Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Liturgie - Page 20

  • Maintenant les puissances célestes

    A la divine liturgie des dons présanctifiés, ce matin à l’église du Grand Chrysostome de Iekaterinbourg : le chant qui remplace l’hymne des chérubins lors de l’entrée des dons, qui sont déjà consacrés comme le souligne le texte.

    A 1h35’30” :

    Ны́не Си́лы Небе́сныя с на́ми неви́димо слу́жат, / се бо вхо́дит Ца́рь Сла́вы, се́ Же́ртва та́йная соверше́на дорино́сится. / - / Ве́рою и Любо́вию присту́пим, / да причастницы Жи́зни ве́чныя бу́дем. / Аллилу́иа, аллилу́иа, аллилу́иа.

    Maintenant les puissances célestes célèbrent invisiblement avec nous. Car voici que s'avance le Roi de gloire. Voici avec son escorte, le Sacrifice mystique déjà accompli.
    Approchons-nous avec foi et amour, afin de devenir participants de la vie éternelle. Alléluia, alléluia, alléluia.

    *

    Suivi à 1h40 de la Prière de saint Ephrem :

    Seigneur et Maître de ma vie, 
    l'esprit d'oisiveté, de domination, 
    de découragement et de paroles faciles, 
    éloigne de moi. (Prosternation)

    L'esprit de pureté, d'humilité,
    de patience et de charité,
    donne à ton serviteur. (Prosternation)

    Oui, Seigneur et Roi, 
    donne-moi de voir mes fautes
    et de ne pas juger mon frère, 
    car tu es béni dans les siècles des siècles. Amen.
    (Prosternation)

  • Mercredi Saint

    Capture d’écran 2024-03-26 à 14.59.53.png

    In nómine Jesu omne genu flectátur, cæléstium, terréstrium et infernórum : quia Dóminus factus est obœdiens usque ad mortem, mortem autem crucis : ideo Dóminus Iesus Christus in glória est Dei Patris.
    Dómine, exáudi oratiónem meam : et clamor meus ad te véniat.

    Qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse dans le ciel, sur la terre et dans les enfers ; car le Seigneur s’est fait obéissant jusqu’à la mort et la mort de la croix : c’est pourquoi le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de Dieu le Père.
    Seigneur, écoutez ma prière, et que mon cri parvienne jusqu’à vous.

    A la veille de la Passion, l’Église veut nous confirmer dans la foi par ce splendide cantique triomphal, afin que demain, voyant Jésus crucifié entre deux voleurs, nous nous souvenions que c’est précisément par son obéissance et son humiliation qu’il a mérité le triomphe de la résurrection et la destruction du règne de Satan. (Cardinal Schuster)

    Ce « cantique triomphal » est paradoxalement en mode 3, un mode contemplatif. La mélodie est d’abord rythmée par les finales identiques sur flectatur, infernorum et ad mortem, qui sont comme des conclusions du troisième mode à la quinte supérieure. Juste après, la mélodie descend pour la première fois à la tonique, en fait c’est une chute brutale, sur crucis, qui ne donne pas du tout l’impression d’une finale. Mais on a ensuite la belle et vraie finale développée sur Dei Patris, rappelant cette fois l’aspect contemplatif du mode.

    Fort bien chanté par Dominic Bevan, qui est ténor quand il n’est pas cantor.

  • "Voici l’Époux"

    Les matines des premiers Jours Saints sont dans la liturgie byzantine l'Office de l'Époux, en référence aux cinq vierge sages et cinq vierges folles : les premières participeront aux Noces, les autres trouveront porte close. Voici le « tropaire de l’Époux », chanté hier soir en l’église de l’Assomption de Palazzo Adriano (Sicile).

    Ἰδοὺ ὁ Νυμφίος ἔρχεται ἐν τῷ μέσῳ τῆς νυκτός, καὶ μακάριος ὁ δοῦλος, ὃν εὑρήσει γρηγοροῦντα, ἀνάξιος δὲ πάλιν, ὃν εὑρήσει ῥαθυμοῦντα. Βλέπε οὖν ψυχή μου, μὴ τῷ ὕπνῳ κατενεχθής, ἵνα μῄ τῷ θανάτῳ παραδοθῇς, καὶ τῆς βασιλείας ἔξω κλεισθῇς, ἀλλὰ ἀνάνηψον κράζουσα· Ἅγιος, Ἅγιος, Ἅγιος εἶ ὁ Θεός, διὰ τῆς Θεοτόκου ἐλέησον ἡμᾶς.

