Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Liturgie

  • Saint Augustin

    Les trois étapes de la conversion de saint Augustin, un modèle pour chaque être humain. Cinquième et dernière catéchèse de Benoît XVI sur saint Augustin, le 27 février 2008.

    Saint Augustin a été un chercheur passionné de la vérité : il l’a été dès le début et ensuite pendant toute sa vie. La première étape de son chemin de conversion s’est précisément réalisée dans l’approche progressive du christianisme. En réalité, il avait reçu de sa mère Monique, à laquelle il resta toujours très lié, une éducation chrétienne et, bien qu’il ait vécu pendant ses années de jeunesse une vie dissipée, il ressentit toujours une profonde attraction pour le Christ, ayant bu l’amour pour le nom du Seigneur avec le lait maternel, comme il le souligne lui-même. Mais la philosophie également, en particulier d’inspiration platonicienne, avait également contribué à le rapprocher ultérieurement du Christ en lui manifestant l’existence du Logos, la raison créatrice. Les livres des philosophes lui indiquaient qu’il y d’abord la raison, dont vient ensuite tout le monde, mais ils ne lui disaient pas comment rejoindre ce Logos, qui semblait si loin. Seule la lecture des lettres de saint Paul, dans la foi de l’Église catholique, lui révéla pleinement la vérité. Cette expérience fut synthétisée par Augustin dans l’une des pages les plus célèbres de ses Confessions : il raconte que, dans le tourment de ses réflexions, s’étant retiré dans un jardin, il entendit à l’improviste une voix d’enfant qui répétait une cantilène, jamais entendue auparavant : tolle, lege, tolle, lege, "prends, lis, prends, lis". Il se rappela alors de la conversion d’Antoine, père du monachisme, et avec attention il revint au codex de Paul qu’il tenait quelques instants auparavant entre les mains, il l’ouvrit et son regard tomba sur la lettre aux Romains, où l’Apôtre exhorte à abandonner les œuvres de la chair et à se revêtir du Christ. Il avait compris que cette parole, à ce moment, lui était personnellement adressée, provenait de Dieu à travers l’Apôtre et lui indiquait ce qu’il fallait faire à ce moment. Il sentit ainsi se dissiper les ténèbres du doute et il se retrouva finalement libre de se donner entièrement au Christ : "Tu avais converti mon être à toi", commente-t-il. Ce fut la première conversion décisive.

    Le rhéteur africain arriva à cette étape fondamentale de son long chemin grâce à sa passion pour l’homme et pour la vérité, passion qui le mena à chercher Dieu, grand et inaccessible. La foi en Christ lui fit comprendre que le Dieu, apparemment si lointain, en réalité ne l’était pas. En effet, il s’était fait proche de nous, devenant l’un de nous. C’est dans ce sens que la foi en Christ a porté à son accomplissement la longue recherche d’Augustin sur le chemin de la vérité. Seul un Dieu qui s’est fait "tangible", l’un de nous, était finalement un Dieu que l’on pouvait prier, pour lequel et avec lequel on pouvait vivre. Il s’agit d’une voie à parcourir avec courage et en même temps avec humilité, en étant ouvert à une purification permanente dont chacun de nous a toujours besoin. Mais avec cette Veillée pascale de 387, comme nous l’avons dit, le chemin d’Augustin n’était pas conclu. De retour en Afrique et ayant fondé un petit monastère, il s’y retira avec quelques amis pour se consacrer à la vie contemplative et à l’étude. C’était le rêve de sa vie. A présent, il était appelé à vivre totalement pour la vérité, avec la vérité, dans l’amitié du Christ qui est la vérité. Un beau rêve qui dura trois ans, jusqu’à ce qu’il soit, malgré lui, consacré prêtre à Hippone et destiné à servir les fidèles, en continuant certes à vivre avec le Christ et pour le Christ, mais au service de tous. Cela lui était très difficile, mais il comprit dès le début que ce n’est qu’en vivant pour les autres, et pas seulement pour sa contemplation privée, qu’il pouvait réellement vivre avec le Christ et pour le Christ. Ainsi, renonçant à une vie uniquement de méditation, Augustin apprit, souvent avec difficulté, à mettre à disposition le fruit de son intelligence au bénéfice des autres. Il apprit à communiquer sa foi aux personnes simples et à vivre ainsi pour elles, dans ce qui devint sa ville, accomplissant sans se lasser une activité généreuse et difficile, qu’il décrit ainsi dans l’un de ses très beaux sermons : "Sans cesse prêcher, discuter, reprendre, édifier, être à la disposition de tous - c’est une lourde charge, un grand poids, une immense fatigue." Mais il prit ce poids sur lui, comprenant que précisément ainsi il pouvait être plus proche du Christ. Comprendre que l’on arrive aux autres avec simplicité et humilité, telle fut sa véritable deuxième conversion.

