Des dizaines de familles de chrétiens irakiens qui avaient dû fuir Bagdad et s’étaient réfugiées au Kurdistan, près de la frontière turque, doivent fuir de nouveau, en raison de l’escalade militaire dans la région. Les Turcs ont déjà bombardé et menacent d’entrer sur le territoire irakien pour lutter contre le PKK qui y a installé ses bases arrières. La Turquie et l’Irak ont signé au début du mois un accord de coopération contre les rebelles kurdes de Turquie installés en Irak, mais le gouvernement irakien n’a évidemment pas les moyens de persuader les Kurdes irakiens (qui sont en fait indépendants) de lutter contre le PKK. Et le président irakien Talabani, qui est l’un des deux grands chefs kurdes, est muet sur la question. Il est vrai qu’il est le chef de l’autre partie du Kurdistan, du côté de l’Iran. Quant à l'autre chef kurde, Barzani, celui de la partie frontalière avec la Turquie, il est le président du Kurdistan autonome...
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Irak : l’exode sans fin des chrétiens
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Irak : une télévision d’Etat islamique
La télévision d’Etat irakienne, Al Iraqiya, va lancer le mois prochain une chaîne islamique, Al Furkan (c’est le titre de la 25e sourate, dont le premier verset dit que le Coran est le Livre de discernement). Elle diffusera d’abord six heures par jour, puis 24 heures sur 24, la récitation du Coran.
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Bagdad toujours sans électricité
Le ministre irakien de la production électrique a reçu les journalistes dans son bureau climatisé de la zone verte (le gigantesque bunker américain de Bagdad). Il leur a déclaré : « Nous ne pouvons couvrir que 20 à 40% des besoins de Bagdad, et il faudra encore trois ou quatre ans pour que le réseau soit opérationnel. »
On ne peut pas dire que ce soit un scoop. Le courant électrique n’est disponible à Bagdad que pendant deux à quatre heures par jour, et encore pas dans tous les quartiers, et cela dure depuis l’invasion du pays, quand les Américains ont sciemment bombardé la centrale qui alimentait la capitale.
Bien sûr, c’est la faute aux « insurgés », qui sabotent à tour de bras et empêchent ensuite les réparations. « Il y a deux semaines, six de nos ingénieurs ont été tués », dit-il. Cette semaine, il a tenté d’envoyer une équipe réparer une ligne à haute tension. « Nous avions des forces de la coalition, des unités irakiennes et même des hélicoptères pour les accompagner sur le site, mais ils ont refusé. »
Voilà qui donne une idée de la situation concrète (qui s’améliore, comme disent sans cesse les Américains).
Le ministre espère beaucoup de sa commande de 44 générateurs qui doivent arriver de Corée du sud. Mais il faudra cinq mois pour qu’ils arrivent. Ensuite il faudra les installer... et ensuite il faudra trouver du diesel, carburant devenu rare dans le pays (sic).
Pendant ce temps-là, les habitants de Bagdad se débrouillent comme ils peuvent, avec pour les plus débrouillards et les plus riches des générateurs qui leur permettent de faire fonctionner pendant quelques heures un réfrigérateur ou un ventilateur, tandis que la température frôle souvent les 50 degrés...
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Kouchner à Bagdad
Bernard Kouchner a entamé hier une « visite surprise » de trois jours en Irak. C’est le plus haut responsable français à se rendre dans ce pays depuis l’invasion américaine, et cela se produit quelques jours après la rencontre entre Nicolas Sarkozy et George Bush.
Et voici ce qu’il a dit à la presse, à propos de la guerre civile qui fait rage, plus de quatre ans après la chute de Saddam Hussein : « C’est un problème irakien et il doit être réglé par les Irakiens. Mais ne soyez pas pressés. Il faut donner du temps au temps. C’est juste le début, j’espère, de la fin de la crise. »
Sic.
Et voici aussi ce qu’il a dit, de même, à propos de sa méthode :
« Ma méthode est d’attendre. D’abord écouter les gens. Nous essayons de vous écouter, et vous nous écoutez. Nous devons jouer nos cartes, et notre rôle. Mais pas aujourd’hui, ni demain, mais un de ces jours. »
Sic.