    Voici, l'Epoux arrive au milieu de la nuit. Et bienheureux le serviteur qu'Il trouvera veillant. Mais indigne celui qu'Il trouvera nonchalant. Veille donc, mon âme à ne pas sombrer dans le sommeil, afin de n'être pas livrée à la mort et enfermée hors du Royaume. Mais reviens à toi et chante : Tu es Saint, Saint, Saint, notre Dieu. Par la Mère de Dieu aie pitié de nous.

  • Mardi Saint

    ℟. Synagóga populórum circumdedérunt me : et non réddidi retribuéntibus mihi mala. * Consumétur, Dómine, nequítia peccatórum, et díriges justum.
    ℣. Júdica me, Dómine, secúndum justítiam meam, et secúndum innocéntiam meam super me.
    ℟. Consumétur, Dómine, nequítia peccatórum, et díriges justum.

    La synagogue des peuples m’a encerclé, ; et je n’ai pas rendu le mal à ceux qui m’en faisaient. La méchanceté des pécheurs sera anéantie, Seigneur, et du dirigeras le juste.
    Juge-moi, Seigneur, selon ma justice, et selon l’innocence qui est en moi.

    Tel est le troisième répons des matines de ce jour. Il vient du psaume 7 mais, comme on le voit, par bouts et dans le désordre, comme c'est souvent le cas dans la composition des anciens répons :

    8 et synagoga populorum circumdabit te :
    et propter hanc in altum regredere :
    5 si reddidi retribuentibus mihi mala,
    decidam merito ab inimicis meis inanis.
    9 Dominus judicat populos.
    Judica me, Domine, secundum justitiam meam,
    et secundum innocentiam meam super me.
    10 Consumetur nequitia peccatorum, et diriges justum,
    scrutans corda et renes, Deus.

    Dans les psaumes le mot « synagogue » est toujours (à une exception près) utilisé pour désigner l’assemblée des méchants (l’assemblée des justes se dit « ecclesia »). Le stique s’applique à l’évidence à la Passion. Dans le psaume c’est David qui s’adresse au Seigneur : « Lève-toi, Seigneur mon Dieu, suivant le précepte que tu as établi ; et la synagogue des peuples t’encerclera, à cause d’elle retourne dans les hauteurs. » Dans le répons c’est le Christ qui s’exprime, donc le pronom est mis à la première personne.

    Ensuite on prend une expression du verset 5. David (qui représente le Christ dans sa Passion) dit : « Si j’ai rendu le mal à ceux qui m’en avaient fait, que je succombe, justement et dénué de tout, devant mes ennemis. » Dans le répons la conjonction conditionnelle est supprimée : le Christ affirme simplement qu’il n'a pas rendu le mal pour le mal. C’est bien ce que dit le psaume, avec cette tournure du serment hébraïque « Qu’il m’arrive ceci et cela si… » Le répons supprime l'imprécation, qui était souvent supprimée du discours, et qui est inopportune quand c'est le Christ qui parle.

    Puis on va au verset 9, dont les stiques 2 et 3 sont repris tels quels, puis on termine par le début du verset 10, en ajoutant « Seigneur ».

    e-codices_csg-0390_172_medium.jpg

    Antiphonaire de Saint-Gall, fin du Xe siècle (le répons est le seul qui commenc par un S, un peu après la moitié de la page).

    Au moyen âge, le verset (℣.) du répons n’était pas, en général, le verset 9 du psaume 7, mais le verset 4 du psaume 3 :

    Tu autem Domine susceptor meus es, gloria mea, et exaltans caput meum.

    Mais toi Seigneur tu es mon soutien et tu élèves ma tête.

  • Lundi Saint

    « Six jours avant la Pâque, Jésus vint à Béthanie… » Ainsi commence l’évangile de la messe de ce jour, qui ouvre les jours Saints. Historiquement, l’épisode de l’onction de nard par Marie a eu lieu la veille des Rameaux. Et c’était en effet six jours avant la Pâque juive. La liturgie latine, faisant de cet épisode l’évangile de ce jour, annonce la Pâque chrétienne : la veillée pascale aura lieu dans six jours.

    Donc, six jours avant la Pâque, Marie annonce la mort du Seigneur en embaumant ses pieds par une onction de nard « pistique » : le parfum de la foi.