    Mais il y a une dernière étape du chemin d’Augustin, une troisième conversion : celle qui le mena chaque jour de sa vie à demander pardon à Dieu. Il avait tout d’abord pensé qu’une fois baptisé, dans la vie de communion avec le Christ, dans les Sacrements, dans la célébration de l’Eucharistie, il serait arrivé à la vie proposée par le Discours sur la montagne : à la perfection donnée dans le baptême et reconfirmée dans l’Eucharistie. Dans la dernière partie de sa vie, il comprit que ce qu’il avait dit dans ses premières prédications sur le Discours de la montagne - c’est-à-dire ce que nous à présent, en tant que chrétiens, nous vivons constamment cet idéal - était erroné. Seul le Christ lui-même réalise vraiment et complètement le Discours de la montagne. Nous avons toujours besoin d’être lavés par le Christ, qu’il nous lave les pieds et qu’il nous renouvelle. Nous avons besoin d’une conversion permanente. Jusqu’à la fin nous avons besoin de cette humilité qui reconnaît que nous sommes des pécheurs en chemin, jusqu’à ce que le Seigneur nous donne la main définitivement et nous introduise dans la vie éternelle. Augustin est mort dans cette dernière attitude d’humilité, vécue jour après jour.

  • Saint Joseph Calasanz

    170255673_2566840596955071_6949747326960082131_n.jpg

    La congrégation fondée au début du XVIIe siècle à Rome par saint Joseph Calasanz pour l’enseignement gratuit des enfants pauvres s’appelle précisément « Ordre des Pauvres Clercs réguliers des Écoles pies de la Mère de Dieu ». Ces clercs sont appelés « piaristes ».

    Leur blason remonte aux origines de l’ordre. On remarque qu’il est entièrement marial, et doublement marial, avec le monogramme Ave Maria couronné, et l’abréviation de "Mère de Dieu" qu’on trouve sur les icônes : ΜΡ ΘΥ. Comme si Joseph Calasanz avait voulu unir les Eglises d’Orient et d’Occident, ce qui n’est pas banal à cette époque, et surtout n’a a priori aucun rapport direct avec la vocation de la congrégation. Et l'expression "Mère de Dieu" dans l'intitulé de la congrégation est elle-même étonnante, à une époque où en Occident on dit surtout "la Sainte Vierge". Je n’ai rien trouvé à ce sujet sur internet.

    il_1588xN.4050659657_32rn.jpg

  • De la férie

    Dans le martyrologe romain on trouve aujourd’hui, en septième position :

    A Nicomédie, la passion de saint Adrien, fils de l'empereur Probus. Pour avoir reproché à Licinius la persécution déchaînée contre les chrétiens, il fut tué par ordre de cet empereur. Son oncle Domice, évêque de Byzance, fit inhumer son corps dans le faubourg de la ville appelé Argyropolis.

    L’empereur Probus régna vers la fin de ce qu’on a appelé « la petite paix de l’Eglise », entre 260 (Gallien) et 303 (Dioclétien).

