J’ai déjà donné l’hymne de prime avec la traduction de Pierre Corneille, et avec la traduction du P. Gladu et chantée par les moines d’En-Calcat. Voici la traduction de Lemaistre de Sacy, dans les Heures de Port Royal. Ces hymnes furent mises à l’index sur dénonciation des jésuites et eurent donc un grand succès. C’est du beau français du grand siècle, même si on s’éloigne parfois beaucoup du texte latin (surtout dans la première strophe).
Pour le chant on ira en Finlande, entendre la Schola Sancti Henrici (saint Henri d’Uppsala). Je l’avais déjà citée pour le graduel Beatus vir. C’était un extrait du disque de la messe de saint Henri. Ce Jam lucis orto sidere se trouve dans le disque qui donne des extraits de l’office du même saint Henri.
Jam lucis orto sidere,
Deum precemur supplices,
Ut in diurnis actibus
Nos servet a nocentibus.
Le grand astre se lève, ô soleil de justice
Montre-nous tes splendeurs;
Et, pour fuir en ce jour la noire ombre du vice,
Lève-toi dans nos cœurs ;
Linguam refrænans temperet,
Ne litis horror insonet :
Visum fovendo contegat,
Ne vanitates hauriat.
Arrêtant de ton frein la langue audacieuse,
Calme ses vains combats;
Rends l'œil insupportable à la beauté trompeuse
Des faux biens d'ici-bas.
Sint pura cordis intima,
Absistat et vecordia :
Carnis terat superbiam
Potus cibique parcitas :
Ôte du fond du cœur ce qui peut te déplaire
Échauffe ses froideurs.
Qu'un vivre tempéré, de notre chair tempère
Les rebelles ardeurs,
Ut cum dies abscesserit,
Noctemque sors reduxerit,
Mundi per abstinentiam
Ipsi canamus gloriam.
Afin que quand la nuit couvrira la nature
D'un voile ténébreux,
L'âme dans un corps chaste, et plus libre et plus pure
T'offre ses humbles vœux.
Deo Patri sit gloria,
Ejusque soli Filio,
Cum Spiritu Paraclito,
Nunc, et in perpetuum. Amen.
Gloire au Père éternel, gloire au Fils, son image,
Gloire à l'Esprit de paix ;
Qu'aux trois, en terre, au ciel, on rende un même hommage
Maintenant à jamais.
Commentaires
Le français est magnifique.
Profane en liturgie, je constate avec un intérêt technique le parti de traduire des quatrains d’octosyllabes par des quatrains présentant une alternance entre alexandrins et hexasyllabes., et non pas uniformément d’alexandrins, donc en contenant quelque peu la prolixité que la structure du français impose généralement.
Est-ce un schéma connu à l’époque ?
Sacy varie beaucoup les mètres. Il en est de même pour Corneille et Racine quand ils traduisent les hymnes. Ce peut être en alternance, ou bien il y a un seul vers plus court, qui peut être n'importe lequel des quatre. Il est souvent de huit pieds, assez souvent aussi de six pieds (surtout en dernier vers), parfois en alternance de douze et dix pieds, etc. Et parfois ce sont uniquement des alexandrins...