    Tous les manuscrits grecs ont « πιστικῆς », génitif de pisticos, et tous les manuscrits latins ont « pistici », génitif de pisticos. Or ce mot n’existe pas en latin. On a gardé le mot grec pour être sûr de ne pas mal le traduire, et pour souligner le mystère. Le mot grec vient de pistis, la foi. Pisticos, c’est ce qui relève de la foi. Le nard pistique est donc le parfum de la foi. Versé par Marie de Béthanie, il répand sa bonne odeur dans toute la maison, et dans l’évangile de saint Marc Jésus dit que partout où l’on prêchera l’Evangile on racontera ce qu’elle a fait : « in universo mundo », dans l’univers entier se répandra l’odeur de ce parfum, la foi.

    Or par sa mort le 6e jour le Seigneur nous laissera son corps et son sang sous la forme d’un sacrement de la foi.

    Voici que nous passons à un plan supérieur, par rapport au début de l’évangile de saint Jean.

    Aux noces de Cana, Jésus annonce la transsubstantiation du vin. C’est « le troisième jour », dit l’évangéliste (suggérant évidemment un autre « troisième jour »). Le jour avant ces trois jours, Jésus trouvait Philippe et Nathanaël. Le jour précédent, Pierre et André étaient déjà devenus des disciples. Le jour précédent, Jean avait baptisé Jésus et avait témoigné avoir vu l’Esprit descendre sur lui comme une colombe.

    Donc, six jours avant les noces de Cana, c’était le baptême de Jésus : l’onction du Saint-Esprit. Qui annonçait « le calice que je dois boire, le baptême dont je dois être baptisé », au sixième jour après l’onction de Béthanie. Pour recréer l’homme, qui avait été créé le sixième jour.

  • Dimanche des Rameaux

    Dans la liturgie byzantine on chante l’hirmos de lé 9e ode des matines pendant la bénédiction des Rameaux :

    Бог Госпо́дь, и яви́ся нам, / соста́вите пра́здник, / и веселя́щеся прииди́те, / возвели́чим Христа́, / с ва́иями и ве́твьми, пе́сньми зову́ще: / благослове́н Гряды́й // во и́мя Го́спода Спа́са на́шего.

    Le Seigneur est Dieu et Il nous est apparu. Célébrez la fête, venez, réjouissez-vous. Exaltons le Christ avec les rameaux et les palmes en chantant : Béni est Celui qui vient au Nom du Seigneur, notre Sauveur.

    Ici par le chœur des frères du monastère (féminin) Sainte-Elisabeth de Minsk.

    *

    Les deux tropaires et le kondak, dans l’église d’un village de Crimée, Mysovoïe, en 2019.

    О́бщее воскресе́ние/ пре́жде Твоея́ стра́сти уверя́я/ из ме́ртвых воздви́гл еси́ Ла́заря, Христе́ Бо́же./ Те́мже и мы, я́ко о́троцы побе́ды зна́мения нося́ще,/ Тебе́ Победи́телю сме́рти вопие́м:/ оса́нна в вы́шних,// благослове́н Гряды́й во и́мя Госпо́дне.

    Confirmant la Résurrection commune avant Ta Passion, Christ Dieu, Tu as relevé Lazare des morts. Et nous, portant comme les enfants les signes de la victoire, Dieu qui as vaincu la mort, nous Te disons : Hosanna au plus haut des cieux, Béni est Celui qui vient au Nom du Seigneur.

    Спогребшеся Тебе крещением, Христе Боже наш,/ безсмертныя жизни сподобихомся Воскресением Твоим,/ и воспевающе зовем:/ осанна в вышних,// благословен Грядый во имя Господне.

    Ensevelis avec Toi dans le baptême, Christ notre Dieu, rendus dignes de la vie immortelle par Ta Résurrection, nous Te chantons : Hosanna au plus haut des cieux, Béni est Celui qui vient au Nom du Seigneur.

    На престоле на небеси, на жребяти на земли носимый Христе Боже, ангелов хваление, и детей воспевание приял еси зовущих Ти: благословен еси грядый Адама воззвати.

    Ô Christ, Dieu sur le Trône dans le ciel, et porté par un petit âne sur la terre, Tu as reçu la louange des Anges et la célébration des enfants qui Te disent : Tu es béni, Toi qui viens rappeler Adam.

