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Liturgie - Page 22

  • Quatrième dimanche de carême

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    Monastère de Dionysiou, Athos, XVIe siècle.

    Par les cinq pains on entend les cinq livres de Moïse : c’est, à vrai dire, de l’orge, et non du blé ; car ils appartiennent à l’Ancien Testament. Vous le savez : l’orge est conformé de telle manière qu’on parvient difficilement à y trouver la farine ; car elle est renfermée dans une enveloppe de paille épaisse et résistante ; on ne l’en fait sortir qu’avec peine. Ainsi en est-il de la lettre de l’Ancien Testament, car elle est enveloppée dans les ombres de figures charnelles ; si on parvient jusqu’à son sens caché, elle nourrit et rassasie l’âme.

    Un enfant portait ces cinq pains et deux poissons. Si nous voulons avoir quel était cet enfant, nous verrons peut-être qu’il représentait la nation juive ; car elle portait les livres de Moïse avec le peu de réflexion d’un entant, et ne s’en nourrissait pas ; en effet, ces livres dont elle était chargée accablaient de leur poids celui qui n’y voyait qu’une lettre close ; ils nourrissaient, au contraire, ceux qui en pénétraient le sens.

    Pour les deux poissons, ils étaient, ce nous semble, la figure de ces deux personnages distingués entre tous, qui, dans l’Ancien Testament, recevaient l’onction sainte pour exercer ensuite, au milieu du peuple, les fonctions du sacerdoce et de la royauté, pour offrir le sacrifice et gouverner. Il est venu mystérieusement, un jour, dans le monde, Celui que préfiguraient ces deux personnages, Celui que représentait la farine d’orge et que la paille d’orge cachait de son enveloppe, Il est venu, réunissant en lui seul la double dignité de grand prêtre et de roi. De grand prêtre, car il s’est offert lui-même à Dieu pour nous comme une victime ; de roi, puisqu’il nous gouverne ; et ainsi brise-t-il les sceaux du livre fermé que portait le peuple d’Israël.

    Et le Sauveur donna l’ordre de rompre les pains, et, à ce moment-là même, ils se multiplièrent. Rien de plus vrai. En effet, que de livres on a écrits pour expliquer les cinq livres de Moïse ! En les rompant, en quelque sorte, c’est-à-dire en en exposant le sens, n’a-t-on pas travaillé à une multiplication de livres ? L’ignorance du peuple juif, quant au sens de la loi, se trouvait comme protégée par une sorte de paille d’orge ; car, en parlant de ce peuple, l’Apôtre a dit :  « Jusqu’à ce jour, lorsqu’ils lisent Moïse, ils ont un voile sur le cœur ». Ce voile n’était pas encore enlevé, parce que le Christ n’était pas encore venu ; il n’avait pas encore été attaché à la croix, et n’avait, par conséquent, pas non plus déchiré le voile du temple. Ce peuple ignorait donc le sens de la loi : voilà pourquoi le Sauveur interrogea son disciple et manifesta son ignorance.

    Rien ici n’est inutile ; tout a un sens, mais il faut des lecteurs qui le comprennent. En effet, le nombre lui-même des personnes nourries par Notre Seigneur représentait le peuple soumis à la loi. Car, pourquoi se trouvaient-elles au nombre de cinq mille, sinon parce qu’elles étaient les sujets de la loi, qui se compose des cinq livres de Moïse ? Aussi, les paralytiques étaient-ils déposés aux cinq portiques du temple, sans y être néanmoins guéris ; mais celui qui, ici, pourvut avec cinq pains à la subsistance d’une multitude, rendit la santé à un paralytique sous l’un de ces portiques. La foule était assise sur l’herbe ; le peuple juif jugeait de tout dans un sens charnel ; il n’avait que des espérances charnelles, car toute chair n’est que de l’herbe.