Le porte-parole de la Maison Blanche pour les questions de sécurité nationale a déclaré : « les Etats-Unis se félicitent de la visite du ministre français des Affaires étrangères Kouchner à Bagdad. C’est un exemple de plus (...) de la volonté croissante de la communauté internationale d’aider l’Irak à devenir un Etat stable et sûr. »
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Irak : la tragédie des yezidis
Plus de 400 personnes ont été tuées et plusieurs centaines d'autres blessées dans des attentats au camion piégé dans le nord de l’Irak. C’est de loin l'attaque la plus meurtrière depuis la chute de Saddam Hussein.
Les attentats visaient deux villages yezidis qui ont été dévastés par les explosions.
C’est un nouvel épisode de la guerre civile tous azimuts qui déchire l’Irak. Il était facile de condamner la dictature de Saddam Hussein, et d’envahir le pays. Il était illusoire, et pour tout dire criminel, de prétendre instaurer en quelques mois une démocratie exemplaire dans un pays divisé en communautés antagonistes et qui allait fatalement devenir le plus grand foyer mondial du terrorisme islamique.
Pour les sunnites les yezidis sont d’immondes hérétiques, des « adorateurs du diable », plus « impurs » encore que les juifs.
Comme il en est pour d’autres communautés de ce type (les Druzes, les Alaouites...), personne ne connaît vraiment la religion des yezidis, qui forment une société fermée, divisée en castes hermétiques.
Ce que l’on sait d’à peu près sûr est qu’ils pensent que Dieu est tellement transcendant qu’il ne s’occupe pas de sa création, confiée à sept anges qui sont en relation avec les hommes, le principal étant « l’Ange-Paon ». Le paon étant lié à la lumière, l’Ange-Paon peut être assimilé à Lucifer (l’ange porteur de lumière), si l’on se reporte à une controverse médiévale dans l’islam sunnite, mais, en l’espèce, il n’est en aucune manière diabolique : certains théologiens avaient énoncé l’hypothèse que Iblis (nom de Lucifer dans le Coran) était en réalité le plus « musulman » des anges, le plus « monothéiste », le seul véritable adorateur de Dieu, car selon le Coran Iblis et ses affidés firent défection quand Dieu demanda aux anges de se prosterner devant Adam, son chef-d’œuvre. Les « mauvais » anges, sous la conduite d’Iblis, étaient donc les bons, puisqu’ils refusaient d’adorer une créature...
Quoi qu’il en soit, le yezidisme est un inextricable syncrétisme où se mêlent les anciennes religions perses (zoroastrisme, mazdéisme), l’islam sunnite, le christianisme nestorien, le judaïsme, etc. « Quelques experts nous qualifient de musée des religions orientales, parce que vous retrouvez toutes les religions dans le yezidisme », disait l’an dernier à l’AFP un journaliste travaillant pour le centre culturel yezidi de Dohouk.
Les yezidis, dont on ne connaît pas le nombre (peut-être autour de 100.000 personnes en Irak) sont aujourd’hui coincés entre les extrémistes sunnites qui veulent les éradiquer, et les politiciens kurdes qui veulent les rallier à leur cause, notamment pour établir la ville multi-ethnique de Mossoul comme « kurde ».
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Irak : les Américains arment les rebelles
Selon une étude de la cour des comptes attachée au Congrès américain, le Pentagone a perdu la trace de 110.000 fusils automatiques, 80.000 pistolets, 135.000 gilets pare-balles et 115.000 casques censés avoir été livrés à la police et à l’armée irakiennes en 2004 et 2005. Et cela continue manifestement en 2007, s’alarme cet organisme.
Les 190.000 pistolets et fusils constituent 54 % des armes remises aux « autorités » irakiennes à la date du 22 septembre 2005.
Il n’est pas besoin d’être devin pour comprendre qu’une partie au moins de cet armement va directement aux insurgés, et que les armes fournies par les Américains servent donc à combattre les Américains.
Ce qu’a confirmé un haut responsable du Pentagone, rappelant qu’en 2004, toute une brigade de l’armée irakienne mise sur pied à Fallouja s’était désintégrée pour ensuite prendre les armes contre les forces américaines.
Le Pentagone vient de réclamer une rallonge de deux milliards de dollars pour former et équiper l’armée irakienne...