  • Samedi de la Passion

    « Quelques Gentils, de ceux qui étaient venus pour adorer au jour de la fête, s’approchèrent donc de Philippe, qui était de Bethsaïda, en Galilée, et le prièrent en disant : Seigneur, nous voudrions voir Jésus. Philippe alla le dire à André, et André et Philippe le dirent à Jésus ». Ecoutons ce que le Seigneur répondit à cela : voilà que les Juifs veulent le tuer, les Gentils veulent le voir ; mais ceux qui criaient : « Béni soit le roi d’Israël qui vient au nom du Seigneur », étaient aussi du nombre des Juifs. Les uns viennent de la circoncision, les autres de la gentilité, comme deux murs qui s’avancent de différents côtés et se réunissent en un baiser de paix dans l’unique foi du Christ. Ecoutons donc la voix de la pierre angulaire. « Jésus leur répondit : L’heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié. » Quelqu’un pensera peut-être que Jésus dit qu’il va être glorifié, parce que des Gentils voulaient le voir ; mais non : il voyait qu’après sa passion et sa résurrection les Gentils croiraient en lui par toute la terre ; « car, selon l’expression de l’Apôtre, une partie d’Israël est tombée dans l’aveuglement jusqu’à ce que la plénitude des Gentils entre dans l’Eglise ». A l’occasion de ces Gentils qui voulaient le voir, il annonce la future plénitude des Gentils, et il promet que déjà est proche l’heure de sa glorification, les nations devant croire en lui quand cette glorification aura eu lieu dans le ciel. C’est pourquoi il a été dit d’avance : « Mon Dieu, élevez-vous au-dessus des cieux, et que votre gloire couvre toute la terre ». Voilà la plénitude des nations, dont l’Apôtre dit : « L’aveuglement est tombé sur une partie d’Israël, jusqu’à ce que la plénitude des nations entre dans l’Église ».

    Mais comme la grandeur de sa glorification devait être précédée par les abaissements de sa passion, il ajouta ensuite : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de froment jeté en terre ne meurt pas, il demeure seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit ». C’est de lui-même qu’il parlait : il était le grain qui devait être mis à mort et se multiplier ensuite ; il devait être mis à mort par l’incrédulité des Juifs et se multiplier par la foi des peuples.

    Puis il nous exhorte à suivre les traces de sa passion : « Celui, dit-il, qui aime sa viee la perdra ». Ce qui peut s’entendre de deux manières : « Celui qui aime perdra », c’est-à-dire : Si tu aimes, perds, si tu veux conserver la vie dans le Christ, ne crains pas de mourir pour lui ; ou bien, d’une autre façon : « Celui qui aime sa vie la perdra », c’est-à-dire : n’aime pas pour ne pas perdre, n’aime pas en cette vie pour ne pas perdre en la vie éternelle. Ce dernier sens paraît mieux s’accorder avec le texte de l’Evangile ; car il ajoute : « Et celui qui hait sa vie en ce monde, la gardera pour la vie éternelle ». Donc quand il est dit plus haut : « Celui qui aime », sous-entendu en ce monde, celui-là perdra. Mais « celui qui hait en ce monde », la gardera pour la vie éternelle. Grande et étonnante sentence ! L’homme a pour sa vie un amour qui la fait périr, et une haine qui l’empêche de périr. Si tu aimes mal, tu détestes ; si tu hais de la bonne manière, tu aimes. Heureux ceux qui savent haïr pour conserver, de peur de perdre en aimant.

    Mais prends-y garde : qu’il ne te vienne pas à l’esprit de te tuer, dans la pensée que tu dois ainsi haïr ta vie en ce monde ; c’est par ce principe que quelques hommes méchants et pervers, cruels et détestables, homicides d’eux-mêmes, se jettent dans les flammes ou dans l’eau, ou dans les précipices, et se donnent la mort. Ce n’est pas là ce que le Christ nous apprend ; au contraire, lorsque le diable lui proposa de se jeter du haut en bas du temple, il lui répondit : « Retire-toi, Satan, il est écrit : Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu ». Pour annoncer à Pierre par quelle mort il devait glorifier Dieu, il lui dit : « Lorsque tu étais jeune, tu te ceignais toi-même et tu allais où tu voulais ; mais quand tu seras vieux, un autre te ceindra et te portera où tu ne veux pas ». Par là, Jésus-Christ marquait assez que celui qui veut suivre son exemple doit être tué, non pas par lui-même, mais par un autre. Si telle circonstance se présentait, où l’on serait placé dans l’alternative de faire quelque chose contre la loi de Dieu, ou de perdre la vie, et qu’un persécuteur, par ses menaces de mort, obligeât à prendre l’un des deux partis, en choisissant de mourir pour l’amour de Dieu, plutôt que de vivre en l’offensant, alors on hait son âme en ce monde, afin de la garder pour la vie éternelle.