    On trouve aussi cet Adrien ce jour dans le calendrier byzantin : "saint martyr Adrien le Prince" :

    Il était, dit-on, fils de l’empereur romain Probus (276-282). Il vivait à Byzance avec son oncle Dométios, qui devint évêque de la ville après Tite. Converti au christianisme après la mort de son père, il désirait ardemment souffrir le martyre pour parvenir à la perfection. C’est dans ce but qu’il se rendit à Nicomédie, pour y trouver l’empereur Licinius et le blâmer des persécutions qu’il infligeait aux chrétiens. Après avoir confessé sa foi, il fut soumis à la torture et gagna finalement la couronne du martyre en étant décapité. Par la suite, saint Métrophane transféra sa précieuse relique à Argyropolis et la déposa près de celles d’Adrien et de Nathalie, et du saint apôtre Stachys.

    Mais il est en deuxième position. Le saint commémoré ce jour par la liturgie byzantine est un autre Adrien, martyr lui aussi à Nicomédie, mais de la persécution de Maximien, en 305, donc un peu avant (Licinius a régné de 308 à 324).

  • A Akoulinino

    main3.jpeg

    Capture d’écran 2024-08-25 à 15.23.28.jpg

    Capture d’écran 2024-08-25 à 15.25.04.jpg

    Soyouz TV retransmettait ce matin la divine liturgie d’Akoulinino, pour la grande consécration de la nouvelle église par le patriarche Cyrille. Il n’est pas facile de trouver Akoulinino sur une carte : c’est un hameau à quelque 50 km au sud de Moscou. Il y eut bien une chapelle en bois au XVIIe siècle, puis en pierre, construite au siècle suivant par les princes Obolenski, et entièrement détruite sous le bolchevisme.

    En 1995 il y avait huit maisons.

    Pourtant en 2018 le patriarche a béni un projet d’église, construite à partir de 2021.

    Une grande église. On comprend mieux quand on sait que le hameau est le lieu de résidence de l’oligarque Vladimir Iakounine. C’est l’ineffable et regretté Navalny qui avait « révélé » et dénoncé en 2013 l’existence à Akoulinino de la datcha de « 75 millions de dollars » de Iakounine (57 millions d’euros selon Wikipedia), avec sa piscine, son sauna, et sa salle de prière climatisée pour les icônes et les livres précieux.

    Iakounine, qui a été notamment président des chemins de fer russes et de l’Union mondiale des chemins de fer, est le président de la Fondation Saint-André qui fait la promotion de la famille et des valeurs traditionnelles, et il est derrière la Fondation Déploie tes ailes qui vient en aide aux enfants handicapés, malades et orphelins. Il est aussi doyen du département des politiques publiques à la faculté des sciences politiques de l'université de Moscou, président du conseil d’administration de l’Institut de recherche Dialogue des civilisations (Forum de Rhodes), et il a été coprésident avec Thierry Mariani de l’association Dialogue franco-russe (c’est pourquoi il a la Légion d’honneur).

    Il n’est dit nulle part que c’est lui qui a financé cette nouvelle église Saint-Michel d’Akoulinino. Mais cela paraît évident. D’ailleurs on le voit au premier rang pendant presque toute la cérémonie.

    Le curé, le Père Sérapion, est un moine de la Trinité-Saint-Serge (originaire… d’Estonie), qui dit joliment : « La construction de l’église dans le village d'Akoulinino à notre époque est la restauration de la justice historique et de la connexion sacrée des temps. »

  • 14e dimanche après la Pentecôte

    Ce dimanche s’appelait autrefois : Dominica Providentiae, le dimanche de la Providence, à cause du bel Évangile qui nous parle de la bonté paternelle de Dieu. Puisse cette belle formule nous accompagner toute la semaine ! Nous trouvons encore aujourd’hui, dans les deux lectures, l’antithèse aimée des deux royaumes : ici, le royaume de la chair, de Mammon ; là, le royaume de l’esprit, le royaume de Dieu (Ép. et Év.). Les conséquences que nous devons tirer de ces images opposées sont claires. Attachons-nous de toute notre âme à Dieu. Le leitmotiv de la semaine est cette phrase : « Cherchez d’abord le royaume de Dieu ; tout le reste vous sera donné par surcroît » (Év., Comm.). Ce verset termine aussi l’office des Heures du jour (Ant. Magn.). Au début du jour, nous avons entendu cette parole consolante du Christ : « Ne soyez pas en souci et ne demandez pas : Que mangerons-nous et que boirons-nous ? Car votre Père sait que vous avez besoin de cela, Alléluia ».

