elle pouvait l'exprimer, elle se tut, et le progrès de la maladie redoublait ses souffrances.

    Alors, méditant sur vos dons, ô Dieu invisible, ces dons que vous semez dans le cœur de vos fidèles pour en récolter d'admirables moissons, je me réjouissais et vous rendais grâces au souvenir de cette vive préoccupation qui l'avait toujours inquiétée de sa sépulture, dont elle avait fixé et préparé la place auprès du corps de son mari ; parce qu'ayant vécu dans une étroite union, elle voulait encore, ô insuffisance de l'esprit humain pour les choses divines ! ajouter à ce bonheur, et qu'il fût dit par les hommes qu'après un voyage d'outremer, une même terre couvrait la terre de leurs corps réunis dans la mort même.

    Quand donc ce vide de son cœur avait-il commencé d'être comblé par la plénitude de votre grâce ? Je l'ignorais, et cette révélation qu'elle venait de faire ainsi me pénétrait d'admiration et de joie. Mais déjà, dans mon entretien à la fenêtre, ces paroles : « Que fais-je ici ? » témoignaient assez qu'elle ne tenait plus à mourir dans sa patrie. J'appris encore depuis, qu'à Ostie même, un jour, en mon absence, elle avait parlé avec une confiance toute maternelle à plusieurs de mes amis du mépris de cette vie et du bonheur de la mort. Admirant la vertu que vous aviez donnée à une femme, ils lui demandaient si elle ne redouterait pas de laisser son corps si loin de son pays : «Rien n'est loin de Dieu, répondit-elle ; et il n'est pas à craindre qu'à la fin des siècles,il ne reconnaisse pas la place où il doit me ressusciter. » Ce fut ainsi que, le neuvième jour de sa maladie, dans la cinquante-sixième année de sa vie, et la trente-troisième de mon âge, cette âme pieuse et sainte vit tomber les chaînes corporelles.

    (Saint Augustin, Confessions)

  • 3e dimanche après Pâques

    « Jubilate Deo », dit l'introït. Mais dans l'évangile Jésus avertit que nous serons d'abord dans la tristesse. Trois fois de suite, il oppose la tristesse de ce temps à la joie de la Rencontre.

    La deuxième fois, au cœur de ce passage, il prend la comparaison de la femme qui va enfanter.

    D'une part, cette comparaison illustre parfaitement le sort du chrétien, qui dans ce monde est dans les douleurs de l'enfantement, jusqu'à ce que son âme naisse en Dieu pour une joie éternelle. Et cette joie rejaillit sur le corps qui, semé animal, ressuscite spirituel (1 Co. 15).

    D'autre part, Jésus insiste ici aussi sur le fait qu'il vient accomplir les prophéties. Car ce thème se trouve à plusieurs reprises dans les textes des prophètes. Et Isaïe, par ce biais, dans son chapitre 26, annonce clairement la résurrection des morts (d'une façon qui annonce également le propos de saint Paul).

  • Saint Athanase

    Tu nous as apparu comme un fleuve de grâce, comme un Nil spirituel, ô toi qui portes Dieu ! tu as apporté aux fidèles les fruits de la doctrine de piété, tu as arrosé toutes les campagnes et nourri au loin la terre. Par le bâton de tes enseignements tu as chasse les loups de l'hérésie loin de l'Eglise du Christ : tu l'as entourée et protégée du rempart de tes paroles, et tu l'as présentée saine et sauve au Christ ; prie-le donc, le Christ Dieu, qu'il daigne nous délivrer de la séduction et de tout péril, nous qui célébrons avec foi ta mémoire digne de vénération.

    (liturgie byzantine)

  • Saint Joseph artisan

    Clamavit populus ad regem, alimenta petens: Quibus ille respondit: Ite ad Joseph, alleluia. V. Salus nostra in manu tua est: respice nos tantum, et læti serviemus regi. R. Quibus ille respondit: Ite ad Joseph, alleluia.

    Le peuple réclamait à grands cris, au roi, de la nourriture. Celui-ci leur répondit : Allez à Joseph, alléluia. Notre salut est entre tes mains : regarde-nous seulement, et nous servirons le roi dans la joie. Il leur répondit : allez à Joseph, alléluia.