    Qu’étaient-ce encore que tous ces restes, sinon ce que le peuple n’avait pu manger ? Sous cet emblème on voit les vérités transcendantes auxquelles ne peut atteindre l’intelligence de la multitude, Pour ces vérités, d’un ordre supérieur aux lumières de la foule, que reste-t-il à faire, quand on ne peut les saisir, sinon de croire ceux qui, à l’instar des Apôtres, peuvent les comprendre et en instruire les autres ? C’est avec ces restes qu’on a rempli douze corbeilles. Prodige admirable en raison de sa grandeur ! Prodige d’une évidente utilité, puisqu’il a été opéré pour le bien des âmes ! Ceux qui en furent les témoins se sentirent saisis d’admiration ; pour nous, nous n’éprouvons aucun étonnement à en écouter le récit. Le Sauveur l’a opéré devant ces cinq mille hommes pour les rendre témoins du fait ; l’Evangéliste en a écrit l’histoire, pour nous l’apprendre. La foi doit nous faire voir ce qu’ils ont eux-mêmes contemplé, car nous apercevons des yeux de l’âme ce que nous n’avons pu apercevoir des yeux du corps ; et, sous ce rapport, nous sommes autrement privilégiés que cette multitude ; car à nous s’appliquent ces paroles de Jésus-Christ : « Bienheureux ceux qui ne voient pas et qui croient ».

    A cet avantage s’en ajoute peut-être encore un autre : c’est que nous avons saisi le sens caché de cet événement qui a échappé à cette foule de peuple ; et ainsi nous avons été nous-mêmes rassasiés, puisque nous avons pu réussir à trouver la farine, malgré l’épaisseur de la paille.

    Saint Augustin, sermon 24 sur saint Jean (§ 5-6).

  • La grande doxologie

    Le chœur russe Axion Estin, qui chante en slavon sur les mélodies grecques, vient de mettre en ligne son enregistrement de la Grande Doxologie (qui conclut les matines), avec vers la fin le Trisagion partiellement en grec, comme ils le font habituellement (et d'autres aussi).

    Gloire à toi qui nous as montré la lumière.

    Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre, bienveillance parmi les hommes.

    Nous te louons, nous te bénissons, nous t'adorons, nous te glorifions, nous te rendons grâce pour ta grande gloire .

    Seigneur, Roi, Dieu céleste et Père tout-puissant ;

    Seigneur, Fils unique, Jésus Christ, et Saint-Esprit ;

    Seigneur Dieu, Agneau de Dieu, Fils du Père, toi qui ôtes le péché du monde, aie pitié de nous, ô toi qui ôtes les péchés du monde.

    Reçois notre prière, ô toi qui sièges à la droite du Père, et aie pitié de nous.

    Car tu es le seul Saint, le seul Seigneur, Jésus Christ, dans la gloire de Dieu le Père. Amen.

    Chaque jour je te bénirai et louerai ton Nom dans les siècles des siècles.

    Daigne, Seigneur, nous garder ce jour sans péché.

    Tu es béni, Seigneur, Dieu de nos pères, et ton Nom est loué et glorifié dans les siècles. Amen.

    Que ta miséricorde, Seigneur, soit sur nous, comme nous avons espéré en toi.

    Tu es béni, Seigneur, enseigne-moi tes commandements. (3 fois, la troisième fois en grec)

    Seigneur, tu as été pour nous un refuge d'âge en âge.

    J'ai dit : Seigneur, aie pitié de moi et guéris mon âme, car j'ai péché contre toi.

    Seigneur, je me suis réfugié auprès de toi, enseigne-moi à faire ta volonté, car tu es mon Dieu.

    Car auprès de toi est la source de la vie, et dans ta lumière nous verrons la lumière.

    Étends ta miséricorde sur ceux qui te connaissent.

    Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous. (3 fois)

    Gloire au Père et au Fils et au Saint-Esprit, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. Amen.

    Saint Immortel, aie pitié de nous.

    Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous.

    Aujourd’hui le salut est venu dans le monde. Célébrons celui qui s’est levé du tombeau et qui est l’auteur de notre vie ; ayant détruit la mort par la mort, il nous a donné la victoire et la grande miséricorde.

  • Samedi de la troisième semaine de carême

    Jam Christe, sol justitiæ,
    Mentis diescant tenebræ,
    Virtutum ut lux redeat,
    Terris diem cum reparas.

    Jésus, vrai soleil de justice,
    De l’âme ténébreuse éclaire enfin les yeux,
    Et fais que des vertus la lumière propice
    Y rentre en même temps que le jour en ces lieux.

    Dans tempus acceptabile,
    Et pœnitens cor tribue,
    Convertat ut benignitas
    Quos longa suffert pietas.

    Nous donnant ces jours favorables,
    Imprime au fond des cœurs un sacré repentir :
    Ta pitié trop longtemps les a soufferts coupables ;
    Par ta bénignité daigne les convertir.

    Quiddamque pænitentiæ
    Da ferre, quamvis gravium,
    Majore tuo munere,
    Quo demptio fit criminum.