    Dom Pius Parsch

    3738005466.png


    podcast

    Primum quǽrite regnum Dei, et ómnia adjiciéntur vobis, dicit Dóminus.

    D’abord, cherchez le Royaume de Dieu, et tout vous sera ajouté, dit le Seigneur.

    Avec les deux premiers versets du psaume 36 :

    Noli aemulari in malignantibus,
    neque zelaveris facientes iniquitatem:

    Ne porte pas envie aux méchants, et ne sois pas jaloux de ceux qui commettent l’iniquité ; 

    quoniam tamquam foenum velociter arescent,
    et quemadmodum olera herbarum cito decident.

    car ils se dessécheront aussi vite que le foin, et, comme les tiges des légumes ils se faneront promptement.

    (Par la schola et l'école de la Vallée de Los Caidos, 1986.)

  • Saint Barthélemy

    Andrea_da_Firenze_-_Saint_Bartholomew_-_Google_Art_Project-1.jpg

    Andrea di Bonaiuto, 1367 (musée de Houston).

    Commentaire de l’évangile (Luc 6, 12-19) par saint Ambroise (leçons des matines au troisième nocturne).

    Ce sont les grandes âmes, les âmes sublimes qui gravissent la montagne. Car le Prophète ne dit pas au premier venu : « Monte sur une haute montagne, toi qui évangélises Sion ; élève ta voix avec force, toi qui évangélises Jérusalem. » Efforcez-vous, non de vos pieds corporels, mais par de grandes actions, de gravir cette montagne et de suivre Jésus-Christ, afin de pouvoir être aussi vous-même une montagne. Car, parcourez l’Évangile, et vous trouverez que les disciples furent les seuls à monter avec lui sur la montagne. Le Seigneur prie donc, non pour lui, mais pour moi. Car bien que le Père ait tout remis en la puissance du Fils, néanmoins le Fils, pour remplir son rôle d’homme, juge qu’il doit prier pour nous son Père, parce qu’il est notre avocat.

    « Et il passa, dit le texte, toute la nuit à prier Dieu. » C’est un exemple qui vous est donné, ô Chrétien, c’est un modèle qu’on vous prescrit d’imiter. Car, que ne devez-vous pas faire pour votre salut, quand le Christ passa toute la nuit à prier pour vous ? Qu’est-il convenable que vous fassiez, ayant quelque œuvre de piété à entreprendre, puisque le Christ, avant que d’envoyer en mission ses Apôtres, se mit en prière, et pria seul ? Et on ne voit pas ailleurs, ce me semble, qu’il ait prié avec ses Apôtres. Partout il est seul à prier. C’est que les désirs des hommes ne comprennent pas les desseins de Dieu, et personne ne peut pénétrer dans l’intérieur de Jésus-Christ.

    « Il appela ses disciples, dit le texte, et il choisit douze d’entre eux, » qu’il destinait à procurer aux hommes le secours du salut dans tout l’univers, en y répandant la semence de la foi. Remarquez en même temps l’économie du plan céleste. Ce ne sont ni des savants, ni des riches, ni des nobles, mais des pêcheurs et des publicains qu’il a choisis pour cette mission : de peur qu’il ne semblât avoir usé auprès de quelques âmes, soit des artifices de la prudence pour les séduire, soit des richesses pour les acheter, soit de l’autorité du pouvoir et du prestige de la noblesse pour les amener à sa grâce : le Sauveur voulait que ce soit l’empire de la vérité, et non la force de l’éloquence, qui triomphât des esprits.

    La citation du « Prophète » est du chapitre 40 d’Isaïe :

    Ascénde in montem excélsum, qui evangelízas Sion : exálta in virtúte vocem tuam, qui evangelízas Jerúsalem.