    Fecit me Deus quasi patrem regis, et dominum universæ domus ejus: Exaltavit me, ut salvos faceret multos populos, alleluia. V. Venite ad me, et ego dabo vobis omnia bona Aegypti, ut comedatis medullam terræ. R. Exaltavit me, ut salvos faceret multos populos, alleluia.

    Il m'a établi comme le père du roi, et le seigneur de toute sa maison ; il m'a élevé afin que je sauve beaucoup de peuples, alléluia. Venez à moi, et je vous donnerai tous les biens de l'Egypte, afin que vous mangiez la moelle de la terre. Il m'a élevé afin que je sauve beaucoup de peuples, alléluia.

    (les deux premiers répons des matines, dans l'ancienne solennité de saint Joseph).

  • Sainte Catherine de Sienne

    Vous me direz peut-être, saint Père, que vous êtes obligé en conscience de conserver et de recouvrer les biens de l'Eglise. Hélas! je l'avoue, c'est la vérité; mais il me semble qu'il vaut mieux encore conserver une chose qui est plus chère. Le trésor de l'Eglise est le sang du Christ, donné pour prix de l'âme; ce trésor du sang n'a pas été payé pour les biens temporels, mais pour le salut du genre humain. En admettant que vous êtes tenu de reconquérir et de conserver les richesses, les droits que l'Eglise a perdus, vous êtes tenu bien davantage à reconquérir tant de brebis, qui sont un trésor pour l'Eglise. Elle serait trop appauvrie si elle les perdait. Elle ne deviendrait pas pauvre elle-même, parce que le sang du Christ ne peut diminuer; mais elle perdrait cet ornement de gloire qu'elle reçoit des vertus et de l'obéissance de ceux qui lui sont soumis. Il vaut mieux négliger les intérêts temporels que les intérêts spirituels. Faites seulement ce que vous pourrez et vous serez excusé devant Dieu et devant les hommes du monde; vous les vaincrez bien mieux avec les armes de la douceur, de l'amour et de la paix, qu'avec les rigueurs de la guerre et vous rentrerez ainsi dans vos droits spirituels et temporels.

    Mon âme, dans son union avec Dieu, a une soif ardente de notre salut, de la réforme de la sainte Eglise, et du bonheur du monde entier; et il me semble que Dieu ne me manifeste pas d'autre remède que la paix; je n'en vois pas d'autres en lui. La paix, oui, la paix, pour l'amour de Jésus crucifié; et ne vous arrêtez pas à l'ignorance, à l'aveuglement et à l'orgueil de vos enfants. Avec la paix vous vaincrez la guerre et la haine qui divise les cœurs; vous les réunirez. C'est par la vertu que vous chasserez le démon. Ouvrez, ouvrez donc l'œil de votre intelligence avec la faim et le désir des âmes, et voyez les deux maux qui se présentent: la perte de la grandeur, de la puissance et des biens temporels, que vous vous croyez obligé de reconquérir, et la perte de la grâce dans les âmes et de l'obéissance qu'elles doivent à Votre Sainteté; et alors vous verrez que vous êtes tenu bien davantage à reconquérir les âmes. Puisque l'œil de l'intelligence peut comparer ces maux, vous, très saint Père, qui êtes placé entre les deux, vous devez choisir le moindre, et en le choisissant pour fuir le plus grand, vous éviterez les deux, et vous y gagnerez de toute manière; car vous aurez retrouvé, dans la paix, vos enfants, et avec eux ce qu'ils vous doivent.

    (Extrait d'une lettre à Grégoire XI)

  • Saint Pierre de Vérone

    Du sein de la fumée la flamme lumineuse s'élance ; la rose fleurit sur les épines du buisson : ainsi Pierre, docteur et martyr, naît d'une famille infidèle.

    D'abord soldat dans l'armée des Prêcheurs, il brille aujourd'hui dans les rangs de la milice céleste.

    Son âme fut tout angélique, sa langue féconde, sa vie apostolique, sa mort précieuse.

    Tandis qu'il est à la recherche des renards de Samson, il est immolé par un bras impie ; un meurtrier frappe sa tête sacrée ; le sang du juste est répandu : ainsi le martyr cueille la palme du triomphe, en succombant pour la foi. Athlète invincible, il confesse encore en mourant la foi pour laquelle il verse son sang. Ainsi le martyr cueille la palme triomphale, en succombant pour la foi.