    Fais-nous par quelque pénitence
    Obtenir le pardon des plus affreux péchés :
    Plus elle sera rude, et plus de ta clémence
    Nous bénirons la force et les trésors cachés.

    Dies venit, dies tua,
    In qua reflorent omnia :
    Lætemur in hac ut tuam
    Per hanc reducti gratiam.

    Ce jour vient, ce jour salutaire
    Où par tout l’univers tu fais tout refleurir :
    Ramène en ce grand jour au chemin de te plaire
    Ceux qu’à toi ce grand jour oblige à recourir.

    Te rerum universitas,
    Clemens adoret Trinitas ;
    Et nos novi per veniam
    Novum canamus canticum. Amen.

    Qu’en tous lieux t’adore un vrai zèle,
    Grand Dieu, dont la bonté nous tire du tombeau ;
    Tandis que renaissants par ta grâce nouvelle,
    Nous chantons à ta gloire un cantique nouveau.

    (Hymne des laudes du Carême, traduction Pierre Corneille.)

    • Le commentaire de saint Hippolyte sur l'histoire de Suzanne.

    • Le parallèle entre Suzanne et la femme adultère.

    Dans la Bible grecque, c'est le livre de Suzanne.

    Suzanne peinte dans le cimetière de sainte Priscille.

    Saint Augustin et la femme adultère.

  • 8 mars à Moscou

    La divine liturgie ce matin au monastère Pokrov de Moscou, avec de superbes chants.

    10’13 Fils unique et Verbe de Dieu

    12’15 béatitudes

    20’45 Trisagion

    42’ Hymne des chérubins

    1h00’25 Hymne à la Mère de Dieu après la consécration.

    Belle tête d'évêque à 1h21' juste avant la communion, d'abord des moniales, et d'abord de celles au "grand schème".

    A 1h25 vue de la foule... un jour de semaine laïquement férié...

  • Vendredi de la troisième semaine de carême

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    Christus sedens juxta puteum loquitur cum Samaritana. (Monreale).

    La messe d’aujourd’hui est une catéchèse baptismale pour les catéchumènes, et aussi pour les fidèles. Avec les deux grandes images de Moïse frappant le rocher, et de la Samaritaine au puits de Jacob, que l’on retrouvera dans nombre de peintures des premiers siècles comme symboles du baptême.

    Car le rocher du désert était le Christ, comme le souligne saint Paul, et l’eau qui en jaillit est cette eau vive jaillissant en vie éternelle que Jésus propose à la Samaritaine.

    Cet épisode de l’évangile de saint Jean vient précisément après le passage où il est dit que tout le monde vient au baptême de Jésus, ce qui interloque les disciples de Jean Baptiste, et celui-ci leur répond qu’il est l’ami de l’Epoux et que sa joie est parfaite, et que le Christ doit croître tandis que lui-même doit diminuer.

    Jean sera décapité et le Christ élevé sur la Croix. Nous en sommes encore au début de l’évangile de saint Jean, ou du moins dans les débuts du ministère public de Jésus dans l’évangile de saint Jean. Et Jésus a soif. Et il demande à boire à la Samaritaine. Il lui fera comprendre qu’il a soif de sa soif spirituelle, en creusant en elle la source de cette soif.

    A partir de ce jour, en dehors des jeudis (déjà hier) qui n’avaient pas primitivement de messe, tous les évangiles, jusqu’aux Rameaux, seront pris dans saint Jean. Et au bout du chemin où Jésus sera vraiment fatigué, le vendredi saint, ce sera la Passion selon saint Jean, où Jésus, les bras étendus sur la croix pour accueillir tous les hommes dans son Cœur bientôt ouvert, dira une dernière fois : « J’ai soif. »

    Entre temps, le lundi de la Passion, il aura dit : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive. Celui qui croit en moi, comme le dit l’Ecriture, des fleuves d’eau vive couleront de son sein. »

    L’évangéliste ajoute : « Il parlait de l’Esprit, qu’allaient recevoir ceux qui croiraient en lui, car l’Esprit n’avait pas encore été donné, parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié. »

    Avant de monter au ciel Jésus dira à ses apôtres : « Jean baptisait d’eau, mais vous, vous serez baptisés de Saint-Esprit dans peu de jours. »

  • Jeudi de la troisième semaine de carême

    Exspectantes beatam illam spem passionis ac resurrectionis Filii Dei, fratres charissimi : et manifestationem gloriæ beati et Salvatoris nostri Jesu Christi, resumite virium fortitudinem : et non quasi futuro terreamini de labore : qui ad Paschalis Dominicæ cupitis anhelando pervenire celebritatem. Sacratæ etenim Quadragesimæ tempore mediante arripite de futuro labore fiduciam : qui præteriti jejunii jam transegistis ærumnas. Dabit Jesus lassis fortitudinem : qui pro nobis dignatus est infirmari. Tribuet perfectionem futuri : qui initia donavit præteriti. Aderit in auxilio, filii : qui suæ nos cupit præstolari gloriam Passionis. Amen.

