Exsúrge, quare obdórmis, Dómine ? exsúrge, et ne repéllas in finem : quare fáciem tuam avértis, oblivísceris tribulatiónem nostram ? Adhǽsit in terra venter noster : exsúrge, Dómine, ádiuva nos, et líbera nos.
Deus, áuribus nostris audívimus : patres nostri annuntiavérunt nobis.
Levez-vous ; pourquoi dormez-vous, Seigneur ? Levez-vous, et ne nous repoussez pas à jamais. Pourquoi détournez-vous votre visage et oubliez-vous notre tribulation ? Notre corps est attaché à la terre. Levez-vous, Seigneur, secourez-nous et délivrez-nous.
O Dieu, nous avons entendu de nos oreilles ; nos pères nous ont annoncé votre œuvre.
Les invasions barbares, avec leurs conséquences désastreuses, peuvent avoir été l'occasion de ces lamentations. Mais elles sont aussi la prière de l'humanité non rachetée, de l'humanité dégénérée, en proie aux appétits inférieurs. Ces paroles ont pu être les cris d'agonie de ceux qui ont vu les eaux du Déluge monter toujours plus haut, car le bréviaire de cette semaine raconte l'histoire de ce grand déluge. C'est peut-être ainsi qu'a prié saint Paul, dont l'église est la station d'aujourd'hui, lorsque son dégoût de la vie était sur le point de le vaincre, ou lorsque l'aiguillon de la chair lui causait une si grande torture. Ces paroles sont le cri des Apôtres, presque mot pour mot, lorsque leur petite barque fut si sauvagement ballottée par les vagues, une nuit de tempête, et que le Seigneur dormait. Nous aussi, par pure nécessité peut-être, nous avons souvent prié pour être soulagés de la douleur ou des chaînes des mauvais désirs qui menaçaient de nous entraîner vers le bas. Notre introït est donc une prière suppliante de la vallée de la mort, un appel à la résurrection, un chant préparatoire à Pâques, au jour de l'ascension du Seigneur.
On vante souvent la musique chorale pour son esprit calme et sans passion, pour sa dignité sereine, pour la lucidité qui semble l'élever au-dessus de tout ce qui est terrestre et qui en fait un véritable écho des chants du ciel. Et à juste titre. Notre mélodie actuelle s'inscrit dans le cadre du chant liturgique, elle évite les dissonances et les contrastes saisissants, et déconseille le subjectivisme effréné. Et pourtant, elle montre combien une mélodie de chant peut être profonde et sincère, combien la relation entre le texte et la musique est intime, et combien son expression est chaleureuse et vraie.
Dans la première phrase, la première moitié est une ascension (arsis), la seconde moitié une descente (thésis). Chaque moitié commence par un élan, le premier animé, le second impétueux, et tous deux suivis d'une récitation plus calme en fa. Dans l'ascension, la mélodie atteint la dominante, et dans la descente, elle descend jusqu'à la tonique. La cadence qui se produit ici est très favorisée par les premier et deuxième modes. Nous nous rappelons peut-être l'avoir entendue dans l'Alléluia de la troisième Messe de Noël (adoráte Dóminum). La phrase suivante montre par son tout premier mot (quare) qu'elle va étendre la portée de la précédente. Un certain nombre de quartes apparaissent ici, ainsi que le point culminant de la pièce : oblivésceris. Bien que le groupe de notes pour ce mot ne soit rien d'autre qu'un résumé de la mélodie sur le verset du psaume (Deus áuribus), elles sont plus efficaces ici en raison de leur position dans l'introït. Le compositeur avait dans son cœur un sentiment un peu semblable à celui qui fit sortir des lèvres du Sauveur le cri terrible : "Mon Dieu, pourquoi m'as-Tu abandonné ?". Le tribulationem nostram, presque monotone, nous rappelle notre travail quotidien, cette implacable banalité qui peut soit engourdir l'âme, soit être sa torture constante. À l'adhaésit, la mélodie tente quatre fois de s'élever et quatre fois elle retombe comme si elle était attirée par un poids de plomb. Les notes les plus hautes des différents groupes forment une ligne descendante de la dominante à la tonique.
Le chanteur fait maintenant appel à toutes ses forces et prend d'assaut le ciel avec des phrases courtes mais puissantes. Comme le chant syllabique simple est révélateur dans ce cas ! La troisième phrase est mélodiquement semblable à la première ; son ádjuva est une forme plus simple du deuxième exsúrge. La seconde moitié de la phrase se termine alors par le calme anticipé inspiré par le verset de psaume suivant, qui raconte la providence de Dieu aux jours de l'esclavage égyptien, et la libération des enfants d'Israël.
• Le graduel.
• Le sermon de saint Grégoire le Grand.
• La communion.
Commentaires
Mon 904 comporte un épisème horzontal sur la première note du podatus de la syllabe LA de tribu-LA-tionem.
Un co-choriste l'avait aussi sur son Usualis de 1962, mais rien sur les Graduels de 1961 et 1974.
Or, dans cet enregistrement, les moines de Solesmes ont marqué cet épisème...
Bizarre !