La destruction des matines a conduit, comme dans toute l’année liturgique, à la disparition de la majorité des répons, puisqu’il n’en reste plus que deux dans le soi-disant « office des lectures ». Pour comprendre la perte, voici le dernier répons des matines traditionnelles :
℟. Senex Puerum portábat, Puer autem senem regébat : * Quem virgo concépit, virgo péperit, virgo post partum, quem génuit, adorávit.
℣. Accípiens Símeon Puerum in mánibus, grátias agens benedíxit Dóminum.
℟. Quem virgo concépit, virgo péperit, virgo post partum, quem génuit, adorávit.
V. Glória Patri, et Fílio, * et Spirítui Sancto.
℟. Quem virgo concépit, virgo péperit, virgo post partum, quem génuit, adorávit.
Le vieillard portait l’enfant, mais l’enfant dirigeait le vieillard. Celui que vierge elle a conçu, que vierge elle a mis au monde, vierge après avoir enfanté, celui qu’elle a engendré, elle l’a adoré. Siméon, prenant l’enfant entre ses mains, bénit Dieu en rendant grâces. Celui que vierge elle a conçu, que vierge elle a mis au monde, vierge après avoir enfanté, celui qu’elle a engendré, elle l’a adoré. Gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Celui que vierge elle a conçu, que vierge elle a mis au monde, vierge après avoir enfanté, celui qu’elle a engendré, elle l’a adoré.
Ce répons a fait l’objet de nombreuses mises en musique par les polyphonistes de la Renaissance, mais il a été jeté à la poubelle par les « rénovateurs ». Même l’antienne Senex Puerum portábat, Puer autem senem regébat, si caractéristique du grand style patristique, a été supprimée, non seulement de l’office, mais aussi de l’Alléluia de la messe.
La particularité de la fête de la Purification de la Sainte Vierge, qu’ils appellent (mais qu’on pouvait appeler aussi) la Présentation du Seigneur, c’est la bénédiction et la procession des cierges, d’où son nom populaire de chandeleur. Il était difficile de la supprimer complètement. Mais on l’a réduite à sa plus simple expression. Ainsi, il n’y a plus qu’une seule prière de bénédiction des cierges, selon deux formules au choix, dont une… qui ne parle pas de bénédiction. La messe traditionnelle a quatre prières de bénédiction (qui donnent lieu à 7 signes de croix sur les cierges, ce n’est pas par hasard) et une autre oraison avant la distribution des cierges.
Je ne citerai que la première, véritablement magnifique, mais qui déplaisait aux fabricants de la néo-« liturgie » parce qu’elle est pour eux un de ces exemples de la superstition qu’il fallait extirper (les cierges comme sacramentaux pour la santé du corps et de l’âme), et sans doute aussi parce qu’elle ne loue pas « le travail des hommes » mais celui… des abeilles qui selon l’ordre de Dieu ont fait la cire… Voici donc ce qu’ils ont aussi mis à la poubelle :
Orémus. Domine sancte, Pater omnípotens, ætérne Deus, qui ómnia ex níhilo creásti, et jussu tuo per ópera apum hunc liquorem ad perfectionem cérei veníre fecísti: et qui hodiérna die petitiónem iusti Simeónis implésti: te humíliter deprecámur; ut has candélas ad usus hóminum et sanitátem córporum et animárum, sive in terra sive in aquis, per invocatiónem tui sanctíssimi nóminis et per intercessiónem beátæ Maríæ semper Vírginis, cuius hódie festa devóte celebrántur, et per preces ómnium Sanctórum tuórum, bene ✠ dícere et sancti ✠ ficáre dignéris: et huius plebis tuæ, quæ illas honorífice in mánibus desíderat portare teque cantando laudare, exáudias voces de cœlo sancto tuo et de sede maiestátis tuæ: et propítius sis ómnibus clamántibus ad te, quos redemísti pretióso Sánguine Fílii tui: Qui tecum vivit et regnat in unitáte Spíritus Sancti Deus per ómnia sǽcula sæculórum.
Seigneur saint, Père tout-puissant, Dieu éternel, qui de rien avez créé toutes choses, et qui par un ordre donné et au moyen du travail des abeilles, avez fait que cette pâte servit à former ce cierge, c’est vous aussi qui, à pareil jour, avez exaucé la demande du juste Siméon ; nous vous en prions humblement, en invoquant votre saint nom, et par l’intercession de la bienheureuse Marie toujours Vierge, dont nous célébrons aujourd’hui la fête avec dévotion, et par les prières de tous vos Saints, daignez bénir, et rendre saints ces Cierges, pour l’usage des hommes, et pour la santé des corps et des âmes, soit sur la terre, soit sur les eaux ; du ciel, votre sanctuaire, et du trône de votre majesté, exaucez les prières de votre peuple ici présent, lequel désire les porter avec honneur dans ses mains et vous louer par ses chants ; soyez enfin propice à tous ceux qui élèvent leurs voix vers vous, et que vous avez rachetés par le sang précieux de votre Fils, qui étant Dieu vit et règne en l’unité du Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles. Amen.
Et la somptueuse antienne Adorna thalamum tuum, Sion, qui est la traduction du début des apostiches des vêpres byzantines, et qui est donc, outre sa beauté intrinsèque, un émouvant témoignage d’unité liturgique, a été supprimé de la procession. Jusque-là a été la fureur des iconoclastes.
Adórna thálamum tuum, Sion, et súscipe Regem Christum: ampléctere Maríam, quæ est cœléstis porta: ipsa enim portat Regem glóriæ novi lúminis: subsístit Virgo, addúcens mánibus Fílium ante lucíferum génitum: quem accípiens Símeon in ulnas suas, prædicávit pópulis, Dóminum eum esse vitæ et mortis et Salvatórem mundi.
Orne, ô Sion, ta demeure, et accueille le Christ Roi ; embrasse Marie, qui est la porte du ciel ; car elle tient entre ses bras le Roi de gloire à qui nous devons une lumière nouvelle. La Vierge s’arrête, offrant de ses mains un Fils engendré avant que fût l’astre du jour. Siméon le prenant entre ses bras, annonce aux peuples qu’il est le Maître de la vie et de la mort, et le Sauveur du monde.
Et bien entendu le répons d’entrée dans l’église (Obtulerunt) a également été supprimé…