Après avoir épinglé France 2 et M6 pour « bipolarisation excessive au profit de deux candidats », le CSA dénonce le même phénomène sur des chaînes non hertziennes (dont LCI et i-télé) et les principales stations de radios. Le conseil « constate que quelques services s’inscrivent dans la logique de bipolarisation excessive déjà constatée lors de la campagne de 2002, au profit de deux candidats cette année, certains dans des proportions encore plus importantes que sur les chaînes hertziennes nationales analogiques ». Le CSA ajoute : « La répartition des temps de parole fait par ailleurs apparaître l’insuffisance des temps accordés à certains des candidats au regard des critères d’équité. » En conséquence il invite les radios et télévisions « à mieux respecter les dispositions de sa recommandation et à assurer une présentation et un accès à l’antenne des candidats plus conformes au respect du principe d’équité ». Ce n’est évidemment qu’un vœu pieux, mais les Français savent ainsi de façon certaine que les médias audiovisuels ne font pas honnêtement leur travail et les trompent sur la campagne présidentielle.
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Le CSA et la « bipolarisation »
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Buffet ne veut pas de Bové
Comme il était prévisible, Marie-George Buffet fait savoir qu’elle ne se retirera pas si José Bové se porte candidat à la présidentielle. Or c’était l’une des conditions posées par l’histrion altermondialiste à sa candidature.
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La peur de Le Pen
Après Christiane Taubira, les socialistes ont obtenu que Jean-Pierre Chevènement se retire de la course à la présidentielle. Rappelons seulement que Chevènement, naturellement soutenu par l’ensemble du MRC, avait très officiellement lancé sa campagne le 28 novembre dernier. Il disait alors : «Je lance ma campagne ce soir pour porter des idées qui aujourd'hui ne sont pas présentes dans le débat. Et en particulier pour faire respecter le vote que le peuple français a émis, pour réorienter la construction européenne de quoi tout le reste ou presque dépend. » Il ajoutait : « Je n'ai pas de raison de retirer ma candidature. Mon but est de peser, pas de témoigner ».
Douze jours plus tard, le MRC vote à 84 % son ralliement à Ségolène Royal, et Jean-Pierre Chevènement annonce : « C’est en toute conscience que j’avais pris ma décision de me porter candidat, c’est en toute conscience que j’ai décidé de retirer ma candidature. » Une conscience pour le moins élastique, notamment en ce qui concerne le « respect du vote du peuple français » au référendum sur la Constitution européenne, puisque Ségolène Royal est à l’opposé de ses convictions en la matière.
Le ralliement de Chevènement, comme celui de Taubira, fait suite à un marchandage électoral. Le PS octroie dix circonscriptions au MRC. « C’est un bon accord », dit Chevènement. Pour lui, sans doute, puisque Belfort figure parmi les dix. Mais certains de ses amis grincent des dents, jugeant « pas gagnables » la plus grande partie des circonscriptions offertes par le PS. Et puis, Chevènement avait obtenu 5,3 % des suffrages le 21 avril 2002. Le PRG, dont l’égérie n’avait obtenu que 2,3 %, se voit gratifié quant à lui de 36 circonscriptions… Il est vrai que le poids électoral des uns et des autres aux législatives est plutôt l’inverse des résultats à la présidentielle.
Il y a derrière tout cela un énorme non-dit. Taubira et Chevènement ont été accusés par les socialistes d’avoir été, par leur candidature, les artisans de la chute de Jospin. Le « danger » Le Pen n’ayant pas disparu, c’est le moins qu’on puisse dire, il fallait donc faire le ménage à gauche. C’est uniquement la peur de voir réédité le premier tour de 2002 qui motive les socialistes, au point de faire cadeau à leurs encombrants voisins de dizaines de circonscriptions.
Il y a un autre non-dit : on constate en effet que les socialistes se méfient des sondages. S’ils y croyaient, ils n’auraient pas fait des pieds et des mains pour récupérer Taubira et Chevènement. L’un et l’autre sont très marginaux dans les sondages, et Ségolène caracole en tête, en compagnie de Sarkozy, très loin devant les autres, y compris Le Pen. Dans cette configuration, il suffit d’attendre le second tour pour que se rallient les autres candidats de gauche. S’il faut les rallier avant, c’est qu’on voit bien que la promotion médiatique des deux vedettes est artificielle. Là encore, c’est parce que les socialistes prennent au sérieux le « danger » Le Pen.
Quel peut être l’impact de ces manœuvres ? Il est trop tôt pour le dire. Il risque de ne pas être à la hauteur des espérances socialistes. Pour le moment, les Verts ont refusé toutes les offres socialistes (il est vrai qu’ils ne veulent pas quelques circonscriptions, mais un groupe à l’Assemblée nationale…), et Dominique Voynet affirme qu’elle ira jusqu’au bout. Et à l’extrême gauche, on s’achemine vers un nouvel éparpillement des candidatures, l’une ou l’autre pouvant fort bien récupérer les voix chevènementistes anti-européistes, voire celles qui se portaient sur Taubira pour son combat anticolonialiste et de promotion des minorités visibles.