    Le texte de saint Ambroise est très proche de celui de la Vulgate, qui ne sera publié que quelques années plus tard :

    Super montem excelsum ascende tu qui evangelizas Sion, exalta in fortitudine vocem tuam qui evangelizas Jerusalem.

    Cette phrase se trouve également dans un répons de l’Avent, comme d’autres expressions de ce très messianique chapitre 40 d’Isaïe (où se trouve aussi la prophétie de saint Jean Baptiste : « Voix de celui qui crie dans le désert », etc.).

  • Saint Philippe Béniti

    Philippe Béniti ou Benizi eut pour patrie Florence, et sortait de la noble maison de Benizi, établie dans cette ville. Ses parents, qui avaient une grande piété, eurent un soin extrême de bien élever leur fils. La grâce seconda leurs vues, et le jeune Philippe, après avoir préservé son âme de la corruption du monde, s'établit solidement dans la crainte de Dieu. Lorsqu'il eut achevé son cours d'humanité dans sa patrie, il vint à Paris pour y étudier la médecine, et ce fut par un motif de charité qu'il voulut s'appliquer à cette science. Galien, tout païen qu'il était, en lui détaillant les effets merveilleux de la nature, le portait continuellement à s'élever vers Dieu, qui en est l'auteur, à le bénir et à l'adorer. De Paris, ses parents le firent venir à Padoue; il y continua les mêmes études et y prit le grade de docteur.

    De retour à Florence, il prit quelque temps pour délibérer sur le genre de vie qu'il devait embrasser, et pria le ciel avec ferveur de lui faire connaître la route qu'il devait suivre pour accomplir parfaitement la volonté divine. Il y avait quinze ans que l'ordre des serviteurs de la vierge Marie, autrement appelés Servites, avait été institué. Leur supérieur, Bonfiglio Monaldi, à la prière de quelques personnes de piété, fonda près d'une des portes de Florence un petit couvent avec une chapelle dédiée sous le titre d'Annonciation de la sainte Vierge. Philippe Béniti étant entré dans cette chapelle pour y entendre la messe, le jeudi de la semaine de Pâques, fut singulièrement frappé à la lecture de ces paroles de l'épître, adressées par l'Esprit Saint au diacre Philippe : Avancez et approchez-vous de ce chariot. Comme il portait le nom de Philippe, il s'appliqua ce texte de l'Ecriture, et il crut que c'était une invitation que lui faisait le Saint-Esprit de se mettre sous la protection de la Mère de Dieu dans le nouvel ordre.

    La nuit suivante, il eut un songe mystérieux, où il s'imaginait être dans un vaste désert rempli de précipices, de rochers, d'épines, de pièges et de serpents venimeux, en sorte qu'il ne voyait pas le moyen d'échapper à tant de dangers. Pendant qu'il était dans la crainte et la consternation, il crut voir la sainte Vierge qui l'invitait à entrer dans le nouvel ordre, comme dans un lieu de refuge. Le lendemain matin, il réfléchit sérieusement à ce qui lui était arrivé. Il reconnut sans peine que cet affreux désert était le monde, et qu'il fallait une vigilance extrême et une grâce extraordinaire pour en éviter les écueils. Il se persuada donc que Dieu l'appelait dans l'ordre des Servites et qu'il lui offrait la protection de la sainte Vierge, comme un asile assuré. Il alla trouver le bienheureux père Bonfiglio, qui lui donna l'habit dans la petite chapelle où il avait entendu la messe. Il demanda par humilité à être reçu en qualité de frère convers. Ayant fait sa profession le 8 septembre 1233, il fut envoyé, par son supérieur au mont Senario, pour y être occupé aux divers travaux de la campagne. Il les offrit à Dieu en esprit de pénitence et y joignit le recueillement le plus parfait. Lorsqu'il était libre, il se renfermait dans une petite grotte située derrière l'église, pour y vaquer à l'exercice de la prière. Les délices célestes qu'il y goûtait lui faisaient souvent oublier le soin de son propre corps.

