Sainte Claire et ses sœurs, oratoire de sainte Claire, église de Saint-Damien, Assise.
Après avoir passé une période de quelques mois auprès d’autres communautés monastiques, résistant aux pressions de sa famille qui au début, n’approuvait pas son choix, Claire s’établit avec ses premières compagnes dans l’église Saint-Damien où les frères mineurs avaient préparé un petit couvent pour elles. Elle vécut dans ce monastère pendant plus de quarante ans, jusqu’à sa mort, survenue en 1253. Une description directe nous est parvenue de la façon dont vivaient ces femmes au cours de ces années, au début du mouvement franciscain. Il s’agit du compte-rendu admiratif d’un évêque flamand en visite en Italie, Jacques de Vitry, qui affirme avoir trouvé un grand nombre d’hommes et de femmes, de toute origine sociale, qui « ayant quitté toute chose pour le Christ, fuyaient le monde. Ils s’appelaient frères mineurs et sœurs mineures et sont tenus en grande estime par Monsieur le Pape et par les cardinaux... Les femmes... demeurent ensemble dans divers hospices non loin des villes. Elles ne reçoivent rien, mais vivent du travail de leurs mains. Et elles sont profondément attristées et troublées, car elles sont honorées plus qu’elles ne le voudraient, par les prêtres et les laïcs. »
Jacques de Vitry avait saisi avec une grande perspicacité un trait caractéristique de la spiritualité franciscaine à laquelle Claire fut très sensible : la radicalité de la pauvreté associée à la confiance totale dans la Providence divine. C'est pour cette raison qu'elle agit avec une grande détermination, en obtenant du Pape Grégoire IX ou, probablement déjà du Pape Innocent III, celui que l’on appela le Privilegium Paupertatis. Sur la base de celui-ci, Claire et ses compagnes de Saint-Damien ne pouvaient posséder aucune propriété matérielle. Il s'agissait d'une exception véritablement extraordinaire par rapport au droit canonique en vigueur et les autorités ecclésiastiques de cette époque le concédèrent en appréciant les fruits de sainteté évangélique qu’elles reconnaissaient dans le mode de vie de Claire et de ses consœurs. Cela montre que même au cours des siècles du Moyen âge, le rôle des femmes n'était pas secondaire, mais considérable. A cet égard, il est bon de rappeler que Claire a été la première femme dans l'histoire de l'Eglise à avoir rédigé une Règle écrite, soumise à l'approbation du Pape, pour que le charisme de François d'Assise fût conservé dans toutes les communautés féminines qui étaient fondées de plus en plus nombreuses déjà de son temps et qui désiraient s'inspirer de l'exemple de François et de Claire.
Dans le couvent de Saint-Damien, Claire pratiqua de manière héroïque les vertus qui devraient distinguer chaque chrétien : l'humilité, l'esprit de piété et de pénitence, la charité. Bien qu'étant la supérieure, elle voulait servir personnellement les sœurs malades, en s'imposant aussi des tâches très humbles : la charité en effet, surmonte toute résistance et celui qui aime accomplit tous les sacrifices avec joie. Sa foi dans la présence réelle de l'Eucharistie était si grande que, par deux fois, un fait prodigieux se réalisa. Par la seule ostension du Très Saint Sacrement, elle éloigna les soldats mercenaires sarrasins, qui étaient sur le point d'agresser le couvent de Saint-Damien et de dévaster la ville d'Assise.
Ces épisodes aussi, comme d'autres miracles, dont est conservée la mémoire, poussèrent le Pape Alexandre IV à la canoniser deux années seulement après sa mort, en 1255, traçant un éloge dans la Bulle de canonisation, où nous lisons : « Comme est vive la puissance de cette lumière et comme est forte la clarté de cette source lumineuse. Vraiment, cette lumière se tenait cachée dans la retraite de la vie de clôture et dehors rayonnaient des éclats lumineux ; elle se recueillait dans un étroit monastère, et dehors elle se diffusait dans la grandeur du monde. Elle se protégeait à l'intérieur et elle se répandait à l'extérieur. Claire en effet, se cachait : mais sa vie était révélée à tous. Claire se taisait mais sa renommée criait. » Et il en est véritablement ainsi, chers amis : ce sont les saints qui changent le monde en mieux, le transforment de manière durable, en insufflant les énergies que seul l'amour inspiré par l'Evangile peut susciter. Les saints sont les grands bienfaiteurs de l'humanité !
Benoît XVI, catéchèse du 15 septembre 2010.