    Dans l’attente de l’heureux espoir que nous avons, Frères très chers, de célébrer la Passion et la Résurrection du Fils de Dieu, et de voir la manifestation de la gloire de notre bienheureux Sauveur Jésus-Christ, ranimez vos forces et votre courage. Ne vous effrayez pas des fatigues qui restent encore à subir, vous qui désirez avec tant d’ardeur arriver à la solennité de la Pâque du Seigneur. En ce milieu de la sainte Quarantaine, vous qui déjà avez traversé une partie des labeurs du jeûne, prenez confiance pour ceux qui restent à accomplir. Jésus, qui a daigné se faire infirme pour nous, donnera le courage à ceux qui sont fatigués ; il nous a donné de fournir le commencement de la carrière, il en accordera la continuation. Il vous viendra en aide, très chers fils, lui qui veut que nous vivions dans l’attente de sa glorieuse Passion. Amen.

    Liturgie mozarabe.

  • Mercredi de la troisième semaine de carême

    Audite et intelligite traditiones quas Dominus dedit nobis.

    Écoutez et comprenez les traditions que le Seigneur nous a données.

    Telle est aujourd’hui l’antienne du Benedictus. A priori on pourrait penser que c’est une citation de Moïse, en rapport avec l’épître de ce jour (la révélation du Décalogue), mais on ne la trouve pas dans le Pentateuque. On constate d’ailleurs à cette occasion que le mot « tradition » ne figure pas dans le Pentateuque.

    Et le propos paraît paradoxal, le jour même où Jésus dans l’évangile s’en prend aux traditions des juifs, ce qui est souligné par l’antienne du Magnificat :

    Non lotis manibus manducare, non coinquinat hominem.

    Ne pas s’être lavé les mains pour manger, cela ne souille point l’homme.

    Si l’on regarde de plus près, on voit que Jésus relativise ou dénonce des traditions humaines (et hypocrites), alors que l’antienne du Benedictus parle des traditions que Dieu nous a données. Ces traditions véritables, c’est la transmission des commandements de Dieu (le Décalogue de la première lecture). « Pourquoi violez-vous le commandement de Dieu, à cause de votre tradition ? (…) Vous avez annulé le commandement de Dieu par votre tradition. »

    Alors que le Christ est venu parfaire le commandement de Dieu par son Evangile.

  • Mardi de la troisième semaine de carême

    En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : Si ton frère a péché contre toi, va, et reprends-le entre toi et lui seul…

    Pourquoi le reprends-tu ? Dans l’amertume de te sentir offensé ? Non, je l’espère ! Si tu agis ainsi par amour-propre, ton action est nulle ! Si tu agis par amour de l’autre, rien de mieux ! Pour savoir sous l’empire de quel amour tu dois agir, l’amour envers toi ou envers lui, prête donc bien attention aux paroles elles-mêmes. « S’il t’écoute, est-il dit, tu as gagné ton frère. » Donc, agis pour lui, dans l’intention de le gagner. En agissant de la sorte, tu le gagnes. Si tu ne l’eus fait, c’était sa perte.

    Comment est-il possible que la plupart des hommes ne prennent pas au sérieux de tels péchés ? Ils disent : « Qu’ai-je fait de grave ? J’ai péché contre un homme. » Prends cela au sérieux : c’est contre un homme que tu as péché. Veux-tu le savoir ? Pécher contre un homme, c’est aller à ta perte. Si celui contre qui tu as péché te reprend, seul à seul, et que tu l’écoutes, il t’a gagné. Qu’est-ce à dire : « Il t’a gagné » ? Ceci : s’il ne te gagnait, tu étais perdu. D’ailleurs si tu n’étais pas perdu, comment a-t-il pu te gagner ? Que nul donc ne le prenne à la légère, si c’est contre son frère qu’il pèche. A un certain endroit, l’Apôtre le dit : « En péchant ainsi contre vos frères, en blessant leur conscience qui est faible, c’est contre le Christ que vous péchez. » Oui, certes, car tous nous sommes devenus membres du Christ. Toi qui pèches contre un membre du Christ, comment ne pèches-tu pas contre le Christ ?