    (Antiennes et répons du bréviaire dominicain)

  • Saint Paul de la Croix

    Une très belle page de dom Guéranger :

    La diminution des vérités par les enfants des hommes semblait avoir tari la source des Saints, quand l'Italie, toujours féconde dans sa foi toujours vive, donna naissance au héros chrétien qui devait projeter sur la froide nuit du XVIII° siècle le rayonnement de la sainteté d'un autre âge. Dieu ne manque jamais à son Eglise. Au siècle de révolte et de sensualisme qui couvre du nom de philosophie ses tristes aberrations, il opposera la Croix de son Fils. Rappelant par son nom et ses œuvres le grand Apôtre des Gentils, un nouveau Paul surgira de cette génération enivrée de mensonge et d'orgueil, pour qui la Croix est redevenue scandale et folie. Faible, pauvre, méconnu longtemps, seul contre tous, mais le cœur débordant d'abnégation, de dévouement et d'amour, il ira, cet apôtre, avec la prétention de confondre, lui aussi, la sagesse des sages et la prudence des prudents ; dans la grossièreté d'un habit étrange pour la mollesse du siècle, nu-pieds, la tête couronnée d'épines, les épaules chargées d'une lourde croix, il parcourra les villes, il se présentera devant les puissants et les faibles, estimant ne savoir autre chose que Jésus et Jésus crucifié. Et la Croix dans ses mains, fécondant son zèle, apparaîtra comme la force et la sagesse de Dieu. Qu'ils triomphent, ceux qui prétendent avoir banni le miracle de l'histoire et le surnaturel de la vie des peuples ; ils ne savent pas qu'à cette heure même, d'étonnants prodiges, des miracles sans nombre, soumettent des populations entières à la voix de cet homme, qui, par la destruction complète du péché dans sa personne, a reconquis le primitif empire d'Adam sur la nature et semble jouir déjà, dans sa chair mortelle, des qualités des corps ressuscités.

    Mais l'apostolat de la Croix ne doit pas finir avec Paul. A la vieillesse d'un monde décrépit ne suffisent plus les ressources anciennes. Nous sommes loin des temps où la délicatesse exquise du sentiment chrétien était surabondamment touchée par le spectacle de la Croix sous les fleurs, telle que la peignait aux Catacombes un suave et respectueux amour. L'humanité a besoin qu'à ses sens émoussés par tant d'émotions malsaines, quelqu'un soit maintenant chargé d'offrir sans cesse, comme réactif suprême, les larmes, le sang, les plaies béantes du divin Rédempteur. Paul de la Croix a reçu d'en-haut la mission de répondre à ce besoin des derniers temps ; au prix d'indicibles souffrances, il devient le père d'une nouvelle famille religieuse qui ajoute aux trois vœux ordinaires celui de propager la dévotion à la Passion du Sauveur, et dont chaque membre en porte ostensiblement le signe sacré sur la poitrine.

    N'oublions pas toutefois qu'elle-même la Passion du Sauveur n'est que la préparation pour l'âme chrétienne au grand mystère de la Pâque, terme radieux des manifestations du Verbe, but suprême des élus, sans l'intelligence et l'amour duquel la piété reste incomplète et découronnée. L'Esprit-Saint, qui conduit l'Eglise dans l'admirable progression de son Année liturgique, n'a pas d'autre direction pour les âmes qui s'abandonnent pleinement à la divine liberté de son action sanctificatrice. Du sommet sanglant du Calvaire où il voudrait clouer tout son être, Paul de la Croix est emporté maintes fois dans les hauteurs divines où il entend ces paroles mystérieuses qu'une bouche humaine ne saurait dire ; il assiste au triomphe de ce Fils de l'homme qui, après avoir vécu de la vie mortelle et passé par la mort, vit aujourd'hui dans les siècles des siècles ; il voit sur le trône de Dieu l'Agneau immolé, devenu le foyer des splendeurs des cieux ; et de cette vue sublime des célestes réalités il rapporte sur terre l'enthousiasme divin, l'enivrement d'amour qui, au milieu des plus effrayantes austérités, donne à toute sa personne un charme incomparable. « Ne craignez pas, dit-il à ses enfants terrifiés par les attaques furieuses des démons ; n'ayez pas peur, et dites bien haut : Alléluia ! Le diable a peur de l'Alléluia ; c'est une parole venue du Paradis. » Au spectacle de la nature renaissant avec son Seigneur en ces jours du printemps, au chant harmonieux des oiseaux célébrant sa victoire, à la vue des fleurs naissant sous les pas du divin Ressuscité, il n'y tient plus; suffoquant de poésie et d'amour, et ne pouvant modérer ses transports, il gourmande les fleurs, il les touche de son bâton, en disant : « Taisez-vous ! Taisez-vous ! » - « A qui appartiennent ces campagnes ? dit-il un jour à son compagnon de route... A qui appartiennent ces campagnes? vous dis-je. Ah ! vous ne comprenez pas ?... Elles appartiennent à notre grand Dieu ! » Et, transporté d'amour, raconte son biographe, il vole en l'air jusqu'à une certaine distance. « Mes frères, aimez Dieu! répète-t-il à tous ceux qu'il rencontre, aimez Dieu qui mérite tant d'être aimé ! N'entendez-vous pas les feuilles mêmes des arbres qui vous disent d'aimer Dieu ? O amour de Dieu ! ô amour de Dieu ! »