    Il cachait avec grand soin son savoir et ses talents, qui cependant à la fin furent découverts. Ceux qui conversaient avec lui admiraient sa prudence toute céleste et la lumière avec laquelle il parlait des matières spirituelles. Etant au couvent qui avait été depuis peu fondé à Sienne, il eut à s'expliquer sur certains points controversés, en présence de plusieurs personnes très éclairées; il le fit avec tant d'habileté, que ceux qui l'entendirent en furent frappés d'admiration. On engagea les supérieurs à tirer cette lumière de dessous le boisseau, pour la placer sur le chandelier. Ceux-ci obtinrent une dispense du Pape pour lui faire recevoir les saints ordres; mais il ne consentit à ce changement d'état que par obéissance. Peu de temps après, on le fit définiteur et assistant du général; il devint lui-même général en 1267. Après la mort du pape Clément IV, les cardinaux assemblés à Viterbe jetaient les yeux sur lui pour l'élever à la papauté. Dès qu'il fut instruit de leur dessein, il se retira dans les montagnes, avec un religieux de son ordre, et y resta caché jusqu'à l'élection de saint Grégoire X. Sa retraite lui fut d'autant plus agréable qu'elle lui fournit l'occasion de redoubler ses austérités et de se livrer uniquement à la contemplation. Il ne vivait que d'herbes desséchées et ne buvait que de l'eau d'une fontaine qui est connue aujourd'hui sous le nom de Bain de saint Philippe et située sur une montagne appelée Montagnat.

    Il quitta son désert, brûlant d'un nouveau zèle pour allumer dans les cœurs le feu de l'amour divin. Ayant prêché en plusieurs endroits de l'Italie, il nomma un vicaire pour gouverner son ordre en sa place, puis il partit avec deux de ses religieux pour faire une mission qui devait avoir une grande étendue. Il prêcha avec un succès incroyable à Avignon, à Toulouse, à Paris, et dans d'autres grandes villes de France; la Flandre, la Frise, la Saxe et la Haute-Allemagne furent aussi les théâtres de son zèle. Après deux ans d'absence, il revint, en 1274, tenir à Borgo le chapitre général de son ordre. Il voulut s'y démettre de sa place; mais on ne lui accorda point ce qu'il demandait; il fut, au contraire, confirmé dans le généralat pour toute la vie. La même année, il alla au second concile général de Lyon, où le pape saint Grégoire X présidait en personne, pour y solliciter la confirmation de son ordre, qu'il obtint.

    Il annonçait la parole de Dieu dans tous les lieux par lesquels il passait. Il avait reçu du ciel un talent extraordinaire pour la conversion des pécheurs, de ceux surtout qui étaient divisés par des haines. L'Italie était alors déchirée par des discordes intestines, et principalement par les factions politiques des Guelfes et des Gibelins. On avait souvent essayé, quelquefois avec succès, de remédier à ces maux; mais on n'avait réussi qu'à l'égard de quelques personnes. Le feu de la discorde s'était rallumé dans la plupart des esprits avec plus de violence que jamais. Philippe calma l'animosité des factions prêtes à s'entre-déchirer, à Pistoie et dans plusieurs autres lieux. Il rétablit aussi la paix à Forli, mais ce ne fut pas sans courir de grands dangers. Les séditieux l'insultèrent et le battirent dans les différents quartiers de la ville. Leur fureur cependant se laissa désarmer à la fin, par la douceur et la patience invincibles du saint (Acta Sanct., et Godescard, 23 août).

    Rohrbacher, Histoire universelle de l’Eglise catholique, tome 8, ch. 75.

  • Le Cœur immaculé de Marie

    Offertoire

    Exsultávit spíritus meus in Deo salutári meo ; quia fecit mihi magna qui potens est, et sanctum nomen ejus.

    Mon esprit tressaille de joie en Dieu, mon Sauveur, parce que le Puissant a fait pour moi de grandes choses, et son nom est saint.

    Capture d’écran 2024-08-21 à 15.45.30.png

  • Sainte Jeanne de Chantal

    Conseils à une religieuse

    Vous voulez, ma chère fille, que je vous écrive ce que je vous ai dit plusieurs fois, je prie Dieu qu'il vous profite.

