La fête de ce jour est dans le calendrier romain d’avant la réforme liturgique celle de l’Exaltation de la sainte Croix. On dit aujourd’hui fête de la Croix glorieuse, ce qui est légitime et précise son sens : célébrant le triomphe de la Croix qui est le triomphe de la Vie sur la mort, elle fait le pendant du Vendredi Saint, où l’on médite les souffrances du Christ sur la Croix.
Dans le calendrier byzantin, elle est celle de l’Exaltation universelle de la vénérable et vivifiante Croix. C’est une fête très importante, au point qu’elle est dotée non seulement d’une vigile, mais que le dimanche précédent est le dimanche « avant la Croix », et le dimanche suivant est le dimanche « après la Croix ».
Faisant allusion à la victoire d’Héraclius sur les Perses, qui permit de récupérer la sainte Croix qu’ils avaient prise à Jérusalem (c’est l’origine de cette fête), mais lui donnant une portée universelle, le tropaire de la fête chante ceci : « Sauve, Seigneur, ton peuple, bénis ton héritage. Accorde à nos chefs victoire sur les ennemis. Garde par ta Croix ce pays qui est tien. »
La divine liturgie de la sainte et vivifiante Croix sera célébrée ce jour en l’église Saint-Julien-le-Pauvre, à Paris, exceptionnellement à 18 h 30, en raison de la présence exceptionnelle du patriarche grec-catholique S.B. Grégoire III et de l’archevêque grec-catholique de Tyr, qui font une tournée pour attirer l’attention sur le sort du Liban et des chrétiens du Sud Liban.
Pourquoi est-ce que j’évoque la liturgie byzantine et Saint-Julien-le-Pauvre ? Parce que c’est ma « paroisse » (d’élection) depuis plus de vingt ans. Puisque de nombreuses Eglises orientales ont un lieu de culte à Paris, j’avais décidé de faire un peu de « tourisme liturgique ». La première église que je visitai fut Saint-Julien-le-Pauvre, parce que c’est une des plus anciennes de Paris et qu’elle est spécialement chargée d’histoire (elle fut la chapelle de la Sorbonne, et l’on y vit saint Thomas d’Aquin, saint Bonaventure, saint Yves, Dante, etc.) Je découvris là une liturgie d’une si intense beauté que j’y suis resté. C’est mon paradis de chaque dimanche, et un peu plus si possible (notamment la semaine sainte). Le chantre, qui a une voix superbe et a constitué une remarquable chorale, est un des meilleurs spécialistes du chant byzantin, et le curé actuel fait des homélies d’une grande profondeur spirituelle, truffées de citations de pères de l’Eglise. A Saint-Julien-le-Pauvre, on est porté tout naturellement à la contemplation, en se laissant porter dans le grand fleuve de la tradition orientale. C’était aussi une façon d’échapper aux tensions, polémiques, crispations qui à tort ou à raison secouaient le mouvement « traditionaliste » (et ça ne s’est pas arrangé par la suite).