La Commission européenne a recommandé hier aux 25 de prendre la décision, lors de leur sommet du 11 décembre, de suspendre les négociations sur huit des 35 chapitres des négociations d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne. Telle serait la réponse de l’Union européenne au refus obstiné d’Ankara d’ouvrir ses ports aux navires chypriotes…
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce ne sont pas les Turcs qui protestent le plus fort (au contraire, ils minimisent la chose), mais les Chypriotes. Car ils voient bien que si les 25 prennent cette décision, ça ne changera strictement rien. Pour qu’il s’agisse d’un moyen de pression, il faudrait au moins que les 25 fixent une date butoir, un ultimatum : si à telle date vos ports ne sont pas ouverts, ce sera la rupture.
La Commission joue sur le fait que les Européens ne savent pas de quoi il s’agit (car les Européens sont toujours soigneusement tenus à l’écart de toute information de ce qui se trame à Bruxelles).
La décision de suspendre les négociations sur 8 des 35 chapitres n’aurait absolument aucun effet, pour la bonne raison… qu’il n’y a pas de négociations, ni sur ces chapitres, ni sur les autres. Les fameuses négociations par chapitre se sont ouvertes le 12 juin 2006. Ce jour-là a été ouvert, et immédiatement clos (car il ne posait aucun problème et avait déjà été finalisé), le « premier chapitre », sur les sciences et technologies, les Chypriotes ayant finalement abandonné, après une longue discussion, leur menace de veto. Mais depuis lors aucun autre chapitre n’a été ouvert, parce que les Chypriotes, voyant qu’ils ont été floués, font jouer systématiquement leur veto.
Les négociations sont donc de fait suspendues, non sur huit chapitres, mais sur 34. Ainsi, la recommandation de Bruxelles ne change rien à l’état de la situation. Tout au plus s’agit-il d’une gesticulation médiatique, mais on comprend que si elle vexe les Turcs, elle ne les impressionne nullement. Ils se contentent de camper tranquillement sur leurs positions, attendant que l’Union européenne accepte leurs propres conditions, à savoir, dans un premier temps, la liberté du commerce avec la partie occupée de Chypre, autrement dit la reconnaissance implicite par l’Union européenne de la prétendue « République turque de Chypre-Nord »…
Comme le souligne Bruno Gollnisch dans un communiqué, « cette "suspension partielle" ne correspond à rien. Elle est humiliante sans être utile. Les négociations doivent s'arrêter définitivement, parce que la Turquie n'est pas une nation européenne. »