    Vous devez avec une sainte générosité et fidélité surmonter toutes vos inclinations qui vous porteront au péché, n'en commettant aucun délibérément ni volontairement. Que s'il vous arrive le contraire, ne vous troublez pas, mais soudain humiliez-vous devant Dieu tout doucement, marquant cela pour vous en confesser ; mais ne vous amusez point à réfléchir dessus.

    Quand vos fautes seront mêlées de doute, si ce n'est en choses importantes, ne vous y amusez point pour les confesser, et qu'il vous suffise de vous en abaisser devant Dieu. Si elles sont en choses importantes, dites : Je m'accuse que je suis en doute d'avoir dit des paroles par le mouvement de la vanité ou de l'impatience, ou ce que c'est.

    Quand vous verrez d'abord que vous ne pouvez reconnaître clairement du péché, n'examinez point, mais vous humiliez devant Dieu avec une confiance filiale, désirant et vous résolvant de ne l'offenser jamais à votre escient ; puis cela fait n'y pensez plus.

    Ne soyez point si pointilleuse autour de vos actions ; gardez-vous du mal (car il le faut) et faites le bien, et toutes vos actions gaiement, simplement et franchement, avec la générale intention de plaire à Dieu seul ; suivez cordialement le directoire pour vos exercices.

    Ne vous étonnez nullement de tout ce que vous sentez ou pensez, pourvu que vous ne vous y arrêtiez pas et que vous ne fassiez rien ensuite volontairement ; ne regardez point tout cela ni aucune chose qui se passe en vous ; souffrez sans regarder ce que c'est, ni n'en parlez, non pas même à Notre-Seigneur, auquel vous devez retourner votre esprit tout simplement, lui disant des paroles de confiance, d'amour et d'abandonnement de vous-même.

    Si vous observez bien ce point, vous serez claire et courte en tout ce que vous direz de vous, et c'est ce qui vous est le plus nécessaire. Pensez et parlez peu de vous ; pensez beaucoup à Dieu, et faites ce qui est de la règle et du directoire gaiement, et la charge que l'obéissance vous donne sans réflexion ; ô Dieu, que vous serez heureuse !

    Corrigez-vous de ces mines froides et dédaigneuses que vous faites quelquefois, comme aussi de cette façon brusque et active ; ne tournez point si court ; tenez votre visage doux, et faites toutes vos actions tranquillement sans vous empresser.

    Or sus le dernier et principal avis que je vous donne, ma chère fille, c'est d'entreprendre en simplicité l'observance de ces petits enseignements, lesquels je ne vous commande point, ains vous les conseille avec un amour maternel. Mettez-vous à les pratiquer, et ne vous amusez point à regarder comme vous les pratiquerez ; adonnez-vous à faire et non à regarder comme il faut faire, comme vous faites, comme vous avez fait ou ferez. Supportez doucement les attaques des diverses pensées qui vous arrivent, et toutes sortes de tentations, ne vous en étonnez point ; ne faites ni ne délaissez à faire aucune chose ensuite de telles fantaisies ; souffrez-les sans les regarder, comme je vous ai déjà dit ; résignez-vous à la divine volonté qui vous les permet, et vous abandonnez à son bon plaisir vous confiant en sa miséricorde, et demeurez en paix.

    Dieu vous fasse la grâce d'observer ces choses et soit béni à jamais ! Amen.

  • Saint Bernard

    Bernardus Doctor inclytus,
    Caelos conscendit hodie,
    Quem attraxit divinitus
    Splendor paternae gloriae.

    Bernard l’illustre docteur monte aujourd’hui aux cieux, lui que la splendeur de la gloire du Père attire divinement.

    Exsultet caelum laudibus
    De Bernardi consortio,
    Quem conjungis caelestibus,
    Jesu, nostra redemptio.

    Que le ciel exulte en louanges pour la compagnie de Bernard, lui que Jésus notre rédemption tu joins aux habitants du ciel.

    Rufum dorso per catulum
    Praefigurasti puerum
    Fore Doctorem sedulum,
    Conditor alme siderum.