    Saint Augustin, traité 51 sur saint Jean (8-10).

    Naturellement la soi-disant Bible de la liturgie a supprimé le verbe « haïr » qui est banni de la néo-liturgie et du néo-christianisme. Ce faisant la forte et frappante antithèse typiquement hébraïque, et donc biblique, et donc à garder impérativement, est détruite, le texte perd son balancement, et les explications des pères peuvent et doivent être mises à la poubelle…

  • Vendredi de la Passion

    Córdibus nostris, quǽsumus, Dómine, grátiam tuam benígnus infúnde : ut peccáta nostra castigatióne voluntária cohibéntes, temporáliter pótius macerémur, quam súppliciis deputémur ætérnis.

    Daignez, Seigneur, dans votre bonté, répandre votre grâce en nos cœurs ; afin que, réprimant nos péchés par les châtiments volontaires, nous souffrions des peines temporelles, plutôt que d’être condamnés aux supplices éternels.

    Cette collecte est, comme tant d’autres, celle de ce jour depuis toujours. C’est-à-dire au moins depuis saint Grégoire le Grand.

    Mais bien sûr elle a été détruite par les destructeurs de la liturgie latine. Et c’est un exemple particulièrement remarquable de la volonté d’imposer une nouvelle religion.

    Pour les fossoyeurs de la liturgie latine, une telle prière est insupportable, parce que à notre époque il est impensable de « réprimer nos péchés par une mortification volontaire » (il n’y a plus aucune contrainte de carême), et il est encore plus inacceptable de vouloir souffrir des peines temporelles plutôt que les supplices éternels : cela est contraire au nouveau dogme de l’amour inconditionnel qui fait que Dieu nous prend dans son Royaume tels que nous sommes.

    Alors, pour cette collecte qui est devenue celle du vendredi de la troisième semaine de carême, on a gardé le début, puis on a jeté tout le reste, et on l’a remplacé (selon le principe des oraisons Frankenstein) par les derniers mots d’une ancienne préface (en prenant soin de supprimer la demande que « l’observation du jeûne fasse croître les effets de notre dévotion », puisqu’il n’y a plus de jeûne et qu’il ne peut donc servir à rien) :

    Cordibus nostris, quaesumus, Domine, gratiam tuam benignus infunde, ut ab humanis semper retrahamur excessibus, et monitis inhaerere valeamus, te largiente, caelestibus.

    Répands ta grâce dans nos cœurs, Seigneur, toi qui es plein de bienveillance, pour que nous sachions toujours nous écarter des excès de la nature humaine, et que nous puissions nous attacher avec ta grâce, aux enseignements célestes.

    Dans la préface, « nous écarter des excès de la nature humaine » faisait référence à « l’observation du jeûne », qui est la première mortification volontaire du carême, mais on a supprimé le lien de façon à ce qu’il ne reste qu’une vague allusion à des « excès » non spécifiés, et qui ne sont pas considérés comme des « péchés » (mot qu’il faut éliminer) et donc qui ne peuvent pas valoir des « supplices éternels » (dont il ne faut plus parler parce que Dieu est amour inconditionnel).

    Lorsqu’on connaît la liturgie byzantine du carême, on prend encore mieux conscience du fossé qu’il y a entre cette impressionnante liturgie pénitentielle et l’anti-tradition qui fait office de liturgie latine et envoie ses adeptes aux supplices éternels s’ils n’ont pas d’antidote.

  • Jeudi de la Passion

    L'hymne des vêpres au temps de la Passion, de saint Venance Fortunat, par les maîtres de chœur réunis à Fontevraud le 29 juillet 1980, sous la direction du chanoine Jeanneteau.


    podcast

    Vexílla Regis pródeunt :
    Fulget Crucis mystérium,
    Qua vita mortem pértulit,
    Et morte vitam prótulit.