    Que personne donc ne dise : « Je n’ai pas péché contre Dieu, mais j’ai péché contre mon frère, j’ai péché contre un homme, il n’y a là que peccadille, voire même rien du tout ! » Sans doute parles-tu ainsi : « Il n’y a là que peccadille », parce que la guérison peut en être immédiate. Tu as péché contre ton frère ? Fais satisfaction et tu es guéri ! En un instant, tu l’as posé, cet acte porteur de mort. Mais en un instant, tu en as trouvé le remède. Mes frères, lequel d’entre nous oserait espérer le Royaume des Cieux, lorsque l’Évangile affirme : « Celui qui dit à son frère : mécréant, sera passible de la géhenne de feu » ? Terrifiante perspective ! Mais, regarde, voici le remède. « Si donc tu présentes ton offrande à l’autel, et que là, tu te rappelles que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande, là, devant l’autel. » Dieu ne s’irrite pas si tu diffères de présenter ton offrande : c’est toi que cherche Dieu plutôt que ton offrande.

    Saint Augustin, leçon des matines (16e sermon sur les Paroles du Seigneur).

  • Lundi de la troisième semaine de carême

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    Plaque de retable, bronze doré et émaux, vallée de la Meuse, XIIe sicle, British Museum.

    La messe de ce jour est étroitement liée à la catéchèse baptismale des catéchumènes. La première lecture raconte comment le général syrien Naaman a été guéri de sa lèpre : le prophète Elisée lui demande de se baigner sept fois dans le Jourdain, et il est purifié.

    On insiste généralement sur le fait que Naaman doit se dépouiller de son orgueil pour être guéri : il est un grand personnage, et il croit qu’il va être reçu par Elisée avec tous les honneurs, et qu’Elisée va accomplir un miracle spectaculaire à la hauteur de son rang. Or Elisée ne le reçoit même pas et lui fait dire qu’il doit se baigner dans le fleuve – comme s’il n’y avait pas des fleuves en Syrie… Après un dernier mouvement d’orgueil, Naaman obéit au prophète (et à ses esclaves...), et il est purifié.

    Mais l’humilité requise de l’homme qui veut être guéri de sa lèpre (du péché) a son pendant (préalable) dans l’humilité de Dieu qui, de façon habituelle, ne fait pas de miracles éclatants, mais se sert des éléments les plus courants de la création pour faire passer sa grâce – sa vie éternelle et bienheureuse : l’eau du baptême, l’huile des diverses onctions, le pain de l’eucharistie… Ce qui est la suite logique de l’incarnation.

    C’est ce que Jésus tente de faire comprendre à ses concitoyens de Nazareth qui voudraient le voir accomplir un miracle, comme s’il était sur une scène de cabaret, ou sur une piste de cirque. Non seulement il ne fera pas de miracle devant des gens qui refusent de comprendre qui il est (alors qu’il vient de leur expliquer qu’il est le Messie dont Isaïe a prophétisé la venue), mais il leur déclare de façon à peine voilée, notamment par l’exemple de Naaman, que le salut sera apporté aux païens puisque les juifs refusent de croire.

    Alors on passe du baptême à une annonce de la Passion : les habitants de Nazareth sont en colère, ils se lèvent, ils le jettent « en dehors de la ville », et ils le conduisent « au sommet de la montagne » pour le précipiter en bas. Mais ce n’est pas encore son heure. Et l’évangile se termine par une affirmation de la toute-puissance divine de Jésus : « Mais lui, passant au milieu d’eux, allait. » L’imparfait montre la divine sérénité et majesté de Celui qui, à travers un assaut ponctuel, continue son chemin. Pourtant ils l’ont saisi, et ils vont le tuer. Mais il leur glisse entre les mains, en fait il disparaît. Et c’est la fin de la 22e section de l’évangile de saint Luc selon la numérotation d’Eusèbe de Césarée.