    Par un petit chien au dos rouge tu as figuré par avance que l’enfant serait un zélé docteur, ô sacré créateur des astres.

    Nascentis ei claruit
    Clara Christi nativitas,
    Hoc a te donum habuit,
    O lux, beata Trinitas.

    La glorieuse nativité du Christ naissant brilla pour lui, il reçut ce don de toi, ô lumière, Trinité bienheureuse.

    Arcana sacrae paginae
    Declarat, et mysterium
    Quod effecit in Virgine
    Deus, creator omnium.

    Il dévoile les arcanes des pages sacrées, et le mystère que Dieu, le créateur de toute chose, a réalisé dans la Vierge.

    Rore perfusum gratiae
    Monstrat dulcor eloquii;
    Per te fons sapientiae,
    Summi largitor praemii.

    La douce saveur de sa parole montre qu’il est baigné de la rosée de la grâce, par toi, source de la sagesse, qui accordes les récompenses suprêmes.

    Detentos a daemonibus
    Sanat, morbos languentium
    Curat, confert doloribus
    Magnum salutis gaudium.

    Il guérit ceux qui sont tenus par les démons, il soigne ceux qui souffrent de maladies, il apporte à leurs douleurs la grande joie du salut.

    Vita vivit feliciter
    Cum Maria Christifera
    Cum qua degustat dulciter
    Aeterna Christi munera.

    Il vit dans le bonheur de la Vie avec Marie porteuse du Christ, avec laquelle il déguste la douceur des dons éternels du Christ.

    Summae Deus potentiae,
    Tibi sit laus et gloria:
    Da post cursum miseriae
    Beata nobis gaudia. Amen.

    Dieu de la puissance suprême, à toi soit la louange et la gloire, donne-nous les joies bienheureuses après le cours de cette vie de misère.

     

    Cette hymne des vêpres de la fête de saint Bernard, dans le bréviaire cistercien, existait dès le XIIIe siècle.

    On remarque :

    - qu’elle est en acrostiche : les premières lettres de chaque strophe donnent BERNARDUS.

    - que chaque strophe se termine par le premier vers d’une hymne du bréviaire : Splendor paternae gloriae est le premier vers de l’hymne des laudes du lundi (le dimanche dans le bréviaire cistercien). Jesu, nostra redemptio est le premier vers de l’hymne des vêpres de l’Ascension. Conditor alme siderum est le premier vers de l’hymne des vêpres de l’Avent. O lux, beata Trinitas est le premier vers de l’hymne des vêpres du samedi. Deus, creator omnium est le premier vers de l’hymne des vêpres du dimanche. Summi largitor praemii est le premier vers d’une hymne cistercienne des matines du carême. Magnum salutis Gaudium est le premier vers d’une hymne pour la procession des Rameaux. Aeterna Christi munera est le premier vers de l’hymne des matines des fêtes des apôtres. Beata nobis gaudia est le premier vers de l’hymne des laudes de la Pentecôte.

    La troisième strophe fait allusion au songe de la mère de saint Bernard enceinte : elle se vit accoucher d’un chien blanc avec des poils rouges sur le dos. C’était une prophétie que son fils serait un confesseur et un docteur, selon l’explication que fait saint Grégoire le Grand de l’épisode des chiens léchant les plaies du pauvre Lazare : « Il n’est pas rare que dans la Sainte Ecriture les chiens désignent les prédicateurs. La langue des chiens guérit en effet les blessures en les léchant, et les saints docteurs aussi, quand ils nous enseignent lorsque nous leur confessons nos péchés, touchent en quelque sorte les plaies de notre âme avec leur langue. Et puisqu’ils nous arrachent à nos péchés par leurs paroles, c’est comme s’ils nous rendaient la santé en touchant nos blessures. »

    La strophe suivante fait allusion à Bernard enfant qui s’endormit en attendant la messe de minuit et eut la vision de l’Enfant Jésus naissant, épisode qui le marqua profondément.

    Chant du Chœur des moines de l'Abbaye de Marienstatt Im Westerwald (Rhénanie-Palatinat).