    Les étendards du Roi s’avancent :
    il resplendit le mystère de la Croix,
    sur laquelle la Vie a souffert la mort,
    et par la mort a produit la vie.

    Quæ, vulneráta lánceæ
    Mucróne diro, críminum
    Ut nos laváret sórdibus,
    Manávit unda et sánguine.

    C’est là que, transpercé du fer
    cruel d’une lance,
    son côté épancha l’eau et le sang,
    pour laver la souillure de nos crimes.

    Impléta sunt quæ cóncinit
    David fidéli cármine,
    Dicéndo natiónibus :
    Regnávit a ligno Deus.

    Il s’est accompli, l’oracle de David
    qui, dans un chant inspiré,
    avait dit aux nations :
    « Dieu régnera par le bois. »

    Arbor decóra et fúlgida,
    Ornáta Regis púrpura,
    Elécta digno stípite
    Tam sancta membra tángere.

    Tu es beau, tu es éclatant,
    arbre paré de la pourpre du Roi ;
    noble tronc appelé à l’honneur
    de toucher des membres si sacrés.

    Beáta, cujus bráchiis
    Prétium pepéndit sǽculi,
    Statéra facta córporis,
    Tulítque prædam tártari.

    Arbre bienheureux, dont les bras
    ont porté la rançon du monde !
    Tu es la balance où fut pesé ce corps,
    et tu as enlevé à l’enfer sa proie.

    O Crux, ave, spes única,
    Hoc Passiónis témpore
    Piis adáuge grátiam,
    Reísque dele crímina.

    Salut, ô Croix, unique espérance !
    En ces jours de la Passion,
    accrois la grâce chez les justes,
    efface le crime des coupables.

    Te, fons salútis, Trínitas,
    Colláudet omnis spíritus :
    Quibus Crucis victóriam
    Largíris, adde prǽmium.
    Amen.

    O Trinité, source de notre salut,
    que tous les esprits vous louent ensemble :
    vous nous donnez la victoire par la Croix :
    daignez y ajouter la récompense. Amen.

    *

    • Dans mon bréviaire c'est la fête de saint Benoît.

  • Mercredi de la Passion

    Capture d’écran 2024-02-29 à 15.27.46.png

    C’est ce jour que dans le bréviaire mozarabe, à l’heure de sexte, on trouve cette prière qui, par on ne sait quel processus, s’est retrouvée, dotée d’une mélodie et d’un refrain plus long, dans un processionnal de Paris en 1824, avant d’être popularisé par Solesmes.

    Voici cette « prose de carême », du moins ses trois premières strophes, chantée à Port-Marly le dimanche de la Passion de 1975. Le refrain glorieusement arrangé en polyphonie par le chanoine Roussel qui est à l’orgue. C’était un disque SERP, la maison fondée par un certain Jean-Marie Le Pen…


    podcast

    Attende, Domine, et miserere, quia peccavimus tibi.

    Écoute-nous, Seigneur, et prends pitié de nous, car nous avons péché contre toi.

    Ad te Rex summe, omnium Redemptor, oculos nostros sublevamus flentes ; exaudi, Christe, supplicantum preces.

    Vers toi, souverain Roi, Rédempteur de tous les hommes, nous élevons nos yeux pleins de larmes. Écoute, o Christ, nos prières suppliantes !

    Dextera Patris, lapis angularis, via salutis, janua caelestis, ablue nostri maculas delicti.

    Droite du Père, pierre angulaire, voie du salut, porte du ciel, Lave les souillures de notre péché.

    Rogamus, Deus, tuam majestatem ; auribus sacris gemitus exaudi ; crimina nostra placidus indulge.

    Nous prions, ô Dieu, ta Majesté ; que tes oreilles saintes entendent nos gémissements ; Dans ta bonté, pardonne-nous de nos crimes.

    Tibi fatemur crimina admissa ; contrito corde pandimus occulta ; tua Redemptor pietas ignoscat.

    Nous t’avouons les fautes commises ; d’un cœur contrit nous te dévoilons nos péchés ; Ô Rédempteur, que te clémence pardonne.

    Innocens captus, nec repugnans ductus, testibus falsis pro impiis damnatus ; quos redemisti, tu conserva, Christe.

    Arrêté innocent et emmené sans résistance, Tu as été condamné pour les pécheurs par de faux témoins ; Ô Christ, conserve ceux que tu as rachetés.