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A quoi ça rime ?
Nicolas Sarkozy a annoncé l’autre jour qu’il était candidat à la présidentielle. Cela a fait la une de tous les journaux et a été la cible de tous les commentaires. Qu’y avait-il de nouveau ? Absolument rien. Tout le monde savait depuis longtemps que Sarkozy était candidat.
Samedi, François Bayrou a annoncé qu’il était candidat à la présidentielle. C’était l’événement politique du jour. Qu’y avait-il de nouveau ? Absolument rien. Tout le monde savait depuis longtemps que Bayrou est candidat. Et Bayrou en est tellement conscient qu’il n’a prononcé qu’une brève allocution.
On constate maintenant le même processus insensé, non seulement dans les déclarations de candidature, mais dans les déclarations de soutien. Ainsi, aujourd’hui, Thierry Breton, dans une interview à La Tribune , dit que son soutien à Sarkozy est « assez évident ». Il pourrait s’en tenir là. Son soutien étant déjà « assez évident », une fois qu’il l’a souligné il n’y a plus rien à ajouter. Eh bien si. Thierry Breton ajoute qu’il « rendra public » ce soutien « avant le 14 janvier ».
Ce n’est donc pas son soutien public qu’il apporte à Sarkozy dans une interview à un grand quotidien. Mais alors qu’est-ce que c’est ?
La vraie question est : à quoi jouent-ils ?
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MAM se place
Michèle Alliot-Marie a encore franchi une nouvelle étape hier soir dans sa préparation à la course présidentielle. Elle était invitée à la Grande Mosquée de Paris pour la rupture du jeûne du ramadan. On se souvient que Sarkozy avait sacrifié à cet étrange nouveau rite républicain il y a quelques jours. Or, devant un parterre d’intellectuels, d’artistes et de scientifiques musulmans, elle s’est ouvertement posée en adversaire de Sarkozy, n’hésitant pas, en ce lieu, à se prononcer contre la discrimination positive : « Parce que je suis opposée aux discriminations, je suis aussi opposée à la discrimination positive. » « Les quotas induisent toujours un doute sur les qualités et les compétences des personnes qui sont visées », ils sont « contraires au principe d’égalité de notre République ». On sait que Michèle Alliot-Marie s’était opposée à la loi sur la parité.
Puis elle s’est livrée à une grande déclaration de principe : « Ici, ce soir, nous sommes rassemblés parce que, musulmans, chrétiens ou autres, nous sommes d’abord français. La république attend et exige des représentants de l’autorité, qu’elle soit militaire, policière, judiciaire, administrative ou sociale, une égalité parfaite de traitement et de considération pour chacun de ses citoyens. »
Poursuivant dans le même sens, MAM est allée jusqu’à contester une politique suivie par le gouvernement auquel elle appartient, se déclarant « parfois un peu réservée sur le problème des ZEP en matière d’éducation, simplement parce que cela peut servir de prétexte de ne pas faire d’efforts à l’égard de jeunes qui auraient aussi des difficultés mais qui ne vivraient pas dans le territoire où on fait des efforts supplémentaires ».
Et pour terminer, après avoir fustigé le communautarisme qui fait « privilégier le vivre entre-soi plutôt que le vivre ensemble », elle a prononcé une quasi-déclaration de candidature où elle se démarque une fois de plus de Sarkozy :
« Notre rôle à nous politiques, c’est de nous occuper de chacun. Ce que je veux être, c’est celle qui permet le passage de cette société de défiance à la société de confiance où chacun a toute sa place et sait qu’il pourra avancer en fonction de sa volonté et de ses mérites. »
Voilà qui va mettre encore un peu plus d’animation au sein de l’UMP…
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Alliot-Marie ?
Derrière les grandes protestations d’unité, se profile dans la majorité, de façon de plus en précise, une autre candidature à la présidentielle : celle de Michèle Alliot-Marie. Elle insiste lourdement sur le fait que dans la tradition gaulliste la présidentielle est la rencontre « entre un homme – ou une femme – et le peuple français », en dehors des appareils, et qu’elle prendra sa décision en janvier. Villepin, qui laisse toujours planer le doute sur l’absence d’ambition présidentielle qu’il affiche, souligne lui aussi que la présidentielle est une rencontre entre une personnalité et le peuple, et dans la foulée il ne tarit pas d’éloges sur Michèle Alliot-Marie. Aujourd’hui, dans Le Figaro, madame le ministre de la Défense nous apprend que « de nombreux militants » lui demandent d’être candidate et disent qu’elle est « la seule à pouvoir battre Ségolène Royal ». Le sérieux de l’affaire se voit dans les réactions de plus en plus irritées des sarkozystes, la dernière en date étant celle de Christian Estrosi : « Elle joue les tireurs embusqués en s’interrogeant à voix haute tous les jours sur sa candidature. Les militaires ont horreur des tireurs embusqués… Ceux qui ne peuvent pas nous faire gagner ne doivent pas nous faire perdre… »