  • Troisième dimanche de carême

    L’évangile de ce dimanche paraît composite. Il y a d’abord Jésus qui chasse un « démon muet », et se fait accuser de chasser les démons par le prince des démons. Après la réponse de Jésus, qui clôt la discussion (« Mais si c’est par le doigt de Dieu que je chasse les démons, assurément le royaume de Dieu est arrivé jusqu’à vous ») il y a la parabole de l’homme fort et du plus fort qui le vainc, avec la conclusion, ou une sentence séparée : « Celui qui n’est point avec moi est contre moi, et celui qui ne recueille pas avec moi dissipe. » Puis il y a la parabole de l’esprit impur qui, chassé de sa « maison », revient avec sept autres esprits et reprend possession de la maison. Enfin il y a l’épisode de cette femme qui dit bienheureuse la mère de Jésus, et à qui il répond que bienheureux sont plutôt ceux qui gardent sa parole.

    En fait, ce dernier passage ne doit pas être lu dans la perspective qu’on lui donne dans les fêtes de la Sainte Vierge, mais comme la conclusion de tout ce qui précède : heureux celui qui écoute et met en pratique tout cet enseignement sur le démon.

    Après l’expulsion du démon muet et la controverse qui suit, Jésus souligne qu’il est, lui seul, plus fort que le démon, alors que l’homme confiant en ses propres forces succombe. C’est au milieu de l’évangile de ce dimanche qu’il y a le « plus fort » qui vainc le « fort armé ». C’est le seul emploi du verbe “nikao” (vaincre) dans les évangiles, avec le passage de saint Jean où Jésus dit : « J’ai vaincu le monde. »

    C’est ce verbe, dans la forme qu’il a dans cet évangile, au présent, à la troisième personne du singulier : NIKA, qui figure autour de la croix sur la prosphore, le pain qui va servir à l’eucharistie dans la liturgie byzantine.

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    IS XS NIKA : Jésus-Christ vainc. Le prêtre découpe la partie où figure cette inscription, et le cube ainsi obtenu s’appelle l’Agneau : c’est ce qui deviendra le corps du Christ. Voici comment le prêtre et le diacre procède, c’est d’une grande beauté.

    Avec la lance le prêtre fait par trois fois un signe de croix sur la prosphore, en disant à chaque fois :

    En mémoire de notre Seigneur, Dieu et Sauveur Jésus-Christ.

    Et le diacre ajoute à chaque fois :

    En tout temps, maintenant et toujours et pour les siècles des siècles. Amen.

    Puis avant chacune des incisions qui suivent, le diacre élève l'orarion et dit :

    Prions le Seigneur.

    Le prêtre incise la prosphore autour de l'empreinte pour en découper, en forme de cube, la partie centrale, appelée "Agneau" : il coupe d'abord le côté droit de l'empreinte (pour le prêtre, c'est le côté gauche) en disant :

    Comme une brebis, Il a été mené à l'immolation. Is 53,7

    Il coupe ensuite le côté opposé en disant :

    Et comme un agneau sans tache, muet devant celui qui le tond, ainsi Il n'ouvre pas la bouche. cf. Is 53,7

    Il coupe le côté supérieur en disant :

    Dans son abaissement, son jugement a été rendu. (Is 53,8)

    Il coupe enfin le côté inférieur en disant :

    Et son origine, qui la dira ? Is 53,8

    Le diacre dit ensuite :

    Enlève, maître.

    Le prêtre enfonce la lance du côté gauche de la prosphore (côté droit pour le prêtre), enlève l'Agneau après l'avoir détaché de la partie inférieure de la prosphore et le met sur la patène en disant :

    Car sa vie a été enlevée de la terre. Is 53,8

    Il retourne l'Agneau et le place l'empreinte contre la patène.

    Le diacre dit :

    Immole, maître.

    Le prêtre incise assez profondément l'Agneau en forme de croix, en disant :

    Il est immolé, l'Agneau de Dieu qui prend le péché du monde pour la vie et le salut du monde. (cf. Jn 1,29)

    Ensuite il retourne l'Agneau, l'empreinte au-dessus, et le place au milieu de la patène.

    Le diacre dit :

    Transperce, maître.

    Le prêtre, au moyen de la lance, fait une incision sur le côté droit de l'Agneau (côté gauche pour le prêtre) en disant :

    L'un des soldats, de sa lance, Lui transperça le côté, et aussitôt il en jaillit du sang et de l'eau. Et celui qui l'a vu en a rendu témoignage et son témoignage est véridique. (Jn 19,34-35)

    (Cela se passe sur la table de la Prothèse avant le début de partie publique de la divine liturgie. On aura une pensée pour les sinistres "experts" qui ont supprimé l'offertoire de la messe latine parce qu'il faisait "double emploi" avec la "prière eucharistique"...)