    Nous nous laissons aller aux charmes d'une sainteté si suave et si forte à la fois ; attrait divin que n'inspirèrent jamais les disciples d'une spiritualité faussée, trop en vogue dans le dernier siècle auprès des meilleurs. Sous prétexte de dompter la nature mauvaise et d'éviter des écarts possibles, on vit les nouveaux docteurs, alliés inconscients du jansénisme, enserrer l'âme dans les liens d'une régularité contrainte, abattre son essor, la discipliner, la refaire à leur façon dans un moule uniforme, et, par des règles savamment déduites, déterminer avec précision les contours de la sphère où tous enfin marcheraient d'un pas égal, et, sous une direction logique, atteindraient sûrement la perfection de la sainteté. Mais c'est le divin Esprit, l'Esprit de sainteté qui seul fait les Saints, et cet Esprit d'amour est libre par essence. Il s'accommode peu du moule et des méthodes humaines : il souffle où il veut et quand il veut ; mais on ne sait d'où il vient, ni où il va. Ainsi en est-il de celui qui est né de l'Esprit, nous dit le Seigneur. L'Esprit a élu Paul dès sa première enfance ; il le saisit dans toute l'expansion de sa riche nature, ne détruit rien, sanctifie tout, et par la grâce décuplant son essor, il le produit sur les modèles antiques, toujours ardent, toujours aimable, et saint plus que personne, en face des chétifs produits d'une école dont les procédés corrects ont pour résultat le plus ordinaire d'user péniblement l'âme sur elle-même, dans les stériles efforts d'une ascèse impuissante.

  • Saint Pierre Canisius

    Extrait du catéchisme de saint Pierre Canisius, qui fut le plus répandu dans toute l'Eglise au XVIIe siècle.

    Question X

    Que nous propose de croire le troisième article, A été conçu du Saint-Esprit ?

    Cet article déclare que ce même souverain Seigneur, qui, sans avoir de mère, est engendré de Dieu le Père de toute éternité, est descendu du ciel par amour pour nous, et a pris notre nature, ayant été conçu dans la suite des temps à Nazareth, et étant né à Bethléem, sous César-Auguste, de la Vierge Marie, sans avoir de père, mais par l'effet de l'opération toute-puissante de l'Esprit-Saint, en sorte que, par un miracle incompréhensible, le Verbe s'est fait chair et Dieu s'est fait homme, et que Marie est devenue mère de Dieu en même temps qu'elle est restée vierge.

    Cette conception et cette génération temporelle du Fils de Dieu renferme les éléments du salut et de la rédemption du monde, et est le modèle de notre régénération à nous-mêmes ; grâce à ce prodige de la divine miséricorde, nous pouvons, quoique enfants d'Adam pécheur, conçus d'une semence impure et nés enfants de colère, recouvrer la pureté de l'homme primitif, et de charnels que nous étions jusque-là, devenir spirituels et vraiment enfants de Dieu en Jésus-Christ, à qui le Père éternel a voulu que ses élus se rendent conformes, pour qu'il soit ainsi, comme le dit saint Paul, le premier-né entre plusieurs frères.