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Les enfants irakiens
Un journaliste a demandé, une fois de plus, à un responsable de l’Unicef quelle est la situation des enfants aujourd’hui en Irak par rapport à ce qu’elle était sous Saddam Hussein. Réponse de Dan Toole, vice-directeur exécutif : « Je n’ai aucun doute sur le fait que les conditions aujourd’hui sont bien pires. » Et d’abord pour les millions d’enfants qui ont dû fuir le pays. Sur place, les hommes étant tués, le nombre de foyers tenus par des femmes a augmenté « dramatiquement ». « Beaucoup de ces femmes sont trop effrayées pour amener leurs enfants à l’hôpital ou les envoyer à l’école. » Il a dit aussi : « Je suis préoccupé parce que l’attention sur l’Irak se focalise sur la situation politique et sécuritaire, et non sur la vie quotidienne des Irakiens, avec son lot de privations, de manque de nourriture, de manque de biens médicaux. »
Rappelons que c’est l’Unicef qui avait estimé que l’embargo américain entre les deux guerres du Golfe avait causé la mort d’1,5 million d’enfants en Irak.
Et qu’avant ces guerres l’Irak était le pays le plus avancé de la région en matière de soins aux enfants et d’éducation.
Mais aujourd’hui l’Irak est libéré de Saddam Hussein, et c’est un grand progrès des droits de l’homme.
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Les Saoudiens en Irak
Selon le Los Angeles Times citant un haut gradé américain anonyme et des parlementaires irakiens, la majorité des combattants étrangers en Irak sont saoudiens, et non syriens ou iraniens comme le gouvernement américain le prétend. 45% des combattants étrangers repérés par l’armée américaine seraient saoudiens, 15% syriens ou libanais, 10% d’Afrique du Nord. Ce qui correspond aux chiffres officiels de l’armée selon lesquels près de la moitié des étrangers détenus dans les prisons américaines en Irak sont saoudiens. Le haut gradé anonyme ajoute que 50% des Saoudiens en question viennent en Irak pour commettre des attentats suicide.
Le Los Angeles Times explique naïvement que l’Arabie saoudite, ce grand et fidèle allié des Etats-Unis dans la guerre contre le terrorisme, n’arrive pas à empêcher ses ressortissants de se rendre en Irak...
Cela confirme en réalité les informations selon lesquelles l’Irak est devenu un champ de bataille entre l’Arabie saoudite wahhabite et l’Iran chiite. (La différence entre les deux étant que l’Arabie saoudite doit envoyer des hommes pour prêter main forte aux insurgés sunnites minoritaires, tandis que l’Iran peut se contenter de fournir des armes aux chiites majoritaires.)
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Zone protégée...
Trois personnes, dont un soldat américain, ont été tuées, et 18 autres blessées, par des obus de mortier dans la « zone verte » de Bagdad. Il n’est plus rare désormais que des obus de mortier tombent dans cette zone, ultra-protégée, qui abrite les institutions irakiennes et le commandement américain. Les Américains l’on reconnu quand ils ont accusé l’Iran de fabriquer un grand nombre des obus et roquettes qui s’abattent sur la zone...
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Enfin les évêques français évoquent le martyre irakien
Le cardinal Ricard publie le message qu’il envoie au patriarche chaldéen, pour témoigner de la solidarité des évêques de France avec les chrétiens d’Irak. Enfin. Il y a quelques semaines, lors de la messe annuelle de l’œuvre d’Orient, Mgr Vingt-Trois avait réussi à ne même pas citer l’Irak dans son homélie…
Extraits :
« Les nouvelles qui nous parviennent d’Irak, jour après jour, manifestent l’extension de la violence armée avec son cortège de meurtres, de souffrances, de drames humains. Toute la population est ainsi victime de cette situation dramatique, mais celle des chrétiens l’est tout particulièrement. (…) Les catholiques de France se sentent particulièrement concernés par la situation de leurs frères irakiens, membres du même corps du Christ.
Nous assurons Sa Béatitude Emmanuel III Delly, patriarche de Babylone des Chaldéens, de notre profonde solidarité dans l’épreuve. Nous exhortons la communauté des nations et les gouvernements responsables à agir avec détermination pour arrêter la violence et assurer la paix civile en Irak. Nous implorons le Dieu de Paix et de Justice pour que la conscience de chacun soit interpellée, pour que des actions courageuses soient entreprises par les responsables politiques et religieux et que la force de l’amour du Christ puisse toujours habiter le cœur de ses fidèles. »Le texte intégral est publié sur le site de la conférence épiscopale.